Interview de M. Jean-Claude Gaudin, vice-président délégué de l'UMP, à France 2 le 25 octobre 2005, sur le droit de vote des étrangers et la loi de 1905 sur la séparation entre les églises et l'État, l'ouverture du capital d'EDF et sur la situation politique dans la majorité et l'opposition.

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Texte intégral

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G. Leclerc - N. Sarkozy est favorable au droit de vote pour les travailleurs étrangers qui sont en France depuis plus de dix ans, lors des élections municipales, êtes-vous d'accord ?
R - Je suis dans une ville où la communauté immigrée représente environ 150.000 personnes. C'est d'ailleurs nous, lorsqu'il y a des élections en Algérie, c'est la ville de Marseille qui contribue largement à organiser le scrutin pour que cela se déroule dans l'ordre. Personnellement, je n'ai pas beaucoup changé d'avis depuis l'époque où monsieur Mitterrand évoquait déjà ce sujet. Ceux, parmi les immigrés, qui souhaitent voter, eh bien qu'ils deviennent français. Je suis favorable à la naturalisation plutôt qu'à des exceptions.
Q - Donc, pas de droit de vote pour les immigrés pour les élections municipales. Autre sujet qui fait débat : la loi 1905. N. Sarkozy, là, serait également pour des aménagements, des assouplissements. En revanche, le chef de l'Etat et monsieur de Villepin disent "non", que c'est un pilier de la République.
R - Les deux ont raison. A la fois, l'exécutif a raison, le président de la République a raison ainsi que monsieur de Villepin, lorsqu'ils disent qu'il ne faut pas toucher à une loi qui maintenant a l'assentiment général des Français. Encore que ces lois ont été faites jadis pour prendre les biens de l'Eglise et pas simplement pour avantager les communautés religieuses. Mais N. Sarkozy, en tant que ministre de l'Intérieur, a aussi raison de dire "attention, on va presque, en ce moment, dans une injustice". Le maire de Marseille, la ville de Marseille possède 72 églises qui ont été construites avant 1905 ; c'est la ville de Marseille qui fait les travaux de réhabilitation dans toutes ces églises ; ce sont des sommes d'argent substantielles. Par contre, lorsque la communauté protestante me demande quelque chose pour le temple protestant, je n'ai pas les moyens légaux de lui donner, pas davantage pour la communauté juive et pas davantage pour la construction des mosquées. Enfin, on a trouvé que par la formule des baux emphytéotiques, on pourrait aider la communauté musulmane. Ce que dit simplement N. Sarkozy, c'est qu'il y a injustice, il y a une catégorie de croyants qui eux, peuvent bénéficier de certains avantages et les autres pas. Il aimerait que l'on harmonise, il n'y a pas de quoi révolutionner la République.

Q - Autre sujet, l'ouverture du capital d'EDF : le feu vert a été donné. Cela provoque un tollé : monsieur Hollande parle de "faute politique et économique grave" ; F. Bayrou qui est quand même dans la majorité, en principe, dit qu'il y a des risques et des menaces...
R - Je ne crois pas. Je crois que le Gouvernement de D. de Villepin veut regarder vers la modernité. Oui, il faut ouvrir le capital, oui il faut donner plus de place à l'actionnariat populaire, c'est prévu ; oui il faut assurer tous les services publics, c'est prévu ; oui, tout l'argent qui sera récupéré ira dans l'investissement de nouvelles centrales qui permettront d'avoir un jour de l'énergie. Le ministre de l'Economie dit : "l'après-pétrole". Oui, il faut y penser. Moi, tout cela ne me choque pas.
Q - Le budget, là aussi volée de bois vert : provocation, "copinage", dit L. Fabius...
R - Monsieur Fabius, sur le sujet que nous venons d'évoquer, était beaucoup moins clair il y a un certain nombre d'années. Aujourd'hui, à gauche, nous assistons à une course poursuite : plus à gauche, plus à gauche, plus à gauche. D'ailleurs, cela ne profitera pas au PS. Cela profitera à tous ces groupuscules de gauche qui s'associent actuellement avec le PC pour essayer de faire une espèce de révolution sociale un peu partout, chaque fois qu'on le peut. Le PS est un parti de gouvernement. A trop jouer ce jeu -là, il n'aura pas le vote des Français, comme il l'espère, et ce sera tant mieux.
Q - Il y a la gauche, mais il y a également l'UDF : F. Bayrou parle d'un budget qui n'est ni juste ni fiable ni sincère, et qui dit qu'il ne voit pas comment l'UDF va pouvoir le voter ; que se passe-t-il si l'UDF ne vote pas le budget ?
R - Je ne sais pas ce que fera F. Bayrou. Il doit sans doute aussi penser lui aussi.... Un certain nombre de critiques qu'il formule aujourd'hui, lorsqu'il était en charge au Gouvernement, il aurait dû les formuler à cette époque-là. A cette époque, il était bien discret. Aujourd'hui, il faut savoir dans quel camp il veut être. Dans la Ve République, on est d'un camp ou on est de l'autre, il n'y a pas le principe des vases communicants. F. Bayrou croit que quand le Gouvernement est affaibli, qu'il rencontre des difficultés, quand cela ne va pas très bien à l'UMP - encore que l'on se porte très bien à l'UMP, avec 170.000 adhérents à jour de cotisations -, il croit que cela lui profite mais pas du tout ! Cela profite à la gauche, et même aujourd'hui à une gauche extrême. S'il ne vote pas le budget, il y a la majorité absolue à l'Assemblée nationale !
Q - Sera-t-il encore dans la majorité ?
R - C'est lui qui, au fur et à mesure, s'éloigne de la majorité. Je ne suis pas sûr que ses députés et ses sénateurs soient aussi favorables à cela, car eux, ils ne peuvent pas oublier qu'ils ont été élus par une force commune de la droite républicaine et du centre.
(Source : Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 27 octobre 2005)