Interview de M. Gérard Larcher, ministre délégué aux relations du travail à BFM le 16 mai 2005, sur la lutte contre le travail illégal, notamment la création de l'Office central de lutte contre le travail illégal et la fraude et le dumping social.

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Média : BFM

Texte intégral

Q- Vous êtes ministre délégué aux Relations du travail. Alors, tiens ! Un petit mot, tout de même, vous travaillez, vous, ce matin.
R- Oui, je suis, comme chaque lundi matin, à la Mairie de Rambouillet jusqu'à 10h30 et puis ensuite, eh bien je rejoins le ministère du Travail et nous avons une réunion à midi et puis, cet après midi, nous installons cet Office central qui est un élément important du dispositif du plan national de lutte contre le travail illégal.
Q- Comment le travail au noir, justement, gangrène-t-il l'économie française ? Par définition, c'est toujours difficile de chiffrer, d'estimer, mais enfin, on dit qu'il pourrait représenter 4 % du PIB. C'est vrai ou pas ?
R- Oui, 55 milliards d'euros de pertes annuelles au titre des cotisations sociales. On est, là, sur un chiffre important, en même temps, on est, là, sur une forme de dumping social qui est une concurrence déloyale et en même temps une absence de protection des salariés. Donc le ministère du Travail ne pouvait que prendre à bras le corps la lutte contre le travail illégal. C'est pourquoi en juin, le 18 juin, très exactement, 2004, nous avons mis en place, J.-L. Borloo et moi-même, un plan national de lutte contre le travail illégal.
Q- Quels sont les secteurs les plus touchés ? Il y a des secteurs qui, à mon avis, apparaissent d'eux-mêmes : le bâtiment, l'hôtellerie, la restauration, mais il n'y a pas que ça...
R- Il y a aussi l'agriculture, il y a aussi tout le secteur du spectacle, mais je dois dire que, aujourd'hui, par exemple dans le bâtiment, dans l'agriculture, les professionnels eux-mêmes ont engagé des actions communes avec nous, et nous allons très bientôt avoir, notamment un dispositif commun avec le secteur du bâtiment et de l'agriculture et ces actions communes de prévention, elles sont aussi de l'intérêt des entreprises. Le secteur du bâtiment lui-même est... je vois encore un artisan du bâtiment me dire, vendredi : "aidez-nous à lutter contre le travail illégal qui est une concurrence déloyale" et qui en même temps crée des conditions d'emploi tout à fait désastreuses pour les salariés.
Q- [Quelles sont] les missions, concrètement, de cet Office central de lutte contre le travail illégal, et puis surtout les moyens, parce que c'est bien de lutter contre le travail illégal, le travail au noir, mais jusqu'à présent, eh bien les moyens ils étaient, non pas inexistants, mais enfin très limités.
R- D'abord, se dire que quand on a la volonté, on peut doubler le nombre de contrôles. Depuis le Plan national de lutte, nous sommes passés d'une moyenne sur l'année de 35 000 contrôles à plus de 72000 contrôles. Nous avons, aujourd'hui, 6 000 procédures d'infractions qui sont au pénal. Donc avec ces moyens d'aujourd'hui, nous marquons très clairement notre volonté de lutte, mais nous voyons aussi de nouveaux systèmes de fraude et notamment la fraude transnationale et, en même temps aussi, les réseaux de fraude. Voilà pourquoi l'Office central de lutte contre le travail illégal, qui va travailler avec la Délégation interministérielle au travail illégal, est un élément du dispositif dont nous avons besoin, notamment pour lutter contre les formes de fraude transnationale et c'est bien pour marquer cette détermination que nous le mettons en place avec des moyens nouveaux qui sont les moyens de la gendarmerie, de la police judiciaire et une coopération entre tous les services et naturellement l'Inspection du travail.
Q- Oui, les impôts, les douanes, le ministère des Transports. [A propos des] condamnations, vous parliez justement d'un certain nombre de procédures pénales qui sont engagées, est-ce qu'à votre avis les condamnations sont vraiment dissuasives ? Le montant des amendes c'est en moyenne, quoi, 1 500 ? C'est rien quand on fait travailler des gens de façon clandestine et ça rapporte beaucoup d'argent, par ailleurs.
R- Première des choses, d'abord, 6.000 procédures au pénal, vous savez qu'au pénal, ceci peut aller jusqu'à des peines de prison.
Q- - Rares, G. Larcher, rares en matière de travail illégal.
R- Voilà pourquoi l'importance de nous rapprocher de l'autorité judiciaire et de travailler en étroite liaison avec notamment le garde des Sceaux, le ministère de l'Intérieur, le ministère de la Défense, mais en même temps, je voudrais rappeler les procédures URSAFF de rappel, ce que nous faisons avec l'ACOSS, et puis nous allons maintenant déterminer un axe qui est la suspension et la suppression des aides publiques à toutes les entreprises qui auront pratiqué des formes de travail illégal. Vous voyez bien que notre détermination est très forte sur ce domaine et je crois que l'installation de cet après midi montre la détermination de tout le gouvernement dans la lutte contre le travail illégal.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 17 mai 2005)