Déclaration de M. Lionel Jospin, Premier ministre, sur les relations entre la France et la République Dominicaine, Paris le 14 janvier 1999.

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Circonstance : Visite de M. Leonel Fernandez, Président de la République dominicaine, à Paris le 14 janvier 1999

Texte intégral

Monsieur le Président de la République,
Messieurs les Ministres,
Je suis très heureux de vous accueillir ce soir en ce Palais des Affaires étrangères. Vous avez en effet, Monsieur le Président, réservé un de vos premiers déplacements de président élu à Paris. Je suis particulièrement sensible à ce geste.
D'abord parce que c'est le geste d'un ami, et c'est en ami que je souhaite accueillir, Monsieur le Président, l'artisan de la démocratisation et de la modernisation de son pays.
Vous avez été reçu cet après-midi Docteur honoris causa de la Sorbonne, distinction qui honore autant l'éminent juriste que vous êtes que l'homme d'Etat épris de justice. Par ce voyage, vous manifestez symboliquement votre volonté de moderniser votre pays, en y consolidant l'Etat de droit.
Vous modernisez en effet vos institutions, et nous sommes fiers d'y contribuer en formant des magistrats dominicains. La France veut être à vos côtés dans la lutte contre le crime organisé. Elle souhaite contribuer au renforcement des institutions démocratiques dominicaines. Je me félicite donc aussi de la signature entre nos deux pays, durant votre visite, d'un accord d'entraide judiciaire en matière pénale.
Vous modernisez par ailleurs votre économie, en encourageant les investissements étrangers et en vous adaptant à la concurrence internationale. Vous oeuvrez aussi, Monsieur le Président, à la modernisation des infrastructures et des services publics de votre pays. Là encore, la France vous propose une coopération fondée sur des entreprises dynamiques, certaines de taille mondiale, mais également, c'est notre originalité, agissant dans une certaine idée du service public, alliant l'efficacité de la gestion et le service aux personnes. Je souhaite que nos échanges commerciaux, en forte progression ces trois dernières années, se développent encore, alors que vient d'être signé un accord de protection et de promotion des investissements.
Je suis ensuite heureux d'accueillir en vous le président d'une République qui s'ouvre à sa région et au monde. L'ouverture de la République dominicaine sur le monde participe de votre volonté de modernisation. Les efforts que vous déployez pour vous rapprocher des Etats d'Amérique centrale et de ceux de la Communauté Caraïbe contribuent à l'intégration toujours plus grande du bassin Caraïbe. Vous rejetez, je crois, comme la France, les tentations de l'unilatéralisme, en matière commerciale comme de sûreté collective. Nous sommes proches aussi dans ce domaine. Je m'en réjouis d'autant plus que nous allons contribuer à la formation de vos diplomates.
C'est aussi en lointains cousins que nous accueillons le représentant d'un pays auquel l'histoire et la culture nous lient. Notre histoire commune est ancienne. Elle a tissé des liens d'abord humains et culturels. Nos concitoyens installés dans votre pays, les Dominicains qui au temps de la dictature trouvèrent refuge en France, les nombreux Dominicains qui ont choisi d'étudier en France et qui occupent aujourd'hui une place éminente dans leurs pays : tous ces hommes et ces femmes nous rapprochent. Votre gouvernement a rendu obligatoire l'enseignement du français, dès la fin du primaire, au même titre que l'anglais : c'est le témoignage que ces liens sont vivants.
Enfin, c'est un peu en voisin que je vous reçois. Car la France n'est pas seulement proche culturellement et politiquement de la République dominicaine ; elle en est aussi proche géographiquement, par ses départements français d'Amérique. Ils partagent avec la Caraïbe une histoire, une culture, une identité. Ils vivent aussi sous la menace des mêmes catastrophes naturelles. Aussi notre population, particulièrement aux Antilles, et les autorités françaises ont-elles été frappées par les dégâts occasionnés par le cyclone "Georges" dans votre pays. Elles ont souhaité apporter leur contribution à l'effort des autorités dominicaines dans ces circonstances très difficiles.
Je suis heureux, Monsieur le Président de la République, d'avoir pu faire personnellement votre connaissance, d'avoir immédiatement senti en vous un homme de maîtrise, un homme qui a l'intention, sans renier tout ce qu'il peut y avoir de passion dans l'Histoire dominicaine - et vous le savez, j'ai été l'ami ou l'interlocuteur de plusieurs des acteurs majeurs de l'Histoire dominicaine récente - mais sans oublier ce qu'il y a de passion, de ferveur, de goût du combat et de l'action politique, dans ce qui a structuré les dernières décennies de votre vie. Je sais aussi, - et vous me l'avez dit tout à l'heure - que vous voulez introduire, peut-être maintenant, une démocratie qui ne soit pas simplement fondée sur le rôle d'hommes exceptionnels, parfois d'ailleurs, dressés les uns contre les autres, mais sur une démocratie qui vit dans les institutions mêmes que se donne le pays qui se répand à travers le peuple.
Démocratisation économique, démocratisation politique, ce sont des ambitions que vous partagez avec l'ensemble des autorités françaises et en tout cas, avec le chef du gouvernement que je suis. C'est pourquoi, je souhaite qu'au-delà des relations d'amitié entre St-Domingue et la France, entre la République dominicaine et la République française, entre nous aussi, Monsieur le Président de la République et si vous m'y autorisez cher Leonel, je souhaite que ce soit le début d'une relation politique féconde et peut-être aussi, d'une amitié.
(Source http://www.premier-ministre.gouv.fr)