Texte intégral
Nous venons de tenir la 4ème et dernière séance du comité directeur du FAC (fonds d'aide et de coopération) pour 1998.
Il m'a semblé utile de rendre compte des travaux de cette instance au moment où la réforme de notre dispositif de Coopération entre en vigueur. Le FAC, est en effet l'un des instruments les plus emblématiques du partenariat que la France souhaite renouveler avec les pays en développement. On avait imaginé que l'on pourrait parler en préalable de la réforme. Mais je vous vois à peu près tous plutôt bien informés de cette réforme, en tout cas de ses objectifs, des principales mesures que nous avons commencé à mettre en oeuvre, de la création de cette grande Direction générale de la Coopération internationale et du Développement qui, à compter du 1er janvier, va structurer en quelque sorte notre action et devient la plus grande direction du ministère des Affaires étrangères.
J'aurais pu vous situer notre rencontre dans le temps, vous rappeler que le 28 janvier prochain, le premier comité interministériel de Coopération internationale et de Développement se réunira à Matignon sous la présidence de M. Lionel Jospin, et qu'à cette occasion nous définirons la Zone de solidarité prioritaire. Nous aurons l'occasion d'y réaffirmer évidemment l'approche partenariale qui est désormais la marque de notre relation avec les pays en développement notamment ; que ce partenariat conjugue à la fois l'ouverture sur l'ensemble du monde et en particulier toute l'Afrique, mais aussi la fidélité, c'est-à-dire le respect des alliances traditionnelles, qui ont gardé d'ailleurs à la France dans le monde un capital de sympathie et de respect. Une fidélité qui s'accompagne d'exigences accrues en matière de droit, de transparence et d'efficacité. C'est tout cela que nous essayons aussi d'illustrer au travers du Fonds d'aide et de Coopération, en particulier dans les inflexions que nous lui avons apportées au cours de l'année qui vient de s'écouler, puisqu'il s'agit de faire le bilan de cette année de FAC. Inflexion dans le sens d'un dialogue plus serré avec les partenaires africains. Je dis africains parce que ce sont, et de très loin, les bénéficiaires des fonds d'aide et de coopération. Dialogue serré à la fois pour qu'ils définissent mieux leurs besoins. Un dialogue serré aussi dans la gestion de ces projets avec la sanction du rapatriement des crédits, ou d'annulation des projets, si il n'y a pas une volonté suffisamment affirmée de la part des responsables de ces pays pour faire avancer les projets en question.
Nous nous sommes efforcés également au cours de cette année de faire mieux vivre le caractère interministériel du Comité directeur du Fonds d'aide et de coopération puisque je rappelle que les ministères de l'Education nationale, de l'Environnement, de l'Industrie, de l'Agriculture, de la Santé, de l'Equipement, et bien entendu des Finances y participent. Le secrétariat d'Etat à l'Outre-mer, la mission de Coopération du ministère, le secrétariat général de la Mer et le Conseil économique et social y sont pareillement représentés. Ce matin, j'ai d'ailleurs eu plaisir à enregistrer la satisfaction exprimée par d'autres ministères se félicitant d'une meilleure concertation dans la préparation des projets. J'allais oublier la présence importante des parlementaires du Sénat et de l'Assemblée nationale, qui je peux en porter témoignage, jouent un rôle actif dans nos réunions. Vous voyez que si j'ajoute le Commissariat général au Plan, la Caisse des Dépôts et Consignations, l'Agence française de développement, c'est le caractère interministériel qui prévaut et permet d'associer les grandes administrations et les grands organismes français.
Je me suis efforcé de présider chacun de ces comités directeurs. C'est pour moi aussi une bonne manière de prendre un peu la température des administrations, mais également au travers de l'examen de ces projets, de rencontrer la réalité de notre coopération dans ces pays. Alors je voudrais vous dire un mot justement de cette procédure singulière qui s'appelle le FAC. Il a été créé en 1959, c'est-à-dire pratiquement au tout début de ce ministère et il a été mis en place pour accompagner le processus de décolonisation. Il aura d'ailleurs beaucoup contribué à la construction des Etats nouvellement indépendants d'Afrique. Il aura financé un nombre important de projets d'investissement, d'abord et surtout en Afrique subsaharienne francophone, et puis dans un nombre croissant de pays des Caraïbes, de l'Océan Indien, et d'Asie du Sud-Est puisque, par exemple, la reconstruction des systèmes de soin et de formation au Cambodge lui doit beaucoup. Le FAC s'articule autour de trois principes : la négociation avec les Etats partenaires, la pluriannualité - ce qui en fait un outil spécifique, c'est qu'il permet de prendre en charge les chantiers de longue haleine, ce que les procédures liées à l'annualité budgétaire ne permettent évidemment pas - ; et le contrôle, car c'est aussi le rôle du comité directeur, qui ne se contente pas d'initier les projets, mais en assure le suivi et l'évaluation. Alors, quels projets sont éligibles au FAC ?
Il y a trois catégories de projets : ceux dits d' "intérêt général", qui sont mis en oeuvre par l'administration centrale (demain la DGCID) et qui permettent de définir une politique dans des secteurs précis et de l'enclencher sur le terrain.
Les FAC "Etats", qui eux sont négociés par nos postes dans le cadre des orientations que nous leur fixons, lesquelles sont formalisées dans les commissions mixtes, qui sont des moments forts dans la relation de partenariat, puisque c'est l'occasion de mettre à plat la coopération passée et surtout de la redéfinir pour les années qui viennent. Je vous rappelle que les commissions mixtes ont, pour simplifier, un rythme de cinq à huit ans. Il y a quelques jours, à la mi-décembre, c'était au tour de la Côte d'Ivoire, quelques mois plus tôt, de la Mauritanie. Dans le courant de l'année qui vient, en 1999, c'est pratiquement une demi-douzaine de commissions mixtes qui vont réactiver nos relations avec un certain nombre de pays. Il y a enfin quelques projets "inter-Etats", qui peuvent concerner quelques pays voisins autour d'une institution commune, l'institut de Formation et de Recherche, qui est une autorité régionale.
Chaque année, nous envoyons aux postes une instruction qui cadre nos priorités et, traduit nos intentions, lesquelles doivent ensuite s'adapter au terrain. Elles ont d'ailleurs parfois pour ambition de corriger certains effets de conjoncture. Faut-il rappeler que au lendemain de la dévaluation du franc CFA, la ligne budgétaire FAC a été appréciée de façon à pouvoir créer une ligne spéciale, appelée Fonds spécial de développement qui s'est transformé en Fonds social de développement, et qui permet de coller au plus près au terrain et de financer des projets très concrets - écoles, dispensaires, électrification de quartiers, micro entreprises, projets montés par des femmes, par des jeunes... Toute une série d'actions qui sont d'autant plus appréciées, qu'elles sont en prise directe avec les préoccupations des populations.
Pour vous donner une idée de l'importance de ces projets, nous aurons cette année distribuer 1273,1 MF correspondant à 128 projets. Il peut être intéressant de voir comment ces projets se distribuent :
- Le développement institutionnel (développement de l'Etat de droit, justice, police, sécurité, administrations publiques) aura représenté 17,5 % des crédits en question.
- La deuxième ligne budgétaire en quelque sorte, c'est par ordre d'importance l'enseignement, la formation, la jeunesse et les sports pour 14,6 %. Cela concerne la réforme des systèmes éducatifs, primaire et supérieur, mais aussi le développement de la pratique sportive et du sport de haut niveau notamment que la France est le seul Etat à financer.
- Le troisième poste c'est le développement rural et l'environnement (14 %).
- Le 4ème poste, la santé et le développement social : 12,7 %. Il s'agit ici des réformes des systèmes de soin, de la lutte contre les endémies, contre le SIDA.
- La Francophonie : 10,6 %.Ce n'est évidemment pas le seul outil d'appui à la Francophonie, mais parmi les projets du FAC, certains s'y rapportent plus particulièrement. Cela s'effectue souvent sous forme de transferts, d'ailleurs vers les deux grands opérateurs de l'espace francophone que sont l'agence intergouvernementale de la francophonie et l'agence universitaire de la francophonie (anciennes ACCT et AUPELF-UREF).
- L'action culturelle spécifique : 8 %.
- Les crédits déconcentrés : le fameux fonds social de développement dont je parlais à l'instant qui représentent 7, 3 %.
- Et puis il y a ce qu'on appelle la coopération " hors l'Etat " : ce sont les crédits que nous distribuons aux collectivités locales territoriales, qui se lancent dans la coopération décentralisée, à l'appui de leurs propres projets et également aux ONG, plus généralement aux associations.
Il est évident que cet instrument budgétaire n'agit pas seul, s'y agrègent les moyens budgétaires annuels (assistance technique, moyens logistiques). Si je prends l'exemple de la formation, qui est pour nous un secteur-clé, et qui consomme en gros 20 % des moyens de la coopération au développement, soit 1,2 milliard de francs par an, le FAC en réalité ne correspond lui qu'à 12 % des moyens, dans les 14, 6 % que j'évoquais tout à l'heure. Mais il est essentiel pour l'ensemble, puisque chaque projet représente un peu la colonne vertébrale, la charpente des actions.
Je vous ai parlé de concertation, de dialogue, faut-il ajouter que ce dialogue vaut aussi pour les grandes institutions bilatérales, puisqu'on coordonne les ressources du FAC avec celles de l'Unicef, de la Banque mondiale, de l'Union européenne, ce qui permet de préserver l'influence de la France dans ces domaines, aujourd'hui très concurrentiels, que sont la santé, la recherche, le développement des droits et des libertés, l'audiovisuel... Bref, je voudrais vous convaincre s'il en est besoin, que cet instrument, qui finance aujourd'hui beaucoup plus de matière grise que de bétons, de murs, est pour beaucoup dans la présence de la France, de ses valeurs, de son système de pensée et d'organisation sociale.
Le FAC est un outil au service des grandes priorités gouvernementales qui sont celles du Premier ministre à l'international. Je voudrais à l'appui de ce propos vous donner trois exemples :
- les technologies de l'information et de la communication ;
- le SIDA et le fonds de solidarité thérapeutique ;
- la recherche scientifique.
Le "programme de promotion des technologies d'information et de communication (TIC) en Afrique" est un programme d'intérêt général qui doit rassembler 20 projets, qui se déroulera sur trois ans (1999-2001), qui pèse 25 MF et qui va concerner l'ensemble des pays de la ZSP.
La grande majorité des investissements proposés au travers de ce programme va s'effectuer à travers l'organisme d'expertise du Sud pour que ces pays s'approprient en particulier l'outil Internet dans une démarche de partenariat et d'indépendance. Ce programme répond à des objectifs politiques que le Premier ministre a réaffirmés lors de son intervention à la CNUCED, à l'ouverture de la conférence organisée à Lyon, il y a quelques semaines. Il a insisté en particulier sur un aspect politique important : le programme refuse la logique libérale qui consisterait à remplacer le concept de coopération par celui de commerce. Ce programme refuse de monétariser en quelque sorte les connaissances, puisque la gratuité d'accès aux systèmes d'information y est préservé. C'est l'aspect politique le plus important. Nous y faisons aussi la promotion des contenus francophones. Face à l'appropriation de fait du réseau Internet par les anglophones, il y a ce dispositif politique fort pour favoriser le libre-accès à la connaissance et aussi la défense de la Francophonie.
Deuxième exemple, le fonds de solidarité thérapeutique. Vous vous souvenez que c'est à Abidjan lors de la conférence mondiale sur le Sida qui s'est tenue en décembre 1997, que le président de la République et le secrétaire d'Etat à la Santé, M. Bernard Kouchner, avait annoncé une grande initiative de la France pour créer un mécanisme international de solidarité afin de permettre aux pays en développement d'accéder aux nouveaux traitements de lutte contre le Sida, y compris les antirétroviraux. C'est en cela surtout qu'il y avait nouveauté. Je n'insiste pas sur les impératifs qui ont présidé au lancement de cette initiative ; l'impératif éthique qui refuse la logique d'une épidémie à deux vitesses qui sacrifie des personnes du Sud ; les considérations de santé publique - il n'y a pas de maîtrise durable de l'épidémie sans complémentarité entre soins et prévention ; les considérations aussi de géopolitique car, à l'ère de la mondialisation, cette pandémie liée aux échanges et aux mouvements de population a déjà, et aura plus encore demain, si on ne la maîtrise pas, des conséquences sur les équilibres internationaux.
C'est donc notre ministère qui a fourni les premiers moyens d'une politique de projets pour élargir l'accès aux traitements dans les pays en développement en faisant adopter un FAC d'"intérêt général" d'un montant de 25 MF, dont 20 MF spécifiquement affectés aux FSTI.
Un an tout juste après l'annonce d'Abidjan, le projet FAC "FSTI" permet de mettre en oeuvre le premier programme démonstratif, en Côte-d'Ivoire, comme l'annonce en a été faite lors de la commission mixte que j'ai présidée les 14 et 15 décembre sur place.
L'action a été engagée déjà depuis plusieurs années. Je ne prétends d'ailleurs pas que ce fonds vient de permettre de commencer à engager cette lutte contre le Sida dans les pays du Sud. Depuis 1987, 42 projets FAC (concernant 24 pays) et 16 projets "inter-Etats" ou "Intérêt général" ont déjà été approuvés pour un montant de 500 MF, dont 350 concernaient directement la lutte contre le Sida. Les fonds affectés au fonds de solidarité viennent donc en complément et non pas en soustraction des actions déjà engagées. Nous espérons bien sûr que l'initiative prise par la France suscite dans les meilleurs délais d'autres financements bilatéraux, multilatéraux, privés. M. Bernard Kouchner s'y emploie de son côté. Moi-même, lors de mes différents déplacements, j'ai eu l'occasion de faire un travail de sensibilisation auprès des grands organismes multilatéraux mais aussi de nos partenaires, et d'en parler aux Américains en particulier, qui sont évidemment en mesure d'aider, de manière significative, de telle initiatives.
Le 3ème exemple, c'est la "coopération scientifique et les recherches sur l'évolution de la vie politique, de l'économie, de la société et de la ville en Afrique". Nous venons, là aussi, d'adopter ce matin un projet spécifique à cette intention pour 10 MF. Si nous avons voulu investir dans ce domaine, c'est aussi pour faire en sorte que la France réaffirme sa présence en matière de recherche africaniste, un secteur dans lequel nous avons observé que la France commence à perdre des positions au détriment de la recherche scientifique conduite dans le monde nord-américain. Il nous est apparu aussi tout à fait indispensable de le faire pour réengager le dialogue avec les chercheurs africains, et d'investir dans ce créneau qui couvre les aspects politiques, économiques, sociétaux ainsi que la ville qui nous paraît être un élément de plus en plus prégnant dans la réalité africaine. Ce programme est délégué à deux opérateurs, l'ORSTOM - qui est devenu l'IRRD - et le CODESRIA basé à Dakar.
Ainsi apparaissent clairement les deux objectifs majeurs de ce programme : inciter les communautés scientifiques s'intéressant au développement à produire en continu et sur place, les connaissances et les informations scientifiques indispensables aux politiques de développement ; donner toute leur place aux équipes du Sud dans ces communautés scientifiques.
Voilà les considérations que je voulais vous livrer au moment où nous clôturons une année de FAC - d'un montant de 1 273 MF auxquels correspondent en cumulé les quatre comités directeurs trimestriels, que j'ai présidés au cours de cette année 1998 -, qui s'est efforcé d'augmenter la proportion des projets "Etat", projets de terrain si je puis dire, par rapport aux projets généraux, et qui s'est efforcé surtout d'être plus sélectif au niveau de ses projets d'"intérêt général" de façon à nous assurer qu'ils coïncident bien avec les préoccupations qui sont les nôtres.
Je voudrais achever cette présentation en vous indiquant l'ordre des bénéficiaires du FAC en 1998 : Sénégal (61 MF), Côte d'Ivoire (56,5 MF), Cameroun (56 MF), Madagascar (51 MF), le Burkina-Faso (42 MF), le Tchad (39 MF), le Niger (36,5 MF), Haïti (36 MF), Bénin (35 MF), Mali (34,6 MF). Voilà pour les 10 pays qui en auront bénéficier le plus en 1998.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 28 septembre 2001)
Il m'a semblé utile de rendre compte des travaux de cette instance au moment où la réforme de notre dispositif de Coopération entre en vigueur. Le FAC, est en effet l'un des instruments les plus emblématiques du partenariat que la France souhaite renouveler avec les pays en développement. On avait imaginé que l'on pourrait parler en préalable de la réforme. Mais je vous vois à peu près tous plutôt bien informés de cette réforme, en tout cas de ses objectifs, des principales mesures que nous avons commencé à mettre en oeuvre, de la création de cette grande Direction générale de la Coopération internationale et du Développement qui, à compter du 1er janvier, va structurer en quelque sorte notre action et devient la plus grande direction du ministère des Affaires étrangères.
J'aurais pu vous situer notre rencontre dans le temps, vous rappeler que le 28 janvier prochain, le premier comité interministériel de Coopération internationale et de Développement se réunira à Matignon sous la présidence de M. Lionel Jospin, et qu'à cette occasion nous définirons la Zone de solidarité prioritaire. Nous aurons l'occasion d'y réaffirmer évidemment l'approche partenariale qui est désormais la marque de notre relation avec les pays en développement notamment ; que ce partenariat conjugue à la fois l'ouverture sur l'ensemble du monde et en particulier toute l'Afrique, mais aussi la fidélité, c'est-à-dire le respect des alliances traditionnelles, qui ont gardé d'ailleurs à la France dans le monde un capital de sympathie et de respect. Une fidélité qui s'accompagne d'exigences accrues en matière de droit, de transparence et d'efficacité. C'est tout cela que nous essayons aussi d'illustrer au travers du Fonds d'aide et de Coopération, en particulier dans les inflexions que nous lui avons apportées au cours de l'année qui vient de s'écouler, puisqu'il s'agit de faire le bilan de cette année de FAC. Inflexion dans le sens d'un dialogue plus serré avec les partenaires africains. Je dis africains parce que ce sont, et de très loin, les bénéficiaires des fonds d'aide et de coopération. Dialogue serré à la fois pour qu'ils définissent mieux leurs besoins. Un dialogue serré aussi dans la gestion de ces projets avec la sanction du rapatriement des crédits, ou d'annulation des projets, si il n'y a pas une volonté suffisamment affirmée de la part des responsables de ces pays pour faire avancer les projets en question.
Nous nous sommes efforcés également au cours de cette année de faire mieux vivre le caractère interministériel du Comité directeur du Fonds d'aide et de coopération puisque je rappelle que les ministères de l'Education nationale, de l'Environnement, de l'Industrie, de l'Agriculture, de la Santé, de l'Equipement, et bien entendu des Finances y participent. Le secrétariat d'Etat à l'Outre-mer, la mission de Coopération du ministère, le secrétariat général de la Mer et le Conseil économique et social y sont pareillement représentés. Ce matin, j'ai d'ailleurs eu plaisir à enregistrer la satisfaction exprimée par d'autres ministères se félicitant d'une meilleure concertation dans la préparation des projets. J'allais oublier la présence importante des parlementaires du Sénat et de l'Assemblée nationale, qui je peux en porter témoignage, jouent un rôle actif dans nos réunions. Vous voyez que si j'ajoute le Commissariat général au Plan, la Caisse des Dépôts et Consignations, l'Agence française de développement, c'est le caractère interministériel qui prévaut et permet d'associer les grandes administrations et les grands organismes français.
Je me suis efforcé de présider chacun de ces comités directeurs. C'est pour moi aussi une bonne manière de prendre un peu la température des administrations, mais également au travers de l'examen de ces projets, de rencontrer la réalité de notre coopération dans ces pays. Alors je voudrais vous dire un mot justement de cette procédure singulière qui s'appelle le FAC. Il a été créé en 1959, c'est-à-dire pratiquement au tout début de ce ministère et il a été mis en place pour accompagner le processus de décolonisation. Il aura d'ailleurs beaucoup contribué à la construction des Etats nouvellement indépendants d'Afrique. Il aura financé un nombre important de projets d'investissement, d'abord et surtout en Afrique subsaharienne francophone, et puis dans un nombre croissant de pays des Caraïbes, de l'Océan Indien, et d'Asie du Sud-Est puisque, par exemple, la reconstruction des systèmes de soin et de formation au Cambodge lui doit beaucoup. Le FAC s'articule autour de trois principes : la négociation avec les Etats partenaires, la pluriannualité - ce qui en fait un outil spécifique, c'est qu'il permet de prendre en charge les chantiers de longue haleine, ce que les procédures liées à l'annualité budgétaire ne permettent évidemment pas - ; et le contrôle, car c'est aussi le rôle du comité directeur, qui ne se contente pas d'initier les projets, mais en assure le suivi et l'évaluation. Alors, quels projets sont éligibles au FAC ?
Il y a trois catégories de projets : ceux dits d' "intérêt général", qui sont mis en oeuvre par l'administration centrale (demain la DGCID) et qui permettent de définir une politique dans des secteurs précis et de l'enclencher sur le terrain.
Les FAC "Etats", qui eux sont négociés par nos postes dans le cadre des orientations que nous leur fixons, lesquelles sont formalisées dans les commissions mixtes, qui sont des moments forts dans la relation de partenariat, puisque c'est l'occasion de mettre à plat la coopération passée et surtout de la redéfinir pour les années qui viennent. Je vous rappelle que les commissions mixtes ont, pour simplifier, un rythme de cinq à huit ans. Il y a quelques jours, à la mi-décembre, c'était au tour de la Côte d'Ivoire, quelques mois plus tôt, de la Mauritanie. Dans le courant de l'année qui vient, en 1999, c'est pratiquement une demi-douzaine de commissions mixtes qui vont réactiver nos relations avec un certain nombre de pays. Il y a enfin quelques projets "inter-Etats", qui peuvent concerner quelques pays voisins autour d'une institution commune, l'institut de Formation et de Recherche, qui est une autorité régionale.
Chaque année, nous envoyons aux postes une instruction qui cadre nos priorités et, traduit nos intentions, lesquelles doivent ensuite s'adapter au terrain. Elles ont d'ailleurs parfois pour ambition de corriger certains effets de conjoncture. Faut-il rappeler que au lendemain de la dévaluation du franc CFA, la ligne budgétaire FAC a été appréciée de façon à pouvoir créer une ligne spéciale, appelée Fonds spécial de développement qui s'est transformé en Fonds social de développement, et qui permet de coller au plus près au terrain et de financer des projets très concrets - écoles, dispensaires, électrification de quartiers, micro entreprises, projets montés par des femmes, par des jeunes... Toute une série d'actions qui sont d'autant plus appréciées, qu'elles sont en prise directe avec les préoccupations des populations.
Pour vous donner une idée de l'importance de ces projets, nous aurons cette année distribuer 1273,1 MF correspondant à 128 projets. Il peut être intéressant de voir comment ces projets se distribuent :
- Le développement institutionnel (développement de l'Etat de droit, justice, police, sécurité, administrations publiques) aura représenté 17,5 % des crédits en question.
- La deuxième ligne budgétaire en quelque sorte, c'est par ordre d'importance l'enseignement, la formation, la jeunesse et les sports pour 14,6 %. Cela concerne la réforme des systèmes éducatifs, primaire et supérieur, mais aussi le développement de la pratique sportive et du sport de haut niveau notamment que la France est le seul Etat à financer.
- Le troisième poste c'est le développement rural et l'environnement (14 %).
- Le 4ème poste, la santé et le développement social : 12,7 %. Il s'agit ici des réformes des systèmes de soin, de la lutte contre les endémies, contre le SIDA.
- La Francophonie : 10,6 %.Ce n'est évidemment pas le seul outil d'appui à la Francophonie, mais parmi les projets du FAC, certains s'y rapportent plus particulièrement. Cela s'effectue souvent sous forme de transferts, d'ailleurs vers les deux grands opérateurs de l'espace francophone que sont l'agence intergouvernementale de la francophonie et l'agence universitaire de la francophonie (anciennes ACCT et AUPELF-UREF).
- L'action culturelle spécifique : 8 %.
- Les crédits déconcentrés : le fameux fonds social de développement dont je parlais à l'instant qui représentent 7, 3 %.
- Et puis il y a ce qu'on appelle la coopération " hors l'Etat " : ce sont les crédits que nous distribuons aux collectivités locales territoriales, qui se lancent dans la coopération décentralisée, à l'appui de leurs propres projets et également aux ONG, plus généralement aux associations.
Il est évident que cet instrument budgétaire n'agit pas seul, s'y agrègent les moyens budgétaires annuels (assistance technique, moyens logistiques). Si je prends l'exemple de la formation, qui est pour nous un secteur-clé, et qui consomme en gros 20 % des moyens de la coopération au développement, soit 1,2 milliard de francs par an, le FAC en réalité ne correspond lui qu'à 12 % des moyens, dans les 14, 6 % que j'évoquais tout à l'heure. Mais il est essentiel pour l'ensemble, puisque chaque projet représente un peu la colonne vertébrale, la charpente des actions.
Je vous ai parlé de concertation, de dialogue, faut-il ajouter que ce dialogue vaut aussi pour les grandes institutions bilatérales, puisqu'on coordonne les ressources du FAC avec celles de l'Unicef, de la Banque mondiale, de l'Union européenne, ce qui permet de préserver l'influence de la France dans ces domaines, aujourd'hui très concurrentiels, que sont la santé, la recherche, le développement des droits et des libertés, l'audiovisuel... Bref, je voudrais vous convaincre s'il en est besoin, que cet instrument, qui finance aujourd'hui beaucoup plus de matière grise que de bétons, de murs, est pour beaucoup dans la présence de la France, de ses valeurs, de son système de pensée et d'organisation sociale.
Le FAC est un outil au service des grandes priorités gouvernementales qui sont celles du Premier ministre à l'international. Je voudrais à l'appui de ce propos vous donner trois exemples :
- les technologies de l'information et de la communication ;
- le SIDA et le fonds de solidarité thérapeutique ;
- la recherche scientifique.
Le "programme de promotion des technologies d'information et de communication (TIC) en Afrique" est un programme d'intérêt général qui doit rassembler 20 projets, qui se déroulera sur trois ans (1999-2001), qui pèse 25 MF et qui va concerner l'ensemble des pays de la ZSP.
La grande majorité des investissements proposés au travers de ce programme va s'effectuer à travers l'organisme d'expertise du Sud pour que ces pays s'approprient en particulier l'outil Internet dans une démarche de partenariat et d'indépendance. Ce programme répond à des objectifs politiques que le Premier ministre a réaffirmés lors de son intervention à la CNUCED, à l'ouverture de la conférence organisée à Lyon, il y a quelques semaines. Il a insisté en particulier sur un aspect politique important : le programme refuse la logique libérale qui consisterait à remplacer le concept de coopération par celui de commerce. Ce programme refuse de monétariser en quelque sorte les connaissances, puisque la gratuité d'accès aux systèmes d'information y est préservé. C'est l'aspect politique le plus important. Nous y faisons aussi la promotion des contenus francophones. Face à l'appropriation de fait du réseau Internet par les anglophones, il y a ce dispositif politique fort pour favoriser le libre-accès à la connaissance et aussi la défense de la Francophonie.
Deuxième exemple, le fonds de solidarité thérapeutique. Vous vous souvenez que c'est à Abidjan lors de la conférence mondiale sur le Sida qui s'est tenue en décembre 1997, que le président de la République et le secrétaire d'Etat à la Santé, M. Bernard Kouchner, avait annoncé une grande initiative de la France pour créer un mécanisme international de solidarité afin de permettre aux pays en développement d'accéder aux nouveaux traitements de lutte contre le Sida, y compris les antirétroviraux. C'est en cela surtout qu'il y avait nouveauté. Je n'insiste pas sur les impératifs qui ont présidé au lancement de cette initiative ; l'impératif éthique qui refuse la logique d'une épidémie à deux vitesses qui sacrifie des personnes du Sud ; les considérations de santé publique - il n'y a pas de maîtrise durable de l'épidémie sans complémentarité entre soins et prévention ; les considérations aussi de géopolitique car, à l'ère de la mondialisation, cette pandémie liée aux échanges et aux mouvements de population a déjà, et aura plus encore demain, si on ne la maîtrise pas, des conséquences sur les équilibres internationaux.
C'est donc notre ministère qui a fourni les premiers moyens d'une politique de projets pour élargir l'accès aux traitements dans les pays en développement en faisant adopter un FAC d'"intérêt général" d'un montant de 25 MF, dont 20 MF spécifiquement affectés aux FSTI.
Un an tout juste après l'annonce d'Abidjan, le projet FAC "FSTI" permet de mettre en oeuvre le premier programme démonstratif, en Côte-d'Ivoire, comme l'annonce en a été faite lors de la commission mixte que j'ai présidée les 14 et 15 décembre sur place.
L'action a été engagée déjà depuis plusieurs années. Je ne prétends d'ailleurs pas que ce fonds vient de permettre de commencer à engager cette lutte contre le Sida dans les pays du Sud. Depuis 1987, 42 projets FAC (concernant 24 pays) et 16 projets "inter-Etats" ou "Intérêt général" ont déjà été approuvés pour un montant de 500 MF, dont 350 concernaient directement la lutte contre le Sida. Les fonds affectés au fonds de solidarité viennent donc en complément et non pas en soustraction des actions déjà engagées. Nous espérons bien sûr que l'initiative prise par la France suscite dans les meilleurs délais d'autres financements bilatéraux, multilatéraux, privés. M. Bernard Kouchner s'y emploie de son côté. Moi-même, lors de mes différents déplacements, j'ai eu l'occasion de faire un travail de sensibilisation auprès des grands organismes multilatéraux mais aussi de nos partenaires, et d'en parler aux Américains en particulier, qui sont évidemment en mesure d'aider, de manière significative, de telle initiatives.
Le 3ème exemple, c'est la "coopération scientifique et les recherches sur l'évolution de la vie politique, de l'économie, de la société et de la ville en Afrique". Nous venons, là aussi, d'adopter ce matin un projet spécifique à cette intention pour 10 MF. Si nous avons voulu investir dans ce domaine, c'est aussi pour faire en sorte que la France réaffirme sa présence en matière de recherche africaniste, un secteur dans lequel nous avons observé que la France commence à perdre des positions au détriment de la recherche scientifique conduite dans le monde nord-américain. Il nous est apparu aussi tout à fait indispensable de le faire pour réengager le dialogue avec les chercheurs africains, et d'investir dans ce créneau qui couvre les aspects politiques, économiques, sociétaux ainsi que la ville qui nous paraît être un élément de plus en plus prégnant dans la réalité africaine. Ce programme est délégué à deux opérateurs, l'ORSTOM - qui est devenu l'IRRD - et le CODESRIA basé à Dakar.
Ainsi apparaissent clairement les deux objectifs majeurs de ce programme : inciter les communautés scientifiques s'intéressant au développement à produire en continu et sur place, les connaissances et les informations scientifiques indispensables aux politiques de développement ; donner toute leur place aux équipes du Sud dans ces communautés scientifiques.
Voilà les considérations que je voulais vous livrer au moment où nous clôturons une année de FAC - d'un montant de 1 273 MF auxquels correspondent en cumulé les quatre comités directeurs trimestriels, que j'ai présidés au cours de cette année 1998 -, qui s'est efforcé d'augmenter la proportion des projets "Etat", projets de terrain si je puis dire, par rapport aux projets généraux, et qui s'est efforcé surtout d'être plus sélectif au niveau de ses projets d'"intérêt général" de façon à nous assurer qu'ils coïncident bien avec les préoccupations qui sont les nôtres.
Je voudrais achever cette présentation en vous indiquant l'ordre des bénéficiaires du FAC en 1998 : Sénégal (61 MF), Côte d'Ivoire (56,5 MF), Cameroun (56 MF), Madagascar (51 MF), le Burkina-Faso (42 MF), le Tchad (39 MF), le Niger (36,5 MF), Haïti (36 MF), Bénin (35 MF), Mali (34,6 MF). Voilà pour les 10 pays qui en auront bénéficier le plus en 1998.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 28 septembre 2001)