Déclaration de M. Dominique de Villepin, Premier ministre, en réponse à une question sur le budget de l'Union européenne, à l'Assemblée nationale le 21 juin 2005.

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Texte intégral

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Députés,
Monsieur le Député,
Le Conseil européen de Bruxelles était un rendez-vous difficile. Revenons sur terre un instant. Et ceci n'est une surprise pour aucun d'entre nous, ici. La France et les Pays-Bas ont rejeté le traité constitutionnel. D'autres pays s'interrogent. A partir de là, nous savions que le chemin allait être long et difficile. Alors, faut-il, Monsieur Ayrault, comme vous le faites, chercher des boucs émissaires ? Ce serait, à la fois, injuste et surtout inefficace. Le Conseil européen de Bruxelles a été un échec. Pourquoi ? D'abord, parce que les Britanniques se sont opposés à toute négociation sur le budget de l'Europe. Nous avons accepté, comme tous nos partenaires européens, la proposition du président de l'Union européenne, Monsieur Juncker : passer le budget de l'Europe, la part du budget de l'Europe, de 1 à 1,06 %. Je sais que cela peut paraître infime.
Cela représente pour notre pays une contribution supplémentaire de 1,5 milliard d'euros par an, soit dix milliards sur la période 2007-2013. Les Britanniques ont refusé. La deuxième raison de l'échec, c'est que les Britanniques ont refusé le compromis sur la Politique agricole commune (PAC) qui avait été accepté en 2002 par tous les pays, y compris les Britanniques. Par un "tour de passe-passe", ils ont voulu mettre sur le même plan la Politique agricole commune et le chèque britannique. Ces deux dépenses n'ont rien, mais strictement rien à voir. Il y a, d'un côté, des dépenses nécessaires, des dépenses indispensables pour répondre à nos besoins européens et nationaux, nos besoins alimentaires. De l'autre, il y a le chèque britannique. C'est un héritage du passé, un héritage désuet, aujourd'hui sans objet. Et ce chèque britannique, je le dis ici avec toute l'amitié que je porte au peuple britannique, c'est une véritable dépense d'ancien régime.
Que nous prenions en compte le problème britannique de manière graduée pour éviter un choc trop brutal, bien sûr ! Que l'on accepte de préserver des avantages acquis, aujourd'hui injustifiés, certainement pas ! Pour moi, aujourd'hui, la question, la véritable question, la seule question, est : comment reconstruit-on l'Europe ? Nous avions choisi d'avancer dans une double voie : d'un côté l'élargissement, de l'autre côté l'approfondissement avec la Constitution européenne. Force est de constater qu'en menant de pair cette double avancée, les Européens et les Français ont eu le sentiment que l'Europe s'éloignait d'eux, s'éloignait de leurs préoccupations quotidiennes.
Aujourd'hui, nous avons besoin, et nous devons le faire ensemble parce que c'est notre intérêt national qui nous rassemble, de promouvoir une nouvelle méthode. Cette nouvelle méthode, c'est d'avancer, projet par projet, avec un mot qui nous rassemble et qui nous est cher : "le pragmatisme".
Avançons dans la voie d'une gouvernance économique européenne !
Avançons dans la voie d'une véritable politique de recherche ! Et je vous rappelle que, dans le projet de budget européen que nous avions accepté comme tous les autres Européens à l'exception des Britanniques, c'était 30 % de dépenses en plus pour la recherche en Europe.
Avançons également avec une véritable politique dans le domaine de la sécurité et de la défense, et nous serons au rendez-vous de l'Europe et au rendez-vous de nos peuples
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 24 juin 2005)