Interview de M. Jean-François Copé, secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement, porte-parole du gouvernement et candidat UMP à la présidence de la région Ile-de-France, à Europe 1 le 22 mars 2004, sur les résultats du premier tour de l'élection régionale en Ile-de-France et sur les accords entre l'UMP et l'UDF pour le deuxième tour.

Prononcé le

Circonstance : Elections régionales et cantonales les 21 et 28 mars 2004

Média : Europe 1

Texte intégral

J.-P. Elkabbach - Vous avez deux rôles : porte-parole du Gouvernement, vous avez lu la presse comme nous - "Sanction", le Parisien, la Tribune ; "Sale tour pour Raffarin", Libération ; "Sévère avertissement", Les Echos - etc. "Choc du premier tour", le Figaro. Est-il possible de casser, d'inverser une telle dynamique de la gauche ?
R - "Le principe d'une élection à deux tours, c'est que, voilà, nous avons un lendemain de premier tour qui est difficile, et je crois que c'est le moment ou jamais d'en appeler à la mobilisation générale pour le second. C'est vrai que le résultat est évidemment difficile dans un certain nombre de régions, sauf, peut-être, dans la mienne, en Ile-de-France, où il y a un vrai espoir de gagner."
J.-P. Elkabbach - Deux ans après 2002, pourquoi cette humeur du pays à votre égard, collectivement, cette sanction, et qui concerne aussi l'UMP ?
R - "Je crois qu'il y a mille raisons, et puis il faut un petit peu de recul pour regarder tout cela dans le détail. Mais, comme cela, un peu à chaud, j'ai envie de dire que, voilà, cela fait 20 mois que nous sommes en action. Nous avons lancé beaucoup de chantiers, l'essentiel d'entre eux a été ouvert, mais tous ne sont pas achevés. Je crois que les Français sont en attente de résultats pour être convaincus de la justesse de ce que faisons. A nous d'expliquer."
J.-P. Elkabbach - Mais devient-il urgent de stopper, d'accélérer les réformes ou peut-être de mieux les faire et les présenter ?
R - "Il faut toujours mieux faire, il faut toujours tirer les enseignements des difficultés que nous rencontrons. Je crois que c'est aussi cela qu'il faut tirer comme leçon de cette élection. Je voudrais ajouter un mot : il y a un travail d'explication, constant à faire sur nos réformes. Il faut en expliquer la justesse, le fondement et la nécessité."
J.-P. Elkabbach- En tout cas parfois mieux les faire, si l'on prend l'exemple des chercheurs,
non ?
R - "Oui sans doute."
J.-P. Elkabbach - Parce que, comme disait A. Rousset et d'autres leaders de la gauche, le conflit des chercheurs vous a coûté cher ?
R - "Sans doute, J.-P. Elkabbach. Mais enfin, après, il faut en appeler chacun à ses responsabilités, à ses réflexions personnelles. Quel est le message ? Voilà une communauté scientifique, de très haut niveau, à qui les responsables politiques n'ont pas parlé depuis 20 ans. Il est temps sans doute de le faire autrement qu'avec une approche strictement de moyens. Nous avons mis sur la table des moyens comme aucun gouvernement n'a fait avant pour l'avenir. Et nous disons en même temps : réfléchissons à une modernisation de notre appareil de recherche Travaillons-y au calme après les élections."
J.-P. Elkabbach - Globalement, comment rectifier le tir, d'urgence pour vous tous ?
R - "Je crois que, pour ce qui nous concerne, le premier message, c'est un appel à la mobilisation de notre électorat. Je vois bien en Ile-de-France, quand on bouge, quand on est sur le terrain, quand on fait un tandem sur de l'action, sur des mots-clés, comme "l'efficacité", "l'obligation de résultats", les gens l'entendent et le FN recule."
J.-P. Elkabbach - Ce matin, justement, répétez-vous, comme P. Douste-Blazy : "Voter FN, c'est voter pour la gauche" ?
R - "Absolument. Je peux en témoigner, puisqu'ici, en Ile-de-France, le FN a reculé. Peut-être aussi, parce que le tandem que je forme avec N. Sarkozy est sur le thème de l'action, notamment dans le domaine de la sécurité. Donc les gens voient que l'on a envie de prendre à bras-le-corps des problèmes."
J.-P. Elkabbach - Que dites-vous à ceux qui écrivent, comme S. July, dans Libération : "Bye bye Raffarin" ?
R - "Je crois que cela relève du commentaire de ceux qui peuvent le souhaiter. Mais il y en a beaucoup qui ne le souhaitent pas. On verra bien ce qu'il en sera. Ce n'est pas de ma responsabilité. Mais voyez-vous, dans l'équation de ce deuxième tour, j'insiste là-dessus : il y a, bien sûr, le score de la gauche à regarder, qui a été un discours finalement très protestataire, pas très constructif, ce sera le travail de la gauche. Mais pour ce qui nous concerne, je vois bien aussi que le FN, effectivement, veut faire passer la gauche d'une certaine manière. Donc, c'est important pour nous d'appeler les électeurs qui ont voté au FN au premier tour, de bien comprendre que, s'ils le font au deuxième, cela fait passer la gauche."
J.-P. Elkabbach - F. Bayrou vous a-t-il fait du tort, du mal ?
R - "Aujourd'hui, l'heure est à la conciliation, à la réconciliation. En tout cas ce que je peux vous dire, c'est qu'en Ile-de-France, il y a une dynamique de victoire parce que justement avec A. Santini, on a fait dans la modération au premier tour et qu'on a envie de gagner au deuxième."
J.-P. Elkabbach - C'est drôle, vous êtes Porte-parole du Gouvernement, et c'est la question que je poserai aussi à D. Strauss-Kahn : le Gouvernement est sanctionné, son porte-parole a encore des chances. Vous avez une tête de symbole ce matin. Vous arrivez en tête, vous pensez que vous avez encore des chances. Que vous faut-il ou vous faudrait-il ?
R - "De l'énergie, j'en ai, et de la détermination à remporter cette région Ile-de-France, qui est un symbole des réformes que nous voulons essayer de mettre en oeuvre, de l'action, de l'efficacité publique, et donc de voir le FN baisser. Ce qu'il nous faut maintenant, c'est la mobilisation générale de tous ceux qui ont envie de rompre avec le système ancien. Je suis dans cette logique de rompre avec le système ancien, d'avancer à l'ancienneté, sans véritablement marquer."
J.-P. Elkabbach - Qu'est-ce que le système ancien ?
R - "Le système ancien, c'est finalement l'idée qu'a le président socialiste sortant de cette région, c'est-à-dire, être un peu un notable anonyme et penser que l'on peut avancer à l'ancienneté sans qu'il ne se passe rien d'important. Je pense que l'heure est venue de changer cela."
J.-P. Elkabbach - L'UDF, A. Santini, vous promet maintenant, évidemment, son soutien, même conditionnel. Le report de voix, à la fois en Ile-de-France et ailleurs peut se faire à l'intérieur de la droite ?
R - "Je le souhaite de tout coeur. En tout cas, c'est un bon exemple l'Ile-de-France pour cela. Parce que, d'une certaine manière, nous, si on continue à être dans le concret, si on continue à parler de notre projet dans le domaine de la sécurité, des transports, des logements, c'est-à-dire, ce que demandent les gens en Ile-de-France, et montrer que l'on est sur la même ligne avec l'UDF sur tous ces sujets, alors il y a une dynamique de victoire."
J.-P. Elkabbach - J.-P. Huchon va faire un meeting, il le disait hier soir ici, jeudi au Zénith, avec DSK, des leaders du PS. Et vous, que faites-vous ?
R - "Nous, nous serons au Palais des congrès, jeudi soir, à la même heure, pour effectivement mobiliser nos troupes, avec des messages forts, je crois pour l'avenir de cette région."
J.-P. Elkabbach - A tous les deux, une même question pour finir, pour vous, J.-F. Copé. Dans l'actualité, il y a un fait aux multiples conséquences au Proche-Orient et qui commence avec des tas de manifestations dans différents pays du Proche-Orient : c'est sur ordre personnel d'A. Sharon que l'armée israélienne a tué le Cheikh Yacine, un chef spirituel, mais surtout un inspirateur des attentats en Israël. Qu'en pensez-vous ?
R - "D'abord, je dois dire que je n'ai pas suffisamment d'informations précises sur ce sujet à ce stade. La seule chose que je peux dire c'est que, c'est la conséquence de ces enchaînements tragiques qui se succèdent dans un Proche-Orient déchiré. A quand une solution politique ?"
J.-P. Elkabach - Merci, J.-F. Copé.
(source : Premier ministre, Service d'information du gouvernement, le 22 mars 2004)