Déclaration de M. Gilles de Robien, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, sur la rentrée scolaire, notamment la scolarisation des élèves handicapés et les emplois "vie scolaire", Paris le 31 août 2005.

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Circonstance : Rentrée scolaire 2005

Texte intégral

Comme des milliers d'enfants aujourd'hui, et avec eux leurs parents, je vis ma première rentrée !
Alors, c'est un moment plein d'émotion. Mais c'est aussi un moment où l'on ressent le désir " d'y aller ", de prendre les choses à bras le corps et de donner le meilleur de soi-même.
C'est en tout cas mon état d'esprit. J'aborde ce moment avec un esprit très positif et très confiant.
Confiant, je le suis car j'ai vu le formidable travail effectué par l'Éducation nationale pour préparer cette rentrée dans les meilleures conditions. Et je tiens à en remercier ici chaleureusement l'ensemble des personnels administratifs qui y ont travaillé.
J'ai pu m'en apercevoir en me rendant sur place la semaine dernière, dans une inspection académique à Agen et, avant-hier, dans une réunion départementale d'inspecteurs du premier degré à Nanterre.
Les chiffres de cette rentrée parlent d'eux-mêmes :
Plus d'un million trois cent mille personnes, dont 888 000 enseignants, accueilleront près de douze millions et demi d'élèves, collégiens et lycéens.
On compte 245 000 classes dans le primaire. Il y aura donc forcément, comme chaque année, quelques problèmes d'ajustement au moment de la rentrée en fonction des effectifs constatés. Je fais confiance aux inspecteurs d'académie pour les régler rapidement. Dans une administration aussi déconcentrée que l'Éducation nationale, les décisions ne sont pas toutes prises au niveau du ministère central, mais aussi au plus près du terrain. La confiance est nécessaire à l'exercice des responsabilités.
Les chiffres que je viens de vous donner sur les effectifs sont considérables : l'on mesure les qualités d'organisation indispensables pour y faire face. Mais je songe aussi aux qualités humaines requises pour une telle entreprise : l'engagement personnel, la persévérance, l'amour du savoir et de la transmission du savoir, et peut-être surtout un certain don de soi.
Ces qualités sont reconnues par toute la Nation. Elles sont la marque de fabrique et le moteur d'un système éducatif que de nombreux pays nous envient. Quand on rencontre des chercheurs, comme hier à Reims, l'on se rend bien compte que l'excellence de nos équipes de recherche, c'est en partie le produit de notre système éducatif ; c'est l'un de nos atouts dans l'offensive que notre pays doit mener pour conquérir les avant-postes de la science et de l'innovation.
En cette première rentrée pour moi, je tenais à dire combien je partage ces valeurs d'engagement professionnel et combien j'admire celles et ceux qui les font vivre jour après jour.
Grâce à eux, l'école en France réussit beaucoup mieux que ce que l'on veut parfois nous faire croire.
Je les admire et, je le redis, puisque je le leur ai écrit, j'ai profondément confiance en eux pour relever les défis qui nous attendent.
Deux Priorités :
Egalité des chances et insertion professionnelle des jeunes
I. Egalité des chances
À cette rentrée, j'ai souhaité fixer deux priorités complémentaires l'une de l'autre, et qui rejoignent des préoccupations exprimées par les Français : l'égalité des chances et l'insertion professionnelle des jeunes.
L'égalité des chances, c'est tout simplement l'un des piliers essentiels de notre école républicaine. Donner à chaque enfant des chances égales d'épanouir ses talents et d'accéder au meilleur de ce que peut lui offrir l'existence : voilà selon moi la première justification d'une école véritablement démocratique.
L'insertion professionnelle des jeunes est l'autre versant de cette exigence. Il nous faut non seulement former les jeunes mais aussi veiller à ce que cette formation puisse les mener vers un emploi.
De nombreux décrets d'application de la loi sur l'école sont, à ce jour publiés au Journal Officiel, et ils s'inscrivent précisément dans ces deux perspectives.
Je souhaite insister aujourd'hui sur certains des aspects qui me semblent les plus emblématiques de la politique que j'entends mener.
La scolarisation des élèves handicapés
J'évoquerai d'abord la scolarisation des élèves handicapés.
L'égalité des chances prend ici un sens particulier. Elle prend même tout son sens.
La loi du 11 février 2005 fait de la scolarisation de ces élèves une obligation pour tous les acteurs du système éducatif, dans l'ensemble des écoles et établissements, et pas seulement dans ceux qui sont spécialisés.
Elle renforce la participation des familles dans les prises de décisions.
Elle impose une prise en charge individualisée au travers des projets personnels de scolarisation.
Sur tous ces aspects, nous recevrons, cet après-midi, avec Philippe Bas, les associations de parents d'enfants handicapés.
Nous allons nous employer à faire que l'école soit aussi celle de ces enfants et de ces jeunes. C'est une priorité absolue et un effort d'accueil sera accompli dès le jour de la rentrée.
L'apprentissage d'une langue étrangère
L'accès à la pratique des langues vivantes est aussi un élément important de l'égalité des chances. Dès cette rentrée, nous allons donc étendre l'initiation à une langue étrangère à la totalité des élèves de CE2 en se fixant pour objectif de l'avancer en CE1 à la rentrée 2007.
Au collège, chaque département devra proposer au moins une opération " école ouverte en langue " pendant les petites vacances.
Au lycée, les classes de terminale générale seront allégées pour que chaque élève ait davantage l'occasion de s'exprimer.
Partout où cela est possible, des heures facultatives de conversation seront mises en place avec l'aide des assistants étrangers.
Il faut que nos élèves s'expriment davantage à l'oral dans les enseignements de langue vivante.
Le recrutement des emplois vie scolaire
Vous le savez, le Premier ministre a décidé une mobilisation exceptionnelle en faveur de l'emploi qui concerne également le service public, et plus particulièrement les hôpitaux et l'Éducation nationale.
Ainsi que j'ai eu l'occasion de l'annoncer la semaine dernière, l'enseignement scolaire disposera, d'ici le 31 décembre, de 45 000 emplois que nous recrutons notamment pour les missions suivantes :
1/ l'aide à l'accueil et à l'intégration des élèves handicapés,
2/ l'assistance administrative (notamment auprès des directeurs d'école),
3/ l'aide à l'accueil, à la surveillance et à l'encadrement d'élèves,
4/ l'aide à l'utilisation des nouvelles technologies,
5/ l'appui à la gestion des fonds documentaires,
6/ la participation à l'encadrement de sorties scolaires,
7/ l'aide à l'animation des activités culturelles, artistiques ou sportives.
Naturellement, cette liste n'est pas exhaustive, et je fais confiance aux responsables du terrain pour la préciser.
Ces contrats permettront de mettre le pied à l'étrier à des adultes - et en particulier à de jeunes adultes - en leur permettant d'apporter un vrai soutien aux équipes éducatives.
La formation des bénéficiaires de ces contrats fera l'objet d'une attention toute particulière.
Depuis plusieurs années, on nous réclame la présence d'un plus grand nombre d'adultes dans les établissements. Cet objectif est en voie d'être atteint avec cette mesure qui représente aussi une participation exceptionnelle à l'effort national pour l'emploi.
J'ai entendu des critiques sur le nombre insuffisant de ces contrats. Mais ces " emplois vie scolaire " viennent s'ajouter à tous ceux qui existent déjà, en plus - bien entendu - des personnels permanents qui assurent l'encadrement, le fonctionnement et l'enseignement dans les établissements.
Je pense notamment aux 56 600 assistants d'éducation et surveillants en poste à cette rentrée, et aux nouveaux assistants pédagogiques qui vont s'y ajouter d'ici octobre.
1 500 assistants pédagogiques seront en effet recrutés à mi-temps dans 344 lycées qui scolarisent une majorité d'élèves scolairement et socialement en difficulté. Vous trouverez la liste de ces lycées dans le dossier qui vous a été remis.
Les assistants pédagogiques seront des étudiants se préparant aux métiers de l'enseignement : ils aideront les élèves dans les méthodes de travail et dans leurs devoirs. Ils exerceront une sorte de tutorat sur des élèves un peu plus jeunes qu'eux.
Ils les aideront à prendre le chemin de la réussite.
Au total, c'est donc une aide considérable pour les écoles, les collèges et les lycées.
Il me semble que, grâce à ces efforts, nos établissements bénéficieront d'une présence beaucoup plus forte d'adultes. Cet encadrement adulte est déjà l'une des caractéristiques de notre école, comme l'a mis en évidence une récente étude de l'OCDE. Son renforcement améliorera encore le fonctionnement de nos établissements.
J'en attends avant tout un allègement des charges de toutes sortes qui pèsent sur les équipes éducatives, pour que les enseignants puissent se consacrer à leur mission première d'enseignement : c'est-à-dire à la réussite de leurs élèves.
À cet égard, dès cette rentrée, une action est engagée pour l'aide pédagogique aux élèves, à l'école et au collège.
Des " programmes personnalisés de réussite éducative " (PPRE), prévus normalement pour la rentrée 2006, sont organisés à partir de 2005, à titre expérimental, là où ce sera possible, en priorité pour les élèves de la classe de CE2 à l'école primaire, et ceux de la classe de 6 e au collège.
De même et afin de mieux garantir la continuité de l'enseignement, le remplacement des professeurs absents dans le second degré sera amélioré.
Le premier trimestre sera consacré à l'élaboration d'un protocole dans tous les collèges et lycées pour organiser le remplacement de courte durée sur la base du volontariat. Je sais pouvoir compter sur l'engagement des enseignants pour atteindre un objectif qui montrera aux parents leur bonne volonté comme leur attachement au service public.
Je leur fais confiance pour réussir ce défi et montrer que l'école réussit à répondre à une vraie demande.
C'est seulement à partir de janvier 2006, si le système du volontariat n'est pas en place, que le chef d'établissement procèdera par désignation lorsque cela sera nécessaire.
II. L'insertion professionnelle des jeunes
Le deuxième axe de mon action porte sur l'insertion professionnelle des jeunes.
Vous le savez, un enseignement de trois heures hebdomadaires de découverte professionnelle est proposé en classe de troisième au collège.
Il s'agit d'une innovation pédagogique essentielle : elle permettra la découverte de la diversité des métiers, de leur rôle, de leur histoire et de leurs débouchés, ainsi que des voies de formation qui y conduisent Cet enseignement doit être le plus concret possible. L'ONISEP a d'ailleurs élaboré des documents pédagogiques très utiles et particulièrement vivants.
Au lycée, outre la rénovation de la série technologique tertiaire que l'on appellera désormais " sciences et technologies de la gestion ", cette rentrée se caractérise par la mise en place de nombreux diplômes rénovés dans l'enseignement professionnel.
C'est le cas en particulier pour le secteur des services à la personne qui est porteur d'un nombre considérable d'emplois nouveaux : nous venons ainsi de rénover le CAP " petite enfance " et de créer le baccalauréat professionnel " services de proximité et vie locale ".
De façon plus générale, les recteurs veilleront, au cours de l'année scolaire, en lien avec les régions, à accroître le nombre des lycées des métiers.
Ces lycées doivent proposer une gamme complète de formation, y compris par la voie de l'apprentissage. Nous y favoriserons aussi l'implantation de sections européennes.
Programme de travail pour 2005/2006
Pour mieux affirmer la réussite du système éducatif, j'ouvre plusieurs autres chantiers dont je souhaite maintenant vous indiquer les points forts.

Le socle commun des connaissances et des compétences
Le Haut conseil de l'éducation sera installé dans les prochaines semaines.
Sa première mission sera de se prononcer sur le socle commun des connaissances et des compétences indispensables.
Cette question me paraît aussi participer directement de l'égalité des chances. Celle-ci restera un vain mot tant que chaque élève n'aura pas acquis un noyau dur de connaissances communes sur lequel il puisse édifier les autres savoirs et élever son niveau de qualification.
Le socle sera un progrès pour tous : c'est la chance donnée à tous les élèves de maîtriser, à la sortie de la scolarité obligatoire, le bagage indispensable pour poursuivre des études, pour recevoir une formation professionnelle ou pour s'adapter à l'emploi tout au long de leur vie.
Formation des enseignants
La deuxième mission du Haut conseil, complémentaire de la première, sera de déterminer le cahier des charges de la formation des maîtres, préalable à l'intégration des IUFM dans les universités prévue par la loi.
Le métier d'enseignant est difficile. Nous devons préparer avec grand soin celles et ceux qui vont l'exercer, pour qu'ils l'exercent avec confiance.
Nous avancerons sans précipitation mais avec la volonté d'aboutir, comme je viens de le faire pour d'autres sujets : le renforcement de l'accompagnement éducatif ou le remplacement des professeurs absents.
Éducation prioritaire
Les ZEP sont un instrument pour l'égalité des chances. J'ai beaucoup d'admiration pour ce qui s'y fait. Voyons ce que nous pouvons améliorer. Les idées ne manquent pas.
En coopération avec le ministre délégué à la promotion de l'égalité des chances, M. Azouz Begag, nous préparons des actions dont nous aurons l'occasion de vous reparler.
Ainsi, à titre d'exemple, nous voulons assurer l'accès des élèves de ZEP à des stages en entreprise, au même titre que pour les autres élèves. C'est l'opération " tous en stage".
Place des parents dans le système éducatif
Un autre chantier me tient particulièrement à cur : celui de la réflexion à mener sur la place et le rôle des parents dans l'école, en tant que membres à part entière de la communauté éducative.
Je pense en effet que l'éducation ne peut se concevoir que de façon partenariale et que chacun des acteurs de la chaîne éducative doit agir en cohérence avec les autres. J'en parlerai prochainement avec les fédérations de parents d'élèves.
Deux mots pour conclure, au sujet de la méthode que je souhaite privilégier dans mon action.
Comme je l'ai dit maintes fois depuis ma prise de fonction, je m'attacherai à conduire ma tâche sous le signe du dialogue.
Un dialogue constant avec l'ensemble de la communauté éducative :
- avec les personnels enseignants et avec tous les autres personnels des établissements scolaires et de l'Éducation nationale,
- avec les parents d'élèves et avec tous les acteurs impliqués dans les missions éducatives.
Ce dialogue doit être aussi favorisé entre les différentes catégories de personnels et de membres de la communauté éducative.
Je suis frappé de constater qu'à l'intérieur d'un même établissement, parfois, les gens ne se parlent pas assez.
Les lycéens doivent aussi être des interlocuteurs, pas seulement dans les périodes de crise, mais tout au long de l'année scolaire : les recteurs nommeront, avant le 1 er octobre, un délégué académique à la vie lycéenne qui sera le relais permanent des délégués au conseil académique à la vie lycéenne.
Enfin le dialogue avec les élus.
Je tiens ici à leur dire toute ma gratitude pour l'aide et le soutien que les collectivités locales apportent, dans le cadre de leurs compétences, au bon fonctionnement du système éducatif. C'est aussi avec eux que l'école réussit.
Cette rentrée marque donc le début d'une année très riche.
Tout au long de celle-ci, l'Éducation nationale va à nouveau faire la démonstration de sa capacité d'évoluer pour mieux répondre aux grands défis de son temps.
Aussi me permettrez-vous de conclure comme j'ai commencé en disant à nouveau combien ma confiance est grande dans tous les personnels et les enseignants pour relever ces défis.
Confiance et aussi gratitude. En effet, la République doit beaucoup à ces femmes et ces hommes dévoués.
En retour, comme je le leur ai écrit, il est naturel qu'elle leur manifeste sa reconnaissance.
C'est-à-dire qu'elle les reconnaisse.
Que la République reconnaisse le succès de notre école et qu'elle offre aux enseignants une place à la hauteur de ce qu'elle leur demande.
C'est en tout cas ma volonté et je suis certain de traduire ici le vu profond de l'ensemble des Français.
Je vous remercie.
(Source http://www.education.gouv.fr, le 31 août 2005)