Texte intégral
Mesdames, Messieurs les journalistes,
Quelques jours avant la réunion des Ministres européens du tourisme à Lille, je suis très heureuse de vous accueillir ici, au Centre d'Accueil de la Presse Étrangère, pour vous présenter l'action que je mène au titre de la Présidence française de l'Union Européenne, en liaison avec mes collègues des autres pays et avec la Commission.
Vous le savez, le tourisme joue, en Europe, un rôle de plus en plus important sur le plan économique, mais aussi culturel et politique.
Avec plus de 392 millions de visiteurs en 1999, l'Europe est aujourd'hui la première région touristique mondiale. Elle est également la première région émettrice de touristes vers les autres destinations de la planète.
En termes économiques, elle a, à ce double titre, enregistré en 1999, 275 milliards d'euros de recettes touristiques et, d'après les prévisions, ces résultats devraient se confirmer et même s'amplifier dans l'avenir.
Ainsi, l'Organisation Mondiale du Tourisme (OMT) prévoit-elle, dans les dix prochaines années, un doublement des flux touristiques en Europe et un triplement au niveau mondial.
Selon ces mêmes projections, ce mouvement devrait s'accompagner de la création de 2 à 3 millions d'emplois de plus que les 9 millions d'emplois, directs et indirects, déjà recensés dans cette activité, au sein de l'Union Européenne.
Au cours des prochaines années, le tourisme va ainsi devenir l'une des principales activités économiques mondiales, dépassant par exemple, en termes d'exportation, les secteurs de la production pétrolière et de l'automobile.
Pour l'Europe, son développement répond aux enjeux de la construction européenne.
Il offre des opportunités nouvelles pour satisfaire les objectifs politiques de l'Union que sont la croissance économique, l'emploi, le bien-être des populations et le développement durable.
Parce qu'il s'appuie sur les richesses spécifiques de nos pays et de nos régions, le tourisme s'impose comme un facteur essentiel du développement local et comme l'un des outils de l'aménagement durable du territoire européen.
Mais le tourisme, ce n'est pas qu'une activité socio-économique, aussi importante soit-elle. C'est aussi un enjeu culturel et politique.
Porteur des valeurs communes de notre continent, il constitue un moteur essentiel pour promouvoir la citoyenneté européenne, à travers les voyages et les séjours des européens à l'intérieur de l'Europe.
Il est aussi un vecteur important, auprès des autres régions du monde, de la culture et des valeurs de notre continent.
On le voit, le tourisme possède une forte dimension politique, qui interpelle directement les gouvernements nationaux et les institutions européennes.
C'est pourquoi, même si le tourisme ne relève pas, à proprement parler, d'une compétence communautaire, son intégration à la politique de l'Union est une idée qui, progressivement, fait son chemin.
En quelques mots, je veux vous en faire un rapide historique.
C'est en 1982 que la Commission a présenté pour la première fois au Conseil les premières lignes d'une politique coordonnée dans ce domaine et en 1987 qu'un Comité consultatif du tourisme a été créé et qui depuis se réunit régulièrement.
Il y a juste dix ans, en proclamant l'année 1990 "Année Européenne du Tourisme", le Conseil et les pays membres de l'Union ont contribué à donner au secteur une visibilité nouvelle au sein des institutions.
Deux ans plus tard, le 7 février 1992, le Traité de Maastricht a reconnu pour la première fois, dans son article 3, la possibilité de mesures favorables au tourisme.
Dans les années qui ont suivi, de 1992 à 1995, des avis et des recommandations du Parlement Européen et du Comité Économique et Social ont été publiés, avec pour objectif de faire prendre conscience à la Commission et au Conseil qu'il faut mettre en oeuvre des actions plus incisives dans le domaine du tourisme.
En 1995 et 1996, des mesures ont alors été adoptées par la Commission en vue d'améliorer la connaissance du tourisme, la qualité des services touristiques, et la coopération entre les organismes publics et privés en charge des politiques nationales du tourisme.
Mais c'est surtout à partir de 1997, il y a donc trois ans, que les choses s'accélèrent. Suite à l'organisation, sous l'impulsion de la Présidence luxembourgeoise, d'une conférence sur le thème du tourisme et de l'emploi, un Groupe de travail de haut niveau sur ce thème a été constitué.
A la suite de ses travaux, une communication de la Commission en date du 28 avril 1999 "Accroître le potentiel du tourisme pour l'emploi" a entériné cette prise de conscience. En juin 1999 le Conseil a adopté la stratégie proposée et demandé au Comité consultatif de mettre en place quatre groupes de travail.
Cette stratégie, consistant à approfondir la connaissance du secteur du tourisme et à une meilleure utilisation des politiques existantes, a été largement soutenue par le Parlement, le Comité économique et social européen et le Comité des régions.
Enfin, il y a six mois, le 11 mai 2000, à Vilamoura, la Présidence portugaise a organisé la première réunion des ministres européens du tourisme. Un véritable consensus des États membres s'est alors dessiné pour renforcer la coopération des États membres et valoriser l'intervention communautaire dans le domaine du tourisme.
Première destination touristique mondiale, la France a dès le départ soutenu ces initiatives, et il était donc logique que la Présidence française de l'Union me donne une occasion de faire franchir à la coopération européenne en matière touristique un nouveau bond qualitatif.
Pour cela je me suis d'abord attachée à tisser des liens avec les États pour que cette coopération progresse.
C'est ainsi que j'ai multiplié ces dernières semaines les rencontres bilatérales avec mes collègues ministres, avec les représentants de la Commission et du Parlement européen. J'en ai tiré plusieurs enseignements.
En premier lieu, j'ai eu confirmation que le traditionnel clivage entre pays émetteurs, au Nord, et pays récepteurs, au Sud, était en train de s'estomper et que l'Europe devenait, de plus en plus, une destination à part entière.
Mes collègues et moi-même, sommes également convaincus que le développement du tourisme bénéficie aujourd'hui de facteurs extérieurs favorables liés aux mutations de nos sociétés.
Je pense tout particulièrement aux évolutions démographiques, mais aussi à la démocratisation des transports, au développement des technologies de l'information et de la communication, à l'apparition de nouveaux rapports au travail et aux loisirs.
Enfin, un véritable consensus se dessine pour, qu'à côté d'un certain tourisme de masse, se développent d'autres formes de tourisme, liées directement aux comportements nouveaux des touristes eux-mêmes, dont les exigences grandissent tant en termes de qualité que de liberté de choix dans l'offre touristique.
Un développement fondé sur des emplois dont la particularité est d'être répartis harmonieusement sur l'ensemble des territoires ; un développement que nous voulons soucieux d'équilibre, respectueux de l'environnement, des traditions, des cultures et des hommes ; un développement maîtrisé par les populations locales et qui leur soit bénéfique. C'est ce que nous appelons un tourisme durable, et qui peut caractériser le tourisme européen.
C'est en fonction du sentiment que j'ai eu d'un excellent climat, préalable à la préparation de notre prochaine conférence informelle de Lille, que j'ai décidé d'organiser deux événements simultanés le même jour.
Mercredi prochain, 22 novembre à Lille, se tiendra ainsi le matin un important "Forum sur le tourisme durable".
Il réunira de nombreux participants des pays de l'Union Européenne comme des pays d'Europe centrale et orientale.
Ministres, parlementaires, représentants des institutions européennes, de l'industrie touristique, experts et professionnels du secteur auront ainsi l'occasion d'échanger leurs savoirs et savoir-faire au cours de trois ateliers traitant des liens à définir entre le développement durable du tourisme, les opérateurs touristiques, l'aménagement des territoires et l'emploi.
L'après-midi, la Conférence informelle des ministres offrira la possibilité à l'ensemble des États, d'appréhender le travail accompli par les représentants des pays de l'Union Européenne au sein de la Commission.
Celle-ci présentera un rapport intermédiaire faisant le point sur les avancées des quatre groupes de travail mis en place, après le Conseil du Marché Intérieur de juin 1999, sur les thèmes de la formation professionnelle des acteurs du tourisme, de l'information en lien avec l'essor des nouvelles technologies, de la qualité de l'offre touristique et du développement touristique durable.
Cette présentation donnera lieu à un échange sur les idées forces qui ont pu être dégagées au cours de cette première étape.
Cette réunion des ministres permettra également à la Présidence française de poursuivre la réflexion engagée, sous Présidence portugaise, dans le but de déterminer des actions coordonnées, favorables à l'émergence de bonnes pratiques touristiques, dans une logique de développement durable.
Dans le cadre de ce qu'on appelle une "méthode ouverte de coordination" entre États, je serai ainsi amenée à proposer quelques recommandations. Elles porteront sur le cadre institutionnel, sur la connaissance de l'économie du tourisme et l'échange d'informations, sur la prise en compte de la durabilité et de l'éthique, sur le soutien aux acteurs économiques et en particulier les PME, notamment par rapport aux phénomènes de concentration des entreprises dans le secteur du tourisme, sur la promotion de la destination Europe.
Je ferai aussi des recommandations rentrant dans le cadre de la politique que je mène depuis maintenant plus de trois ans au sein du gouvernement français : le droit aux vacances pour tous, la prise en compte des personnes handicapées, les conditions de travail des salariés, la qualité des services.
Ces recommandations, une fois débattues et validées, avec d'autres peut-être ici de nos échanges, feront l'objet d'une information au prochain Conseil du marché intérieur qui se tiendra le 30 novembre prochain.
Mesdames et Messieurs les journalistes,
Mon objectif, que j'espère partagé par mes collègues et la Commission, est de faire vivre un certain "modèle européen du tourisme", au service tant du développement économique que de la cohésion sociale. C'est, vous l'aurez compris un chantier ambitieux, un chantier d'avenir qui appelle la plus large mobilisation et pour lequel les relais d'opinion que vous êtes peuvent jouer un rôle essentiel d'information et de sensibilisation.
C'est pourquoi je tiens à vous remercier de votre attention et du dialogue que je vous propose maintenant d'entamer.
(Source http://www.tourisme.gouv.fr, le 28 décembre 2000)
Mesdames et messieurs les ministres,
Cher(e)s collègues,
Monsieur le commissaire,
Permettez-moi tout d'abord de vous remercier pour votre présence dans cette belle ville de LILLE qui nous accueille aujourd'hui et qui symbolise, au cur de la région du Nord Pas de Calais, toute la richesse et tout le potentiel d'une Europe en développement.
Vous le savez, cette réunion des ministres chargés du tourisme fait suite à celle organisée sous l'autorité de nos amis portugais en mai dernier et revêt une importance particulière.
Car, si la rencontre de VILAMOURA a permis de remettre sur la bonne voie la coopération européenne en matière de tourisme, j'espère que celle de LILLE permettra d'acter la volonté politique de nos pays de participer, dans un secteur qui ne relève pas de la compétence communautaire, à l'élaboration d'un modèle de développement durable qui fasse référence dans l'avenir.
Vous le savez également, l'histoire, parfois chaotique, des tentatives de bâtir une politique européenne a longtemps souffert, d'une absence de vision partagée des États-membres sur les politiques à mener en matière de tourisme.
Or, depuis le Conseil de Luxembourg en 1997 et à la suite des travaux menés par le Groupe de Haut Niveau sur le tourisme et l'emploi qui s'est constitué à cette période, les choses ont bougé favorablement.
Ainsi, la prise de conscience par tous les partenaires institutionnels européens et nationaux de l'importance du tourisme dans la croissance européenne, ses perspectives de développement pour les vingt prochaines années, leurs conséquences en termes d'aménagement de nos territoires et d'emplois, ont amené la Commission et les États-membres à se préoccuper des enjeux du développement du tourisme en Europe.
Je ne rappellerai que pour mémoire des chiffres que nous avons tous en tête mais qui illustrent parfaitement ces enjeux :
* 392 millions de visiteurs étrangers accueillis en Europe l'an dernier, l'Europe étant également la première région émettrice,
* 275 milliards d'Euros de recettes touristiques,
* 9 millions d'emplois et une prévision de 12 millions d'ici dix ans,
* un doublement attendu des flux touristiques en Europe d'ici 2020.
Plus que ces chiffres, se sont bien les mutations que nous percevons aujourd'hui qui doivent nous interpeller.
* Ainsi, le clivage entre pays récepteurs du Sud de l'Europe et pays émetteurs du Nord s'atténue.
* Partout, on voit se développer de nouvelles formes de tourisme : tourisme de court séjour, tourisme culturel, tourisme à la recherche de valeurs plus authentiques, de diversité et de traditions qui font la richesse et l'identité de chacun de nos pays.
* Les attentes de nos concitoyens, comme de nos visiteurs étrangers, se font plus exigeantes en terme de liberté de choix et de qualité de services.
* Sous l'effet des évolutions technologiques l'exigence de qualité, et le besoin de qualification accrue, les métiers du tourisme changent. Les emplois touristiques, qui jusque là se caractérisaient par la précarité, la faible qualification et la saisonnalité, vont devoir évoluer
- et c'est tant mieux ainsi - vers de véritables emplois qualifiés et permanents.
* D'autre part, le tissu de petites et moyennes entreprises qui irrigue l'ensemble de nos territoires, parfois même les plus reculés, et assure la diversité de l'offre qui caractérise nos régions, voit son environnement économique se modifier. En effet, la mondialisation et le phénomène de concentration des opérateurs touristiques n'est pas sans conséquence, à terme, sur les structures de distribution et de production constituées en majorité de ces petites et moyennes entreprises.
* Enfin, nous le savons, le tourisme n'est plus aujourd'hui réductible à sa seule dimension économique. Il s'inscrit dans une éthique de respect mutuel des modes de vie et des valeurs des populations et, vecteur d'échange de culture et de connaissance réciproques, il participe à la construction de valeurs européennes.
Dans ce cadre général, les politiques du tourisme mises en place dans chacun de nos pays revêtent une importance toute particulière.
Nous avons même une responsabilité commune à l'égard de nos concitoyens pour préparer l'Europe et ses habitants à ces évolutions du tourisme.
Il s'agit de leur garantir, autant que faire se peut, un développement touristique de qualité, soucieux d'équilibre entre performance économique et valorisation sociale, créateur d'emplois qualifiés et durables, respectueux des attentes des consommateurs et du maintien de la diversité de nos patrimoines naturels et culturels.
En ce sens, le tourisme représente un atout essentiel pour faciliter le renforcement de la coordination économique et de la cohésion sociale en Europe.
C'est, je crois, un des premiers encouragements à tirer de notre réunion de VILAMOURA.
C'est un de ceux, aussi, que je tire des nombreuses consultations que j'ai eu avec la plupart d'entre vous, en prévision de notre rencontre aujourd'hui.
A chacune de ces consultations, j'ai rencontré la même volonté de travailler ensemble au progrès de nos politiques nationales, dans un souci de valorisation de la diversité de nos richesses et de nos territoires, au bénéfice de nos concitoyens.
Les travaux lancés au sein de la Commission entre les États-membres - dont Monsieur le Commissaire LIIKANEN nous présentera tout à l'heure, dans un rapport d'étape, les premiers résultats - ont montré ce besoin de concertation et d'échanges entre nous pour agir de manière coordonnée, à la reconnaissance et à la mise en valeur de ce secteur, jusqu'ici si peu présent dans les grandes orientations européennes.
De même, le Forum de ce matin en associant l'ensemble des acteurs publics et privés du tourisme en Europe, a fait ressortir le besoin d'une concertation accrue entre les États pour apporter des réponses communes aux besoins réels et aux attentes urgentes des opérateurs touristiques. Qu'il s'agisse d'entreprises, de travailleurs ou d'élus responsables du devenir de territoires.
Je crois qu'une impulsion forte est aujourd'hui nécessaire.
Il n'est pas indispensable de modifier pour cela la compétence communautaire en la matière.
La réunion de VILAMOURA a fait clairement ressortir le désir des participants de respecter le principe de subsidiarité, en laissant aux États membres la plus grande marge d'action.
Il existe aujourd'hui d'autres moyens pour favoriser l'association des expériences et la synergie des compétences.
C'est le sens de la méthode ouverte de coordination recommandée par le Conseil Européen de LISBONNE pour définir ensemble les lignes directrices et les objectifs d'amélioration ou de réforme à mener à court, moyen ou long terme, et permettre une diffusion des meilleures pratiques entre nous.
Cette volonté de coopération et de concertation pour renforcer notre action en faveur d'un nouveau modèle européen du tourisme ne passe pas non plus, à mon sens, obligatoirement par des moyens politiques budgétaires supplémentaires.
Les divers instruments d'intervention existant au niveau européen peuvent largement pourvoir aux besoins d'accompagnement du secteur, à la condition que le tourisme y soit mieux intégré et que les ressources des fonds structurels et des programmes communautaires soient optimisés en faveur d'une politique du tourisme clairement identifiée. C'est notamment le cas de la politique régionale, de la politique de l'emploi et du fonds social européen, de celles des transports, de l'environnement et du développement rural.
Il s'agit de travailler ensemble et d'instaurer un dialogue, le plus large possible, dans le strict respect du principe de subsidiarité, en nous attachant à préconiser dès aujourd'hui des actions concrètes.
C'est pourquoi je vous propose de soutenir fermement les premières conclusions de la Commission qui vont nous être soumises à l'instant.
Mais, sans attendre la fin des travaux des groupes de travail mis en place - qui, si je me réfère aux recommandations de la Commission, interviendra en automne 2001 - nous pouvons, dès à présent, examiner quelques propositions à même d'anticiper sur les évolutions attendues dans le secteur du tourisme.
Tout d'abord, dans le domaine institutionnel et politique.
Il faut, je crois, réaffirmer notre volonté d'une approche intégrée du tourisme dans les politiques nationales, en convenant que les ministres en charge du tourisme puissent se réunir avec la Commission, sous chaque présidence, à l'occasion d'une manifestation et sur un thème laissé à l'initiative de l'État assurant cette présidence.
Cette réunion semestrielle permettrait ainsi de faire le point sur les progrès réalisés, d'examiner les éventuelles difficultés et maintenir une forte orientation politique.
Il appartiendra également à la Commission de s'assurer que le tourisme bénéficiera davantage que par le passé d'une claire identification dans les politiques et initiatives communautaires et au sein de ses propres directions générales.
Ceci afin d'en accroître la visibilité et d'en améliorer la structure.
Dans le domaine international, nous pourrions, tout d'abord, être attentifs à intensifier notre présence collective au sein des organismes internationaux pour faire avancer nos conceptions nouvelles en matière de tourisme.
Dans cet esprit, nous devrions, plus particulièrement, nous attacher à faire vivre, dans nos politiques nationales, le Code Mondial d'Éthique que la plupart d'entre nous a approuvé au sein de l'Organisation Mondiale du Tourisme.
Bien entendu, des dispositions doivent figurer au premier chef pour lutter contre le tourisme sexuel impliquant des enfants. C'est pourquoi je vous propose d'unir nos efforts pour que le travail entrepris sur ce sujet soit poursuivi.
Par ailleurs, en matière de coopération internationale, nous aurions tout intérêt à promouvoir cette idée d'un modèle européen de développement durable du tourisme auprès des organisations en charge du développement.
Un modèle européen qui peut être la base des contacts que nous engageons aujourd'hui avec les représentants des pays d'Europe centrale et orientale présents à nos travaux sur le tourisme durable.
Un tourisme qui répond aux enjeux de la construction européenne, porteur de valeurs communes ; un tourisme équilibré, respectueux des identités nationales et de leur diversité. Un tourisme maîtrisé par les populations locales et qui leur est bénéfique de façon durable.
C'est ce qui a été rappelé par les participants au Forum sur le tourisme durable qui s'est tenu ce matin, ici-même, à Lille.
Par les attentes qu'ils ont exprimées, ils ont montré combien le tourisme, comme facteur essentiel de développement local et outil de l'aménagement durable du territoire, possède une forte dimension politique qui interpelle directement les gouvernements nationaux et leurs populations.
Cette volonté politique de faire avancer, de manière concertée, un tel modèle de tourisme européen peut s'appuyer sur une série de propositions d'actions concernant les secteurs économique, social et de l'emploi.
Propositions dont vous avez eu connaissance à partir du document de travail qui vous a été adressé.
Ainsi, en matière économique, il convient de s'interroger sur :
* la mise en commun des informations dont nous disposons sur le secteur touristique pour assurer une lisibilité accrue de l'efficacité des politiques nationales,
* la réalisation d'un outil de mesure du poids économique du tourisme dans les économies nationales à travers le compte satellite du tourisme,
* la façon de faciliter, l'accès des petites et moyennes entreprises aux dispositifs existant au niveau européen pour accroître leur efficacité et mieux former leurs dirigeants aux évolutions en cours dans le secteur du tourisme,
Il convient de s'interroger aussi sur :
* le phénomène de concentrations constaté chez certains gros tours opérateurs pour affronter les marchés internationaux et les conséquences de ce phénomène sur la structure de notre offre touristique, sur la diversité nécessaire des opérateurs, sur la nature des emplois et sur le développement équilibré des territoires.
* la mise en cohérence d'indicateurs de qualité de l'offre touristique pour répondre aux attentes et aux exigences accrues des consommateurs européens,
* la promotion de l'Europe à l'étranger comme destination riche de cultures et de traditions, à partir de programmes intra-européens,
Toujours dans le domaine économique, il convient de s'interroger enfin sur :
* la mise en réseau de territoire pilotes porteurs d'expériences réussies, et la recherche de critères propres à cette forme de développement touristique et d'aménagement du territoire avec la mise en uvre sur la base du volontariat d'un label ou d'une charte appropriée,
* la préparation par la Commission d'un agenda 21 du tourisme qui pourrait être intégré à l'agenda 21 communautaire en prévision de la Commission du développement durable dite "de RIO + 10".
Dans le domaine de l'emploi, nous avons tous bien compris - et l'atelier du Forum de ce matin l'a bien mis en évidence - que là plus qu'ailleurs, nous nous devons de coordonner et améliorer nos actions.
Car la pression qui s'exerce aujourd'hui sur le marché du travail, dans tous les pays de l'Union, la faible attractivité des emplois du tourisme liée aux conditions de travail difficiles et aux faibles rémunérations, à la formation insuffisante et à la qualification peu élevée des emplois, la faible maîtrise du management des ressources humaines par les dirigeants des petites entreprises, tous ces facteurs peuvent entraîner un blocage du développement touristique en Europe.
Il nous faut donc être attentifs à améliorer cette situation par des actions concrètes.
Notre dialogue pourrait ainsi porter sur :
* l'accompagnement des partenaires sociaux pour faciliter la reprise d'un dialogue social renforcé, permanent et dépassant les corporatismes,
* la formation des salariés et des dirigeants pour les préparer aux évolutions des métiers du tourisme,
* l'utilisation optimisée au sein de nos politiques nationales pour l'emploi touristique, des dispositifs européens comme le fonds social,
* l'élaboration d'un outil d'évaluation et d'observation des politiques d'emploi pour encourager là aussi le développement des bonnes pratiques, anticiper les besoins à venir des petites et moyennes entreprises et veiller à ce que l'emploi dans le tourisme soit bien intégré dans les autres initiatives communautaires.
Dans le domaine social enfin, il existe dans chacun de nos pays, des politiques particulières destinées à faciliter l'exercice du droit aux vacances selon les sensibilités, les habitudes et les règles d'assistance nationales.
Il semble donc possible, par des concertations bilatérales entre les administrations et les organisations associatives ou privées agissant dans ce domaine, de parvenir assez vite à élargir le champ de l'accès aux vacances à davantage de nos concitoyens.
C'est vrai notamment pour ce qui concerne :
* les jeunes, futurs touristes mais aussi citoyens de l'Europe de demain,
* les familles les plus démunies, pour lesquelles existent des systèmes publics ou privés d'aide au départ en vacances, systèmes qu'il pourrait être intéressant de coordonner pour en accroître l'efficacité,
* les handicapés pour lesquels des politiques d'accessibilité des équipements sont mises en uvre au niveau des États. Une concertation entre les associations nationales en charge des handicapées et les États-membres par l'intermédiaire de la Commission serait, je crois, très bénéfique à ces personnes et pourrait déboucher sur l'élaboration d'un label commun favorisant la lisibilité de l'offre touristique à leur intention.
Vous le voyez, cher(e)s collègues, Monsieur le Commissaire, nous avons la possibilité de mener si nous le voulons de larges actions de concertation dans le cadre d'une coopération volontaire, pour bâtir une véritable stratégie européenne du tourisme, porteuse d'espoir et de paix pour nos concitoyens dans le respect de nos sensibilités et diversités nationales.
C'est le sens du projet de résolution que j'ai soumis à votre réflexion.
C'est de cela, et des propositions de la Commission dont Monsieur le Commissaire LIIKANEN va nous faire la présentation maintenant, que je propose que nous débattions cet après midi.
Je m'attacherai à présenter au titre de la Présidence Française au Conseil du Marché Intérieur du 30 novembre les conclusions auxquelles nous arriverons ensemble et à faire en sorte, avec votre appui, qu'elles figurent en bonne place dans le document final du Conseil Européen de NICE des 7, 8 et 9 décembre, de façon à leur accorder toute la dimension politique qui est la leur.
Monsieur le Commissaire, je vous passe la parole.
(source http://www.tourisme.gouv.fr, le 11 décembre 2000)
Quelques jours avant la réunion des Ministres européens du tourisme à Lille, je suis très heureuse de vous accueillir ici, au Centre d'Accueil de la Presse Étrangère, pour vous présenter l'action que je mène au titre de la Présidence française de l'Union Européenne, en liaison avec mes collègues des autres pays et avec la Commission.
Vous le savez, le tourisme joue, en Europe, un rôle de plus en plus important sur le plan économique, mais aussi culturel et politique.
Avec plus de 392 millions de visiteurs en 1999, l'Europe est aujourd'hui la première région touristique mondiale. Elle est également la première région émettrice de touristes vers les autres destinations de la planète.
En termes économiques, elle a, à ce double titre, enregistré en 1999, 275 milliards d'euros de recettes touristiques et, d'après les prévisions, ces résultats devraient se confirmer et même s'amplifier dans l'avenir.
Ainsi, l'Organisation Mondiale du Tourisme (OMT) prévoit-elle, dans les dix prochaines années, un doublement des flux touristiques en Europe et un triplement au niveau mondial.
Selon ces mêmes projections, ce mouvement devrait s'accompagner de la création de 2 à 3 millions d'emplois de plus que les 9 millions d'emplois, directs et indirects, déjà recensés dans cette activité, au sein de l'Union Européenne.
Au cours des prochaines années, le tourisme va ainsi devenir l'une des principales activités économiques mondiales, dépassant par exemple, en termes d'exportation, les secteurs de la production pétrolière et de l'automobile.
Pour l'Europe, son développement répond aux enjeux de la construction européenne.
Il offre des opportunités nouvelles pour satisfaire les objectifs politiques de l'Union que sont la croissance économique, l'emploi, le bien-être des populations et le développement durable.
Parce qu'il s'appuie sur les richesses spécifiques de nos pays et de nos régions, le tourisme s'impose comme un facteur essentiel du développement local et comme l'un des outils de l'aménagement durable du territoire européen.
Mais le tourisme, ce n'est pas qu'une activité socio-économique, aussi importante soit-elle. C'est aussi un enjeu culturel et politique.
Porteur des valeurs communes de notre continent, il constitue un moteur essentiel pour promouvoir la citoyenneté européenne, à travers les voyages et les séjours des européens à l'intérieur de l'Europe.
Il est aussi un vecteur important, auprès des autres régions du monde, de la culture et des valeurs de notre continent.
On le voit, le tourisme possède une forte dimension politique, qui interpelle directement les gouvernements nationaux et les institutions européennes.
C'est pourquoi, même si le tourisme ne relève pas, à proprement parler, d'une compétence communautaire, son intégration à la politique de l'Union est une idée qui, progressivement, fait son chemin.
En quelques mots, je veux vous en faire un rapide historique.
C'est en 1982 que la Commission a présenté pour la première fois au Conseil les premières lignes d'une politique coordonnée dans ce domaine et en 1987 qu'un Comité consultatif du tourisme a été créé et qui depuis se réunit régulièrement.
Il y a juste dix ans, en proclamant l'année 1990 "Année Européenne du Tourisme", le Conseil et les pays membres de l'Union ont contribué à donner au secteur une visibilité nouvelle au sein des institutions.
Deux ans plus tard, le 7 février 1992, le Traité de Maastricht a reconnu pour la première fois, dans son article 3, la possibilité de mesures favorables au tourisme.
Dans les années qui ont suivi, de 1992 à 1995, des avis et des recommandations du Parlement Européen et du Comité Économique et Social ont été publiés, avec pour objectif de faire prendre conscience à la Commission et au Conseil qu'il faut mettre en oeuvre des actions plus incisives dans le domaine du tourisme.
En 1995 et 1996, des mesures ont alors été adoptées par la Commission en vue d'améliorer la connaissance du tourisme, la qualité des services touristiques, et la coopération entre les organismes publics et privés en charge des politiques nationales du tourisme.
Mais c'est surtout à partir de 1997, il y a donc trois ans, que les choses s'accélèrent. Suite à l'organisation, sous l'impulsion de la Présidence luxembourgeoise, d'une conférence sur le thème du tourisme et de l'emploi, un Groupe de travail de haut niveau sur ce thème a été constitué.
A la suite de ses travaux, une communication de la Commission en date du 28 avril 1999 "Accroître le potentiel du tourisme pour l'emploi" a entériné cette prise de conscience. En juin 1999 le Conseil a adopté la stratégie proposée et demandé au Comité consultatif de mettre en place quatre groupes de travail.
Cette stratégie, consistant à approfondir la connaissance du secteur du tourisme et à une meilleure utilisation des politiques existantes, a été largement soutenue par le Parlement, le Comité économique et social européen et le Comité des régions.
Enfin, il y a six mois, le 11 mai 2000, à Vilamoura, la Présidence portugaise a organisé la première réunion des ministres européens du tourisme. Un véritable consensus des États membres s'est alors dessiné pour renforcer la coopération des États membres et valoriser l'intervention communautaire dans le domaine du tourisme.
Première destination touristique mondiale, la France a dès le départ soutenu ces initiatives, et il était donc logique que la Présidence française de l'Union me donne une occasion de faire franchir à la coopération européenne en matière touristique un nouveau bond qualitatif.
Pour cela je me suis d'abord attachée à tisser des liens avec les États pour que cette coopération progresse.
C'est ainsi que j'ai multiplié ces dernières semaines les rencontres bilatérales avec mes collègues ministres, avec les représentants de la Commission et du Parlement européen. J'en ai tiré plusieurs enseignements.
En premier lieu, j'ai eu confirmation que le traditionnel clivage entre pays émetteurs, au Nord, et pays récepteurs, au Sud, était en train de s'estomper et que l'Europe devenait, de plus en plus, une destination à part entière.
Mes collègues et moi-même, sommes également convaincus que le développement du tourisme bénéficie aujourd'hui de facteurs extérieurs favorables liés aux mutations de nos sociétés.
Je pense tout particulièrement aux évolutions démographiques, mais aussi à la démocratisation des transports, au développement des technologies de l'information et de la communication, à l'apparition de nouveaux rapports au travail et aux loisirs.
Enfin, un véritable consensus se dessine pour, qu'à côté d'un certain tourisme de masse, se développent d'autres formes de tourisme, liées directement aux comportements nouveaux des touristes eux-mêmes, dont les exigences grandissent tant en termes de qualité que de liberté de choix dans l'offre touristique.
Un développement fondé sur des emplois dont la particularité est d'être répartis harmonieusement sur l'ensemble des territoires ; un développement que nous voulons soucieux d'équilibre, respectueux de l'environnement, des traditions, des cultures et des hommes ; un développement maîtrisé par les populations locales et qui leur soit bénéfique. C'est ce que nous appelons un tourisme durable, et qui peut caractériser le tourisme européen.
C'est en fonction du sentiment que j'ai eu d'un excellent climat, préalable à la préparation de notre prochaine conférence informelle de Lille, que j'ai décidé d'organiser deux événements simultanés le même jour.
Mercredi prochain, 22 novembre à Lille, se tiendra ainsi le matin un important "Forum sur le tourisme durable".
Il réunira de nombreux participants des pays de l'Union Européenne comme des pays d'Europe centrale et orientale.
Ministres, parlementaires, représentants des institutions européennes, de l'industrie touristique, experts et professionnels du secteur auront ainsi l'occasion d'échanger leurs savoirs et savoir-faire au cours de trois ateliers traitant des liens à définir entre le développement durable du tourisme, les opérateurs touristiques, l'aménagement des territoires et l'emploi.
L'après-midi, la Conférence informelle des ministres offrira la possibilité à l'ensemble des États, d'appréhender le travail accompli par les représentants des pays de l'Union Européenne au sein de la Commission.
Celle-ci présentera un rapport intermédiaire faisant le point sur les avancées des quatre groupes de travail mis en place, après le Conseil du Marché Intérieur de juin 1999, sur les thèmes de la formation professionnelle des acteurs du tourisme, de l'information en lien avec l'essor des nouvelles technologies, de la qualité de l'offre touristique et du développement touristique durable.
Cette présentation donnera lieu à un échange sur les idées forces qui ont pu être dégagées au cours de cette première étape.
Cette réunion des ministres permettra également à la Présidence française de poursuivre la réflexion engagée, sous Présidence portugaise, dans le but de déterminer des actions coordonnées, favorables à l'émergence de bonnes pratiques touristiques, dans une logique de développement durable.
Dans le cadre de ce qu'on appelle une "méthode ouverte de coordination" entre États, je serai ainsi amenée à proposer quelques recommandations. Elles porteront sur le cadre institutionnel, sur la connaissance de l'économie du tourisme et l'échange d'informations, sur la prise en compte de la durabilité et de l'éthique, sur le soutien aux acteurs économiques et en particulier les PME, notamment par rapport aux phénomènes de concentration des entreprises dans le secteur du tourisme, sur la promotion de la destination Europe.
Je ferai aussi des recommandations rentrant dans le cadre de la politique que je mène depuis maintenant plus de trois ans au sein du gouvernement français : le droit aux vacances pour tous, la prise en compte des personnes handicapées, les conditions de travail des salariés, la qualité des services.
Ces recommandations, une fois débattues et validées, avec d'autres peut-être ici de nos échanges, feront l'objet d'une information au prochain Conseil du marché intérieur qui se tiendra le 30 novembre prochain.
Mesdames et Messieurs les journalistes,
Mon objectif, que j'espère partagé par mes collègues et la Commission, est de faire vivre un certain "modèle européen du tourisme", au service tant du développement économique que de la cohésion sociale. C'est, vous l'aurez compris un chantier ambitieux, un chantier d'avenir qui appelle la plus large mobilisation et pour lequel les relais d'opinion que vous êtes peuvent jouer un rôle essentiel d'information et de sensibilisation.
C'est pourquoi je tiens à vous remercier de votre attention et du dialogue que je vous propose maintenant d'entamer.
(Source http://www.tourisme.gouv.fr, le 28 décembre 2000)
Mesdames et messieurs les ministres,
Cher(e)s collègues,
Monsieur le commissaire,
Permettez-moi tout d'abord de vous remercier pour votre présence dans cette belle ville de LILLE qui nous accueille aujourd'hui et qui symbolise, au cur de la région du Nord Pas de Calais, toute la richesse et tout le potentiel d'une Europe en développement.
Vous le savez, cette réunion des ministres chargés du tourisme fait suite à celle organisée sous l'autorité de nos amis portugais en mai dernier et revêt une importance particulière.
Car, si la rencontre de VILAMOURA a permis de remettre sur la bonne voie la coopération européenne en matière de tourisme, j'espère que celle de LILLE permettra d'acter la volonté politique de nos pays de participer, dans un secteur qui ne relève pas de la compétence communautaire, à l'élaboration d'un modèle de développement durable qui fasse référence dans l'avenir.
Vous le savez également, l'histoire, parfois chaotique, des tentatives de bâtir une politique européenne a longtemps souffert, d'une absence de vision partagée des États-membres sur les politiques à mener en matière de tourisme.
Or, depuis le Conseil de Luxembourg en 1997 et à la suite des travaux menés par le Groupe de Haut Niveau sur le tourisme et l'emploi qui s'est constitué à cette période, les choses ont bougé favorablement.
Ainsi, la prise de conscience par tous les partenaires institutionnels européens et nationaux de l'importance du tourisme dans la croissance européenne, ses perspectives de développement pour les vingt prochaines années, leurs conséquences en termes d'aménagement de nos territoires et d'emplois, ont amené la Commission et les États-membres à se préoccuper des enjeux du développement du tourisme en Europe.
Je ne rappellerai que pour mémoire des chiffres que nous avons tous en tête mais qui illustrent parfaitement ces enjeux :
* 392 millions de visiteurs étrangers accueillis en Europe l'an dernier, l'Europe étant également la première région émettrice,
* 275 milliards d'Euros de recettes touristiques,
* 9 millions d'emplois et une prévision de 12 millions d'ici dix ans,
* un doublement attendu des flux touristiques en Europe d'ici 2020.
Plus que ces chiffres, se sont bien les mutations que nous percevons aujourd'hui qui doivent nous interpeller.
* Ainsi, le clivage entre pays récepteurs du Sud de l'Europe et pays émetteurs du Nord s'atténue.
* Partout, on voit se développer de nouvelles formes de tourisme : tourisme de court séjour, tourisme culturel, tourisme à la recherche de valeurs plus authentiques, de diversité et de traditions qui font la richesse et l'identité de chacun de nos pays.
* Les attentes de nos concitoyens, comme de nos visiteurs étrangers, se font plus exigeantes en terme de liberté de choix et de qualité de services.
* Sous l'effet des évolutions technologiques l'exigence de qualité, et le besoin de qualification accrue, les métiers du tourisme changent. Les emplois touristiques, qui jusque là se caractérisaient par la précarité, la faible qualification et la saisonnalité, vont devoir évoluer
- et c'est tant mieux ainsi - vers de véritables emplois qualifiés et permanents.
* D'autre part, le tissu de petites et moyennes entreprises qui irrigue l'ensemble de nos territoires, parfois même les plus reculés, et assure la diversité de l'offre qui caractérise nos régions, voit son environnement économique se modifier. En effet, la mondialisation et le phénomène de concentration des opérateurs touristiques n'est pas sans conséquence, à terme, sur les structures de distribution et de production constituées en majorité de ces petites et moyennes entreprises.
* Enfin, nous le savons, le tourisme n'est plus aujourd'hui réductible à sa seule dimension économique. Il s'inscrit dans une éthique de respect mutuel des modes de vie et des valeurs des populations et, vecteur d'échange de culture et de connaissance réciproques, il participe à la construction de valeurs européennes.
Dans ce cadre général, les politiques du tourisme mises en place dans chacun de nos pays revêtent une importance toute particulière.
Nous avons même une responsabilité commune à l'égard de nos concitoyens pour préparer l'Europe et ses habitants à ces évolutions du tourisme.
Il s'agit de leur garantir, autant que faire se peut, un développement touristique de qualité, soucieux d'équilibre entre performance économique et valorisation sociale, créateur d'emplois qualifiés et durables, respectueux des attentes des consommateurs et du maintien de la diversité de nos patrimoines naturels et culturels.
En ce sens, le tourisme représente un atout essentiel pour faciliter le renforcement de la coordination économique et de la cohésion sociale en Europe.
C'est, je crois, un des premiers encouragements à tirer de notre réunion de VILAMOURA.
C'est un de ceux, aussi, que je tire des nombreuses consultations que j'ai eu avec la plupart d'entre vous, en prévision de notre rencontre aujourd'hui.
A chacune de ces consultations, j'ai rencontré la même volonté de travailler ensemble au progrès de nos politiques nationales, dans un souci de valorisation de la diversité de nos richesses et de nos territoires, au bénéfice de nos concitoyens.
Les travaux lancés au sein de la Commission entre les États-membres - dont Monsieur le Commissaire LIIKANEN nous présentera tout à l'heure, dans un rapport d'étape, les premiers résultats - ont montré ce besoin de concertation et d'échanges entre nous pour agir de manière coordonnée, à la reconnaissance et à la mise en valeur de ce secteur, jusqu'ici si peu présent dans les grandes orientations européennes.
De même, le Forum de ce matin en associant l'ensemble des acteurs publics et privés du tourisme en Europe, a fait ressortir le besoin d'une concertation accrue entre les États pour apporter des réponses communes aux besoins réels et aux attentes urgentes des opérateurs touristiques. Qu'il s'agisse d'entreprises, de travailleurs ou d'élus responsables du devenir de territoires.
Je crois qu'une impulsion forte est aujourd'hui nécessaire.
Il n'est pas indispensable de modifier pour cela la compétence communautaire en la matière.
La réunion de VILAMOURA a fait clairement ressortir le désir des participants de respecter le principe de subsidiarité, en laissant aux États membres la plus grande marge d'action.
Il existe aujourd'hui d'autres moyens pour favoriser l'association des expériences et la synergie des compétences.
C'est le sens de la méthode ouverte de coordination recommandée par le Conseil Européen de LISBONNE pour définir ensemble les lignes directrices et les objectifs d'amélioration ou de réforme à mener à court, moyen ou long terme, et permettre une diffusion des meilleures pratiques entre nous.
Cette volonté de coopération et de concertation pour renforcer notre action en faveur d'un nouveau modèle européen du tourisme ne passe pas non plus, à mon sens, obligatoirement par des moyens politiques budgétaires supplémentaires.
Les divers instruments d'intervention existant au niveau européen peuvent largement pourvoir aux besoins d'accompagnement du secteur, à la condition que le tourisme y soit mieux intégré et que les ressources des fonds structurels et des programmes communautaires soient optimisés en faveur d'une politique du tourisme clairement identifiée. C'est notamment le cas de la politique régionale, de la politique de l'emploi et du fonds social européen, de celles des transports, de l'environnement et du développement rural.
Il s'agit de travailler ensemble et d'instaurer un dialogue, le plus large possible, dans le strict respect du principe de subsidiarité, en nous attachant à préconiser dès aujourd'hui des actions concrètes.
C'est pourquoi je vous propose de soutenir fermement les premières conclusions de la Commission qui vont nous être soumises à l'instant.
Mais, sans attendre la fin des travaux des groupes de travail mis en place - qui, si je me réfère aux recommandations de la Commission, interviendra en automne 2001 - nous pouvons, dès à présent, examiner quelques propositions à même d'anticiper sur les évolutions attendues dans le secteur du tourisme.
Tout d'abord, dans le domaine institutionnel et politique.
Il faut, je crois, réaffirmer notre volonté d'une approche intégrée du tourisme dans les politiques nationales, en convenant que les ministres en charge du tourisme puissent se réunir avec la Commission, sous chaque présidence, à l'occasion d'une manifestation et sur un thème laissé à l'initiative de l'État assurant cette présidence.
Cette réunion semestrielle permettrait ainsi de faire le point sur les progrès réalisés, d'examiner les éventuelles difficultés et maintenir une forte orientation politique.
Il appartiendra également à la Commission de s'assurer que le tourisme bénéficiera davantage que par le passé d'une claire identification dans les politiques et initiatives communautaires et au sein de ses propres directions générales.
Ceci afin d'en accroître la visibilité et d'en améliorer la structure.
Dans le domaine international, nous pourrions, tout d'abord, être attentifs à intensifier notre présence collective au sein des organismes internationaux pour faire avancer nos conceptions nouvelles en matière de tourisme.
Dans cet esprit, nous devrions, plus particulièrement, nous attacher à faire vivre, dans nos politiques nationales, le Code Mondial d'Éthique que la plupart d'entre nous a approuvé au sein de l'Organisation Mondiale du Tourisme.
Bien entendu, des dispositions doivent figurer au premier chef pour lutter contre le tourisme sexuel impliquant des enfants. C'est pourquoi je vous propose d'unir nos efforts pour que le travail entrepris sur ce sujet soit poursuivi.
Par ailleurs, en matière de coopération internationale, nous aurions tout intérêt à promouvoir cette idée d'un modèle européen de développement durable du tourisme auprès des organisations en charge du développement.
Un modèle européen qui peut être la base des contacts que nous engageons aujourd'hui avec les représentants des pays d'Europe centrale et orientale présents à nos travaux sur le tourisme durable.
Un tourisme qui répond aux enjeux de la construction européenne, porteur de valeurs communes ; un tourisme équilibré, respectueux des identités nationales et de leur diversité. Un tourisme maîtrisé par les populations locales et qui leur est bénéfique de façon durable.
C'est ce qui a été rappelé par les participants au Forum sur le tourisme durable qui s'est tenu ce matin, ici-même, à Lille.
Par les attentes qu'ils ont exprimées, ils ont montré combien le tourisme, comme facteur essentiel de développement local et outil de l'aménagement durable du territoire, possède une forte dimension politique qui interpelle directement les gouvernements nationaux et leurs populations.
Cette volonté politique de faire avancer, de manière concertée, un tel modèle de tourisme européen peut s'appuyer sur une série de propositions d'actions concernant les secteurs économique, social et de l'emploi.
Propositions dont vous avez eu connaissance à partir du document de travail qui vous a été adressé.
Ainsi, en matière économique, il convient de s'interroger sur :
* la mise en commun des informations dont nous disposons sur le secteur touristique pour assurer une lisibilité accrue de l'efficacité des politiques nationales,
* la réalisation d'un outil de mesure du poids économique du tourisme dans les économies nationales à travers le compte satellite du tourisme,
* la façon de faciliter, l'accès des petites et moyennes entreprises aux dispositifs existant au niveau européen pour accroître leur efficacité et mieux former leurs dirigeants aux évolutions en cours dans le secteur du tourisme,
Il convient de s'interroger aussi sur :
* le phénomène de concentrations constaté chez certains gros tours opérateurs pour affronter les marchés internationaux et les conséquences de ce phénomène sur la structure de notre offre touristique, sur la diversité nécessaire des opérateurs, sur la nature des emplois et sur le développement équilibré des territoires.
* la mise en cohérence d'indicateurs de qualité de l'offre touristique pour répondre aux attentes et aux exigences accrues des consommateurs européens,
* la promotion de l'Europe à l'étranger comme destination riche de cultures et de traditions, à partir de programmes intra-européens,
Toujours dans le domaine économique, il convient de s'interroger enfin sur :
* la mise en réseau de territoire pilotes porteurs d'expériences réussies, et la recherche de critères propres à cette forme de développement touristique et d'aménagement du territoire avec la mise en uvre sur la base du volontariat d'un label ou d'une charte appropriée,
* la préparation par la Commission d'un agenda 21 du tourisme qui pourrait être intégré à l'agenda 21 communautaire en prévision de la Commission du développement durable dite "de RIO + 10".
Dans le domaine de l'emploi, nous avons tous bien compris - et l'atelier du Forum de ce matin l'a bien mis en évidence - que là plus qu'ailleurs, nous nous devons de coordonner et améliorer nos actions.
Car la pression qui s'exerce aujourd'hui sur le marché du travail, dans tous les pays de l'Union, la faible attractivité des emplois du tourisme liée aux conditions de travail difficiles et aux faibles rémunérations, à la formation insuffisante et à la qualification peu élevée des emplois, la faible maîtrise du management des ressources humaines par les dirigeants des petites entreprises, tous ces facteurs peuvent entraîner un blocage du développement touristique en Europe.
Il nous faut donc être attentifs à améliorer cette situation par des actions concrètes.
Notre dialogue pourrait ainsi porter sur :
* l'accompagnement des partenaires sociaux pour faciliter la reprise d'un dialogue social renforcé, permanent et dépassant les corporatismes,
* la formation des salariés et des dirigeants pour les préparer aux évolutions des métiers du tourisme,
* l'utilisation optimisée au sein de nos politiques nationales pour l'emploi touristique, des dispositifs européens comme le fonds social,
* l'élaboration d'un outil d'évaluation et d'observation des politiques d'emploi pour encourager là aussi le développement des bonnes pratiques, anticiper les besoins à venir des petites et moyennes entreprises et veiller à ce que l'emploi dans le tourisme soit bien intégré dans les autres initiatives communautaires.
Dans le domaine social enfin, il existe dans chacun de nos pays, des politiques particulières destinées à faciliter l'exercice du droit aux vacances selon les sensibilités, les habitudes et les règles d'assistance nationales.
Il semble donc possible, par des concertations bilatérales entre les administrations et les organisations associatives ou privées agissant dans ce domaine, de parvenir assez vite à élargir le champ de l'accès aux vacances à davantage de nos concitoyens.
C'est vrai notamment pour ce qui concerne :
* les jeunes, futurs touristes mais aussi citoyens de l'Europe de demain,
* les familles les plus démunies, pour lesquelles existent des systèmes publics ou privés d'aide au départ en vacances, systèmes qu'il pourrait être intéressant de coordonner pour en accroître l'efficacité,
* les handicapés pour lesquels des politiques d'accessibilité des équipements sont mises en uvre au niveau des États. Une concertation entre les associations nationales en charge des handicapées et les États-membres par l'intermédiaire de la Commission serait, je crois, très bénéfique à ces personnes et pourrait déboucher sur l'élaboration d'un label commun favorisant la lisibilité de l'offre touristique à leur intention.
Vous le voyez, cher(e)s collègues, Monsieur le Commissaire, nous avons la possibilité de mener si nous le voulons de larges actions de concertation dans le cadre d'une coopération volontaire, pour bâtir une véritable stratégie européenne du tourisme, porteuse d'espoir et de paix pour nos concitoyens dans le respect de nos sensibilités et diversités nationales.
C'est le sens du projet de résolution que j'ai soumis à votre réflexion.
C'est de cela, et des propositions de la Commission dont Monsieur le Commissaire LIIKANEN va nous faire la présentation maintenant, que je propose que nous débattions cet après midi.
Je m'attacherai à présenter au titre de la Présidence Française au Conseil du Marché Intérieur du 30 novembre les conclusions auxquelles nous arriverons ensemble et à faire en sorte, avec votre appui, qu'elles figurent en bonne place dans le document final du Conseil Européen de NICE des 7, 8 et 9 décembre, de façon à leur accorder toute la dimension politique qui est la leur.
Monsieur le Commissaire, je vous passe la parole.
(source http://www.tourisme.gouv.fr, le 11 décembre 2000)