Déclaration de M. François Huwart, secrétaire d'Etat au commerce extérieur, sur l'évolution des relations économiques entre la France et le Kazakhstan, Almaty, le 4 octobre 2000

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Circonstance : 5ème rencontre intergouvernementale France-Kazakhstan à Almaty, au Kazakhstan, le 4 octobre 2000

Texte intégral

Monsieur le Ministre,
Mesdames et Messieurs,
Permettez-moi avant toute chose de remercier M. Chkolnik pour son accueil et les mots de bienvenue qu'il vient de prononcer.
Je suis particulièrement heureux, Monsieur le Ministre, d'inaugurer en votre compagnie la Commission Mixte entre nos deux pays. Le Groupe de Travail Intergouvernemental France-Kazakhstan se réunit pour la cinquième fois. Déjà, Notre cinquième rencontre, suis-je tenté d'ajouter. Je suis donc satisfait de constater que la collaboration entre nos deux pays trouve désormais son rythme de croisière. Je veux souligner par ma présence ici à l'Académie des Sciences d'Almaty, les liens d'amitié qui sont en train de se tisser entre nos deux pays. Des liens qui ont pris la forme d'un jumelage, dès 1991, entre Almaty et la ville de Rennes. Des liens noués au plus haut niveau en septembre 1993 lors de la visite du Président François Mitterrand au Kazakhstan. Des liens sans cesse renforcés depuis, ainsi qu'en témoigne la visite du Président Nazarbaev à Paris en juin dernier.
Sur un plan plus personnel, cette satisfaction se double du plaisir que j'éprouve à effectuer mon premier voyage au Kazakhstan. Je ne vous cacherai pas, Monsieur le Ministre, la part de rêve que la simple évocation de votre pays peut susciter. Cette part de rêve habitait certainement la grande voyageuse Ella Maillart dans son périple des monts célestes aux sables rouges de Kizil-Koum, périple qui la mena en 1932 jusqu'à Alma-Ata. Cette part de rêve que suscite le Kazakhstan, tous les amoureux de cartes et d'estampes l'ont partagée. Ce n'est pas vous, Monsieur de Montesquiou, dont je sais l'attachement à ce pays, qui me contredirez.
En effet, le plaisir de cette visite au Kazakhstan, je le partage avec deux parlementaires français, Monsieur de Montesquiou et Monsieur André. Ils ont tenu à m'accompagner. Et je vois dans leur présence à mes côtés le signe fort que les élus du peuple français sont aussi sensibles que mon gouvernement au développement des relations entre nos deux pays. Permettez-moi de saisir cette occasion pour les en remercier très sincèrement.
Un autre signe fort de l'intérêt de la France pour votre pays est le nombre et la qualité des entreprises françaises qui sont représentées aujourd'hui. Vous l'avez remarqué, je suis venu fort bien accompagné. Total Fina Elf, Vivendi, Sogea, Thomson, BRGM, Bull, Alstom, Bouygues. Je suis désolé de ne pouvoir toutes les citer. Leur seule présence témoigne de la volonté des milieux d'affaires français de travailler avec le Kazakhstan. La diversité des industriels représentés témoigne également que leur intérêt n'est pas motivé exclusivement par vos ressources énergétiques. Je peux vous affirmer que la France souhaite augmenter le volume et la diversité de ses échanges avec le Kazakhstan.
Je le répète, les liens entre nos deux pays sont plus forts que le volume encore modeste de nos échanges commerciaux pourraient le laisser supposer. Il existe, je crois une curiosité mutuelle entre deux pays qui voudraient se connaître mieux. Je peux témoigner en tout cas de la curiosité de mes compatriotes pour le Kazakhstan. Votre pays est jeune, mais son histoire est ancienne et votre territoire immense. La France est cinq fois plus petite en superficie que le Kazakhstan : elle rêve naturellement à cet horizon sans fin qui toujours recommence. Jeune, votre pays montre pourtant une volonté forte d'affirmer son existence et d'assurer son développement. La France et le Kazakhstan partagent le même désir de participer de manière pacifique et constructive aux relations internationales.
Pacifique, l'histoire de France ne l'a pas toujours été, loin de là. Au cours des siècles, la guerre a scandé nos relations avec nos voisins. Pourtant depuis cinquante ans, le cours de notre histoire s'est apaisé, par la grâce d'une révolution patiente : celle de la construction européenne. Avec nos ennemis et nos rivaux d'hier, nous nous efforçons de construire une communauté de nations. La tâche n'est ni aisée ni rapide. Nous ne prétendons pas saborder nos nations mais simplement lier nos destins.
Mais, je le sais aussi, cette construction n'est pas encore parfaite et ne simplifie pas toujours nos relations extérieures. Pour le Kazakhstan, il n'est pas toujours simple de trouver le bon interlocuteur quand certains dossiers sont traités à Paris et d'autres à Bruxelles. Je me félicite néanmoins que la plupart des discussions en cours avec Bruxelles, en particulier concernant la réglementation anti-dumping sur les produits métallurgiques, avancent à la satisfaction de toutes la parties. C'est une question que vous évoquerez peut-être au cours de la réunion d'aujourd'hui. Si des difficultés persistent dans ce domaine n'hésitez pas à les évoquer. La France, vous le savez, assure jusqu'à la fin de cette année la présidence de l'Union Européenne et se fera votre interprète auprès de ses partenaires.
Mais la construction européenne n'est pas la seule mutation que connaît la France aujourd'hui. J'en citerai deux autres d'importance.
La première concerne notre Etat. De nos rois et d'un Empereur, nous avions hérité une tradition forte de centralisme. Or l'Etat français aujourd'hui se réforme.
La démocratie a certainement besoin d'un Etat fort, mais pas d'un Etat omniprésent ou omnipotent. Un processus ambitieux de décentralisation a été lancé dès 1982, par lequel l'Etat a délégué un certain nombre de ses tâches à des collectivités territoriales et locales élues. Ce processus doit être poussé plus avant encore, à l'image de ce que nos voisins allemands ou espagnols ont entrepris. Par ailleurs, comme le Kazakhstan, l'Etat français se désengage progressivement des tâches de production de biens et de services marchands. Mais pas plus ces privatisations que la décentralisation ne signifient que l'Etat abandonne ses fonctions essentielles de garant de l'unité nationale.
Autre mutation décisive que nous connaissons comme beaucoup d'autres pays, celle de la mondialisation et des nouveaux réseaux de communication. Cette mutation touche nos entreprises nos administrations et nos citoyens. Nous en percevons l'influence sur nos modes de vie, sur notre façon de travailler et de communiquer. Dans un pays aussi grand que le Kazakhstan, ces réseaux de communication sont une chance formidable. Tout à la fois outil précieux au service de la communauté et ouverture sur le monde, l'Internet peut permettre au Kazakhstan d'occuper la place qu'il mérite dans le village mondial qui se dessine. Les entreprises françaises sont souvent aux avants-postes dans ces nouvelles technologies de l'information et de la communication. Je peux vous affirmer qu'elles ont la volonté de mettre leur savoir faire technologique et leurs compétences au service du Kazakhstan pour lui permettre d'accéder dans les meilleure conditions à l'économie mondialisée.
A cet égard, je dois me féliciter de la coopération économique déjà en place entre nos deux pays. Nos relations économiques se développent dans les domaines de l'agriculture, de l'électronique, de l'environnement, de l'énergie ou de la défense. D'ailleurs, nous devons signer ce soir des accords qui portent sur le financement d'un projet de gestion des eaux de la ville d'Almaty par une joint-venture entre Vivendi et le Vodokanal. Un autre accord est prévu avec l'entreprise BRGM, il porte sur l'environnement et la démercurisation du site de Pavlodar. Les investissements de la société Total Fina Elf dans l'OKIOC sont eux aussi l'expression d'un partenariat ancien et profond. Mais, je crois que nous avons, les uns et les autres, beaucoup à gagner à renforcer et à diversifier cette coopération. La présence de la France au Kazakhstan reste malgré tout insuffisante et nous ne pouvons pas nous satisfaire d'une part de marché de 1% dans votre pays. En qualité de responsable du commerce extérieur français, vous ne m'en voudrez pas de noter que nos échanges sont déséquilibrés. En 1999, le Kazakhstan a vendu trois fois plus qu'il n'a acheté à la France. Nous devons donc redoubler d'efforts pour stimuler nos relations commerciales. En tout cas, ne doutez pas de la détermination des entreprises françaises à venir prospecter au Kazakhstan et à travailler avec vous. L'importance des investissements français dans votre pays en témoigne. En 1998, les investissements directs de nos entreprises au Kazakhstan se sont élevés à 248 millions de francs. Mais la sécurité juridique doit rester une priorité car elle est un élément clé aux yeux des investisseurs. A cet égard, comme je l'ai souligné tout à l'heure, je suis satisfait de l'entrée en vigueur le 21 août dernier de l'accord sur la protection réciproque des investissements entre la France et le Kazakhstan.
Le Kazakhstan s'affirme désormais comme le pays émergent d'Asie Centrale, le pays où les perspectives économiques sont les plus prometteuses. En effet, le Kazakhstan a relativement bien résisté aux conséquences de la crise financière russe de 1998. Cela témoigne des réformes entreprises et de la confiance des acteurs économiques et financiers dans ce processus. Je crois que ces bons résultats doivent surtout encourager les autorités Kazakhes à poursuivre leurs efforts afin de ne pas être trop dépendantes de l'activité pétrolière qui reste soumise à des fluctuations importantes. En outre, la crédibilité de ce processus de réforme mené par les autorités kazakhes sera d'autant plus grande qu'elles sauront travailler en étroite association avec les institutions financières internationales.
Mais permettez-moi pour conclure de souhaiter bonne chance et bon travail surtout à cette Commission Mixte entre nos deux pays qui se réunit pour la cinquième fois.
J'ai demandé à M. Bertrand de Cordoue, de mon ministère, d'être le coordinateur de la délégation française participant à cette réunion. Lui-même et les autres membres de la délégation française ont préparé cette réunion avec le plus grand soin. Je sais leur volonté de collaborer de manière aussi ouverte et fructueuse que possible. Nous devons aujourd'hui franchir une étape dans nos relations bilatérales. Je souhaite donc un plein succès à vos travaux. Qu'ils inaugurent une nouvelle période des relations entre la France et le Kazakhstan.

(Source http://www.commerce-exterieur.gouv.fr, le 11 octobre 2000)