Texte intégral
Q - L'affaire des ventes d'armes en Angola ne risque-t-elle pas de peser sur le Sommet de Yaoundé ?
R - On pouvait le craindre tant que les chefs d'Etat africains n'avaient pas encore annoncé leur participation. Une trentaine d'entre eux l'ont déjà fait. C'est un nombre presque comparable à celui du Sommet de Paris de novembre 1998 qui fut un grand succès.
Q - La mise en cause du fils de François Mitterrand, auteur du discours de La Baule sur le nécessaire Etat de droit en Afrique, n'entame-t-elle pas la crédibilité de notre nouvelle politique africaine ?
R - Les Africains savent que l'intégration du dispositif de coopération français dans le ministère des Affaires étrangères avait pour ambition de tourner la page de la "Françafrique". Certes, il reste des scories de cette période. Les réseaux ne sont pas tous taris. Ils ne sont plus alimentés par la volonté politique française. Ils n'interfèrent plus dans notre politique de coopération, y compris militaire. Il existe toujours des marchands de canons mais les intermédiaires sont des acteurs du commerce international.
Q - Certains ont-ils appartenu aux rouages de l'Etat ?
R - C'est ce que je lis. Il revient aux instructions judiciaires en cours de démêler le vrai du faux. J'ajoute que, parmi nos actions de coopération, il y a aussi l'appui à la police, à l'armée, administrations ayant besoin de matériel, que la France, comme d'autres, est susceptible de leur fournir. A condition qu'il s'agisse d'Etats dont les dirigeants ont été légalement désignés. En Angola, pour citer un seul cas, l'interlocuteur unique du gouvernement français est le gouvernement angolais.
Q - Le commerce frauduleux des armes n'est-il pas encouragé par les guerres qui ravagent plusieurs régions d'Afrique ?
R - Sur un plan général, il y a, certainement, à gagner encore en transparence. Je suis attentif, par exemple, aux recommandations sur le blanchiment d'argent ou aux avancées de la convention sur le contrôle des armes légères. C'est à partir de dispositions de ce genre que l'on peut faire en sorte que le commerce des armes sorte de la clandestinité.
Q - Par son existence même, le Sommet n'est--il pas une survivance de cette politique africaine à laquelle nous disons avoir renoncé ?
R - La question est d'autant plus légitime qu'un premier Sommet Europe-Afrique s'est tenu il y a quelques mois. Mais nous sommes sortis de notre "pré carré" pour dialoguer avec l'ensemble de l'Afrique. D'autres, comme le Japon ou la Chine, ont institué une relation spécifique avec ce continent. Ce n'est pas au moment où il a le plus besoin de la solidarité internationale qu'il faut se désengager. On ne peut pas se satisfaire d'une situation où l'Afrique, qui pèse 10 % de la population du globe ne reçoit que 1,5 % de l'investissement industriel. Ni d'une situation qui voit, à cause du sida, l'espérance de vie reculer, dans certains pays africains, de 55 à 35 ans.
Q - Pourtant, n'observe-t-on pas un repli de la France en Afrique ?
R - Notre politique africaine n'a pas la visibilité qu'elle a pu avoir; mais notre volonté d'engagement aux côtés des Africains demeure inchangée. Nous sommes, de très loin, le pays qui apporte le plus - 35 milliards de francs en 1999 - en aide publique au développement à l'Afrique subsaharienne. Notre contribution au Fonds européen de développement représente, à elle seule, quatre fois l'aide des Etats-Unis à l'Afrique au sud du Sahara. Sur les 55 pays de la Zone de solidarité prioritaire, 44 sont africains, Maghreb compris. En outre, il y a une sorte de transfert de responsabilité en direction de l'Europe. La présidence française de l'Union y a fortement contribué. C'est ainsi que l'on évitera toute tentation de type néo-colonial. Je suis, néanmoins, soucieux de la sous-consommation des crédits destinés aux pays en développement.
Q - A quoi est-elle due ?
R - A la lourdeur de certaines procédures, à leur insuffisante décentralisation, au manque d'expertise des pays partenaires et, aussi, aux situations de crise. Des programmes sont interrompus, des coopérations arrêtées parce que des pays basculent dans la violence. Cela nous désole. Le préalable de la paix se pose avec de plus en plus de force dans un nombre considérable de pays. Comme l'a dit Kofi Annan, la première responsabilité de la communauté internationale, c'est le rétablissement de la paix, condition du développement.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 16 janvier 2001)
R - On pouvait le craindre tant que les chefs d'Etat africains n'avaient pas encore annoncé leur participation. Une trentaine d'entre eux l'ont déjà fait. C'est un nombre presque comparable à celui du Sommet de Paris de novembre 1998 qui fut un grand succès.
Q - La mise en cause du fils de François Mitterrand, auteur du discours de La Baule sur le nécessaire Etat de droit en Afrique, n'entame-t-elle pas la crédibilité de notre nouvelle politique africaine ?
R - Les Africains savent que l'intégration du dispositif de coopération français dans le ministère des Affaires étrangères avait pour ambition de tourner la page de la "Françafrique". Certes, il reste des scories de cette période. Les réseaux ne sont pas tous taris. Ils ne sont plus alimentés par la volonté politique française. Ils n'interfèrent plus dans notre politique de coopération, y compris militaire. Il existe toujours des marchands de canons mais les intermédiaires sont des acteurs du commerce international.
Q - Certains ont-ils appartenu aux rouages de l'Etat ?
R - C'est ce que je lis. Il revient aux instructions judiciaires en cours de démêler le vrai du faux. J'ajoute que, parmi nos actions de coopération, il y a aussi l'appui à la police, à l'armée, administrations ayant besoin de matériel, que la France, comme d'autres, est susceptible de leur fournir. A condition qu'il s'agisse d'Etats dont les dirigeants ont été légalement désignés. En Angola, pour citer un seul cas, l'interlocuteur unique du gouvernement français est le gouvernement angolais.
Q - Le commerce frauduleux des armes n'est-il pas encouragé par les guerres qui ravagent plusieurs régions d'Afrique ?
R - Sur un plan général, il y a, certainement, à gagner encore en transparence. Je suis attentif, par exemple, aux recommandations sur le blanchiment d'argent ou aux avancées de la convention sur le contrôle des armes légères. C'est à partir de dispositions de ce genre que l'on peut faire en sorte que le commerce des armes sorte de la clandestinité.
Q - Par son existence même, le Sommet n'est--il pas une survivance de cette politique africaine à laquelle nous disons avoir renoncé ?
R - La question est d'autant plus légitime qu'un premier Sommet Europe-Afrique s'est tenu il y a quelques mois. Mais nous sommes sortis de notre "pré carré" pour dialoguer avec l'ensemble de l'Afrique. D'autres, comme le Japon ou la Chine, ont institué une relation spécifique avec ce continent. Ce n'est pas au moment où il a le plus besoin de la solidarité internationale qu'il faut se désengager. On ne peut pas se satisfaire d'une situation où l'Afrique, qui pèse 10 % de la population du globe ne reçoit que 1,5 % de l'investissement industriel. Ni d'une situation qui voit, à cause du sida, l'espérance de vie reculer, dans certains pays africains, de 55 à 35 ans.
Q - Pourtant, n'observe-t-on pas un repli de la France en Afrique ?
R - Notre politique africaine n'a pas la visibilité qu'elle a pu avoir; mais notre volonté d'engagement aux côtés des Africains demeure inchangée. Nous sommes, de très loin, le pays qui apporte le plus - 35 milliards de francs en 1999 - en aide publique au développement à l'Afrique subsaharienne. Notre contribution au Fonds européen de développement représente, à elle seule, quatre fois l'aide des Etats-Unis à l'Afrique au sud du Sahara. Sur les 55 pays de la Zone de solidarité prioritaire, 44 sont africains, Maghreb compris. En outre, il y a une sorte de transfert de responsabilité en direction de l'Europe. La présidence française de l'Union y a fortement contribué. C'est ainsi que l'on évitera toute tentation de type néo-colonial. Je suis, néanmoins, soucieux de la sous-consommation des crédits destinés aux pays en développement.
Q - A quoi est-elle due ?
R - A la lourdeur de certaines procédures, à leur insuffisante décentralisation, au manque d'expertise des pays partenaires et, aussi, aux situations de crise. Des programmes sont interrompus, des coopérations arrêtées parce que des pays basculent dans la violence. Cela nous désole. Le préalable de la paix se pose avec de plus en plus de force dans un nombre considérable de pays. Comme l'a dit Kofi Annan, la première responsabilité de la communauté internationale, c'est le rétablissement de la paix, condition du développement.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 16 janvier 2001)