Interviews de M. Charles Pasqua, président du RPF, à France 2 le 6 avril 2000 et à Europe 1 le 7, sur la préparation des listes pour les élections municipales, les relations avec le RPR et le statut de la Corse.

Prononcé le

Média : Emission Les Quatre Vérités - Europe 1 - France 2 - Télévision

Texte intégral

Charles Pasqua, invité d'Europe 1. Le 7 avril 2000
Bonjour, Monsieur Pasqua.
Bonjour.
D'abord, la Corse parce que la Corse et Pasqua c'est souvent lié, si vous permettez. Est ce que peu à peu, pas à pas, l'avenir de la Corse se précise ?
Non, je crois queJe donne le sentiment brut de décoffrage que j'ai. J'ai le sentiment que le Premier ministre s'est engagé dans un processus sans avoir une idée bien précise de ce qu'il souhaitait ou de ce qui pouvait être fait pour la Corse. Alors il ne s'agit pas d'avancer pas à pas. Si c'est avancer pas à pas dans le brouillard, ça je dois dire que c'est en route.
Mais une discussion avec les parties concernées, c'est à dire les élus corses à Paris au grand jour, ce n'est pas un progrès ?
Et qu'est ce que cela change à cette discussion ?
D'abord, c'est en train de montrer que les élus corses n'arrivent pas à s'entendre et qu'ils sont eux mêmes divisés.
Ca, ce n'est pas une nouvelle. Tout le monde le savait depuis longtemps. Quant à rencontrer des élus corses, je l'ai fait moi même, Monsieur Balladur l'a fait lorsqu'il est venu à Ajaccio devant l'assemblée de Corse dans le cadre de la définition d'un projet de développement pour la Corse. Tout le monde sait cela. En réalité, il y a en Corse des gens qui sont pour l'indépendance de la Corse et qui, au travers de ces discussions et de l'autonomie, veulent aller dans cette direction.
C'est à dire, pour vous, vous démasquez ces gens, vous dites ils disent "l'autonomie" pour arriver à "l'indépendance".
Oui.
Mais ils sont minoritaires.
Oui, ils sont minoritaires. Et je pense qu'il faut avoir le courage pour les uns et les autres de dire la vérité. Par exemple, je prends un exemple précis, comment peut on imaginer une seule minute dans notre pays que l'enseignement du corse devienne obligatoire ? Que l'on fasse le maximum pour favoriser l'apprentissage du corse, oui, mais qu'il devienne obligatoire, c'est invraisemblable.
Monsieur Pasqua, et si l'avenir et la tranquillité de la Corse passaient par un référendum et même une révision de la Constitution ?
Non, mais il ne peut pas y avoir Je dirais d'abord qu'un référendum et une révision de la Constitution dans le contexte actuel ne résoudrait rien du tout.
Le sentiment des Corses, on le connaît. 80% des Corses quand il y a des élections manifestent leur volonté de rester dans le cadre national. C'est à l'Etat d'assumer ses responsabilités et à personne d'autre. Qu'on aille plus loin dans la voie de la décentralisation, du transfert d'un certain nombre de compétences, oui.
Donc, on est parti pour de longues discussions ?
Oui, bien entendu. Mais dans ce cadre de longues discussions, mes compatriotes sont tout à fait armés. Ils sont prêts là pour de longues discussions, il n'y a aucun problème.
Mais pour vous, il appartient au Premier ministre de trancher les divergences entre les élus corses ?
Non, certainement pas.
Donc, ils se débrouillent entre eux ?
Il ne s'agit pas de dire qu'ils se débrouillent entre eux. Que les Corses dialoguent entre eux, qu'ils essaient d'abord de se mettre d'accord sur un projet de développement économique autour duquel on pourrait rassembler une très large majorité, tout cela me paraît souhaitable. Mais il y a des sujets sur lesquels il ne peut pas y avoir d'accord.
Pour Charles Pasqua, pas de référendum en Corse ?
Le référendum est possible. Il est même prévu dans le cadre des lois sur l'aménagement du territoire mais il ne peut porter que sur les compétences
Pas sur les institutions ?
Non, certainement pas.
Est ce que vous répondez à ceux qui veulent vraiment qu'il y ait une consultation de la Corse et des Corses: simplement une dissolution de l'assemblée territoriale corse et de nouvelles élections ?
Oui, pourquoi pas. Mais seulement si, auparavant, on a quelque chose à dire aux gens. On ne va pas dissoudre pour le plaisir de dissoudre.
Monsieur Pasqua, Paris.
Paris est une femme, très belle chanson.
Continuez à chanter, ce n'est pas mal du tout. Mais répondez moi si vous voulez même en musique et en chanson. Est ce que Paris, c'est Paris ou est ce que Paris, c'est la France? Je veux dire, c'est un enjeu national comme dit Edouard Balladur ?
Paris, de toute façon, c'est un enjeu national. Personne n'imagine que, si Paris venait à changer de camp, cela n'aurait pas un certain retentissement sur l'ensemble du pays. Mais c'est avant tout naturellement le choix des Parisiens.
Mais pour vous, que Paris soit gagné par la gauche, est ce que cela vous ne vous fait ni chaud ni froid ?
Cela ne me ferait pas plaisir, non.
Et alors, autrement dit, vous ne jouerez pas la défaite de la droite ?
Certainement pas.
Donc, vous ne présenterez pas de candidat pour ne pas en ajouter aux quatre qui sont déjà en compétition même s'il y en a un au moment final ?
Je vous vois venir. Premièrement, ainsi qu'on vous le rappelait il y a un petit moment je crois ou quelques jours, l'union n'a jamais été garante du succès. L'union, dès le premier tour dans le cadre d'un scrutin à deux tours, ne signifie pas forcément que ce soit un atout supplémentaire.
Cela veut dire qu'il y aura des RPF ?
Il y aura des candidats RPF dans tous les arrondissements de Paris comme je l'ai dit. Et en fonction des résultats du premier tour, puisque les autres se seront regroupés, nous nous entendrons pour avoir des listes d'union complètes au second tour.
Mais est ce que votre attitude sera variable selon le ou la sélectionnée du RPR ?
Non, parce que nous n'avons pas à intervenir. D'abord, ce ne sera pas seulement le choix du RPR. C'est cela qui est un peu plus compliqué d'ailleurs pour le RPR parce que le RPR ne peut pas prétendre non plus imposer son candidat à tout le monde à moins que les autres formations ne l'acceptent, ce qui est leur problème.
Quel est le profil idéal selon vous du futur maire de Paris ?
Le meilleur.
Il a un costume ou une robe ?
Il peut porter une robe si
Mais là, vous savez bien que les candidats ne sont pas avocats. Ils ne porteront pas de robe.
Si c'est un avocat, il peut porter une robe.
Non, mais faut il qu'il soit Parisien ? Faut il qu'il ait une stature ? Faut il qu'il ait de longs cheveux ? Encore que Panafieu a les cheveux courts.
Vous ne m'entraînerez pas sur ce terrain. Je ne connais pas tous les candidats. Chacun d'entre eux a des qualités et des défauts.
C'est un peu de baratin qui ne part sur rien. On en s'engage pas. Chacun a des qualités, des défauts.
Oui, mais c'est la vérité, c'est la réalité.
Vous connaissez bien Philippe Séguin. Vous l'avez vu démarrer. Il est entrain de dire partout qu'il est Parisien, il démarre, que sa priorité, c'est la lutte contre la pollution. Je vous pose la même question qu'à Edouard Balladur. Est ce qu'il y a une dynamique Séguin ? Est ce qu'il y a un effet Séguin dès le démarrage ?
Non, je n'ai pas ce sentiment. Mais cela viendra peut être.
Et vous le voyez, vous, devenir maire de Paris ?
S'il a été choisi par l'ensemble des autres formations et si effectivement il est en tête par rapport à nous au premier tour, nous l'aiderons. Nous aiderons de la même manière tout autre candidat qu'il s'agisse d'Edouard Balladur, de Françoise de Panafieu
Donc, ce n'est pas la politique du pire par Pasqua ?
Non, pas du tout. C'est l'affirmation de ce que nous sommes. Nous allons nous présenter avec notre drapeau sous nos couleurs et en disant ce que nous pensons dans tous les domaines, voilà.
Et dans d'autres villes, là où vous ne serez pas tête de liste, est ce que vous aiderez ou est ce que vous demanderez une stratégie d'alliance et de réciprocité ?
Il est bien évident que nous demanderons une stratégie de réciprocité. Compte tenu du poids qui est le nôtre dans un certain nombre de villes, nous demanderons à diriger nous mêmes les listes d'opposition. Et quand ce n'est pas le cas et que d'autres le font, eh bien nous demanderons la réciprocité en termes de positionnement sur ces listes.
Merci, Monsieur Pasqua.
Merci.
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Charles Pasqua, invité de l'émission "Les quatre vérités". Le 6 avril 2000
Charles Pasqua, bonjour.
Bonjour.
Vous dirigez le Rassemblement Pour la France aux côtés de Philippe de Villiers. Vous avez réuni hier soir vos instances dirigeantes pour discuter notamment des municipales et vous annoncez que vous allez revendiquer la tête de liste de l'opposition dans toutes les villes où votre mouvement a dépassé vos partenaires, vos collègues de l'opposition
Nous n'avons pas seulement décidé cela.
Oui, je sais, mais enfin c'est peut être cela qui va c'est à dire que là où vous avez "remporté" les européennes, vous revendiquez la tête de liste de l'opposition.
Ce sera aux autres formations de l'opposition de savoir ce qu'elles veulent faire. Nous, nous avons clairement indiqué les choses depuis un certain temps en ce qui concerne les villes de Paris, Lyon et Marseille.
Là, vous aurez vos candidats à vous.
Nous avons indiqué que nous aurons nos propres listes.
Mais on ne connaît pas la tête de liste de Paris.
Nous avons le temps.
Il y en a d'autres qui trouvent qu'ils n'ont pas le temps, qui se précipitent un peu.
Oui, mais enfin, ils annoncent leur candidature à la candidature à l'intérieur du RPR, et il faudra bien que le moment venu le RPR choisisse un seul candidat. C'est leur problème, ce n'est pas le nôtre.
Et puis ensuite, ils s'entendront avec les autres formations de l'opposition. Ce n'est pas notre affaire, là nous aurons nos propres listes. Nous avons le temps, jusqu'au mois de juin pour choisir nos têtes de liste. Ce sera pareil à Marseille et à Lyon. Ailleurs, il y a un certain nombre de villes où nous sommes arrivés en tête, c'est le cas notamment dans le Midi, depuis Marseille jusqu'à Perpignan, nous sommes arrivés de très loin en tête, alors
Pour les élections européennes !
Oui, pour les élections européennes. Mais chacun sait que nous avons là une implantation assez forte et c'est normal que nous réclamions, que nous disions que nous sommes prêts à constituer des listes et que nous invitions les autres à nous rejoindre. Puis ensuite il y a les villes qui sont actuellement détenues par la gauche, et nous disons que nous sommes prêts à participer à des listes d'union ou à les conduire, le cas échéant, si on considère qu'il vaut mieux que ce soit nous de façon à récupérer ces villes. Voilà, les choses sont claires, la balle est donc dans le camp des autres, c'est à eux de dire ce qu'ils veulent.
Oui, mais pensez vous vraiment qu'en leur faisant cette proposition vous cherchez à les mettre dans l'embarras, vous cherchez à les embêter ? Cela paraît peu probable quand même qu'ils acceptent, non ?
Je crois que les choses devront être examinées au cas par cas, mais ils ont d'abord à répondre à une question préalable en quelque sorte. Jusqu'à présent on était tenté de nous faire un procès en disant que nous refusions l'union même dans les endroits où il pourrait y avoir des conséquences, eh bien maintenant la balle est dans leur camp.
C'est vous qui proposez l'union.
Oui.
Et alors à Paris effectivement votre tête de liste, on la connaîtra un peu plus tard. Même si vous ne voulez pas vous mêler des affaires des autres, vous pensez quoi quand même de cette multiplication des candidatures à Paris au RPR, candidature à la candidature au RPR ?
Je crois qu'il y a beaucoup de candidats, moi je ne vais pas m'en mêler, je ne vais pas dire moi même quels sont les meilleurs. Ce n'est pas mon problème, je les connais tous bien entendu. J'ai regretté en son temps ce qui s'est passé au Conseil de Paris où les coups bas se sont multipliés, c'était pas très agréable et ce n'était pas très normal. Bon, maintenant il faut tirer un trait sur tout cela.
Il y a un certain nombre de candidats, Jean Tibéri bien entendu. Il y a même Françoise de Panafieu, Philippe Séguin, maintenant il y a Edouard Balladur. Edouard Balladur, en ce qui le concerne, a écrit à tous les présidents des formations de l'opposition.
Vous avez reçu une lettre, donc !
Y compris à moi, oui, bon !
Et alors ?
Bien, je dirais qu'il a été plus poli que les autres.
D'accord, mais quand vous dites que cela ne vous intéresse pas, cela vous intéressera au final quand même parce que, au deuxième tour des municipales
Oui, bien sûr.
Il y aura des fusions de listes. Donc celui qui tirera la liste de l'opposition vous représentera d'une certaine façon.
Oui seulement il ne faut pas oublier qu'à Paris les élections se font par arrondissement. Alors on a beau dire on a une très bonne tête de liste, mais il doit y avoir 20 têtes de listes. Il n'y a pas seulement une personne emblématique, elle ne tire pas toutes les listes.
Elle ne tire pas toutes les listes, mais enfin elle tire quand même
Mais elle a un rôle non négligeable à jouer et en principe, bien qu'on ne puisse jurer de rien, en principe c'est elle qui est destinée à occuper le poste de maire. Nous, nous avons dit des choses. Nous présenterons nos propres candidats au second tour à Paris, et naturellement nous serons prêts à nous entendre.
Pour faire barrage à la gauche.
Voilà. Bien sûr.
D'accord. Au RPR, les candidatures se multiplient, chez vous cela a l'air plutôt simple au niveau des candidatures. Par contre , on a beaucoup parlé de vous ces derniers temps parce qu'on avait l'impression qu'il y avait, que la lune de miel entre Philippe de Villiers et vous était terminée. On a entendu des tas de choses, que les élections internes ne s'étaient pas bien passées, des petites phrases. Alors, comment cela se passe ?
Oh, cela ne s'est pas bien passé. Je crois qu'il est difficile de réaliser d'un seul coup la symbiose avec des adhérents qui viennent d'horizons différents. Certains avaient déjà participé à l'action politique dans d'autres mouvements, beaucoup n'avaient jamais fait de politique, ne s'étaient jamais engagés dans un mouvement, c'est difficile d'arriver à rassembler tout le monde. Je crois que maintenant les choses sont faites. Nous avons hier soir pris acte des élections qui sont survenues, il y a très peu de contestations.
Vos amis sont minoritaires finalement.
Qu'est ce que cela veut dire ?
Moins de fédérations que d'habitude.
Mais qu'est ce que cela veut dire mes amis ? Tout s'est réclamé de moi, je n'ai que des amis. Je m'en réjouis, je n'en demandais pas tant. Non, il n'y a pas de problème de ce point de vue, il n'y a pas de problème entre de Villiers et moi. Nous avons la même analyse, nous avons la même démarche et on verra dans l'avenir. Ceux qui escomptaient ou ceux qui pensaient que notre mouvement allait éclater en seront pour leurs frais.
D'accord. Alors, on ne peut pas mettre un coin entre Philippe de Villiers et vous ?
Non.
Bonne campagne pour les municipales. Nous aurons peut être l'occasion de nous revoir d'ici là.
Merci.
Merci d'être venu.
(source http://www.rpfie.org, le 08/04/2000)