Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,
Je suis honorée d'être parmi vous aujourd'hui en cette journée qui clôture les travaux de votre 55è congrès par la traditionnelle rencontre avec les pouvoirs publics, à un moment où nous avons particulièrement besoin de nous concerter.
La politique de soutien au cinéma telle qu'elle s'est développée et consolidée dans notre pays, depuis maintenant plus de cinquante ans, a peu à peu pris en considération la dimension spécifique du " spectacle cinématographique " et son caractère irremplaçable. L'aide à l'exploitation, rare chez nos voisins étrangers, est ainsi devenue un des piliers de notre système d'aides.
Il y a en effet peu de lieux sur notre territoire où le cinéma n'est pas aisément accessible grâce à ce parc de près de 5000 écrans, le premier d'Europe.
Quant au niveau de la fréquentation, souvenez-vous de l'année noire de 1992 avec seulement 116 millions d'entrées. Aujourd'hui, nous sommes sur une croissance soutenue de la fréquentation. L'année 2000 devrait confirmer ce mouvement, avec au moins 164 millions d'entrées.
La part de marché du cinéma français se situe autour d'un tiers des entrées et est très supérieure à celle des cinématographies nationales de nos voisins européens.
Notre production cinématographique est respectée et appréciée dans le monde entier, comme le montrent constamment les sélections des festivals internationaux, et en dernier lieu, celles de Locarno, de Montréal ou de Venise.
En outre, l'été cinématographique n'a pas été cette année, pour la production française, la catastrophe absolue commentée par certains esprits chagrins. Il a été au contraire un exemple de diversité dans ses succès. Le spectateur aura eu, cet été, un registre étendu de films français de caractères très différents. Au total, dans cette période, les films français auront attiré deux fois plus de spectateurs que l'année précédente.
J'ai néanmoins conscience que, sur certaines périodes de l'année, l'offre de films français, notamment ceux qui sont susceptibles d'attirer le public le plus large, est encore rare et irrégulière. Il faut s'interroger sur ce phénomène dans un contexte où, pourtant, le nombre de films français produits chaque année a augmenté sensiblement avec un rythme annuel de 150 uvres, dont la quasi-totalité est distribuée en salles.
Pourtant les films français sont plus que jamais capables d'entraîner des spectateurs en grand nombre vers les salles, nous n'avons pas à en douter.
I - Aujourd'hui, pour ce qui concerne le secteur de l'exploitation, les perspectives économiques sont positives, compte tenu de la croissance de la fréquentation. Et cependant, nous partageons de fortes inquiétudes.
Je sais qu'en dépit de cette conjoncture favorable, votre Congrès est, depuis quelques années le théâtre de débats vifs sur l'évolution actuelle de notre parc cinématographique et de l'économie d'un secteur qui a connu de manière accélérée, ces dernières années, une mutation profonde avec un double mouvement.
- celui de l'investissement dans de nouveaux équipements, les multiplexes ; mais aussi un vaste mouvement de rénovation de salles existantes, soutenu par les pouvoirs publics
- celui de l'instauration de nouvelles relations avec le public, en terme de politique commerciale et de fidélisation des publics.
Face à ce contexte, les pouvoirs publics sont très vigilants.
Sans entraver un développement qui est indispensable au cinéma dans son ensemble, les pouvoirs publics doivent veiller à l'équilibre général de l'industrie cinématographique, au maintien de la diversité des lieux d'accès au cinéma - des cinémas de proximité et de centre ville en particulier - et bien sûr à la diversité de la programmation des films.
Ainsi, il faut absolument prévenir une situation de suréquipement telle que celle que connaît aujourd'hui l'exploitation aux Etats-Unis. Il ne faut pas que le développement immodéré et non régulé des multiplexes entraîne l'ensemble du secteur dans des tensions concurrentielles aux conséquences néfastes pour tous.
Aujourd'hui les multiplexes, représentent près de 30 % des entrées en salles. Ce qui change la situation de concurrence entre les exploitants.
Le taux de programmation des films européens dans les multiplexes a été, en 1999, inférieur de plus de 5 points à celui de l'ensemble des salles. Je ne peux pas être indifférente à ce chiffre et à ses conséquences : il indique que nos films sont mieux diffusés dans les établissements de taille moyenne et petite que dans les multiplexes.
Mais l'évolution du parc a aussi pour conséquence d'entraîner de nouvelles pratiques commerciales qui bouleversent les usages ou les coutumes du secteur.
Nous avions connu la " guerre des prix " : Lyon, Nantes, Bordeaux, ont défrayé la chronique et suscité bien des inquiétudes.
Nous connaissons maintenant la " guerre des abonnements illimités ", variante de la première, mais plus complexe encore à appréhender du fait de la radicalité de cette formule.
L'initiative prise par UGC le 29 mars dernier - à la surprise générale - de commercialiser une carte illimitée a immédiatement suscité des inquiétudes. A tel point que - comme vous le savez - j'ai demandé à UGC de suspendre la commercialisation de sa carte. Il aurait été sage que cette suspension soit maintenue jusqu'à ce que des garanties et des correctifs aient été apportés. Et je regrette que cette suspension n'ait pas permis, dès ce moment, aux milieux professionnels d'engager une concertation constructive.
Deux catégories de questions ont été, en effet, immédiatement soulevées.
La première est liée au respect du droit de la concurrence. Comme vous le savez, j'ai demandé à ce que le Conseil de la concurrence se prononce. Dans sa décision du 25 juillet dernier, le Conseil n'a pas exclu l'éventualité d'un abus de position dominante sur le marché parisien. De même il n'a pas non plus écarté l'éventualité qu'une carte d'accès illimité tarifée à 98 francs par mois constitue une pratique de prix prédateur. Sur ces deux points, déjà soulevés par le rapport du Médiateur du cinéma, le Conseil de la concurrence a souhaité disposer de temps pour traiter l'affaire au fond. Or, il y a urgence.
La seconde interrogation concerne la conformité du système de cartes illimitées avec la réglementation, du fait de l'impossibilité d'affecter un prix de place à chaque entrée. Ce qui soulève en cascade un ensemble de problèmes très concrets relatifs à la fiscalité et à la remontée de recettes aux ayants droit. Une procédure de sanction a été engagée contre les exploitants qui ont mis en uvre un tel système.
Bien entendu, ces problèmes ne concernent pas seulement UGC mais maintenant aussi Pathé, Gaumont et MK2, encore que ceux-ci aient pu s'estimer contraints de riposter avec les mêmes armes.
On peut certes constater que des pratiques d'abonnement, lorsqu'elles visent à fidéliser le public et à accroître la fréquentation, se sont utilement développé dans le spectacle vivant et dans les musées. Dès lors, on peut comprendre que le cinéma s'y intéresse aussi. Si l'on en fait bon usage, les abonnements peuvent être des instruments de démocratisation de l'accès à la culture, notamment pour les jeunes, et dans un contexte où la réduction du temps de travail libère du temps pour les pratiques culturelles. C'est un enjeu qu'il ne faut pas négliger pour le cinéma français dont l'avenir repose en bonne partie sur sa capacité à toucher un public toujours plus large. Et d'ailleurs la réponse du public est en elle-même éloquente.
Mais, la différence et le grand risque avec ces cartes d'abonnement, c'est le caractère illimité qui confine à la gratuité et qui est de nature à engendrer, chez certains spectateurs, des comportements excessivement consuméristes et " Zappeurs ".
C'est pourquoi j'envisage, compte tenu des problèmes spécifiques et complexes que posent les nouvelles formes d'abonnement dans le domaine du cinéma, de prendre des mesures pour réguler ces pratiques en les rendant compatibles, sous certaines conditions et garanties, avec la préservation des grands équilibres auxquels nous sommes tous attachés, et auxquels toutes les chaînes du cinéma ont intérêt.
Le cinéma connaît déjà, dans le domaine de la programmation et de la diffusion du film, un droit spécifique qui complète le droit commun de la concurrence, et des institutions qui lui sont propres comme le Médiateur du cinéma ou le Comité de la diffusion cinématographique, institués par la loi du 29 juillet 1982.
Les cartes de ce type devront faire l'objet d'un encadrement juridique dont les critères reposeront sur les règles suivantes :
-un contrôle des billetteries pour assurer une parfaite traçabilité des entrées,
-une transparence absolue de la remontée de la recette aux ayants-droit,
-un engagement de longue durée de la part des opérateurs quant au niveau de rémunération des ayants-droit, conforme aux pratiques jusque-là observées,
-l'application de la taxe spéciale à chaque entrée,
-l'ouverture des cartes aux indépendants de la zone de chalandise, à des conditions équitables et sans exclusivité.
Ces mesures seront intégrées dans le projet de loi sur les nouvelles régulations économiques. Toutes les formules d'abonnement devront faire l'objet d'un agrément préalable du CNC, qui s'assurera que ces conditions sont strictement respectées. A défaut, l'agrément ne sera pas délivré et le non-respect des engagements sera sanctionné.
En outre, j'estime souhaitable, dans ce contexte très nouveau, d'engager une réflexion sur une nouvelle modification du soutien automatique et de poursuivre la réforme de son barème afin d'accentuer son caractère redistributif au profit de la petite et moyenne exploitation.
En effet, j'attache le plus grand prix à ce que l'équilibre financier de la petite et moyenne exploitation soit maintenu, à charge pour elle d'assurer la qualité de l'accueil du public.
Enfin, je demande au CNC de se doter des moyens pour assurer la transparence des informations quant à l'évolution de la fréquentation et des mouvements de parts de marché.
II - L'action des pouvoirs publics vis-à-vis des mutations que j'ai évoquées doit conjuguer deux démarches complémentaires: soutien et régulation.
Soutien afin d'encourager l'investissement pour toutes les catégories de salles, en privilégiant cependant celles qui méritent un soutien renforcé de l'Etat. Ce souci inspire les mesures que je vais prendre en faveur de l'exploitation et dont j'ai souhaité vous donner la primeur.
Régulation, pour l'implantation des multiplexes qui doit être autorisée avec raison ; c'est vrai aussi pour le respect par les opérateurs de multiplexes de principes tels que la diversité de la programmation, l'accès des films aux salles et des salles aux films, par des engagements de programmation.
C'est dans cet esprit et à la lecture des rapports qui ont été effectués à la demande de mon ministère ainsi que des larges débats auxquels ils ont donné lieu, que j'ai décidé de prendre des mesures qui ont pour objectif principal d'accompagner et d'encourager un développement maîtrisé de l'activité des salles de cinéma en France pour ces prochaines années.
1 - Un premier volet de mesures concerne les multiplexes dans la suite des propositions du rapport de M. Francis Delon, rapport que vous connaissez bien
Je souhaite en effet redéfinir les conditions d'octroi des autorisations de multiplexes en faisant en sorte que les objectifs légitimes prévus par la loi soient mieux observés et que ces décisions soient prises dans une plus grande transparence, notamment après une large consultation de toutes les parties intéressées :
- ainsi une première mesure consiste à confier aux préfets l'organisation d'une consultation des exploitants déjà implantés, préalablement à l'instruction des dossiers soumis aux CDEC. Je crois que cette demande de concertation est tout à fait légitime : il convient que les CDEC prennent leurs décisions en toute connaissance des intérêts des parties concernées.
- une deuxième mesure consiste a compléter les critères d'autorisation afin de prendre en compte le respect des engagements de programmation contractés par le candidat pour l'exploitation d'autres établissements, les relations envisagées avec les exploitants de la zone concernée ainsi que la qualité architecturale du projet.
- la troisième mesure consiste à donner aux CDEC la faculté d'autoriser l'implantation d'un multiplexe en fonction de l'engagement de programmation que l'opérateur s'engage à souscrire dès la présentation de son dossier, engagement dont le respect est contrôlé et sanctionné par la suite.
- Enfin je propose de confier au Médiateur du cinéma le pouvoir de former un recours contre une décision de CDEC s'il l'estime nécessaire.
J'envisage, en outre, d'abaisser le seuil d'examen par les CDEC des projets à 800 fauteuils, au lieu de 1000 actuellement. S'agissant enfin de la régulation de l'activité des multiplexes, je vous rappelle que désormais, tous les propriétaires de multiplexes détenant plus de 0,5 % du marché national sont soumis au respect d'engagements de programmation, au même titre que jadis les groupements de programmation. Le Comité de la diffusion cinématographique a rendu il y a quelques semaines son avis sur les engagements proposés par les opérateurs désormais soumis à cette procédure. Trois types d'engagements, similaires pour l'ensemble des opérateurs, mais adaptés le cas échéant aux situations locales ont été définis :
- Il s'agit en premier lieu de la diffusion de films européens de distributeurs indépendants ; chaque opérateur doit s'engager sur la diffusion annuelle d'un volume minimum de films relevant de cette catégorie, ainsi que sur une durée minimum d'exposition de ces films.
- Un second type d'engagement, vise à limiter la multidiffusion des films à 2 copies par film et à un maximum de 30 % des séances d'un même multiplexe.
- Enfin, une série d'engagements adaptés aux situations locales, vise à permettre l'accès aux films pour les exploitants d'art et d'essai ou de toute salle reconnue pour la qualité de sa programmation, sous le contrôle du Médiateur.
Ces engagements sont en cours de signature, et feront l'objet d'un contrôle régulier par le Comité de la diffusion, ainsi que d'une réactualisation tous les dix huit mois, au fur et à mesure de l'ouverture de nouveaux complexes.
2 - Une deuxième série de mesures concerne l'aide sélective à l'exploitation indépendante et d'art et essai
Le rapport de Mme Mariani-Ducray et de M. Motchane, a préconisé un renforcement des aides sélectives à l'exploitation afin notamment de permettre aux exploitants indépendants de moderniser leurs équipements et de répondre à la concurrence nouvelle des multiplexes.
C'est dans cet esprit que j'ai décidé, outre le renforcement du budget de l'aide sélective, qui a augmenté de 15 MF dès l'année 2000, de mettre en uvre un certain nombre de mesures propres à intensifier et diversifier les modalités d'octroi de subventions aux salles indépendantes.
a) par un relèvement des seuils prévus aujourd'hui par la loi Sueur pour l'intervention des collectivités locales en faveur des salles. Je proposerai au Parlement que le seuil de 2200 entrées hebdomadaires soit relevé à 5000 et qu'aucun seuil ne soit retenu pour les salles classées art et essai.
b) par un relèvement du seuil à 5000 entrées hebdomadaires pour l'exonération totale de la taxe professionnelle par les collectivités locales en faveur des salles d'art et d'essai.
Ces mesures sont destinées à mieux conjuguer les subventions provenant du compte de soutien d'une part et des collectivités locales de l'autre, en desserrant certaines contraintes qui pèsent aujourd'hui sur les modalités de leur intervention.
Par ailleurs, le décret du 24 août 1998, qui fixe les conditions d'octroi des aides sélectives à la création et à la modernisation des salles de cinéma va être modifié afin de définir plus largement les zones d'intervention, de réserver les aides aux exploitants de taille petite et moyenne (propriétaires de moins de 50 écrans), et de faciliter le financement des projets en élargissant le mécanisme des avances majorées à la création des salles de cinéma.
La politique de déplafonnement des aides, au delà d'un montant de 3 MF, sera maintenue pour des projets de qualité, initiés par des opérateurs indépendants, afin d'accompagner les efforts d'ouverture de complexes en centre-ville.
3 - Enfin un troisième ensemble de mesures, concerne plus spécifiquement les salles d'art et d'essai
Avec 877 écrans, les salles d'art et d'essai constituent le premier réseau de salles par sa taille et la multiplicité de ses implantations.
Le dispositif spécifique de subventions aux salles d'art et d'essai, qui permet de maintenir en France une programmation diversifiée, curieuse, exigeante, novatrice et s'affranchissant des seules règles du marché, est un élément essentiel de la politique des pouvoirs publics en faveur du cinéma.
La France est le seul pays d'Europe à disposer d'un tel réseau de salles qui consacrent aussi leur programmation à des cinématographies étrangères autres que nord-américaines. Elles mènent enfin des actions déterminantes d'éveil au cinéma pour le jeune public, et d'initiation à la cinéphilie.
Pourquoi une réforme de l'art et essai ?
- d'une, part notre dispositif a près de dix ans d'âge, et il est en partie fondé sur des critères démographiques qui ont depuis évolué. De nouvelles catégories vont donc être définies pour la fixation du montant des subventions, notamment par la prise en compte de la taille de l'agglomération et non plus de la commune. Ceci est cohérent avec la politique du gouvernement pour engager la coopération intercommunale.
- d'autre part il est apparu nécessaire - et je crois que ce sera là un pas important vers une simplification des critères d'attribution des aides - de retenir le critère de l'établissement et non celui de la salle.
- enfin et c'est le point le plus important, je souhaite que soit désormais prise en considération la politique d'animation menée par les salles dans l'appréciation du montant de la prime, à côté du critère de programmation qui reste bien évidemment déterminant. C'est dans cette perspective que j'envisage de regrouper la subvention Art et Essai et la prime d'encouragement à l'animation qui constituaient deux procédures distinctes.
- en outre sur le plan budgétaire, je demande au directeur général du CNC de mettre à l'étude un mécanisme d'ajustement annuel du montant des aides attribuées au titre de l'art et essai, afin de maintenir le montant des subventions individuelles, quel que soit le nombre de salles qui sont chaque année classées art et essai.
Voilà, Monsieur le Président, mesdames et messieurs, les principales mesures que j'entends mettre en oeuvre.
Elles me paraissent indispensables pour accompagner l'ensemble du secteur de l'exploitation dans la période de mutation qui s'est ouverte.
Et dans cette perspective votre action est décisive pour l'avenir du cinéma en général, et pour le cinéma français en particulier.
C'est pourquoi je tiens à saisir l'occasion qui m'est donnée aujourd'hui de vous rappeler que les efforts entrepris par l'Etat en faveur du cinéma - ils sont aujourd'hui considérables - n'ont de sens que si l'ensemble des professionnels les relaient avec la claire conscience des enjeux d'une communauté d'intérêt solidaire qui s'attache à l'existence d'une cinématographie vivante et créative.
Je tiens, pour ma part, à réaffirmer mon désaccord sur des initiatives qui rompent unilatéralement avec cette solidarité.
En conclusion, vous le voyez, mesdames et messieurs, c'est un vaste chantier qu'il nous faut entreprendre et faire aboutir rapidement si nous voulons apporter des correctifs efficaces au dérèglement de la concurrence. Il nous faudra convaincre de l'absolue nécessité de cette régulation. La loi, la régulation n'ont pas très bonne presse en ces temps. Nous ne serons pas trop nombreux pour le faire. Je compte sur vous. Je veux que vous sachiez tous que ma porte, mon administration vous sont ouvertes.
(source http://www.culture.gouv.fr, le 2 octobre 2000)
Mesdames et Messieurs,
Je suis honorée d'être parmi vous aujourd'hui en cette journée qui clôture les travaux de votre 55è congrès par la traditionnelle rencontre avec les pouvoirs publics, à un moment où nous avons particulièrement besoin de nous concerter.
La politique de soutien au cinéma telle qu'elle s'est développée et consolidée dans notre pays, depuis maintenant plus de cinquante ans, a peu à peu pris en considération la dimension spécifique du " spectacle cinématographique " et son caractère irremplaçable. L'aide à l'exploitation, rare chez nos voisins étrangers, est ainsi devenue un des piliers de notre système d'aides.
Il y a en effet peu de lieux sur notre territoire où le cinéma n'est pas aisément accessible grâce à ce parc de près de 5000 écrans, le premier d'Europe.
Quant au niveau de la fréquentation, souvenez-vous de l'année noire de 1992 avec seulement 116 millions d'entrées. Aujourd'hui, nous sommes sur une croissance soutenue de la fréquentation. L'année 2000 devrait confirmer ce mouvement, avec au moins 164 millions d'entrées.
La part de marché du cinéma français se situe autour d'un tiers des entrées et est très supérieure à celle des cinématographies nationales de nos voisins européens.
Notre production cinématographique est respectée et appréciée dans le monde entier, comme le montrent constamment les sélections des festivals internationaux, et en dernier lieu, celles de Locarno, de Montréal ou de Venise.
En outre, l'été cinématographique n'a pas été cette année, pour la production française, la catastrophe absolue commentée par certains esprits chagrins. Il a été au contraire un exemple de diversité dans ses succès. Le spectateur aura eu, cet été, un registre étendu de films français de caractères très différents. Au total, dans cette période, les films français auront attiré deux fois plus de spectateurs que l'année précédente.
J'ai néanmoins conscience que, sur certaines périodes de l'année, l'offre de films français, notamment ceux qui sont susceptibles d'attirer le public le plus large, est encore rare et irrégulière. Il faut s'interroger sur ce phénomène dans un contexte où, pourtant, le nombre de films français produits chaque année a augmenté sensiblement avec un rythme annuel de 150 uvres, dont la quasi-totalité est distribuée en salles.
Pourtant les films français sont plus que jamais capables d'entraîner des spectateurs en grand nombre vers les salles, nous n'avons pas à en douter.
I - Aujourd'hui, pour ce qui concerne le secteur de l'exploitation, les perspectives économiques sont positives, compte tenu de la croissance de la fréquentation. Et cependant, nous partageons de fortes inquiétudes.
Je sais qu'en dépit de cette conjoncture favorable, votre Congrès est, depuis quelques années le théâtre de débats vifs sur l'évolution actuelle de notre parc cinématographique et de l'économie d'un secteur qui a connu de manière accélérée, ces dernières années, une mutation profonde avec un double mouvement.
- celui de l'investissement dans de nouveaux équipements, les multiplexes ; mais aussi un vaste mouvement de rénovation de salles existantes, soutenu par les pouvoirs publics
- celui de l'instauration de nouvelles relations avec le public, en terme de politique commerciale et de fidélisation des publics.
Face à ce contexte, les pouvoirs publics sont très vigilants.
Sans entraver un développement qui est indispensable au cinéma dans son ensemble, les pouvoirs publics doivent veiller à l'équilibre général de l'industrie cinématographique, au maintien de la diversité des lieux d'accès au cinéma - des cinémas de proximité et de centre ville en particulier - et bien sûr à la diversité de la programmation des films.
Ainsi, il faut absolument prévenir une situation de suréquipement telle que celle que connaît aujourd'hui l'exploitation aux Etats-Unis. Il ne faut pas que le développement immodéré et non régulé des multiplexes entraîne l'ensemble du secteur dans des tensions concurrentielles aux conséquences néfastes pour tous.
Aujourd'hui les multiplexes, représentent près de 30 % des entrées en salles. Ce qui change la situation de concurrence entre les exploitants.
Le taux de programmation des films européens dans les multiplexes a été, en 1999, inférieur de plus de 5 points à celui de l'ensemble des salles. Je ne peux pas être indifférente à ce chiffre et à ses conséquences : il indique que nos films sont mieux diffusés dans les établissements de taille moyenne et petite que dans les multiplexes.
Mais l'évolution du parc a aussi pour conséquence d'entraîner de nouvelles pratiques commerciales qui bouleversent les usages ou les coutumes du secteur.
Nous avions connu la " guerre des prix " : Lyon, Nantes, Bordeaux, ont défrayé la chronique et suscité bien des inquiétudes.
Nous connaissons maintenant la " guerre des abonnements illimités ", variante de la première, mais plus complexe encore à appréhender du fait de la radicalité de cette formule.
L'initiative prise par UGC le 29 mars dernier - à la surprise générale - de commercialiser une carte illimitée a immédiatement suscité des inquiétudes. A tel point que - comme vous le savez - j'ai demandé à UGC de suspendre la commercialisation de sa carte. Il aurait été sage que cette suspension soit maintenue jusqu'à ce que des garanties et des correctifs aient été apportés. Et je regrette que cette suspension n'ait pas permis, dès ce moment, aux milieux professionnels d'engager une concertation constructive.
Deux catégories de questions ont été, en effet, immédiatement soulevées.
La première est liée au respect du droit de la concurrence. Comme vous le savez, j'ai demandé à ce que le Conseil de la concurrence se prononce. Dans sa décision du 25 juillet dernier, le Conseil n'a pas exclu l'éventualité d'un abus de position dominante sur le marché parisien. De même il n'a pas non plus écarté l'éventualité qu'une carte d'accès illimité tarifée à 98 francs par mois constitue une pratique de prix prédateur. Sur ces deux points, déjà soulevés par le rapport du Médiateur du cinéma, le Conseil de la concurrence a souhaité disposer de temps pour traiter l'affaire au fond. Or, il y a urgence.
La seconde interrogation concerne la conformité du système de cartes illimitées avec la réglementation, du fait de l'impossibilité d'affecter un prix de place à chaque entrée. Ce qui soulève en cascade un ensemble de problèmes très concrets relatifs à la fiscalité et à la remontée de recettes aux ayants droit. Une procédure de sanction a été engagée contre les exploitants qui ont mis en uvre un tel système.
Bien entendu, ces problèmes ne concernent pas seulement UGC mais maintenant aussi Pathé, Gaumont et MK2, encore que ceux-ci aient pu s'estimer contraints de riposter avec les mêmes armes.
On peut certes constater que des pratiques d'abonnement, lorsqu'elles visent à fidéliser le public et à accroître la fréquentation, se sont utilement développé dans le spectacle vivant et dans les musées. Dès lors, on peut comprendre que le cinéma s'y intéresse aussi. Si l'on en fait bon usage, les abonnements peuvent être des instruments de démocratisation de l'accès à la culture, notamment pour les jeunes, et dans un contexte où la réduction du temps de travail libère du temps pour les pratiques culturelles. C'est un enjeu qu'il ne faut pas négliger pour le cinéma français dont l'avenir repose en bonne partie sur sa capacité à toucher un public toujours plus large. Et d'ailleurs la réponse du public est en elle-même éloquente.
Mais, la différence et le grand risque avec ces cartes d'abonnement, c'est le caractère illimité qui confine à la gratuité et qui est de nature à engendrer, chez certains spectateurs, des comportements excessivement consuméristes et " Zappeurs ".
C'est pourquoi j'envisage, compte tenu des problèmes spécifiques et complexes que posent les nouvelles formes d'abonnement dans le domaine du cinéma, de prendre des mesures pour réguler ces pratiques en les rendant compatibles, sous certaines conditions et garanties, avec la préservation des grands équilibres auxquels nous sommes tous attachés, et auxquels toutes les chaînes du cinéma ont intérêt.
Le cinéma connaît déjà, dans le domaine de la programmation et de la diffusion du film, un droit spécifique qui complète le droit commun de la concurrence, et des institutions qui lui sont propres comme le Médiateur du cinéma ou le Comité de la diffusion cinématographique, institués par la loi du 29 juillet 1982.
Les cartes de ce type devront faire l'objet d'un encadrement juridique dont les critères reposeront sur les règles suivantes :
-un contrôle des billetteries pour assurer une parfaite traçabilité des entrées,
-une transparence absolue de la remontée de la recette aux ayants-droit,
-un engagement de longue durée de la part des opérateurs quant au niveau de rémunération des ayants-droit, conforme aux pratiques jusque-là observées,
-l'application de la taxe spéciale à chaque entrée,
-l'ouverture des cartes aux indépendants de la zone de chalandise, à des conditions équitables et sans exclusivité.
Ces mesures seront intégrées dans le projet de loi sur les nouvelles régulations économiques. Toutes les formules d'abonnement devront faire l'objet d'un agrément préalable du CNC, qui s'assurera que ces conditions sont strictement respectées. A défaut, l'agrément ne sera pas délivré et le non-respect des engagements sera sanctionné.
En outre, j'estime souhaitable, dans ce contexte très nouveau, d'engager une réflexion sur une nouvelle modification du soutien automatique et de poursuivre la réforme de son barème afin d'accentuer son caractère redistributif au profit de la petite et moyenne exploitation.
En effet, j'attache le plus grand prix à ce que l'équilibre financier de la petite et moyenne exploitation soit maintenu, à charge pour elle d'assurer la qualité de l'accueil du public.
Enfin, je demande au CNC de se doter des moyens pour assurer la transparence des informations quant à l'évolution de la fréquentation et des mouvements de parts de marché.
II - L'action des pouvoirs publics vis-à-vis des mutations que j'ai évoquées doit conjuguer deux démarches complémentaires: soutien et régulation.
Soutien afin d'encourager l'investissement pour toutes les catégories de salles, en privilégiant cependant celles qui méritent un soutien renforcé de l'Etat. Ce souci inspire les mesures que je vais prendre en faveur de l'exploitation et dont j'ai souhaité vous donner la primeur.
Régulation, pour l'implantation des multiplexes qui doit être autorisée avec raison ; c'est vrai aussi pour le respect par les opérateurs de multiplexes de principes tels que la diversité de la programmation, l'accès des films aux salles et des salles aux films, par des engagements de programmation.
C'est dans cet esprit et à la lecture des rapports qui ont été effectués à la demande de mon ministère ainsi que des larges débats auxquels ils ont donné lieu, que j'ai décidé de prendre des mesures qui ont pour objectif principal d'accompagner et d'encourager un développement maîtrisé de l'activité des salles de cinéma en France pour ces prochaines années.
1 - Un premier volet de mesures concerne les multiplexes dans la suite des propositions du rapport de M. Francis Delon, rapport que vous connaissez bien
Je souhaite en effet redéfinir les conditions d'octroi des autorisations de multiplexes en faisant en sorte que les objectifs légitimes prévus par la loi soient mieux observés et que ces décisions soient prises dans une plus grande transparence, notamment après une large consultation de toutes les parties intéressées :
- ainsi une première mesure consiste à confier aux préfets l'organisation d'une consultation des exploitants déjà implantés, préalablement à l'instruction des dossiers soumis aux CDEC. Je crois que cette demande de concertation est tout à fait légitime : il convient que les CDEC prennent leurs décisions en toute connaissance des intérêts des parties concernées.
- une deuxième mesure consiste a compléter les critères d'autorisation afin de prendre en compte le respect des engagements de programmation contractés par le candidat pour l'exploitation d'autres établissements, les relations envisagées avec les exploitants de la zone concernée ainsi que la qualité architecturale du projet.
- la troisième mesure consiste à donner aux CDEC la faculté d'autoriser l'implantation d'un multiplexe en fonction de l'engagement de programmation que l'opérateur s'engage à souscrire dès la présentation de son dossier, engagement dont le respect est contrôlé et sanctionné par la suite.
- Enfin je propose de confier au Médiateur du cinéma le pouvoir de former un recours contre une décision de CDEC s'il l'estime nécessaire.
J'envisage, en outre, d'abaisser le seuil d'examen par les CDEC des projets à 800 fauteuils, au lieu de 1000 actuellement. S'agissant enfin de la régulation de l'activité des multiplexes, je vous rappelle que désormais, tous les propriétaires de multiplexes détenant plus de 0,5 % du marché national sont soumis au respect d'engagements de programmation, au même titre que jadis les groupements de programmation. Le Comité de la diffusion cinématographique a rendu il y a quelques semaines son avis sur les engagements proposés par les opérateurs désormais soumis à cette procédure. Trois types d'engagements, similaires pour l'ensemble des opérateurs, mais adaptés le cas échéant aux situations locales ont été définis :
- Il s'agit en premier lieu de la diffusion de films européens de distributeurs indépendants ; chaque opérateur doit s'engager sur la diffusion annuelle d'un volume minimum de films relevant de cette catégorie, ainsi que sur une durée minimum d'exposition de ces films.
- Un second type d'engagement, vise à limiter la multidiffusion des films à 2 copies par film et à un maximum de 30 % des séances d'un même multiplexe.
- Enfin, une série d'engagements adaptés aux situations locales, vise à permettre l'accès aux films pour les exploitants d'art et d'essai ou de toute salle reconnue pour la qualité de sa programmation, sous le contrôle du Médiateur.
Ces engagements sont en cours de signature, et feront l'objet d'un contrôle régulier par le Comité de la diffusion, ainsi que d'une réactualisation tous les dix huit mois, au fur et à mesure de l'ouverture de nouveaux complexes.
2 - Une deuxième série de mesures concerne l'aide sélective à l'exploitation indépendante et d'art et essai
Le rapport de Mme Mariani-Ducray et de M. Motchane, a préconisé un renforcement des aides sélectives à l'exploitation afin notamment de permettre aux exploitants indépendants de moderniser leurs équipements et de répondre à la concurrence nouvelle des multiplexes.
C'est dans cet esprit que j'ai décidé, outre le renforcement du budget de l'aide sélective, qui a augmenté de 15 MF dès l'année 2000, de mettre en uvre un certain nombre de mesures propres à intensifier et diversifier les modalités d'octroi de subventions aux salles indépendantes.
a) par un relèvement des seuils prévus aujourd'hui par la loi Sueur pour l'intervention des collectivités locales en faveur des salles. Je proposerai au Parlement que le seuil de 2200 entrées hebdomadaires soit relevé à 5000 et qu'aucun seuil ne soit retenu pour les salles classées art et essai.
b) par un relèvement du seuil à 5000 entrées hebdomadaires pour l'exonération totale de la taxe professionnelle par les collectivités locales en faveur des salles d'art et d'essai.
Ces mesures sont destinées à mieux conjuguer les subventions provenant du compte de soutien d'une part et des collectivités locales de l'autre, en desserrant certaines contraintes qui pèsent aujourd'hui sur les modalités de leur intervention.
Par ailleurs, le décret du 24 août 1998, qui fixe les conditions d'octroi des aides sélectives à la création et à la modernisation des salles de cinéma va être modifié afin de définir plus largement les zones d'intervention, de réserver les aides aux exploitants de taille petite et moyenne (propriétaires de moins de 50 écrans), et de faciliter le financement des projets en élargissant le mécanisme des avances majorées à la création des salles de cinéma.
La politique de déplafonnement des aides, au delà d'un montant de 3 MF, sera maintenue pour des projets de qualité, initiés par des opérateurs indépendants, afin d'accompagner les efforts d'ouverture de complexes en centre-ville.
3 - Enfin un troisième ensemble de mesures, concerne plus spécifiquement les salles d'art et d'essai
Avec 877 écrans, les salles d'art et d'essai constituent le premier réseau de salles par sa taille et la multiplicité de ses implantations.
Le dispositif spécifique de subventions aux salles d'art et d'essai, qui permet de maintenir en France une programmation diversifiée, curieuse, exigeante, novatrice et s'affranchissant des seules règles du marché, est un élément essentiel de la politique des pouvoirs publics en faveur du cinéma.
La France est le seul pays d'Europe à disposer d'un tel réseau de salles qui consacrent aussi leur programmation à des cinématographies étrangères autres que nord-américaines. Elles mènent enfin des actions déterminantes d'éveil au cinéma pour le jeune public, et d'initiation à la cinéphilie.
Pourquoi une réforme de l'art et essai ?
- d'une, part notre dispositif a près de dix ans d'âge, et il est en partie fondé sur des critères démographiques qui ont depuis évolué. De nouvelles catégories vont donc être définies pour la fixation du montant des subventions, notamment par la prise en compte de la taille de l'agglomération et non plus de la commune. Ceci est cohérent avec la politique du gouvernement pour engager la coopération intercommunale.
- d'autre part il est apparu nécessaire - et je crois que ce sera là un pas important vers une simplification des critères d'attribution des aides - de retenir le critère de l'établissement et non celui de la salle.
- enfin et c'est le point le plus important, je souhaite que soit désormais prise en considération la politique d'animation menée par les salles dans l'appréciation du montant de la prime, à côté du critère de programmation qui reste bien évidemment déterminant. C'est dans cette perspective que j'envisage de regrouper la subvention Art et Essai et la prime d'encouragement à l'animation qui constituaient deux procédures distinctes.
- en outre sur le plan budgétaire, je demande au directeur général du CNC de mettre à l'étude un mécanisme d'ajustement annuel du montant des aides attribuées au titre de l'art et essai, afin de maintenir le montant des subventions individuelles, quel que soit le nombre de salles qui sont chaque année classées art et essai.
Voilà, Monsieur le Président, mesdames et messieurs, les principales mesures que j'entends mettre en oeuvre.
Elles me paraissent indispensables pour accompagner l'ensemble du secteur de l'exploitation dans la période de mutation qui s'est ouverte.
Et dans cette perspective votre action est décisive pour l'avenir du cinéma en général, et pour le cinéma français en particulier.
C'est pourquoi je tiens à saisir l'occasion qui m'est donnée aujourd'hui de vous rappeler que les efforts entrepris par l'Etat en faveur du cinéma - ils sont aujourd'hui considérables - n'ont de sens que si l'ensemble des professionnels les relaient avec la claire conscience des enjeux d'une communauté d'intérêt solidaire qui s'attache à l'existence d'une cinématographie vivante et créative.
Je tiens, pour ma part, à réaffirmer mon désaccord sur des initiatives qui rompent unilatéralement avec cette solidarité.
En conclusion, vous le voyez, mesdames et messieurs, c'est un vaste chantier qu'il nous faut entreprendre et faire aboutir rapidement si nous voulons apporter des correctifs efficaces au dérèglement de la concurrence. Il nous faudra convaincre de l'absolue nécessité de cette régulation. La loi, la régulation n'ont pas très bonne presse en ces temps. Nous ne serons pas trop nombreux pour le faire. Je compte sur vous. Je veux que vous sachiez tous que ma porte, mon administration vous sont ouvertes.
(source http://www.culture.gouv.fr, le 2 octobre 2000)