Texte intégral
12 août 2005
Que mûrissent les raisins de la colère!
En annonçant le 2 août, à la veille de partir lui-même en vacances, que le "contrat nouvelle embauche", destiné aux entreprises de moins de vingt salariés, entrait immédiatement en vigueur, le Premier ministre s'est même permis de prétendre que celui-ci constituait un "progrès tout à fait considérable", sous prétexte que "70% des contrats proposés sont aujourd'hui des CDD".
Mais s'il y a tant de CDD, si ceux-ci ne sont pas en pratique limités, comme le prévoit expressément la loi, à des circonstances exceptionnelles, comme le remplacement d'un salarié malade ou un "surcroît momentané d'activité", à qui la faute ? Si ce n'est aux patrons qui agissent sans contrôle et tournent la loi en toute impunité, grâce aux gouvernements successifs qui les ont laissés faire.
Ce "contrat nouvelle embauche" marque un recul par rapport au CDD, puisque l'employeur ne peut pas rompre ce dernier avant son terme, sauf en évoquant une faute professionnelle grave, alors qu'avec le nouveau contrat inventé par de Villepin, et sa "période d'essai" de deux ans, le patron n'aura même pas besoin de donner une raison pour procéder à un licenciement durant cette période.
Quand il a présenté son projet, en juin dernier, de Villepin avait affirmé que celui-ci serait "plus protecteur" pour le salarié, qu'il prévoirait des indemnités en cas de perte de l'emploi. En fait d'indemnisation, le salarié licencié recevra du patron une prime de licenciement correspondant à 8% des salaires perçus. Et ce n'est qu'à condition d'avoir travaillé pendant au moins quatre mois qu'il recevra de l'État 16,40 euros (environ 110 francs) par jour... pendant un mois. C'est dire que le salarié qui sera licencié sans explication au bout de trois mois touchera une prime de huit jours, et n'aura droit à aucune indemnité de chômage. C'est cela la "protection sociale" telle que la conçoit de Villepin.
Que ces textes n'avantagent que le patronat, c'est l'évidence même. Laurence Parisot, la nouvelle présidente du Medef, a salué des ordonnances qui vont "dans le bon sens" et qui constituent "un signal positif" pour les patrons, qui souhaitent évidemment la généralisation de ce contrat à toutes les entreprises.
Mais, comme son prédécesseur Seillière, elle s'empresse d'en demander encore plus: "Il est clair qu'il ne faudra pas s'arrêter là et que d'autres initiatives, relatives notamment aux prélèvements obligatoires, seront également nécessaires pour remonter la pente". En clair, cela veut dire que les patrons des grandes entreprises, qui font pourtant des profits records, voudraient payer moins d'impôt, et obtenir de nouvelles diminutions des charges sociales, qui aggraveront évidemment le déficit de la Sécurité sociale.
Quant à créer de nouveaux emplois, il ne faut pas compter pour cela sur le "contrat nouvelle embauche". Les patrons n'embauchent pas pour "donner du travail" aux ouvriers, mais lorsque cela leur permet d'augmenter leurs profits. Et ceux qui utiliseront le nouveau contrat ne feront que profiter de l'opportunité que leur offre le gouvernement.
Les confédérations syndicales ont été quasiment unanimes à dénoncer ce "contrat nouvelle embauche", qui ne concerne pour l'instant que les petites entreprises, mais dont le Premier ministre lui-même a reconnu qu'il pourrait bien se généraliser aux plus grandes. Elles ont évidemment raison. Mais il ne sert à rien de se contenter de condamner, ou de demander l'ouverture de négociations, qui ne changeront rien à la politique du patronat et du gouvernement. Pour les faire reculer, il faudra changer le rapport de forces.
Bien malgré lui, de Villepin va peut-être y contribuer. Suivant une vieille tactique politique, il a voulu profiter des congés d'été pour faire son mauvais coup. Mais c'est en août que mûrissent les raisins... Ceux de la vigne, bien sûr, mais aussi, peut-être, les raisins de la colère. C'est en tout cas ce qu'il faut souhaiter.
(Source http://www.lutte-ouvrière.org, le 17 août 2005)
19 août 2005
L'essence du problème
L'augmentation de 16% du prix des carburants en un an n'attriste pas tout le monde. Tous les groupes pétroliers internationaux ont affiché, grâce à cela, des bénéfices en hausse considérable en 2004: BP (+26%), ExxonMobil (+18%), Shell (+48%). Le groupe français Total a annoncé quant à lui un accroissement de ses bénéfices de 23% par rapport à l'année précédente. De Villepin a fini par sortir de son silence face à cette flambée des prix des carburants qui s'est encore accentuée cet été, mais s'est contenté de vagues déclarations pour l'avenir. Le gouvernement n'envisage évidemment pas un seul instant de taxer davantage Total et ses semblables. L'État se contente d'encaisser les sommes supplémentaires considérables qu'il récupère ainsi.
Le Parti Socialiste, qui a trouvé là un sujet grâce auquel il peut jouer les opposants sans prendre d'engagement précis, s'est prononcé pour le retour au système de la TIPP flottante (taxe intérieure sur les produits pétroliers) que le gouvernement Jospin avait institué en 2001, lors d'une précédente flambée du cours du pétrole, et qui fut supprimé un an après par Raffarin. Par ce système, en diminuant la TIPP en cas de forte hausse des carburants, l'État laissait aux consommateurs un peu de ce qu'il encaissait en plus.
Mais parmi les alliés du PS, tout le monde n'est pas d'accord avec cette proposition. Les Verts, par la voix de l'adjoint à la mairie de Paris Denis Baupin, qualifient cette mesure de "contre-productive", parce qu'elle "inciterait les consommateurs à maintenir une forte consommation", et plaident seulement pour une amélioration des transports en commun.
C'est d'ailleurs vrai que ceux-ci sont nettement insuffisants. Mais les Verts ont participé au gouvernement Jospin de 1997 à 2002. Ils sont présents dans nombre de conseils municipaux. S'ils avaient fait quelque chose pour améliorer les transports en commun, cela se verrait. À Paris, tout comme la droite avant eux, ils se sont ingéniés à rendre l'accès au centre-ville plus difficile et plus coûteux pour les banlieusards qui viennent y travailler, c'est-à-dire la majorité de ceux qui travaillent à Paris, sans améliorer en contrepartie les transports en commun.
Des millions de salariés emploient tous les jours leur voiture pour se rendre à leur travail, et ils n'ont souvent pas d'autre choix, parce que dans les grandes agglomérations les transports en commun sont insuffisants et parce que la spéculation immobilière les a poussés vers des banlieues de plus en plus lointaines et de moins en moins accessibles. Beaucoup ne gagnent que le smic. Pour les petits salaires, cette explosion du prix des carburants va rendre la vie encore plus difficile.
Quant à dire que cette augmentation est une bonne chose parce qu'elle va encourager les consommateurs à rouler moins, ce que prétend aussi de Villepin, c'est une ânerie. Les travailleurs qui n'ont pas le choix paieront seulement plus cher. Les riches qui ont les moyens ne s'arrêteront pas devant la hausse des carburants: il n'est que de voir le succès commercial que remportent actuellement les gros 4x4 tout-terrain (mais plus souvent utilisés pour frimer dans les centres-villes qu'à la montagne), capables de brûler 20ou 30 litres aux 100 kilomètres.
Le pétrole ne constitue certes pas une énergie inépuisable (même si les gisements connus sont encore loin d'être épuisés), et une société qui se donnerait pour but l'utilisation rationnelle des ressources de la planète, y compris pour les générations futures, devrait faire des choix en matière de consommation et de sources d'énergie. Mais ce n'est pas ainsi que le problème se pose aujourd'hui. La course au profit est la seule règle des capitalistes. C'est celle que respectent et appliquent les gouvernements à leur service, quelle que soit leur couleur politique. Et toutes les mesures préconisées par les hommes politiques partisans de "l'économie de marché", c'est-à-dire du système capitaliste, aboutissent immanquablement à faire supporter les conséquences de cette gestion égoïste à la population laborieuse, soit en bloquant les salaires, soit en laissant augmenter librement prix et profits.
(Source http://www.lutte-ouvrière.org, le 18 août 2005)
26 août 2005
Ce n'est pas aux travailleurs de faire les frais de la hausse du pétrole
Le prix des produits pétroliers n'en finit pas de grimper. Selon les chiffres du ministère de l'Économie, qu'on ne saurait suspecter de les surestimer, le prix du super sans plomb 95 a augmenté de 10,9% en un an, celui du gazole de 20,8%, et celui du fioul domestique de près de 35%. Face à cela, le Premier ministre s'est contenté de promettre "la vérité et la transparence aux Français", renvoyant toute mesure concrète à plus tard. Les mesures éventuelles qui ont été évoquées concernent surtout les professionnels de la route. Les travailleurs qui gagnent un peu plus que le smic, comme les retraités, ont été d'ores et déjà écartés de la liste de ceux qui pourraient bénéficier d'une quelconque redistribution des rentrées supplémentaires que procure à l'État cette flambée des prix à la pompe.
Ces hausses viennent pourtant frapper de plein fouet le monde du travail: des milliers de salariés n'ont pas d'autre choix, face à l'insuffisance des transports en commun, aux horaires qu'on leur impose et à l'éloignement de leur domicile des lieux de travail, que d'utiliser leur véhicule personnel. Une grande partie de la population laborieuse se chauffe au fioul, que ce soit dans des habitations individuelles ou dans des immeubles dont les charges locatives vont forcément répercuter ces hausses.
Les conséquences de cette flambée des prix des produits pétroliers ne seront évidemment pas les mêmes pour tout le monde.
Il y a ceux qui en profitent: les sociétés pétrolières et leurs actionnaires, dont les profits s'envolent depuis plus d'un an, sans que le gouvernement ait jamais envisagé d'augmenter l'impôt sur les bénéfices des sociétés. Il y a ceux que cela ne gêne pas trop: les nantis pour qui les frais de carburant ou de chauffage égratignent à peine leurs revenus. Mais pour la grande masse des familles de travailleurs, des retraités, dont les salaires et les pensions étaient déjà loin de suivre l'augmentation du coût de la vie, la hausse incessante des carburants et du fioul ne peut que se traduire par une diminution insupportable de leur niveau de vie.
Les travailleurs n'ont aucun moyen d'intervenir directement sur le prix des produits pétroliers. Mais ils n'ont aucune raison non plus d'accepter d'être les victimes de cette situation. Si les salaires deviennent de plus en plus insuffisants pour leur assurer un niveau de vie décent, alors il faut exiger une revalorisation générale des salaires, pensions et retraites.
Il ne faut évidemment pas compter pour cela sur la bonne volonté du patronat, qui s'est au contraire employé, depuis des années, à réduire le niveau de vie des travailleurs afin d'augmenter ses propres profits. Ni sur celle du gouvernement actuel, ou d'un quelconque gouvernement futur, car toute l'expérience du passé montre, quels que soient les résultats des élections, que les gouvernants ne sont que les commis du grand patronat. Mais les travailleurs, sans qui rien ne serait produit, sans qui aucun service ne fonctionnerait, représentent par leur nombre, par leur place dans la vie économique, une force considérable, capable d'obliger les possédants à faire les frais des conséquences du système économique aberrant qui ne vise qu'à l'enrichissement d'une petite minorité.
Après les mauvais coups qu'ont constitués en juillet les ordonnances de de Villepin, avec en particulier le "contrat nouvelle embauche", les confédérations syndicales ont annoncé des actions pour cette rentrée de septembre. Elles n'ont peut-être pas d'autre ambition que d'être admises à discuter autour d'un tapis vert avec les représentants du patronat et du gouvernement.
Mais il faudra se servir de chacune de ces actions pour montrer au patronat, comme aux dirigeants syndicaux, que les travailleurs sont prêts à imposer par la lutte la satisfaction de revendications qui relèvent de la plus élémentaire justice sociale.
(Source http://www.lutte-ouvrière.org, le 25 août 2005)
Que mûrissent les raisins de la colère!
En annonçant le 2 août, à la veille de partir lui-même en vacances, que le "contrat nouvelle embauche", destiné aux entreprises de moins de vingt salariés, entrait immédiatement en vigueur, le Premier ministre s'est même permis de prétendre que celui-ci constituait un "progrès tout à fait considérable", sous prétexte que "70% des contrats proposés sont aujourd'hui des CDD".
Mais s'il y a tant de CDD, si ceux-ci ne sont pas en pratique limités, comme le prévoit expressément la loi, à des circonstances exceptionnelles, comme le remplacement d'un salarié malade ou un "surcroît momentané d'activité", à qui la faute ? Si ce n'est aux patrons qui agissent sans contrôle et tournent la loi en toute impunité, grâce aux gouvernements successifs qui les ont laissés faire.
Ce "contrat nouvelle embauche" marque un recul par rapport au CDD, puisque l'employeur ne peut pas rompre ce dernier avant son terme, sauf en évoquant une faute professionnelle grave, alors qu'avec le nouveau contrat inventé par de Villepin, et sa "période d'essai" de deux ans, le patron n'aura même pas besoin de donner une raison pour procéder à un licenciement durant cette période.
Quand il a présenté son projet, en juin dernier, de Villepin avait affirmé que celui-ci serait "plus protecteur" pour le salarié, qu'il prévoirait des indemnités en cas de perte de l'emploi. En fait d'indemnisation, le salarié licencié recevra du patron une prime de licenciement correspondant à 8% des salaires perçus. Et ce n'est qu'à condition d'avoir travaillé pendant au moins quatre mois qu'il recevra de l'État 16,40 euros (environ 110 francs) par jour... pendant un mois. C'est dire que le salarié qui sera licencié sans explication au bout de trois mois touchera une prime de huit jours, et n'aura droit à aucune indemnité de chômage. C'est cela la "protection sociale" telle que la conçoit de Villepin.
Que ces textes n'avantagent que le patronat, c'est l'évidence même. Laurence Parisot, la nouvelle présidente du Medef, a salué des ordonnances qui vont "dans le bon sens" et qui constituent "un signal positif" pour les patrons, qui souhaitent évidemment la généralisation de ce contrat à toutes les entreprises.
Mais, comme son prédécesseur Seillière, elle s'empresse d'en demander encore plus: "Il est clair qu'il ne faudra pas s'arrêter là et que d'autres initiatives, relatives notamment aux prélèvements obligatoires, seront également nécessaires pour remonter la pente". En clair, cela veut dire que les patrons des grandes entreprises, qui font pourtant des profits records, voudraient payer moins d'impôt, et obtenir de nouvelles diminutions des charges sociales, qui aggraveront évidemment le déficit de la Sécurité sociale.
Quant à créer de nouveaux emplois, il ne faut pas compter pour cela sur le "contrat nouvelle embauche". Les patrons n'embauchent pas pour "donner du travail" aux ouvriers, mais lorsque cela leur permet d'augmenter leurs profits. Et ceux qui utiliseront le nouveau contrat ne feront que profiter de l'opportunité que leur offre le gouvernement.
Les confédérations syndicales ont été quasiment unanimes à dénoncer ce "contrat nouvelle embauche", qui ne concerne pour l'instant que les petites entreprises, mais dont le Premier ministre lui-même a reconnu qu'il pourrait bien se généraliser aux plus grandes. Elles ont évidemment raison. Mais il ne sert à rien de se contenter de condamner, ou de demander l'ouverture de négociations, qui ne changeront rien à la politique du patronat et du gouvernement. Pour les faire reculer, il faudra changer le rapport de forces.
Bien malgré lui, de Villepin va peut-être y contribuer. Suivant une vieille tactique politique, il a voulu profiter des congés d'été pour faire son mauvais coup. Mais c'est en août que mûrissent les raisins... Ceux de la vigne, bien sûr, mais aussi, peut-être, les raisins de la colère. C'est en tout cas ce qu'il faut souhaiter.
(Source http://www.lutte-ouvrière.org, le 17 août 2005)
19 août 2005
L'essence du problème
L'augmentation de 16% du prix des carburants en un an n'attriste pas tout le monde. Tous les groupes pétroliers internationaux ont affiché, grâce à cela, des bénéfices en hausse considérable en 2004: BP (+26%), ExxonMobil (+18%), Shell (+48%). Le groupe français Total a annoncé quant à lui un accroissement de ses bénéfices de 23% par rapport à l'année précédente. De Villepin a fini par sortir de son silence face à cette flambée des prix des carburants qui s'est encore accentuée cet été, mais s'est contenté de vagues déclarations pour l'avenir. Le gouvernement n'envisage évidemment pas un seul instant de taxer davantage Total et ses semblables. L'État se contente d'encaisser les sommes supplémentaires considérables qu'il récupère ainsi.
Le Parti Socialiste, qui a trouvé là un sujet grâce auquel il peut jouer les opposants sans prendre d'engagement précis, s'est prononcé pour le retour au système de la TIPP flottante (taxe intérieure sur les produits pétroliers) que le gouvernement Jospin avait institué en 2001, lors d'une précédente flambée du cours du pétrole, et qui fut supprimé un an après par Raffarin. Par ce système, en diminuant la TIPP en cas de forte hausse des carburants, l'État laissait aux consommateurs un peu de ce qu'il encaissait en plus.
Mais parmi les alliés du PS, tout le monde n'est pas d'accord avec cette proposition. Les Verts, par la voix de l'adjoint à la mairie de Paris Denis Baupin, qualifient cette mesure de "contre-productive", parce qu'elle "inciterait les consommateurs à maintenir une forte consommation", et plaident seulement pour une amélioration des transports en commun.
C'est d'ailleurs vrai que ceux-ci sont nettement insuffisants. Mais les Verts ont participé au gouvernement Jospin de 1997 à 2002. Ils sont présents dans nombre de conseils municipaux. S'ils avaient fait quelque chose pour améliorer les transports en commun, cela se verrait. À Paris, tout comme la droite avant eux, ils se sont ingéniés à rendre l'accès au centre-ville plus difficile et plus coûteux pour les banlieusards qui viennent y travailler, c'est-à-dire la majorité de ceux qui travaillent à Paris, sans améliorer en contrepartie les transports en commun.
Des millions de salariés emploient tous les jours leur voiture pour se rendre à leur travail, et ils n'ont souvent pas d'autre choix, parce que dans les grandes agglomérations les transports en commun sont insuffisants et parce que la spéculation immobilière les a poussés vers des banlieues de plus en plus lointaines et de moins en moins accessibles. Beaucoup ne gagnent que le smic. Pour les petits salaires, cette explosion du prix des carburants va rendre la vie encore plus difficile.
Quant à dire que cette augmentation est une bonne chose parce qu'elle va encourager les consommateurs à rouler moins, ce que prétend aussi de Villepin, c'est une ânerie. Les travailleurs qui n'ont pas le choix paieront seulement plus cher. Les riches qui ont les moyens ne s'arrêteront pas devant la hausse des carburants: il n'est que de voir le succès commercial que remportent actuellement les gros 4x4 tout-terrain (mais plus souvent utilisés pour frimer dans les centres-villes qu'à la montagne), capables de brûler 20ou 30 litres aux 100 kilomètres.
Le pétrole ne constitue certes pas une énergie inépuisable (même si les gisements connus sont encore loin d'être épuisés), et une société qui se donnerait pour but l'utilisation rationnelle des ressources de la planète, y compris pour les générations futures, devrait faire des choix en matière de consommation et de sources d'énergie. Mais ce n'est pas ainsi que le problème se pose aujourd'hui. La course au profit est la seule règle des capitalistes. C'est celle que respectent et appliquent les gouvernements à leur service, quelle que soit leur couleur politique. Et toutes les mesures préconisées par les hommes politiques partisans de "l'économie de marché", c'est-à-dire du système capitaliste, aboutissent immanquablement à faire supporter les conséquences de cette gestion égoïste à la population laborieuse, soit en bloquant les salaires, soit en laissant augmenter librement prix et profits.
(Source http://www.lutte-ouvrière.org, le 18 août 2005)
26 août 2005
Ce n'est pas aux travailleurs de faire les frais de la hausse du pétrole
Le prix des produits pétroliers n'en finit pas de grimper. Selon les chiffres du ministère de l'Économie, qu'on ne saurait suspecter de les surestimer, le prix du super sans plomb 95 a augmenté de 10,9% en un an, celui du gazole de 20,8%, et celui du fioul domestique de près de 35%. Face à cela, le Premier ministre s'est contenté de promettre "la vérité et la transparence aux Français", renvoyant toute mesure concrète à plus tard. Les mesures éventuelles qui ont été évoquées concernent surtout les professionnels de la route. Les travailleurs qui gagnent un peu plus que le smic, comme les retraités, ont été d'ores et déjà écartés de la liste de ceux qui pourraient bénéficier d'une quelconque redistribution des rentrées supplémentaires que procure à l'État cette flambée des prix à la pompe.
Ces hausses viennent pourtant frapper de plein fouet le monde du travail: des milliers de salariés n'ont pas d'autre choix, face à l'insuffisance des transports en commun, aux horaires qu'on leur impose et à l'éloignement de leur domicile des lieux de travail, que d'utiliser leur véhicule personnel. Une grande partie de la population laborieuse se chauffe au fioul, que ce soit dans des habitations individuelles ou dans des immeubles dont les charges locatives vont forcément répercuter ces hausses.
Les conséquences de cette flambée des prix des produits pétroliers ne seront évidemment pas les mêmes pour tout le monde.
Il y a ceux qui en profitent: les sociétés pétrolières et leurs actionnaires, dont les profits s'envolent depuis plus d'un an, sans que le gouvernement ait jamais envisagé d'augmenter l'impôt sur les bénéfices des sociétés. Il y a ceux que cela ne gêne pas trop: les nantis pour qui les frais de carburant ou de chauffage égratignent à peine leurs revenus. Mais pour la grande masse des familles de travailleurs, des retraités, dont les salaires et les pensions étaient déjà loin de suivre l'augmentation du coût de la vie, la hausse incessante des carburants et du fioul ne peut que se traduire par une diminution insupportable de leur niveau de vie.
Les travailleurs n'ont aucun moyen d'intervenir directement sur le prix des produits pétroliers. Mais ils n'ont aucune raison non plus d'accepter d'être les victimes de cette situation. Si les salaires deviennent de plus en plus insuffisants pour leur assurer un niveau de vie décent, alors il faut exiger une revalorisation générale des salaires, pensions et retraites.
Il ne faut évidemment pas compter pour cela sur la bonne volonté du patronat, qui s'est au contraire employé, depuis des années, à réduire le niveau de vie des travailleurs afin d'augmenter ses propres profits. Ni sur celle du gouvernement actuel, ou d'un quelconque gouvernement futur, car toute l'expérience du passé montre, quels que soient les résultats des élections, que les gouvernants ne sont que les commis du grand patronat. Mais les travailleurs, sans qui rien ne serait produit, sans qui aucun service ne fonctionnerait, représentent par leur nombre, par leur place dans la vie économique, une force considérable, capable d'obliger les possédants à faire les frais des conséquences du système économique aberrant qui ne vise qu'à l'enrichissement d'une petite minorité.
Après les mauvais coups qu'ont constitués en juillet les ordonnances de de Villepin, avec en particulier le "contrat nouvelle embauche", les confédérations syndicales ont annoncé des actions pour cette rentrée de septembre. Elles n'ont peut-être pas d'autre ambition que d'être admises à discuter autour d'un tapis vert avec les représentants du patronat et du gouvernement.
Mais il faudra se servir de chacune de ces actions pour montrer au patronat, comme aux dirigeants syndicaux, que les travailleurs sont prêts à imposer par la lutte la satisfaction de revendications qui relèvent de la plus élémentaire justice sociale.
(Source http://www.lutte-ouvrière.org, le 25 août 2005)