Conférence de presse de Mme Catherine Colonna, ministre déléguée aux affaires européennes, sur les priorités du gouvernement français concernant l'Union européenne et l'implication des parlementaires français, à Bruxelles le 28 novembre 2005.

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Circonstance : Déplacement à Bruxelles (Belgique)-journées de sensibilisation de parlementaires français aux thématiques européennes, le 28 novembre 2005

Texte intégral


Bonjour à tous,
Bienvenue à la Représentation de la France auprès de l'Union européenne. Ces propos s'adressent d'abord et avant tout aux parlementaires présents, sénateurs et députés, qui nous ont accompagnés dans ce déplacement. Je vais leur laisser la parole très largement, parce que ce sont eux, avant tout, qui ont à vous transmettre leurs réflexions et leur sentiment sur l'Union européenne. Je voulais brièvement vous rappeler dans quel cadre nous sommes ici aujourd'hui.
D'abord c'est une première. Non pas côté parlementaire français puisqu'ils sont amenés à venir à Bruxelles, mais une première parce que c'est la première d'une série. Nous commençons aujourd'hui une nouvelle action pour contribuer à rapprocher l'Europe des citoyens dont les élus sont les représentants et ceci dans un cadre plus global dont je voudrais vous rappeler les principaux éléments.
Nous savons tous que l'Europe vit un moment difficile, les deux référendums négatifs, aux Pays-Bas et en France, ont révélé qu'une distance s'était établie entre les citoyens et le projet européen. On a vu qu'un peu partout les citoyens s'interrogent sur le sens de la construction européenne. Les Etats membres, pour leur part, peinent à trouver des accords et à prendre des décisions, je pense, en particulier, au futur budget de l'Union européenne. La Commission, jusqu'à il y a peu, jouait peut-être insuffisamment le rôle qui doit être le sien d'instruction et de mise en perspective des grands enjeux. Vous le savez, comme nous le savons, l'Europe est dans un moment difficile, ça n'est pas la première fois. Je citerai Jean Monnet pour rappeler au monde que l'histoire de l'Europe est celle de l'histoire de crises surmontées. Si je cite cela c'est pour dire qu'il va falloir surmonter ce moment et que le plus tôt, bien sûr, sera le mieux. Il est important d'en sortir vite. C'est dans ce cadre que prend place ce déplacement qui est à la fois le premier déplacement d'une nouvelle action de relations plus étroites entre le Parlement français et Bruxelles, je devrais dire aussi Luxembourg et Strasbourg, parce que je souhaite aussi que plusieurs parlementaires puissent avoir de la même façon qu'aujourd'hui des rendez-vous au Parlement européen à Strasbourg. Mais c'est aussi un élément dans un ensemble plus vaste d'actions que le gouvernement a entrepris depuis sa formation c'est à dire depuis le début juin.
Depuis la constitution de ce nouveau gouvernement, il y a bientôt six mois, je voudrais vous dire quels sont les axes sur lesquels nous travaillons en matière européenne. Ils sont au nombre de quatre. Je vous les présente très brièvement sachant que nous avons fait à votre intention un document. Premier axe qui nous est apparu nécessaire et même indispensable : traiter différemment les affaires européennes au sein du gouvernement. Il a été décidé de créer des comités interministériels sur l'Europe. Le Premier ministre a bien voulu prendre cette décision dès le mois de juin. Ces comités réunissent les ministres compétents sur un ordre du jour donné, que je propose au Premier ministre, et permettent d'avoir un certain nombre d'orientations politiques, de mieux anticiper les enjeux à venir et de redonner aux politiques la place qui doit être la leur dans le traitement des affaires européennes.
Deuxième axe, on a bien vu, au moment du référendum notamment, mais pas seulement, qu'il y avait certaines attentes, mais aussi certaines incompréhensions auxquelles il était mal répondu, pour ce qui concerne la marche des choses. Je fais partie de celles et ceux qui pensent que les Français restent attachés à l'idée européenne, n'ont pas rejeté le projet européen, mais nous ont exprimé leurs incompréhensions sur une certaine façon de faire l'Europe. Il fallait faire des efforts supplémentaires pour mieux informer nos compatriotes, mieux les associer au processus de décision européen. Le président de la République et le Premier ministre l'ont dit d'emblée après le mois de juin, en précisant une série de mesures pour mieux associer le Parlement d'une part, mieux associer les Français, les collectivités locales, les partenaires sociaux mais aussi la société civile à ce qui est le processus de décision en Europe. Je ne vais pas détailler l'ensemble des actions qui ont été décidées, mais, aujourd'hui nous nous situons dans le cadre de cette première branche de cette action importante qui consiste à mieux associer le Parlement. Le Parlement sera informé plus régulièrement, il y aura des débats à l'occasion de chaque Conseil européen, ce qui n'était pas le cas, les ministres compétents seront appelés à rendre compte régulièrement de leur action devant les commissions compétentes. Ce n'est pas seulement au ministre des Affaires étrangères et à la ministre déléguée aux Affaires européennes de rendre compte devant la commission des Affaires étrangères ou à la délégation pour l'Union européenne. Le Parlement sera saisi de davantage de projets de textes européens. Certains textes lui étaient transmis en application de l'article 88-4, dès la mi-juin le Premier ministre a décidé que nous devrions transmettre davantage de textes. Il vient donc de signer une circulaire, après concertation avec les assemblées, qui demande à chacun des ministres de transmettre au Parlement qui pourra faire connaître son opinion, plus de textes et tous les textes qui dans la procédure communautaire sont du ressort de la co-décision, entre le Conseil et le Parlement, c'est une nouveauté.
Les liens entre les institutions européennes et les parlementaires nationaux seront renforcés et c'est ce que nous faisons aujourd'hui. Nouvelle action, premier déplacement dans une série dont j'espère qu'elle sera appelée à se prolonger non seulement dans les mois mais dans les années qui viennent. Le Premier ministre a fait au président de la République, tout récemment, après que le dernier comité interministériel en date en a décidé ainsi, mercredi dernier, une série de propositions pour, vous le verrez, renforcer les consultations avec les partenaires sociaux, cela ne se faisait pas suffisamment. J'ai moi-même commencé à recevoir les partenaires sociaux en France. Cela ne se faisait pas et c'était tout à fait anormal, je ne vois pas pourquoi en me rendant dans un pays étranger je verrais souvent les partenaires sociaux et pourquoi, dans mes fonctions, je ne le ferai pas. Ceci est terminé, nous aurons des contacts plus fréquents. Il faut aussi informer la société civile et dialoguer avec elle, par divers moyens qui sont détaillés. L'usage de l'outil formidable que représente Internet doit être développé. Nous mettrons aussi en réseau les associations qui traitent des questions européennes et que, souvent, nous aidons. Il faut faire de la journée de l'Europe beaucoup plus que ce qui est organisé aujourd'hui, pas seulement à Paris mais un peu partout en France. Vous verrez que nous avons eu à c?ur, en nous appuyant sur d'autres ministères que le nôtre de développer la connaissance de ce qu'est l'Europe : à l'école, les questions européennes doivent faire partie du socle commun de connaissances qui est en train d'être élaboré dans le cadre de la réforme de l'école. Les journées d'appel à la préparation de la défense seront utilisées, là aussi, pour faire une présentation générale des enjeux européens. Il y aura une évaluation systématique des connaissances à l'occasion du brevet des collèges. Les écoles de journalisme renforceront la formation sur l'Union européenne et puis je souhaite que non seulement moi-même mais tous mes collègues du gouvernement soient davantage à l'écoute des citoyens et utilisent les occasions de rencontres avec les représentants de la société civile mais aussi utilisent les moyens d'un dialogue direct pour rendre compte de leur action, pour mieux expliquer les enjeux européens.
Troisième axe, nous continuons à promouvoir les opinions de la France sur les dossiers européens. Nous ne ferons pas l'Europe chacun dans notre coin, cela va de soi. Il nous faut donc faire progresser nos idées, trouver des alliés, accroître le cercle des pays qui partagent nos positions, c'est l'action qui a été entreprise depuis plusieurs mois. Philippe Douste-Blazy et moi-même, nous sommes beaucoup déplacés en Europe auprès de nos dix nouveaux partenaires mais pas seulement. Je crois que, sur un certain nombre de sujets, cela commence à porter ses fruits. Sur les perspectives financières, il y a maintenant une très large majorité d'Etats qui partage notre position. Sur la directive services, la réorientation que nous avons demandée est en cours. Sur les négociations à l'OMC, il a fallu remettre un peu les mécanismes habituels noir sur blanc là où il y avait parfois une tentation de s'en écarter. Je vous cite quelques exemples, il y en aurait beaucoup d'autres comme autant de points sur lesquels ce travail d'influence porte ses fruits.
Le quatrième axe, c'est l'Europe des projets et des politiques concrètes. Il va de soi que pour répondre aux interrogations et aux attentes qui se sont exprimées, nous devons donner la priorité à une Europe concrète. Nous devons démontrer à nos concitoyens que l'Europe répond à leurs attentes et à leurs préoccupations. La première d'entre elles, vous le savez bien, c'est le développement économique, la croissance, l'emploi. L'autre grande attente, je pense, ce sont les questions de sécurité aussi bien dans l'espace européen que pour la politique étrangère et la politique de défense de l'Union. Là aussi, nous avons indiqué un certain nombre d'actions qui sont menées, la France est en initiative, elle est et elle reste profondément engagée dans la construction européenne. Nous faisons des propositions à nos partenaires, et à Hampton Court, un début de travail en commun s'est manifesté. Il est important que ce Conseil européen d'Hampton Court soit une première étape. Je veux dire par là une étape suivie d'autres étapes et ceci dès le Conseil européen du mois de décembre pour que l'Union puisse par deux, trois ou quatre grandes actions concrètes, démontrer qu'elle est efficace et qu'elle agit pour le bien des citoyens européens.
Je n'en dis pas davantage parce que vous avez un certain nombre de précisions dans le document que nous vous avons remis et puis surtout parce qu'aujourd'hui je voudrais d'abord laisser la parole aux sénateurs et députés qui m'accompagnent, pour qu'ils vous donnent leur sentiment mais aussi pour que vous les interrogiez. Voilà en ce qui me concerne.(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 6 décembre 2005)