Déclaration de M. Claude Bartolone, ministre délégué à la ville, sur les projets de multiplexes de cinéma, notamment la démarche en terme de créations d'emplois et la recomposition urbaine, Strasbourg le 27 novembre 2000.

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Circonstance : Inauguration de l'UGC Cinécité à Strasbourg le 27 novembre 2000

Texte intégral

Monsieur le Président,
Madame le Maire,
Monsieur le Maire-adjoint chargé de la culture,
Mesdames et Messieurs,
Je suis vraiment très heureux de participer, ce soir, à l'inauguration de ce grand cinéma, en plein cur de Strasbourg. Nous avons pu découvrir, à l'occasion du feu d'artifice, la qualité architecturale du bâtiment dans lequel nous nous trouvons, réalisé par MM Valode et Pistre ; nous découvrons qu'un projet architectural, c'est bien évidemment aussi son aménagement interne. Et je crois que toutes celles et tous ceux qui sont ici ce soir, ont apprécié l'esthétique raffiné de ce grand complexe cinématographique. La beauté de cet équipement porte en elle le respect que les habitants y porteront.
Mesdames et Messieurs, un cinéma, c'est avant tout un projet de culture dans la ville ; c'est aussi, bien sûr, un formidable moyen de décloisonnement et de rencontres ; c'est enfin une chance pour une nouvelle urbanité.
Le Cinéma : Un projet de culture dans la ville.
Madame le Maire, vous avez voulu cet équipement de grande envergure, mais vous avez précisement souhaité qu'il participe à votre politique culturelle. Et pour ce faire, vous avez " imposé " un cahier des charges culturelles aux prétendants, alors qu'il s'agit d'un investissement privé, qui n'avait pas vocation à être soumis à une telle procédure.
Si je m'arrête un instant sur cet aspect, c'est parce que je souhaiterais qu'il fasse école.
Nous entendons souvent des craintes - de diverses origines - quand un projet de " multiplexe " apparaît quelque part. Je ne reprendrai pas toutes les critiques des opposants à ce type d'investissement, je voudrais juste souligner qu'il n'y a pas de menaces culturelles quand il y a un projet culturel. Ce sont les élus qui sont légitimes pour le porter, et je me réjouis de voir un investisseur privé y répondre point à point, quitte à modifier sa stratégie commerciale. Nous pouvons appeler cela de l'innovation.
Mais je veux également souligner la démarche qui a été conduite en termes d'emplois. Je me réjouis, Monsieur le Président d'UGC, de la méthode qui a consisté à associer trois missions locales et l'ANPE de Hautepierre, pour profiter de l'opportunité de créer des emplois pour des publics défavorisés. Je veux saluer le fait que sur 115 emplois créés par ce multiplexe, 95 l'ont été localement. Et je me réjouis plus encore que 41 d'entre eux soient passés par des contrats de qualification ou des stages d'accès à l'entreprise. Cette solidarité dans la création d'emploi est bien le signe que cet équipement a vocation à devenir l'équipement de tous, puisque tous y participent dans son animation.
J'en viens au fond du projet culturel. Incontestablement, et les chiffres le prouvent, l'offre de cinémas - si elle est fortement diversifiée à Strasbourg - n'a pas encore su capter le potentiel de public estimable, pour une agglomération de cette importance. Tel est l'enjeu de ce cinéma et des 22 salles qui le composent.
Il ne s'agit de rien d'autre que d'offrir aux habitants de votre ville et de votre agglomération, un plus grand nombre de films accessibles, une diversité de programmation garantie (et vous avez sur ce point des obligations à tenir), dans des conditions techniques et de confort maximum. Cela constitue déjà un projet de culture.
Car il ne faut jamais l'oublier : la pratique cinématographique est la toute première pratique culturelle de nos concitoyens. En offrant un équipement de cette qualité, c'est une chance qui s'ouvre de réconciler les strasbourgeois avec une pratique culturelle fondamentale.
Mais permettez moi d'insister sur d'autres aspects qui sont au cur du cahier des charges que la mairie a souhaité proposé à l'investisseur UGC :
- La prochaine ouverture d'un cyber-centre sur ce site, s'inscrira dans ce qui est presque une marque de fabrique de Strasbourg. Elle permettra de relier le cinéma à une autre forme de culture, de réunir des gens autour de projets innovants.
- La distribution de places de cinéma gratuites pour les jeunes des quartiers populaires ne peut pas laisser insensible le ministre de la ville que je suis. Les jeunes aiment le cinéma ; et les jeunes issus des quartiers défavorisés n'ont souvent que le cinéma pour espérer découvrir d'autres univers.
- La mise à disposition de salles en matinée, pour des projets pédagogiques est, là encore, une possibilité offerte pour donner à tous, non seulement la chance d'accéder à la culture cinématographique, mais la chance d'y être éduqué.
- Enfin, la mise à disposition gratuite de la ville d'une grande salle de 600 places, 30 jours par an, permettra - c'est en tout cas mon souhait et un défi à relever - de programmer du spectacle vivant dans cet équipement, et de favoriser ainsi, des croisements de publics.
Cinécité, telle est la " marque " de ce cinéma. Cela doit devenir un slogan : le cinéma dans la ville, pour la ville, avec la ville. Je trouve, dans cette réalisation, l'exemple d'un multiplexe de la maturité. J'espère que l'avenir répondra pleinement à ces promesses.
Le Cinéma : Un outil de décloisonnement social.
L'implantation des ces 22 salles n'a pas été choisie au hasard. La contrainte foncière était réelle, mais vous avez voulu situer ces salles au cur de la ville, et aussi au cur des moyens de communication.
Il n'y a pas de projet culturel qui n'intégre les moyens d'accéder à la culture. Situé à quelques minutes de la station de tramway, vous avez marqué votre souhait que " cinéma et transport public " se relient entre eux, pour conforter une politique qui est une contre-marque de votre action : un plan de déplacement urbain au service de tous.
Mais ce cinéma est aussi un projet d'avenir. Il se situe sur les projets de tracé de la prochaine ligne de tram. Je souhaite que vous puissiez concrétiser ce projet et relier les quartiers populaires au centre ville, et, au passage, au cinéma.
Entre les actions culturelles que j'ai évoquées, et ce positionnement stratégique, ce cinéma deviendra, j'en suis convaincu, l'un des premiers lieux fréquentés par vos concitoyens. C'est bel et bien une chance pour la convivialité, que de disposer des moyens et des lieux qui permettent à tous, de se rencontrer en un point de la ville. C'est toute la différence, d'ailleurs, entre notre pratique du cinéma et celle qui nous vient d'Outre-Atlantique. Le multiplexe de Strasbourg deviendra un lieu de rencontres et de croisement des publics, car il est pensé comme un espace public, et non comme un espace privé. Je soutiens les projets qui produisent de la ville.
Le cinéma est par excellence le lieu que tout le monde fréquente, car sa programmation sera diversifiée, et son accès aisé. On trouve là l'idée à laquelle nous sommes attachés, d'une culture populaire, dans le beau, dans le très beau sens du terme.
Le Cinéma : Une chance pour une nouvelle urbanité.
Ce cinéma est le premier équipement d'une recomposition urbaine décidée - car votée par le conseil municipal - dans ce quartier de centre ville.
Ce choix stratégique a été mûrement réfléchi. Vous avez voulu en premier lieu le cinéma, car par sa présence, il transformera la ville et ce quartier. Mais à observer le cadre dans lequel il se situe, je devine vos rêves, je pressens vos intentions, je crois rêver un peu avec vous.
Nous sommes dans un lieu culturel et de loisirs en devenir. Avec ce bassin tout à côté, vous devez déjà imaginer quelques péniches accostées aux quais, transformées en restaurants ou lieux de créations vivantes.
La force du geste architectural qui est de l'autre côté du bassin - et qui commandait la qualité esthétique de ce cinéma - ce bâtiment témoin d'une nostalgie portuaire vous fait espérer d'une ville qui entraîne les habitants à sortir Le défi d'aujourd'hui n'est pas seulement de reconquérir toute la ville, mais d'élargir avec patience et méthode leurs centres Je suis sûr que ce cinéma en constitue une étape, et que dans dix ans, cette utopie qui nous anime, se transformera en évidence.
(Source http://www.ville.gouv.fr, le 1er décembre 2000)