Interview de M. Charles Pasqua, président du RPF, à Europe 1 le 11 décembre 2000, sur son opposition aux conclusions du conseil européen de Nice.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Conseil européen à Nice du 7 au 11 décembre 2000

Média : Europe 1

Texte intégral

A. Chabot Quand on est euro sceptique, c'est une bonne journée parce que vous allez dénoncer le marchandage de Nice, non ?
- "Je crois qu'à partir du moment où l'on va dans une négociation avec comme objectif de conclure à tout prix un accord, on se met dans une situation où on est conduit à abandonner un certain nombre de choses et je constate que les pays qui ont le plus manifesté leur volonté voient leur position renforcée. C'est le cas de l'Allemagne qui, grâce au filet démographique, pèsera désormais d'un poids décisif en Europe, puisqu'il suffira qu'un pays conteste une décision du Conseil des ministres pour que 62 % de la population annule cette disposition. De plus, elle garde 99 députés alors que la France en perd un certain nombre - on ne versera pas une larme là-dessus d'ailleurs. Ce qui ressort du traité de Nice, c'est l'impossibilité de faire autre chose que de faire progresser une zone de libre échange. Il n'y a aucune ambition politique et il n'y a aucune volonté pour une raison simple : la question de fond "Voulez-vous une Europe indépendante ?" n'a jamais été posée, et les Européens n'ont pas eu à répondre. M. Blair a répondu. Sur la création d'une force d'intervention militaire, Chirac a dit " il faut qu'elle soit autonome par rapport à l'OTAN ", Blair a répondu " non ", la France s'est couchée."
C. Pasqua, vous êtes toujours le verre à moitié vide ou à moitié plein. Quand il n'y a pas d'accord, on dit " c'est une tragédie l'Europe n'avance pas " et quand il y a un accord on dit " ce n'est pas terrible " Elle marche l'Europe, elle avance quand même
- "Je suis tenté de dire : "réformer les institutions, pour quoi faire ?" Quelle Europe veut-on ? Pour l'instant cette Europe ne marche pas, on le sait, on le voit tous les jours, pourquoi voulez-vous"
Selon vous, ça ne marchera pas mieux avec l'accord de Nice?
- "Pourquoi voulez-vous qu'elle marche demain à vingt-sept alors qu'elle ne marche pas à quinze et qu'on a vu effectivement pendant trois jours une discussion de marchands de tapis :" je veux un commissaire de plus - non, vous en aurez un de moins", "je veux tant de députés de plus - non, vous en aurez tant de moins". Cela manque de souffle, cela manque d'ambition. Il n'y a pas en-dehors des mots d'ambition politique digne de ce nom."
Demain, le Parlement européen va entendre le Président de la République ; vous voterez ?
- "Je serai là, naturellement"
Est-ce que vous approuverez ce traité de Nice ?
- "Certainement pas! Non seulement je ne l'approuverai pas mais j'espère que compte tenu de ce qui vient de se passer depuis une dizaine de jours, qui constitue de nouveaux abandons de la souveraineté nationale et qui mettent par conséquent en péril les principes mêmes de la République - qu'il s'agisse d'ailleurs de ce traité avec de nouveaux abandons de souveraineté ou qu'il s'agisse de la Corse -, le Président de la République et le Premier ministre accepteront de demander leur avis aux Français, c'est-à-dire de les consulter par la voix du référendum. "
Ce sera le thème de votre campagne présidentielle ?
- "Ce serait en tous les cas la moindre des choses que les Français aient à se déterminer par eux-mêmes et qu'on ne décide pas à leur place !"
(Source http://sig.premier-ministre.gouv.fr, le 11 décembre 2000)