Texte intégral
Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs,
Je prends part, aujourd'hui, avec grand plaisir à votre assemblée générale, et souhaite manifester ainsi l'attention que je porte à la place des propriétaires ruraux pour le développement économique et social de nos territoires. Je salue, à ce titre, Monsieur le Président, votre action qui ne constitue pas la moindre des explications à ce nouveau positionnement acquis par votre fédération au cours de ces dernières années comme partenaire privilégié de l'agriculture et de l'espace rural.
Comme vous, je centrerai mon intervention sur les deux dossiers majeurs sur lesquels nous avons travaillé ensemble au cours de ces derniers mois :
- la mise en uvre de la réforme de la PAC ;
- la préparation du projet de loi d'orientation agricole.
I - La PAC a fait l'objet d'une réforme pour répondre à des besoins nouveaux
Définie par l'accord de Luxembourg en 2003 sous l'impulsion décisive du Président de la République, la réforme de la PAC repose sur trois principes :
- le budget de la PAC est " sanctuarisé " jusqu'en 2013, les exploitants français recevant 8 milliards d'aides directes par an ;
- ces aides reçues sont soumises au respect de critères liés notamment à l'environnement dans le cadre du principe de conditionnalité ;
- les aides sont découplées, partiellement dans le cas retenu par la France.
J'ai souhaité que la nouvelle PAC soit mise en uvre avec discernement et dans un souci de simplification, orientation prise d'ailleurs en concertation avec les différents partenaires du monde agricole.
S'agissant du découplage, je crois que nous partageons un même constat : sa mise en place introduit une évolution fondamentale dans la relation entre l'activité agricole et son support naturel qu'est le foncier. Véritable " révolution culturelle " pour l'agriculture française, nous devons rester très vigilants sur ses conséquences.
Dès le départ, le souci du Gouvernement a été de définir une déclinaison nationale de cette réforme qui limite les risques de déprise et évite la mise en place de comportements spéculatifs. L'objectif, selon lequel les transferts de droits à paiement unique doivent se faire au plus près du foncier, a ainsi été très clairement affirmé. Dans ce domaine, j'ai confirmé récemment les orientations prises en 2004 :
- la France utilisera les possibilités de découplage partiel qui sont offertes par le règlement du Conseil, notamment en ce qui concerne les aides SCOP (qui resteront couplées à hauteur de 25 %) et la PMTVA (qui restera couplée à 100 %) ;
- elle mettra en uvre la réforme sur la base des références historiques à compter de 2006.
Le choix de la simplification à l'issue d'une phase de concertation et après comparaison avec les modalités retenues par six de nos partenaires européens Dès ma prise de fonction, alerté par les organisations professionnelles, je les ai reçues afin d'entendre leurs remarques sur la complexité du dispositif et les incertitudes portant à la fois sur l'établissement des droits de chacun et la période transitoire du 1er janvier 2000 au 15 mai. Attentif à ces inquiétudes manifestées tant par les exploitants que par les propriétaires, j'ai souhaité prendre le temps de refaire le point sur les positions de chacun et m'informer sur les choix adoptés par nos partenaires européens de manière à bénéficier de leur expérience.
Cette phase d'écoute, d'observation et de concertation a permis de déboucher sur une orientation importante recueillant l'accord de tous les partenaires : donner une priorité absolue au transfert direct par clause contractuelle, entre cédant et repreneur, entre propriétaire et exploitant, que ce soit pour la période transitoire ou pour l'avenir.
Ce choix et les modalités pratiques de gestion des droits qui le déclinent, seront présentées à la prochaine réunion du Conseil Supérieur d'Orientation fixée au 28 juin. Je précise que ces modalités ont été établies en concertation étroite avec les représentants de votre syndicat.
Le dispositif retenu permettra la prise en compte la plus simple et la plus lisible possible des évolutions foncières des exploitations françaises depuis le 1er janvier 2000, par le recours systématique - autant que faire se peut - aux clauses privées.
Ce choix présente le double avantage, pour les repreneurs de récupérer directement les DPU correspondant aux terres reprises et, pour les cédants, de mettre en adéquation leurs DPU avec la situation actuelle de leur exploitation. Ces DPU ne pourront ni générer des primes en l'absence de terres, ni être cédés ou loués sans terres.
Pour faciliter le recours à la clause contractuelle, le Ministère de l'agriculture proposera à chaque agriculteur, en même temps que les éléments d'information correspondant à sa référence historique individuelle, des modèles de clause-type.
Ainsi, tous les agriculteurs ayant eu recours à la clause pourront connaître les DPU dont ils disposeront, avec certitude dès l'automne 2005, bien avant ce qui avait été prévu dans le précédent dispositif.
Le dispositif retenu permet également de limiter les attributions de DPU à partir de la réserve aux seuls cas prioritaires : installations, en complément des clauses privées, investissements significatifs intervenus avant le 15 mai 2004 et corrections des situations avérées de distorsion de concurrence.
En outre la réserve permettra de répondre à trois objectifs :
- rééquilibrer, lors de la mise en uvre du découplage, la situation d'agriculteurs dont l'exploitation a fait l'objet d'investissements liés à une augmentation de la production avant le 15 mai 2004 : agrandissement, investissement lié à une augmentation du potentiel de production " situations spéciales " ;
- doter en DPU complémentaires les jeunes agriculteurs qui commencent à exercer une activité agricole ;
- mettre en uvre des " programmes spécifiques " : attributions dans le cadre de programmes de restructuration ou de développement, de manière à éviter que des terres agricoles ne soient abandonnées ou pour compenser des désavantages spécifiques. Une dotation pourra aussi être prévue pour des agriculteurs ayant cultivé pendant la période de référence des cultures non aidées et incompatibles avec l'activation de DPU : dans ce cas, la question de la dotation se pose au moment de l'abandon de ces cultures pour reconversion vers des cultures admissibles aux DPU. Il s'agit, par exemple, des producteurs de pommes de terre, de fruits et légumes, de plantes aromatiques ou à parfum pérennes, agriculteurs sous contrat avec des melonniers en fin de contrat.
Voilà quelles sont les grandes lignes du dispositif, notamment sur ses aspects fonciers. Les règles précises devront faire ensuite l'objet d'une communication large, en collaboration étroite avec les organisations professionnelles.
Les références historiques seront ensuite envoyées individuellement au moment de la rentrée, afin que les opérations d'instruction puissent commencer sans tarder dans les directions départementales de l'agriculture. Les demandes de participation au nouveau régime de paiement découplé seront déposées en mai 2006 sur la base de données individuelles actualisées communiquées aux agriculteurs au mois d'avril 2006. Les attributions définitives de DPU interviendront pendant l'été.
Comme vous, nous partageons le souhait de lier au maximum le foncier et les DPU dans le cadre réglementaire européen. En effet, si le dispositif réglementaire européen relatif aux droits à paiement unique ne prévoit pas explicitement un tel lien, nous souhaitons, en France, le conforter. Ce choix répond au trait spécifique de notre agriculture, caractérisée par une très forte proportion d'exploitants fermiers et de très nombreux mouvements fonciers chaque année. C'est pourquoi : les cessions de droits seront fortement "taxées", à hauteur de 50 %, quand elles ne sont pas accompagnées du foncier correspondant ; le prélèvement de 50 % des DPU en cas de transfert de DPU sans foncier ne s'appliquera pas au fermier sortant s'il cède ses DPU au repreneur des terres.
Par ailleurs, à votre demande, nous avons saisi le Conseil d'Etat pour connaître son avis sur la possibilité de rendre les DPU accessoires des baux pour les contrats signés avant l'attribution des DPU. L'avis devrait être connu avant fin juin. Dans l'hypothèse d'une réponse affirmative, la question sera alors réglée pour la période transitoire ; dans le cas contraire, la clause contractuelle permettra de pallier ce lien.
D'autres dispositions favorables aux propriétaires seront soumises au conseil supérieur de l'orientation qui se tiendra fin juin. Il s'agit notamment de doter en DPU le propriétaire qui a exercé son droit de reprise avant le 15 mai 2004, mais l'affaire a été portée devant les tribunaux. Cette mesure pourrait être étendue après le 15 mai 2004 dans le cadre d'un programme spécifique doté par la réserve, elle sera également soumise au CSO.
II - La loi d'orientation agricole prépare des bases solides pour l'agriculture de demain
L'agriculture française est placée aujourd'hui dans un cadre évolutif dominé par un environnement international et communautaire en voie de stabilisation.
S'agissant du contexte international, il se caractérise par la montée en puissance de nouveaux concurrents sur des marchés où l'OMC a un rôle de régulation essentiel à jouer. Le 2 août dernier, les négociations du cycle de DOHA ont franchi une étape significative grâce à l'accord obtenu qui a relancé les discussions, ce qui permet d'envisager une conclusion de ce cycle en 2006 si un consensus est trouvé lors de la conférence ministérielle de Hong-Kong en décembre prochain. Sur le volet agricole, il est essentiel pour l'Europe de bien négocier d'une part la formule de réduction tarifaire et, d'autre part, le traitement particulier réservé aux produits sensibles.
La France sera attentive à l'équilibre des concessions accordées par les différents membres de l'OMC. La proposition de l'Union Européenne formulée lors de l'accord cadre d'août 2004 à Genève, et visant à la suppression à terme de ses subventions à l'exportation, ne sera maintenue que si nos partenaires acceptent eux aussi de faire une partie du chemin. En outre, ces négociations commerciales doivent être globales associant agriculture, services et agriculture.
Par ailleurs, la réforme de la PAC ou, au niveau national, la nécessaire prise en compte de la demande sociale en matière de qualité et de préservation de l'environnement impliquent de revoir le cadre législatif de notre agriculture.
Le monde agricole attend de nouvelles perspectives pour les vingt prochaines années, lignes directrices qui doivent s'inscrire dans ce contexte nouveau. Nos marges de manuvre, ouvertes dans le cadre des politiques communautaires, ont été utilisées pour impulser ce nouvel élan, voulu par le Président de la République, et que dessine le projet de loi d'orientation agricole.
Présenté en Conseil des Ministres le 18 mai dernier, ce dernier doit désormais être soumis à la discussion parlementaire. Compte tenu du remaniement gouvernemental, le calendrier de l'Assemblée nationale, prévoyant l'examen du texte par les Députés à partir du 20 juin, pourrait être décalé de quelques jours.
Comme vous l'avez dit, Monsieur le Président, votre fédération a participé à l'élaboration du projet de loi dès le lancement du processus. Vous avez participé aux travaux de la Commission nationale d'orientation mise en place l'automne dernier par Hervé GAYMARD et nombreux sont ceux parmi vous qui ont participé aux débats régionaux.
II - 1 La démarche d'entreprise et le bail cessible
L'un des tout premiers objectifs du texte est de promouvoir une véritable démarche d'entreprise de façon à conforter notre agriculture au premier rang mondial. Pour bâtir une agriculture économiquement forte, le projet de loi favorise, en effet, l'évolution de l'exploitation vers une entreprise agricole organisée autour d'un projet économique. Je suis convaincu que la force de l'agriculture française à l'avenir reposera sur un tissu d'entreprises agricoles, unités économiques solides, autonomes et offrant aux exploitants agricoles qui les font vivre, seuls ou en association, des perspectives de revenu et des conditions de travail qui répondent à leurs attentes et celles de leurs salariés.
Plusieurs mesures importantes, et notamment la reconnaissance d'un fonds agricole ou la possibilité conventionnelle de conclure un bail cessible, donneront aux agriculteurs les moyens juridiques d'une véritable démarche d'entreprise. Le plan crédit-transmission pour favoriser l'installation des jeunes ou l'amélioration de la fiscalité des EARL participent au même objectif qui est de faciliter la transmission des exploitations agricoles, notamment des exploitations économiquement viables. Il faut que nous sortions de cette situation dans laquelle chaque agriculteur doit reconstruire son exploitation, quasiment à partir de rien ; il faut qu'il puisse bénéficier de l'acquis des générations précédentes pour poursuivre engager une nouvelle étape de développement.
La mise en place de ce nouveau type de bail a été l'occasion d'un travail partenarial qui a permis de trouver une réponse satisfaisant les objectifs de chacun. Je me félicite du climat constructif dans lequel se sont déroulés les échanges et nous avons abouti, je crois, à une proposition équilibrée.
Vous l'avez souligné, Monsieur le Président, cette proposition peut encore être améliorée, d'une part pour donner plus de place à la liberté contractuelle, d'autre part pour améliorer la disponibilité et la valorisation de son bien pour le propriétaire qui souhaite le vendre.
Les débats parlementaires ne manqueront pas d'apporter des modifications positives, auxquelles je suis prêt à souscrire ; il souhaite qu'elles soient préparées en étroite concertation avec les différents partenaires concernés de façon que les propositions complémentaires éventuellement formulées soient dans toute la mesure du possible consensuelles.
S'agissant du bail environnemental, qui répond à la demande des propriétaires, ni les organisations professionnelles agricoles, ni le Ministère de l'Ecologie n'y sont hostiles. Cette orientation doit donc être valorisée parce qu'elle trouve une cohérence avec les politiques nationales et locales conduites pour préserver l'environnement. Elle peut aussi trouver écho dans des actions menées individuellement et produire ainsi des effets directs tangibles. En tout état de cause, un tel outil devrait permettre une plus grande appropriation individuelle des enjeux écologiques.
II - 2 La gestion du foncier et de la relation propriétaire-bailleur
S'agissant des SAFER, vous regrettez que la loi d'orientation n'apporte pas de réponses nouvelles. Comme vous l'avez dit, je partage la conviction que nous avons besoin d'une véritable politique de gestion de l'espace rural de manière à concilier toutes les attentes qu'il porte, à limiter les conflits entre usages, à limiter le mitage, à protéger l'espace agricole, etc. Une telle politique justifie l'intervention publique sous diverses formes et doit s'appuyer sur un certain nombre d'outils, dont font naturellement partie les SAFER. Le rapport Boisson du Conseil Economique et Social a ouvert la réflexion sur ce sujet et j'ai indiqué que les discussions parlementaires ne manqueraient pas de la reprendre. Néanmoins, je tiens à ajouter que, si des adaptations de leurs modalités d'intervention sont nécessaires, il n'entre pas dans les projets du Gouvernement de remettre en cause l'outil que constituent les SAFER
Vous souhaiteriez que la clause de conversion automatique, sur la simple initiative du métayer, du bail à métayage en bail à ferme soit remise en cause. Votre question, vingt ans après la loi qui a mis en place cette disposition, est en effet légitime : la pertinence de cette mesure ou, au contraire, le retour à la liberté contractuelle classique doit être posée. L'étude de cette question est ouverte mais, là encore, elle doit être menée en concertation avec tous les partenaires concernés.
Vous avez également évoqué la nécessité de donner un cadre plus clair aux conditions de location des bâtiments agricoles. Je sais que les pratiques sont différentes selon les départements sur la manière de prendre en compte les bâtiments d'exploitation dans la détermination du prix du loyer. Ensemble et avec les organisations professionnelles, nous pouvons chercher à clarifier cette question dans le cadre de l'ordonnance prévue par le projet de loi pour adapter le statut du fermage.
II - 3 Sur la fiscalité : la réforme de la taxe sur le foncier non bâti.
Les modalités de la mise en uvre de cette réforme sont en cours d'expertise. Une mission d'inspection a été lancée afin de définir les modalités et le périmètre précis de la suppression progressive de la TFNB, dont la mise en uvre fera l'objet d'une concertation avec les partenaires concernés, notamment les collectivités territoriales. Il est nécessaire en effet d'identifier les moyens selon lesquels pourront être préservées les ressources de communes, notamment les plus rurales d'entre elles pour lesquelles la TFNB représente aujourd'hui une part très importante de leurs ressources. A ce jour, il est acquis que cette réforme sera appliquée de façon progressive à partir de 2006 selon des modalités fixées dans la prochaine loi de finance.
Conclusion
Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, l'agriculture française a besoin que chacun participe à son développement à sa mesure : les propriétaires comme les exploitants et les pouvoirs publics. Notre objectif est d'associer l'ensemble des partenaires pour que " être agriculteur ait encore un sens au XXIe siècle ".
Parce que le monde agricole sait que la récolte vient après un long travail de valorisation parfois sur plus d'une génération, la loi Bussereau ne cherchera pas à occulter les références législatives que constituent les lois Tanguy-Prigent ou Debré-Pisani que vous avez citées. Elles ont fait notre histoire agricole sur laquelle nous devons nous appuyer pour conforter les atouts de notre agriculture. C'est à partir de ces derniers que nous impulserons, avec détermination, un nouvel élan à l'agriculture pour les 20 prochaines années comme ont réussi à le faire ces grandes lois qui l'ont précédée.
(Source http://www.agriculture.gouv.fr, le 14 juin 2005)
Je prends part, aujourd'hui, avec grand plaisir à votre assemblée générale, et souhaite manifester ainsi l'attention que je porte à la place des propriétaires ruraux pour le développement économique et social de nos territoires. Je salue, à ce titre, Monsieur le Président, votre action qui ne constitue pas la moindre des explications à ce nouveau positionnement acquis par votre fédération au cours de ces dernières années comme partenaire privilégié de l'agriculture et de l'espace rural.
Comme vous, je centrerai mon intervention sur les deux dossiers majeurs sur lesquels nous avons travaillé ensemble au cours de ces derniers mois :
- la mise en uvre de la réforme de la PAC ;
- la préparation du projet de loi d'orientation agricole.
I - La PAC a fait l'objet d'une réforme pour répondre à des besoins nouveaux
Définie par l'accord de Luxembourg en 2003 sous l'impulsion décisive du Président de la République, la réforme de la PAC repose sur trois principes :
- le budget de la PAC est " sanctuarisé " jusqu'en 2013, les exploitants français recevant 8 milliards d'aides directes par an ;
- ces aides reçues sont soumises au respect de critères liés notamment à l'environnement dans le cadre du principe de conditionnalité ;
- les aides sont découplées, partiellement dans le cas retenu par la France.
J'ai souhaité que la nouvelle PAC soit mise en uvre avec discernement et dans un souci de simplification, orientation prise d'ailleurs en concertation avec les différents partenaires du monde agricole.
S'agissant du découplage, je crois que nous partageons un même constat : sa mise en place introduit une évolution fondamentale dans la relation entre l'activité agricole et son support naturel qu'est le foncier. Véritable " révolution culturelle " pour l'agriculture française, nous devons rester très vigilants sur ses conséquences.
Dès le départ, le souci du Gouvernement a été de définir une déclinaison nationale de cette réforme qui limite les risques de déprise et évite la mise en place de comportements spéculatifs. L'objectif, selon lequel les transferts de droits à paiement unique doivent se faire au plus près du foncier, a ainsi été très clairement affirmé. Dans ce domaine, j'ai confirmé récemment les orientations prises en 2004 :
- la France utilisera les possibilités de découplage partiel qui sont offertes par le règlement du Conseil, notamment en ce qui concerne les aides SCOP (qui resteront couplées à hauteur de 25 %) et la PMTVA (qui restera couplée à 100 %) ;
- elle mettra en uvre la réforme sur la base des références historiques à compter de 2006.
Le choix de la simplification à l'issue d'une phase de concertation et après comparaison avec les modalités retenues par six de nos partenaires européens Dès ma prise de fonction, alerté par les organisations professionnelles, je les ai reçues afin d'entendre leurs remarques sur la complexité du dispositif et les incertitudes portant à la fois sur l'établissement des droits de chacun et la période transitoire du 1er janvier 2000 au 15 mai. Attentif à ces inquiétudes manifestées tant par les exploitants que par les propriétaires, j'ai souhaité prendre le temps de refaire le point sur les positions de chacun et m'informer sur les choix adoptés par nos partenaires européens de manière à bénéficier de leur expérience.
Cette phase d'écoute, d'observation et de concertation a permis de déboucher sur une orientation importante recueillant l'accord de tous les partenaires : donner une priorité absolue au transfert direct par clause contractuelle, entre cédant et repreneur, entre propriétaire et exploitant, que ce soit pour la période transitoire ou pour l'avenir.
Ce choix et les modalités pratiques de gestion des droits qui le déclinent, seront présentées à la prochaine réunion du Conseil Supérieur d'Orientation fixée au 28 juin. Je précise que ces modalités ont été établies en concertation étroite avec les représentants de votre syndicat.
Le dispositif retenu permettra la prise en compte la plus simple et la plus lisible possible des évolutions foncières des exploitations françaises depuis le 1er janvier 2000, par le recours systématique - autant que faire se peut - aux clauses privées.
Ce choix présente le double avantage, pour les repreneurs de récupérer directement les DPU correspondant aux terres reprises et, pour les cédants, de mettre en adéquation leurs DPU avec la situation actuelle de leur exploitation. Ces DPU ne pourront ni générer des primes en l'absence de terres, ni être cédés ou loués sans terres.
Pour faciliter le recours à la clause contractuelle, le Ministère de l'agriculture proposera à chaque agriculteur, en même temps que les éléments d'information correspondant à sa référence historique individuelle, des modèles de clause-type.
Ainsi, tous les agriculteurs ayant eu recours à la clause pourront connaître les DPU dont ils disposeront, avec certitude dès l'automne 2005, bien avant ce qui avait été prévu dans le précédent dispositif.
Le dispositif retenu permet également de limiter les attributions de DPU à partir de la réserve aux seuls cas prioritaires : installations, en complément des clauses privées, investissements significatifs intervenus avant le 15 mai 2004 et corrections des situations avérées de distorsion de concurrence.
En outre la réserve permettra de répondre à trois objectifs :
- rééquilibrer, lors de la mise en uvre du découplage, la situation d'agriculteurs dont l'exploitation a fait l'objet d'investissements liés à une augmentation de la production avant le 15 mai 2004 : agrandissement, investissement lié à une augmentation du potentiel de production " situations spéciales " ;
- doter en DPU complémentaires les jeunes agriculteurs qui commencent à exercer une activité agricole ;
- mettre en uvre des " programmes spécifiques " : attributions dans le cadre de programmes de restructuration ou de développement, de manière à éviter que des terres agricoles ne soient abandonnées ou pour compenser des désavantages spécifiques. Une dotation pourra aussi être prévue pour des agriculteurs ayant cultivé pendant la période de référence des cultures non aidées et incompatibles avec l'activation de DPU : dans ce cas, la question de la dotation se pose au moment de l'abandon de ces cultures pour reconversion vers des cultures admissibles aux DPU. Il s'agit, par exemple, des producteurs de pommes de terre, de fruits et légumes, de plantes aromatiques ou à parfum pérennes, agriculteurs sous contrat avec des melonniers en fin de contrat.
Voilà quelles sont les grandes lignes du dispositif, notamment sur ses aspects fonciers. Les règles précises devront faire ensuite l'objet d'une communication large, en collaboration étroite avec les organisations professionnelles.
Les références historiques seront ensuite envoyées individuellement au moment de la rentrée, afin que les opérations d'instruction puissent commencer sans tarder dans les directions départementales de l'agriculture. Les demandes de participation au nouveau régime de paiement découplé seront déposées en mai 2006 sur la base de données individuelles actualisées communiquées aux agriculteurs au mois d'avril 2006. Les attributions définitives de DPU interviendront pendant l'été.
Comme vous, nous partageons le souhait de lier au maximum le foncier et les DPU dans le cadre réglementaire européen. En effet, si le dispositif réglementaire européen relatif aux droits à paiement unique ne prévoit pas explicitement un tel lien, nous souhaitons, en France, le conforter. Ce choix répond au trait spécifique de notre agriculture, caractérisée par une très forte proportion d'exploitants fermiers et de très nombreux mouvements fonciers chaque année. C'est pourquoi : les cessions de droits seront fortement "taxées", à hauteur de 50 %, quand elles ne sont pas accompagnées du foncier correspondant ; le prélèvement de 50 % des DPU en cas de transfert de DPU sans foncier ne s'appliquera pas au fermier sortant s'il cède ses DPU au repreneur des terres.
Par ailleurs, à votre demande, nous avons saisi le Conseil d'Etat pour connaître son avis sur la possibilité de rendre les DPU accessoires des baux pour les contrats signés avant l'attribution des DPU. L'avis devrait être connu avant fin juin. Dans l'hypothèse d'une réponse affirmative, la question sera alors réglée pour la période transitoire ; dans le cas contraire, la clause contractuelle permettra de pallier ce lien.
D'autres dispositions favorables aux propriétaires seront soumises au conseil supérieur de l'orientation qui se tiendra fin juin. Il s'agit notamment de doter en DPU le propriétaire qui a exercé son droit de reprise avant le 15 mai 2004, mais l'affaire a été portée devant les tribunaux. Cette mesure pourrait être étendue après le 15 mai 2004 dans le cadre d'un programme spécifique doté par la réserve, elle sera également soumise au CSO.
II - La loi d'orientation agricole prépare des bases solides pour l'agriculture de demain
L'agriculture française est placée aujourd'hui dans un cadre évolutif dominé par un environnement international et communautaire en voie de stabilisation.
S'agissant du contexte international, il se caractérise par la montée en puissance de nouveaux concurrents sur des marchés où l'OMC a un rôle de régulation essentiel à jouer. Le 2 août dernier, les négociations du cycle de DOHA ont franchi une étape significative grâce à l'accord obtenu qui a relancé les discussions, ce qui permet d'envisager une conclusion de ce cycle en 2006 si un consensus est trouvé lors de la conférence ministérielle de Hong-Kong en décembre prochain. Sur le volet agricole, il est essentiel pour l'Europe de bien négocier d'une part la formule de réduction tarifaire et, d'autre part, le traitement particulier réservé aux produits sensibles.
La France sera attentive à l'équilibre des concessions accordées par les différents membres de l'OMC. La proposition de l'Union Européenne formulée lors de l'accord cadre d'août 2004 à Genève, et visant à la suppression à terme de ses subventions à l'exportation, ne sera maintenue que si nos partenaires acceptent eux aussi de faire une partie du chemin. En outre, ces négociations commerciales doivent être globales associant agriculture, services et agriculture.
Par ailleurs, la réforme de la PAC ou, au niveau national, la nécessaire prise en compte de la demande sociale en matière de qualité et de préservation de l'environnement impliquent de revoir le cadre législatif de notre agriculture.
Le monde agricole attend de nouvelles perspectives pour les vingt prochaines années, lignes directrices qui doivent s'inscrire dans ce contexte nouveau. Nos marges de manuvre, ouvertes dans le cadre des politiques communautaires, ont été utilisées pour impulser ce nouvel élan, voulu par le Président de la République, et que dessine le projet de loi d'orientation agricole.
Présenté en Conseil des Ministres le 18 mai dernier, ce dernier doit désormais être soumis à la discussion parlementaire. Compte tenu du remaniement gouvernemental, le calendrier de l'Assemblée nationale, prévoyant l'examen du texte par les Députés à partir du 20 juin, pourrait être décalé de quelques jours.
Comme vous l'avez dit, Monsieur le Président, votre fédération a participé à l'élaboration du projet de loi dès le lancement du processus. Vous avez participé aux travaux de la Commission nationale d'orientation mise en place l'automne dernier par Hervé GAYMARD et nombreux sont ceux parmi vous qui ont participé aux débats régionaux.
II - 1 La démarche d'entreprise et le bail cessible
L'un des tout premiers objectifs du texte est de promouvoir une véritable démarche d'entreprise de façon à conforter notre agriculture au premier rang mondial. Pour bâtir une agriculture économiquement forte, le projet de loi favorise, en effet, l'évolution de l'exploitation vers une entreprise agricole organisée autour d'un projet économique. Je suis convaincu que la force de l'agriculture française à l'avenir reposera sur un tissu d'entreprises agricoles, unités économiques solides, autonomes et offrant aux exploitants agricoles qui les font vivre, seuls ou en association, des perspectives de revenu et des conditions de travail qui répondent à leurs attentes et celles de leurs salariés.
Plusieurs mesures importantes, et notamment la reconnaissance d'un fonds agricole ou la possibilité conventionnelle de conclure un bail cessible, donneront aux agriculteurs les moyens juridiques d'une véritable démarche d'entreprise. Le plan crédit-transmission pour favoriser l'installation des jeunes ou l'amélioration de la fiscalité des EARL participent au même objectif qui est de faciliter la transmission des exploitations agricoles, notamment des exploitations économiquement viables. Il faut que nous sortions de cette situation dans laquelle chaque agriculteur doit reconstruire son exploitation, quasiment à partir de rien ; il faut qu'il puisse bénéficier de l'acquis des générations précédentes pour poursuivre engager une nouvelle étape de développement.
La mise en place de ce nouveau type de bail a été l'occasion d'un travail partenarial qui a permis de trouver une réponse satisfaisant les objectifs de chacun. Je me félicite du climat constructif dans lequel se sont déroulés les échanges et nous avons abouti, je crois, à une proposition équilibrée.
Vous l'avez souligné, Monsieur le Président, cette proposition peut encore être améliorée, d'une part pour donner plus de place à la liberté contractuelle, d'autre part pour améliorer la disponibilité et la valorisation de son bien pour le propriétaire qui souhaite le vendre.
Les débats parlementaires ne manqueront pas d'apporter des modifications positives, auxquelles je suis prêt à souscrire ; il souhaite qu'elles soient préparées en étroite concertation avec les différents partenaires concernés de façon que les propositions complémentaires éventuellement formulées soient dans toute la mesure du possible consensuelles.
S'agissant du bail environnemental, qui répond à la demande des propriétaires, ni les organisations professionnelles agricoles, ni le Ministère de l'Ecologie n'y sont hostiles. Cette orientation doit donc être valorisée parce qu'elle trouve une cohérence avec les politiques nationales et locales conduites pour préserver l'environnement. Elle peut aussi trouver écho dans des actions menées individuellement et produire ainsi des effets directs tangibles. En tout état de cause, un tel outil devrait permettre une plus grande appropriation individuelle des enjeux écologiques.
II - 2 La gestion du foncier et de la relation propriétaire-bailleur
S'agissant des SAFER, vous regrettez que la loi d'orientation n'apporte pas de réponses nouvelles. Comme vous l'avez dit, je partage la conviction que nous avons besoin d'une véritable politique de gestion de l'espace rural de manière à concilier toutes les attentes qu'il porte, à limiter les conflits entre usages, à limiter le mitage, à protéger l'espace agricole, etc. Une telle politique justifie l'intervention publique sous diverses formes et doit s'appuyer sur un certain nombre d'outils, dont font naturellement partie les SAFER. Le rapport Boisson du Conseil Economique et Social a ouvert la réflexion sur ce sujet et j'ai indiqué que les discussions parlementaires ne manqueraient pas de la reprendre. Néanmoins, je tiens à ajouter que, si des adaptations de leurs modalités d'intervention sont nécessaires, il n'entre pas dans les projets du Gouvernement de remettre en cause l'outil que constituent les SAFER
Vous souhaiteriez que la clause de conversion automatique, sur la simple initiative du métayer, du bail à métayage en bail à ferme soit remise en cause. Votre question, vingt ans après la loi qui a mis en place cette disposition, est en effet légitime : la pertinence de cette mesure ou, au contraire, le retour à la liberté contractuelle classique doit être posée. L'étude de cette question est ouverte mais, là encore, elle doit être menée en concertation avec tous les partenaires concernés.
Vous avez également évoqué la nécessité de donner un cadre plus clair aux conditions de location des bâtiments agricoles. Je sais que les pratiques sont différentes selon les départements sur la manière de prendre en compte les bâtiments d'exploitation dans la détermination du prix du loyer. Ensemble et avec les organisations professionnelles, nous pouvons chercher à clarifier cette question dans le cadre de l'ordonnance prévue par le projet de loi pour adapter le statut du fermage.
II - 3 Sur la fiscalité : la réforme de la taxe sur le foncier non bâti.
Les modalités de la mise en uvre de cette réforme sont en cours d'expertise. Une mission d'inspection a été lancée afin de définir les modalités et le périmètre précis de la suppression progressive de la TFNB, dont la mise en uvre fera l'objet d'une concertation avec les partenaires concernés, notamment les collectivités territoriales. Il est nécessaire en effet d'identifier les moyens selon lesquels pourront être préservées les ressources de communes, notamment les plus rurales d'entre elles pour lesquelles la TFNB représente aujourd'hui une part très importante de leurs ressources. A ce jour, il est acquis que cette réforme sera appliquée de façon progressive à partir de 2006 selon des modalités fixées dans la prochaine loi de finance.
Conclusion
Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, l'agriculture française a besoin que chacun participe à son développement à sa mesure : les propriétaires comme les exploitants et les pouvoirs publics. Notre objectif est d'associer l'ensemble des partenaires pour que " être agriculteur ait encore un sens au XXIe siècle ".
Parce que le monde agricole sait que la récolte vient après un long travail de valorisation parfois sur plus d'une génération, la loi Bussereau ne cherchera pas à occulter les références législatives que constituent les lois Tanguy-Prigent ou Debré-Pisani que vous avez citées. Elles ont fait notre histoire agricole sur laquelle nous devons nous appuyer pour conforter les atouts de notre agriculture. C'est à partir de ces derniers que nous impulserons, avec détermination, un nouvel élan à l'agriculture pour les 20 prochaines années comme ont réussi à le faire ces grandes lois qui l'ont précédée.
(Source http://www.agriculture.gouv.fr, le 14 juin 2005)