Déclaration de M. Christian Poncelet, président du Sénat, sur la promotion de l'esprit d'entreprise, l'importance du rôle du chef d'entreprise et les relations entre les sénateurs et les entrepreneurs, Paris le 27 janvier 2000.

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Circonstance : Ouverture du salon des entrepreneurs au Palais des Congrès, à Paris le 27 janvier 2000

Texte intégral

Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs,
Cher Jacques Singer,
Je suis très heureux que vous m'ayez demandé d'ouvrir officiellement, et pour la deuxième année consécutive, cette septième édition du Salon des entrepreneurs. Je considère qu'il s'agit d'une initiative utile pour la promotion de l'esprit d'entreprise, auquel je suis personnellement très attaché. En effet, mon désir, depuis mon élection à la présidence du Sénat, a été de promouvoir l'entreprise privée. Car en définitive c'est elle qui fait vivre, directement ou indirectement, tous les Français, qu'il s'agisse des fonctionnaires, des retraités ou encore des hommes politiques. C'est sans doute une évidence, mais à un moment de notre histoire où il est de bon ton de critiquer l'économie de marché, cela fait partie des évidences qu'il me semble bon de rappeler.
A quoi devons nous le retour de la croissance ? Les bons résultats sur le front du commerce extérieur ? Les créations d'emplois, dont chacun se félicite, ou encore les rentrées fiscales plus importantes que prévues sinon au dynamisme de nos entrepreneurs ? Si la France se porte bien aujourd'hui, c'est d'abord et avant tout grâce à ses entreprises qui ont su profiter de la croissance mondiale et s'insérer harmonieusement dans cette " nouvelle économie " dont vous venez de débattre longuement.
Et pourtant, quels trésors de volonté est-il nécessaire de déployer aujourd'hui dans notre pays pour s'aventurer sur le terrain de la libre entreprise ! Quelle ténacité faut-il démontrer pour affronter les embûches d'une réglementation toujours plus complexe et plus tatillonne et satisfaire dans le même temps les exigences de ses clients. L'étude que vous avez réalisée, en partenariat avec l'IFOP et l'Agence pour la création d'entreprise est de ce point de vue éclairante. De plus en plus de nos concitoyens ont le désir d'entreprendre, ou de voir leurs enfants entreprendre. Mais ils sont aussi de plus en plus nombreux à considérer qu'il est plus difficile d'entreprendre aujourd'hui qu'il y a quelques années. Il y a là un paradoxe qui ne peut laisser indifférent les hommes politiques.
Aussi, pour ce qui me concerne, j'ai souhaité venir ici témoigner du fait que je considère que le chef d'entreprise est un personnage clé de notre société, le gage de la vitalité pour tous les risques qu'il assume, pour toutes les innovations qu'il ose, pour toute la richesse qu'il crée et pour toutes les audaces dont il fait preuve aujourd'hui et qui seront perçues comme autant d'évidences demain.
Si chacun, l'Etat en premier lieu, avait réellement conscience que la réussite des nations repose sur la liberté de ses citoyens à entreprendre et à construire, la France serait sans conteste au tout premier rang. Malheureusement, les choses n'en sont pas encore là et on ne peut qu'être inquiet de la faiblesse des créations d'entreprises, dont le nombre stagne au point le plus bas depuis 1994. C'est pourquoi il est indispensable de repenser notre droit du travail et notre protection sociale afin de sortir d'une situation qui fait du salariat le droit commun et de la création d'entreprise l'exception. La promotion des valeurs entrepreneuriales est un combat. Un combat intérieur qu'il appartient à chacun de nous de mener afin de substituer l'audace à la facilité, l'innovation à la routine. Combat au sein de la société, afin que la défiance ne l'emporte pas sur la confiance. Or ce n'est pas en alourdissant les charges fiscales et sociales des entreprises et en reportant toujours au lendemain la nécessaire diminution des prélèvements obligatoires que nous y parviendrons. Au contraire, nous y parviendrons si nous avons le courage de faire évoluer notre droit du travail, si nous avons la volonté réelle de rendre notre système éducatif plus ouvert sur les réalités de l'entreprise et si nous avons la détermination de faire évoluer certains aspects de notre politique sociale.
Pour ce qui est du Sénat, j'avais annoncé l'an dernier ici même plusieurs initiatives afin de contribuer à ce combat culturel pour la promotion de l'entreprise dans la hiérarchie de nos valeurs sociales. Certains dans la salle avaient dit : " ce ne sont que belles paroles ". Et bien aujourd'hui je suis fier de pouvoir vous apporter non plus des paroles, mais des actes.
C'est ainsi que le Sénat a organisé l'an dernier, en partenariat avec l'ESSEC, les premières rencontres de capital risque - Tremplin entreprises - destinées à rapprocher ceux qui ont les idées de ceux qui ont les capitaux. Les trois quart des vingt projets qui ont été présentés à des investisseurs professionnels ou privés ont pu ainsi trouver les financements nécessaires à leur création ou à leur développement. Voilà, me semble-t-il, quelque chose de tout à fait concret, utile et qui marche. Si vous même avez des idées et recherchez les capitaux pour les mettre en oeuvre, un conseil : postulez pour la deuxième édition de Tremplin entreprises les 6 et 7 juin prochain.
Par ailleurs, j'ai décidé de me déplacer régulièrement en Province afin de sensibiliser, avec le concours d'entrepreneurs ayant déjà réussi, les jeunes à l'esprit d'entreprise. J'étais ainsi la semaine dernière à Lyon où j'ai pu, en compagnie de mon ami Raymond Barre, discuter avec les jeunes et m'efforcer de les convaincre à créer leur propre entreprise.
Enfin, j'ai souhaité rapprocher davantage le législateur des réalités de l'entreprise et c'est pourquoi j'ai proposé à mes collègues d'effectuer un stage d'immersion de quelques jours en entreprise afin de se rendre compte par eux-mêmes de la situation. Une trentaine de sénateurs, de tous les horizons politiques ont accepté et, à leur tour, ont reçu des chefs d'entreprise au Sénat afin de leur montrer, loin des clichés et des a priori, les travaux du Sénat de la République. Le 2 février, c'est à dire mercredi prochain, sénateurs et chefs d'entreprise ayant participé à cette expérience pourront échanger librement sur des thèmes concrets tels que le financement de l'innovation ou l'insertion des jeunes par l'économie. Ce seront les premières "Rencontres sénatoriales de l'entreprise", auxquels vous êtes conviés et pouvez vous inscrire directement en utilisant l'internet : entreprises.senat.fr. On ne dira plus après cela que les sénateurs ne sont pas branchés !
En ce nouveau siècle d'un nouveau millénaire, je forme donc des voeux pour que le bon sens l'emporte sur le dogmatisme et en vous remerciant pour votre attention, je souhaite longue vie au Salon des entrepreneurs.
(source http://www.senat.fr, le 27 novembre 2000)