Texte intégral
PREAMBULE
Avant d'ouvrir vos travaux, je voudrais évoquer le drame qui a frappé hier matin le monde de la pêche. Le chalutier " AN ORIANT " basé à Lorient, a sombré à 90 nautiques des côtes irlandaises, alors que les conditions météo faisaient état d'une mer grosse ; très grosse même puisque " AN ORIANT " était un chalutier de 38 mètres, emporté par une lame et coulé en quelques minutes. Le naufrage a été connu par le déclenchement de la balise 406.
11 hommes étaient à bord. 3 rescapés dont le capitaine, ont pu être sauvés. 1 homme est mort et 7 sont portés disparus.
Tous les moyens de secours ont été aussitôt mis en uvre par les autorités Irlandaises et par les autorités françaises. Ce matin un Falcon 50 français a décollé.
Je partage le deuil de la famille du marin décédé et l'angoisse des familles des marins disparus, mais tant qu'il reste un espoir, nous continuerons les recherches. Je voudrais aussi remercier, tous les patrons et équipages des navires de pêche français et espagnols qui se sont déroutés sur la zone et qui ont fait des recherches toute la nuit et qui continuent.
Une enquête du BEA mer a été ouverte et on ne peut rien dire des causes du naufrage sinon qu'il a été extrêmement rapide.
Je voudrais ici dire que la sécurité des marins pêcheurs me préoccupe beaucoup et que nous tirerons toutes les conséquences de ce que cette enquête nous apprendra pour éviter de tels drames.
J'ai appris ce matin qu'un navire de Loctudy, "l'EPERVIER" avait également fait naufrage au large des Glénans et j'ai été soulagé d'apprendre que les deux marins à bord ont été sauvés.
Mais je pense que vous comprendrez tous qu'avant d'évoquer les problèmes qui vous rassemblent ici, je consacre ces quelques mots à ce drame.
Mesdames et Messieurs
Je suis très heureux d'être ici devant le Forum Mondial des Pêches artisanales.
Je voudrais tout d'abord saluer votre initiative, celle de ce Comité de coordination qui a permis de rassembler pêcheurs artisans et travailleurs de la mer de quelques 32 nations du Monde.
C'est pour moi un plaisir de me trouver parmi vous à Loctudy, au cur du Pays Bigouden. Vous le savez tous, la pêche est ici bien plus qu'une activité économique comme une autre. Son importance économique, mais aussi sociale et culturelle l'ont placée au cur de la vie de cette région.
Aussi n'est-ce pas tout à fait le fruit du hasard si plus de deux cents participants originaires de plus d'une trentaine de pays vont aujourd'hui jeter les bases du nouveau Forum Mondial de la Pêche Artisanale. Je ne peux que me féliciter de ce que vous ayez choisi Loctudy pour la tenue de cette Assemblée Constituante. Ce choix reflète à mes yeux le dynamisme de la pêche artisanale française. Il résulte aussi de la qualité des liens qui ont pu être tissés avec les pêcheurs francophones et, au-delà, avec les pêcheurs artisans du Nord comme du Sud. Il est enfin la reconnaissance du rôle de quelque hommes et quelques femmes à l'origine de cette initiative et je pense tout particulièrement, disant cela à Danièle Le Sauce présidente de la branche française du Forum, qui a contribué tout particulièrement à faire avancer l'idée de parité hommes/femmes et à André Le Berre, le dynamique et entreprenant président du Comité local des Pêches du Guilvinec.
Les liens établis notamment l'an dernier à New Delhi sont sans aucun doute le résultat de démarches actives et volontaires de votre part. Mais ces démarches n'auraient pas abouti si le lien plus profond du métier n'unissait les pêcheurs artisans du monde entier.
C'est d'abord un métier où la solidarité entre les hommes n'est pas un vain mot, et où les uns et les autres doivent constamment trouver la voie d'une cohabitation harmonieuse. C'est, aussi, un métier qui pose très directement la question de l'équilibre entre homme et nature, entre dimension socio-économique et préservation des ressources. C'est enfin un métier dangereux, qui vous plonge quotidiennement dans un milieu naturel parfois hostile, toujours intense.
Et puis, d'autres problèmes plus prosaïques vous réunissent aussi, l'actualité de la crise du gas-oil nous le rappelle de façon criante et je ne reviendrai pas sur les conséquences des naufrages de pétroliers. La France a récemment largement donné
Les pêcheries que vous représentez sont d'une grande diversité, c'est d'ailleurs l'une de vos grandes richesses. Mais cette diversité ne doit pas occulter la similitude des problématiques qui sont les vôtres. Ce sont ces points communs qui vous réunissent aujourd'hui autour d'un objectif que je résumerai d'une phrase si vous le permettez.
Défendre les droits des communautés de pêcheurs artisans dans le cadre d'une pêche durable.
Cet objectif signifie bien sûr une bonne gestion de la ressource et le respect de l'environnement. Cela veut dire aussi qu'on agit pour que le marin pêcheur occupe toute sa place dans la société parce qu'il exerce un métier indissociable de la vie des communautés littorales et cette préoccupation, je la partage totalement.
La pêche est une des dernières grandes activités humaines à dépendre entièrement d'une ressource naturelle. Pour répondre à une demande accrue des consommateurs, le progrès des techniques a permis d'augmenter la capacité de production mais a malheureusement aussi entraîné une compétition de plus en plus dure pour l'exploitation des ressources pêchables. Et tous, nous sommes conscients de la nécessité d'une pêche raisonnée, condition de pérennité de votre métier.
Je sais que des conflits parfois très graves opposent des pêcheurs pratiquant des techniques très différentes. Mais il n'est pas question pour moi, ici, de condamner tel ou tel type de pêche pour des raisons qui n'ont pas de sérieux fondement scientifique. Les pêcheurs français le savent bien, de tels propos tenus dans certaines enceintes ont eu des conséquences regrettables.
Mais ce que je voudrais vous dire, c'est que chaque type de pêche permet d'accéder à des stocks et des zones différentes, pour des valorisations également différenciées. Et que les mesures de régulation sont indispensables pour tous, comme les TAC et quotas les mesures techniques, la sélectivité des engins, la protection des juvéniles, qu'elles constituent une boite à outil à utilisation variable selon l'état des stocks.
J'ajouterai que ces mesures peuvent être complétés par des accords de cohabitation entre métiers que les professionnels en Europe et en France connaissent bien.
L'important c'est que ces mesures de gestion ou de cohabitation soient respectées par tous pour que le capital biologique soit préservé, l'important c'est que ces mesures permettent de garantir l'activité de vos communautés de pêcheurs artisans.
C'est cet enjeu très fort qui vous réunit aujourd'hui
La pêche artisanale, s'exerce principalement dans les eaux côtières. C'est là que se situe l'essentiel des ressources exploitables.
Les pêches artisanales sont donc tout spécialement confrontées au problème de la gestion de la bande côtière. L'accès tout d'abord, qui est la condition première de votre activité. La cohabitation ensuite, pour laquelle des solutions pragmatiques et respectueuses des différents métiers doivent être constamment trouvées, comme je viens de le souligner. L'environnement enfin, car ces eaux constituent la zone où se reproduisent de nombreuses espèces dont la préservation doit être assurée. Je pense plus particulièrement aux problèmes de pollution côtière et d'aménagements divers auxquels vous êtes tous confrontés. Cette problématique a amené le Gouvernement français à élaborer à la demande du Parlement un rapport sur l'exercice de la pêche dans la bande côtière. Celui-ci devrait permettre de progresser dans la mise en place des outils adéquats d'une gestion durable de cette zone pivot de l'espace maritime.
Je m'arrêterai un moment sur l'accès à la ressource :
Le régime d'accès aux pêcheries est un thème central de l'exploitation durable des ressources biologiques marines. Certains Etats considèrent que la privatisation de la ressource par le biais des quotas individuels transférables constitue la bonne solution. Pour ma part, cette approche me paraît être de nature à concentrer les capitaux et à remettre en cause l'emploi. C'est pourquoi en France, par la Loi, nous avons choisi de maintenir le caractère de bien collectif des ressources halieutiques et le rôle régulateur de l'Etat dans la répartition des autorisations de pêche et de quota de captures. Leur caractère non cessible est établi afin d'éviter leur patrimonialisation pour garantir les équilibres économiques et sociaux des zones littorales qui vivent de la pêche.
Autre point commun, la nature de vos entreprises. Entreprises familiales, basées sur la responsabilité individuelle, leurs responsables sont amenés à embrasser plusieurs métiers à la fois, celui de marin pêcheur d'abord, mais aussi celui de commerçant et celui de gestionnaire. A cet égard, on ne rappellera jamais assez le rôle que jouent vos conjointes, ici largement représentées, dans la gestion de vos entreprises, mais aussi dans les fonctions les plus diverses de la production jusqu'à la mise en marché. Il est nécessaire que leur place soit reconnue économiquement et socialement. Un premier pas a été fait en France avec l'adoption du statut de conjoint. On peut sans doute aller plus loin en reconnaissant aux conjointes une place dans les organisations professionnelles. Ce forum en donne l'exemple aujourd'hui.
Toujours au chapitre des problématiques qui vous sont communes, j'évoquerai le modèle de développement qui vous est propre. La pêche artisanale est en effet certainement la mieux placée pour développer l'emploi dans des conditions sociales dignes, loin d'un productivisme débridé qui oublierait que l'homme doit être au cur de nos préoccupations, que le respect de l'environnement est un enjeu majeur et que le consommateur a droit à la qualité et à la sécurité sanitaire de son alimentation. Votre modèle de production, intègre au contraire ces enjeux.
Je n'omettrai pas la diversité des rôles joués par la pêche artisanale, de l'économique au social en passant par le territorial et le culturel. Derrière votre activité, c'est la vie des ports qui est en jeu, et aussi la vie d'une mosaïque de régions littorales et le maintien de vos communautés.
Enfin je sais que la pêche est dans de nombreux pays, et je pense en particulier aux pays du sud, une activité essentielle non seulement pour l'approvisionnement des populations en protéines animales de qualité mais aussi pour leur développement économique. C'est également autour de la pêche et dépendant d'elle que se sont structurées des communautés d'hommes et de femmes : Au Nord comme au Sud. Ce sont autant d'emplois qu'il faut maintenir mais auxquels il faut aussi assurer la meilleure qualification grâce à la formation professionnelle.
Certains d'entre vous savent qu'une grande réflexion est amorcée en Europe pour la rénovation de la politique commune de la pêche qui aura lieu en 2002.
La réflexion a déjà été entreprise côté français. Je n'ai pas l'intention de lancer ici un débat sur ce que seront les priorités de la France. Soyez sûrs, en tous les cas, que je m'attacherai à défendre une politique des pêches qui assure le bon équilibre entre l'indispensable gestion durable des ressources halieutiques et le non moins nécessaire maintien d'une activité de pêche vivante. Je suis persuadé qu'il faudra à l'avenir développer et promouvoir les multifonctionnalités de la pêche. A côté de sa fonction économique, qui doit demeurer prééminente, il conviendra de prendre plus en compte les dimensions environnementales dans le cadre d'une approche globale de la gestion de la ressource, la qualité des produits, les dimensions sociales et littorales de cette activité. La pêche artisanale me paraît tout à fait à même d'incarner cette synthèse.
Il me reste à vous souhaiter un plein succès pour ces journées de travail. Je suis bien certain que vos débats dégageront des perspectives utiles pour l'avenir de la pêche artisanale et permettront de resserrer encore les liens entre les marins pêcheurs que vous êtes tous.
(source http://www.agriculture.gouv.fr, le 11 octobre 2000)
Avant d'ouvrir vos travaux, je voudrais évoquer le drame qui a frappé hier matin le monde de la pêche. Le chalutier " AN ORIANT " basé à Lorient, a sombré à 90 nautiques des côtes irlandaises, alors que les conditions météo faisaient état d'une mer grosse ; très grosse même puisque " AN ORIANT " était un chalutier de 38 mètres, emporté par une lame et coulé en quelques minutes. Le naufrage a été connu par le déclenchement de la balise 406.
11 hommes étaient à bord. 3 rescapés dont le capitaine, ont pu être sauvés. 1 homme est mort et 7 sont portés disparus.
Tous les moyens de secours ont été aussitôt mis en uvre par les autorités Irlandaises et par les autorités françaises. Ce matin un Falcon 50 français a décollé.
Je partage le deuil de la famille du marin décédé et l'angoisse des familles des marins disparus, mais tant qu'il reste un espoir, nous continuerons les recherches. Je voudrais aussi remercier, tous les patrons et équipages des navires de pêche français et espagnols qui se sont déroutés sur la zone et qui ont fait des recherches toute la nuit et qui continuent.
Une enquête du BEA mer a été ouverte et on ne peut rien dire des causes du naufrage sinon qu'il a été extrêmement rapide.
Je voudrais ici dire que la sécurité des marins pêcheurs me préoccupe beaucoup et que nous tirerons toutes les conséquences de ce que cette enquête nous apprendra pour éviter de tels drames.
J'ai appris ce matin qu'un navire de Loctudy, "l'EPERVIER" avait également fait naufrage au large des Glénans et j'ai été soulagé d'apprendre que les deux marins à bord ont été sauvés.
Mais je pense que vous comprendrez tous qu'avant d'évoquer les problèmes qui vous rassemblent ici, je consacre ces quelques mots à ce drame.
Mesdames et Messieurs
Je suis très heureux d'être ici devant le Forum Mondial des Pêches artisanales.
Je voudrais tout d'abord saluer votre initiative, celle de ce Comité de coordination qui a permis de rassembler pêcheurs artisans et travailleurs de la mer de quelques 32 nations du Monde.
C'est pour moi un plaisir de me trouver parmi vous à Loctudy, au cur du Pays Bigouden. Vous le savez tous, la pêche est ici bien plus qu'une activité économique comme une autre. Son importance économique, mais aussi sociale et culturelle l'ont placée au cur de la vie de cette région.
Aussi n'est-ce pas tout à fait le fruit du hasard si plus de deux cents participants originaires de plus d'une trentaine de pays vont aujourd'hui jeter les bases du nouveau Forum Mondial de la Pêche Artisanale. Je ne peux que me féliciter de ce que vous ayez choisi Loctudy pour la tenue de cette Assemblée Constituante. Ce choix reflète à mes yeux le dynamisme de la pêche artisanale française. Il résulte aussi de la qualité des liens qui ont pu être tissés avec les pêcheurs francophones et, au-delà, avec les pêcheurs artisans du Nord comme du Sud. Il est enfin la reconnaissance du rôle de quelque hommes et quelques femmes à l'origine de cette initiative et je pense tout particulièrement, disant cela à Danièle Le Sauce présidente de la branche française du Forum, qui a contribué tout particulièrement à faire avancer l'idée de parité hommes/femmes et à André Le Berre, le dynamique et entreprenant président du Comité local des Pêches du Guilvinec.
Les liens établis notamment l'an dernier à New Delhi sont sans aucun doute le résultat de démarches actives et volontaires de votre part. Mais ces démarches n'auraient pas abouti si le lien plus profond du métier n'unissait les pêcheurs artisans du monde entier.
C'est d'abord un métier où la solidarité entre les hommes n'est pas un vain mot, et où les uns et les autres doivent constamment trouver la voie d'une cohabitation harmonieuse. C'est, aussi, un métier qui pose très directement la question de l'équilibre entre homme et nature, entre dimension socio-économique et préservation des ressources. C'est enfin un métier dangereux, qui vous plonge quotidiennement dans un milieu naturel parfois hostile, toujours intense.
Et puis, d'autres problèmes plus prosaïques vous réunissent aussi, l'actualité de la crise du gas-oil nous le rappelle de façon criante et je ne reviendrai pas sur les conséquences des naufrages de pétroliers. La France a récemment largement donné
Les pêcheries que vous représentez sont d'une grande diversité, c'est d'ailleurs l'une de vos grandes richesses. Mais cette diversité ne doit pas occulter la similitude des problématiques qui sont les vôtres. Ce sont ces points communs qui vous réunissent aujourd'hui autour d'un objectif que je résumerai d'une phrase si vous le permettez.
Défendre les droits des communautés de pêcheurs artisans dans le cadre d'une pêche durable.
Cet objectif signifie bien sûr une bonne gestion de la ressource et le respect de l'environnement. Cela veut dire aussi qu'on agit pour que le marin pêcheur occupe toute sa place dans la société parce qu'il exerce un métier indissociable de la vie des communautés littorales et cette préoccupation, je la partage totalement.
La pêche est une des dernières grandes activités humaines à dépendre entièrement d'une ressource naturelle. Pour répondre à une demande accrue des consommateurs, le progrès des techniques a permis d'augmenter la capacité de production mais a malheureusement aussi entraîné une compétition de plus en plus dure pour l'exploitation des ressources pêchables. Et tous, nous sommes conscients de la nécessité d'une pêche raisonnée, condition de pérennité de votre métier.
Je sais que des conflits parfois très graves opposent des pêcheurs pratiquant des techniques très différentes. Mais il n'est pas question pour moi, ici, de condamner tel ou tel type de pêche pour des raisons qui n'ont pas de sérieux fondement scientifique. Les pêcheurs français le savent bien, de tels propos tenus dans certaines enceintes ont eu des conséquences regrettables.
Mais ce que je voudrais vous dire, c'est que chaque type de pêche permet d'accéder à des stocks et des zones différentes, pour des valorisations également différenciées. Et que les mesures de régulation sont indispensables pour tous, comme les TAC et quotas les mesures techniques, la sélectivité des engins, la protection des juvéniles, qu'elles constituent une boite à outil à utilisation variable selon l'état des stocks.
J'ajouterai que ces mesures peuvent être complétés par des accords de cohabitation entre métiers que les professionnels en Europe et en France connaissent bien.
L'important c'est que ces mesures de gestion ou de cohabitation soient respectées par tous pour que le capital biologique soit préservé, l'important c'est que ces mesures permettent de garantir l'activité de vos communautés de pêcheurs artisans.
C'est cet enjeu très fort qui vous réunit aujourd'hui
La pêche artisanale, s'exerce principalement dans les eaux côtières. C'est là que se situe l'essentiel des ressources exploitables.
Les pêches artisanales sont donc tout spécialement confrontées au problème de la gestion de la bande côtière. L'accès tout d'abord, qui est la condition première de votre activité. La cohabitation ensuite, pour laquelle des solutions pragmatiques et respectueuses des différents métiers doivent être constamment trouvées, comme je viens de le souligner. L'environnement enfin, car ces eaux constituent la zone où se reproduisent de nombreuses espèces dont la préservation doit être assurée. Je pense plus particulièrement aux problèmes de pollution côtière et d'aménagements divers auxquels vous êtes tous confrontés. Cette problématique a amené le Gouvernement français à élaborer à la demande du Parlement un rapport sur l'exercice de la pêche dans la bande côtière. Celui-ci devrait permettre de progresser dans la mise en place des outils adéquats d'une gestion durable de cette zone pivot de l'espace maritime.
Je m'arrêterai un moment sur l'accès à la ressource :
Le régime d'accès aux pêcheries est un thème central de l'exploitation durable des ressources biologiques marines. Certains Etats considèrent que la privatisation de la ressource par le biais des quotas individuels transférables constitue la bonne solution. Pour ma part, cette approche me paraît être de nature à concentrer les capitaux et à remettre en cause l'emploi. C'est pourquoi en France, par la Loi, nous avons choisi de maintenir le caractère de bien collectif des ressources halieutiques et le rôle régulateur de l'Etat dans la répartition des autorisations de pêche et de quota de captures. Leur caractère non cessible est établi afin d'éviter leur patrimonialisation pour garantir les équilibres économiques et sociaux des zones littorales qui vivent de la pêche.
Autre point commun, la nature de vos entreprises. Entreprises familiales, basées sur la responsabilité individuelle, leurs responsables sont amenés à embrasser plusieurs métiers à la fois, celui de marin pêcheur d'abord, mais aussi celui de commerçant et celui de gestionnaire. A cet égard, on ne rappellera jamais assez le rôle que jouent vos conjointes, ici largement représentées, dans la gestion de vos entreprises, mais aussi dans les fonctions les plus diverses de la production jusqu'à la mise en marché. Il est nécessaire que leur place soit reconnue économiquement et socialement. Un premier pas a été fait en France avec l'adoption du statut de conjoint. On peut sans doute aller plus loin en reconnaissant aux conjointes une place dans les organisations professionnelles. Ce forum en donne l'exemple aujourd'hui.
Toujours au chapitre des problématiques qui vous sont communes, j'évoquerai le modèle de développement qui vous est propre. La pêche artisanale est en effet certainement la mieux placée pour développer l'emploi dans des conditions sociales dignes, loin d'un productivisme débridé qui oublierait que l'homme doit être au cur de nos préoccupations, que le respect de l'environnement est un enjeu majeur et que le consommateur a droit à la qualité et à la sécurité sanitaire de son alimentation. Votre modèle de production, intègre au contraire ces enjeux.
Je n'omettrai pas la diversité des rôles joués par la pêche artisanale, de l'économique au social en passant par le territorial et le culturel. Derrière votre activité, c'est la vie des ports qui est en jeu, et aussi la vie d'une mosaïque de régions littorales et le maintien de vos communautés.
Enfin je sais que la pêche est dans de nombreux pays, et je pense en particulier aux pays du sud, une activité essentielle non seulement pour l'approvisionnement des populations en protéines animales de qualité mais aussi pour leur développement économique. C'est également autour de la pêche et dépendant d'elle que se sont structurées des communautés d'hommes et de femmes : Au Nord comme au Sud. Ce sont autant d'emplois qu'il faut maintenir mais auxquels il faut aussi assurer la meilleure qualification grâce à la formation professionnelle.
Certains d'entre vous savent qu'une grande réflexion est amorcée en Europe pour la rénovation de la politique commune de la pêche qui aura lieu en 2002.
La réflexion a déjà été entreprise côté français. Je n'ai pas l'intention de lancer ici un débat sur ce que seront les priorités de la France. Soyez sûrs, en tous les cas, que je m'attacherai à défendre une politique des pêches qui assure le bon équilibre entre l'indispensable gestion durable des ressources halieutiques et le non moins nécessaire maintien d'une activité de pêche vivante. Je suis persuadé qu'il faudra à l'avenir développer et promouvoir les multifonctionnalités de la pêche. A côté de sa fonction économique, qui doit demeurer prééminente, il conviendra de prendre plus en compte les dimensions environnementales dans le cadre d'une approche globale de la gestion de la ressource, la qualité des produits, les dimensions sociales et littorales de cette activité. La pêche artisanale me paraît tout à fait à même d'incarner cette synthèse.
Il me reste à vous souhaiter un plein succès pour ces journées de travail. Je suis bien certain que vos débats dégageront des perspectives utiles pour l'avenir de la pêche artisanale et permettront de resserrer encore les liens entre les marins pêcheurs que vous êtes tous.
(source http://www.agriculture.gouv.fr, le 11 octobre 2000)