Texte intégral
Q - Vous venez de recevoir M. Almunia, qui a contesté récemment les prévisions budgétaires de la France. Que lui avez-vous dit et que répondez-vous à ceux qui disent que la loi de finances 2006 n'est pas sincère ?
R - Le dialogue entre l'État et la Commission est normal pour rapprocher les points de vue. Quand je suis arrivé à Bercy, en mars, les déficits étaient sur la mauvaise pente dont parle la Commission, c'est-à-dire de l'ordre de 3, 5 % du PIB cette année et 3, 7 % l'an prochain. M. Almunia est venu me voir ce matin pour que je lui explique les mesures correctrices que nous avons prises depuis cet été pour faire en sorte que, sur 2005 et 2006, nous soyons bien en dessous de 3 % du PIB, conformément à nos engagements. J'espère que nous avons été aussi convaincants qu'avec le FMI, qui a corrigé ses premières estimations pour reprendre des prévisions voisines des nôtres.
Je suis d'autant plus confiant que s'est ajouté depuis cet automne un élément majeur, je veux parler bien sûr des très bons chiffres de la croissance du 3e trimestre. Nous l'avions dit à maintes reprises : la croissance de la France a touché son point bas à la fin juin et, depuis, nous sentions l'amélioration venir, que ce soit la consommation, l'investissement, l'amélioration sensible de nos exportations, les créations d'entreprises les plus importantes jamais connues dans notre pays.
Q - Aujourd'hui, où en sommes-nous sur la croissance ?
R - Avec 0, 7 % de croissance au 3e trimestre, la France réalise la meilleure performance de tous les grands pays européens. C'est aussi le fruit des mesures prises depuis plusieurs semestres, tant par le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin que par celui de Dominique de Villepin, qui les a amplifiées en déverrouillant certains blocages de l'économie. Il faut encore être prudent, mais ce que je vois pour le 4e trimestre me conforte tout à fait sur la prévision de croissance 2006. Quant à la sincérité du budget 2006, qui prévoit entre 2 et 2, 5 % de croissance, je constate que la tendance sur laquelle nous sommes au 3e trimestre, et vraisemblablement sur tout le second semestre, est bien celle-là. J'espère que tous ceux qui le contestaient il y a quelques semaines auront l'honnêteté de le reconnaître.
Q - Sauf - petit grain de sable - que, ce jeudi, la BCE va remonter son taux directeur. Pour reprendre l'expres- sion de M. Trichet, cela vous semble-t-il "approprié" ?
R - Comme les autres ministres des Finances de l'Eurogroupe l'ont dit par la voix de Jean-Claude Juncker, nous ne voyons pas la nécessité de cette hausse des taux. Il appartient à la BCE de justifier sa décision, si elle se confirme jeudi. L'essentiel, pour la solidité de notre croissance, c'est que ceci n'ouvre pas un cycle de resserrement de la politique monétaire.
Q - Un autre pays va se battre contre ses déficits : l'Allemagne. Cela ne renforce-t-il pas encore plus la pression sur la France ?
R - Nous sommes déjà totalement engagés dans l'effort de réduction des déficits et beaucoup plus proche des 3 % que l'Allemagne. Sur le fond, je le dis sans détour : ce qui est bon pour l'Allemagne est par définition une bonne nouvelle pour la France. Après les réformes importantes et courageuses engagées par le chancelier Schröder, le nouveau train de mesures annoncé par le gouvernement de coalition d'Angela Merkel sera d'autant plus positif que l'équipe dirigeante actuelle a eu la sagesse de décaler la hausse éventuelle de la fiscalité à 2007. Même s'il pourra avoir un effet négatif transitoire sur la consommation, ce rattrapage était attendu : la TVA allemande était une des plus basses d'Europe, à 16 %, alors que nous sommes à 19, 6 %. En annonçant dès maintenant la hausse, le gouvernement allemand clarifie l'avenir, ce qui peut avoir un impact psychologique positif pour la consommation et la croissance.
Q - Vous avez demandé à Michel Pébereau un rapport pour établir "la vérité sur la dette de l'État", ce qui n'avait jamais été fait. Pouvez-vous nous en dire plus ?
R - Il s'agit d'une question centrale, non seulement pour les finances publiques, mais aussi pour tout programme politique à venir. Les Français entendent parler de la dette mais ne comprennent pas ses conséquences concrètes et ont l'impression qu'elle ne pèse pas. Ils ont tort : elle pèse très lourdement sur nos finances publiques. C'est pour cela que j'ai rappelé que l'ensemble de l'impôt sur le revenu des Français ne sert désormais pratiquement qu'à payer les intérêts de la dette. Cette "charge de la dette" est même le deuxième poste du budget de l'État, et il ne cesse de grandir. Nous avons la chance d'avoir des taux d'intérêt très bas. Si jamais ils devaient monter exagérément, cela alourdirait encore cette charge.
Cela fait vingt-cinq ans que le déficit public fait partie de notre vie quotidienne. En fait, on aggrave la dette un peu plus chaque fois. C'est pour cela que j'ai souhaité rappeler tout le monde à la raison et dire que la France n'a plus les moyens de dépenser plus qu'elle ne gagne. Je veux aussi que les Français comprennent que cette dette est notre affaire à tous. C'est un héritage collectif que nous devons prendre en charge avec responsabilité.
Q - Pourquoi tirer le signal d'alarme aussi fort ?
R - J'estime que le temps de la pédagogie est plus que venu. Je veux faire comprendre que la nécessité de maîtriser les comptes publics ne répond pas à une idéologie mais à une impérieuse nécessité. La première chose à faire était donc la communication sur la dette. Je voulais que tout le monde comprenne bien, après l'échec du référendum européen, que la réponse aux défis de la France ne serait certainement pas d'augmenter la dépense publique inconsidérément. Cela a été entendu puisque, avec Dominique de Villepin, nous avons pu prendre des mesures courageuses mais indispensables pour remettre la France en conformité avec ses engagements européens tout en préparant l'avenir.
J'ai demandé ensuite à Michel Pébereau de m'aider pour faire de la pédagogie économique. Pour moi, la dette est le résultat des faiblesses de notre système, mais aussi des erreurs du passé. Il faut avoir le courage de les étudier une par une. Je souhaite donc que Michel Pébereau fasse la genèse de cette dette et qu'il m'aide à expliquer aux Français comment elle s'est stratifiée. Parce ce que, ce faisant, on pourra comprendre que les erreurs de politique économique se payent comptant, très cher et très vite. Mais, ce qui est choquant, c'est que la facture est laissée à la génération qui suit.
Q - Cette dette, de combien est-elle ? Vous évoquez le chiffre de 2.000 milliards d'euros. C'est énorme...
R - Cela n'a rien de neuf malheureusement ! Tout le monde le sait, mais personne ne le disait. Il y a la dette financière stricto sensu, certaine, parce que ce sont nos emprunts, qui représenteront 1.167 milliards fin 2005. Il y a aussi les engagements que nous avons pris pour l'avenir : d'abord pour payer les retraites des fonctionnaires : ils représentent à peu près 450 milliards d'euros, chiffre qu'il faut doubler si l'on y ajoute les retraites futures des agents des collectivités locales et des hôpitaux. Soit 900 milliards d'euros complémentaires qui ne sont pas l'emprunt stricto sensu mais des engagements. Il ne faut pas avoir peur de ce chiffre effectivement très important. Il figure depuis longtemps dans tous les rapports de l'État et de la Cour des comptes. La différence, c'est que, désormais, il est médiatisé.
Une dette, ce n'est pas honteux, c'est même assez normal. Cela devient un problème quand on ne sait pas comment faire pour rembourser. Ce qui est un problème, ce n'est pas d'avoir une dette, mais de ne plus en faire un objet normal du débat politique. J'estime qu'il est de mon devoir de ministre de l'Économie de contribuer à mettre ce sujet au coeur du débat politique car il est essentiel pour l'avenir de nos enfants et, même, pour notre avenir à nous.
Q - Quelles sont les pistes proposées par la mission Pébereau pour réduire la dette ?
R - Lorsqu'on a une dette, trois solutions sont envisageables pour la réduire : baisser les dépenses, augmenter la croissance et vendre des actifs non stratégiques. J'attends donc de la mission Pébereau qu'elle me décrive des orientations précises sur ces trois pistes.
Q - Ce n'est pas un peu risqué comme stratégie ? Si on n'arrive pas à appliquer ces solutions, on risque de dire que la France, criblée de dettes, est menacée de faillite...
R - Non : le risque c'est d'esquiver la réalité qui vous rattrape toujours. Encore une fois, tous les chiffres sont sur la place publique et connus de tous les observateurs. Cela ne s'adresse pas aux économistes. J'imagine qu'ils ne s'attendent pas à des révélations de la part de la mission Pébereau. Je souhaite que ses conclusions s'adressent avant tout aux Français, avec clarté et pédagogie.
Tout le monde doit se persuader que notre combat c'est d'abord la croissance. Aujourd'hui, la croissance potentielle de la France est autour de 2, 25 %. Ce n'est pas suffisant pour un pays comme le nôtre. Je pense qu'il faudrait que la nation entière se fixe comme objectif de faire remonter cette croissance potentielle. Avant de se demander comment dépenser l'argent, il faut que tout le monde se pose la question de savoir comment on crée la richesse, c'est le principe de base de l'économie. Après, selon qu'on est de droite, de gauche, du centre, ou ailleurs, on peut avoir des appréciations différentes sur la distribution, mais la création elle-même de la richesse est l'impératif de tous. Si l'on a une croissance à 3, 25 % ou à 3, 50 %, plutôt qu'une croissance à 2, 25 %, cela change tout.
Q - Vous venez d'achever l'introduction en Bourse d'EDF, avec 5 millions d'actionnaires, un très beau résultat. Mais ce sont également 5 millions d'électeurs potentiellement mécontents. N'avez-vous pas l'impression d'avoir vendu trop cher ?
R - Parce qu'ils ont perdu moins de 1 % en une semaine ? Soyons sérieux : un prix minimum a été donné par la Commission des participations et des transferts pour fixer la valeur de l'action EDF. C'est son rôle et elle l'a fait en toute indépendance. D'habitude, le ministre des Finances prend toujours un peu plus que le prix de la Commission. Là, j'ai retenu exactement le prix de la Commission. À partir du moment où le prix était dans la fourchette indicative initiale, pourquoi dire après coup que c'est un euro de trop ou de pas assez. Quand on est actionnaire, c'est dans la durée qu'il faut s'inscrire : on accompagne la vie de l'entreprise. Après cela, c'est à l'entreprise de performer... EDF a de très beaux actifs, de grands projets, un très bon management. C'est ce qui fera que, progressivement, le cours de Bourse pourra augmenter. Et rien d'autre. La Bourse, ce n'est pas un jeu.
(Source http://www.u-m-p.org, le 30 novembre 2005)
R - Le dialogue entre l'État et la Commission est normal pour rapprocher les points de vue. Quand je suis arrivé à Bercy, en mars, les déficits étaient sur la mauvaise pente dont parle la Commission, c'est-à-dire de l'ordre de 3, 5 % du PIB cette année et 3, 7 % l'an prochain. M. Almunia est venu me voir ce matin pour que je lui explique les mesures correctrices que nous avons prises depuis cet été pour faire en sorte que, sur 2005 et 2006, nous soyons bien en dessous de 3 % du PIB, conformément à nos engagements. J'espère que nous avons été aussi convaincants qu'avec le FMI, qui a corrigé ses premières estimations pour reprendre des prévisions voisines des nôtres.
Je suis d'autant plus confiant que s'est ajouté depuis cet automne un élément majeur, je veux parler bien sûr des très bons chiffres de la croissance du 3e trimestre. Nous l'avions dit à maintes reprises : la croissance de la France a touché son point bas à la fin juin et, depuis, nous sentions l'amélioration venir, que ce soit la consommation, l'investissement, l'amélioration sensible de nos exportations, les créations d'entreprises les plus importantes jamais connues dans notre pays.
Q - Aujourd'hui, où en sommes-nous sur la croissance ?
R - Avec 0, 7 % de croissance au 3e trimestre, la France réalise la meilleure performance de tous les grands pays européens. C'est aussi le fruit des mesures prises depuis plusieurs semestres, tant par le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin que par celui de Dominique de Villepin, qui les a amplifiées en déverrouillant certains blocages de l'économie. Il faut encore être prudent, mais ce que je vois pour le 4e trimestre me conforte tout à fait sur la prévision de croissance 2006. Quant à la sincérité du budget 2006, qui prévoit entre 2 et 2, 5 % de croissance, je constate que la tendance sur laquelle nous sommes au 3e trimestre, et vraisemblablement sur tout le second semestre, est bien celle-là. J'espère que tous ceux qui le contestaient il y a quelques semaines auront l'honnêteté de le reconnaître.
Q - Sauf - petit grain de sable - que, ce jeudi, la BCE va remonter son taux directeur. Pour reprendre l'expres- sion de M. Trichet, cela vous semble-t-il "approprié" ?
R - Comme les autres ministres des Finances de l'Eurogroupe l'ont dit par la voix de Jean-Claude Juncker, nous ne voyons pas la nécessité de cette hausse des taux. Il appartient à la BCE de justifier sa décision, si elle se confirme jeudi. L'essentiel, pour la solidité de notre croissance, c'est que ceci n'ouvre pas un cycle de resserrement de la politique monétaire.
Q - Un autre pays va se battre contre ses déficits : l'Allemagne. Cela ne renforce-t-il pas encore plus la pression sur la France ?
R - Nous sommes déjà totalement engagés dans l'effort de réduction des déficits et beaucoup plus proche des 3 % que l'Allemagne. Sur le fond, je le dis sans détour : ce qui est bon pour l'Allemagne est par définition une bonne nouvelle pour la France. Après les réformes importantes et courageuses engagées par le chancelier Schröder, le nouveau train de mesures annoncé par le gouvernement de coalition d'Angela Merkel sera d'autant plus positif que l'équipe dirigeante actuelle a eu la sagesse de décaler la hausse éventuelle de la fiscalité à 2007. Même s'il pourra avoir un effet négatif transitoire sur la consommation, ce rattrapage était attendu : la TVA allemande était une des plus basses d'Europe, à 16 %, alors que nous sommes à 19, 6 %. En annonçant dès maintenant la hausse, le gouvernement allemand clarifie l'avenir, ce qui peut avoir un impact psychologique positif pour la consommation et la croissance.
Q - Vous avez demandé à Michel Pébereau un rapport pour établir "la vérité sur la dette de l'État", ce qui n'avait jamais été fait. Pouvez-vous nous en dire plus ?
R - Il s'agit d'une question centrale, non seulement pour les finances publiques, mais aussi pour tout programme politique à venir. Les Français entendent parler de la dette mais ne comprennent pas ses conséquences concrètes et ont l'impression qu'elle ne pèse pas. Ils ont tort : elle pèse très lourdement sur nos finances publiques. C'est pour cela que j'ai rappelé que l'ensemble de l'impôt sur le revenu des Français ne sert désormais pratiquement qu'à payer les intérêts de la dette. Cette "charge de la dette" est même le deuxième poste du budget de l'État, et il ne cesse de grandir. Nous avons la chance d'avoir des taux d'intérêt très bas. Si jamais ils devaient monter exagérément, cela alourdirait encore cette charge.
Cela fait vingt-cinq ans que le déficit public fait partie de notre vie quotidienne. En fait, on aggrave la dette un peu plus chaque fois. C'est pour cela que j'ai souhaité rappeler tout le monde à la raison et dire que la France n'a plus les moyens de dépenser plus qu'elle ne gagne. Je veux aussi que les Français comprennent que cette dette est notre affaire à tous. C'est un héritage collectif que nous devons prendre en charge avec responsabilité.
Q - Pourquoi tirer le signal d'alarme aussi fort ?
R - J'estime que le temps de la pédagogie est plus que venu. Je veux faire comprendre que la nécessité de maîtriser les comptes publics ne répond pas à une idéologie mais à une impérieuse nécessité. La première chose à faire était donc la communication sur la dette. Je voulais que tout le monde comprenne bien, après l'échec du référendum européen, que la réponse aux défis de la France ne serait certainement pas d'augmenter la dépense publique inconsidérément. Cela a été entendu puisque, avec Dominique de Villepin, nous avons pu prendre des mesures courageuses mais indispensables pour remettre la France en conformité avec ses engagements européens tout en préparant l'avenir.
J'ai demandé ensuite à Michel Pébereau de m'aider pour faire de la pédagogie économique. Pour moi, la dette est le résultat des faiblesses de notre système, mais aussi des erreurs du passé. Il faut avoir le courage de les étudier une par une. Je souhaite donc que Michel Pébereau fasse la genèse de cette dette et qu'il m'aide à expliquer aux Français comment elle s'est stratifiée. Parce ce que, ce faisant, on pourra comprendre que les erreurs de politique économique se payent comptant, très cher et très vite. Mais, ce qui est choquant, c'est que la facture est laissée à la génération qui suit.
Q - Cette dette, de combien est-elle ? Vous évoquez le chiffre de 2.000 milliards d'euros. C'est énorme...
R - Cela n'a rien de neuf malheureusement ! Tout le monde le sait, mais personne ne le disait. Il y a la dette financière stricto sensu, certaine, parce que ce sont nos emprunts, qui représenteront 1.167 milliards fin 2005. Il y a aussi les engagements que nous avons pris pour l'avenir : d'abord pour payer les retraites des fonctionnaires : ils représentent à peu près 450 milliards d'euros, chiffre qu'il faut doubler si l'on y ajoute les retraites futures des agents des collectivités locales et des hôpitaux. Soit 900 milliards d'euros complémentaires qui ne sont pas l'emprunt stricto sensu mais des engagements. Il ne faut pas avoir peur de ce chiffre effectivement très important. Il figure depuis longtemps dans tous les rapports de l'État et de la Cour des comptes. La différence, c'est que, désormais, il est médiatisé.
Une dette, ce n'est pas honteux, c'est même assez normal. Cela devient un problème quand on ne sait pas comment faire pour rembourser. Ce qui est un problème, ce n'est pas d'avoir une dette, mais de ne plus en faire un objet normal du débat politique. J'estime qu'il est de mon devoir de ministre de l'Économie de contribuer à mettre ce sujet au coeur du débat politique car il est essentiel pour l'avenir de nos enfants et, même, pour notre avenir à nous.
Q - Quelles sont les pistes proposées par la mission Pébereau pour réduire la dette ?
R - Lorsqu'on a une dette, trois solutions sont envisageables pour la réduire : baisser les dépenses, augmenter la croissance et vendre des actifs non stratégiques. J'attends donc de la mission Pébereau qu'elle me décrive des orientations précises sur ces trois pistes.
Q - Ce n'est pas un peu risqué comme stratégie ? Si on n'arrive pas à appliquer ces solutions, on risque de dire que la France, criblée de dettes, est menacée de faillite...
R - Non : le risque c'est d'esquiver la réalité qui vous rattrape toujours. Encore une fois, tous les chiffres sont sur la place publique et connus de tous les observateurs. Cela ne s'adresse pas aux économistes. J'imagine qu'ils ne s'attendent pas à des révélations de la part de la mission Pébereau. Je souhaite que ses conclusions s'adressent avant tout aux Français, avec clarté et pédagogie.
Tout le monde doit se persuader que notre combat c'est d'abord la croissance. Aujourd'hui, la croissance potentielle de la France est autour de 2, 25 %. Ce n'est pas suffisant pour un pays comme le nôtre. Je pense qu'il faudrait que la nation entière se fixe comme objectif de faire remonter cette croissance potentielle. Avant de se demander comment dépenser l'argent, il faut que tout le monde se pose la question de savoir comment on crée la richesse, c'est le principe de base de l'économie. Après, selon qu'on est de droite, de gauche, du centre, ou ailleurs, on peut avoir des appréciations différentes sur la distribution, mais la création elle-même de la richesse est l'impératif de tous. Si l'on a une croissance à 3, 25 % ou à 3, 50 %, plutôt qu'une croissance à 2, 25 %, cela change tout.
Q - Vous venez d'achever l'introduction en Bourse d'EDF, avec 5 millions d'actionnaires, un très beau résultat. Mais ce sont également 5 millions d'électeurs potentiellement mécontents. N'avez-vous pas l'impression d'avoir vendu trop cher ?
R - Parce qu'ils ont perdu moins de 1 % en une semaine ? Soyons sérieux : un prix minimum a été donné par la Commission des participations et des transferts pour fixer la valeur de l'action EDF. C'est son rôle et elle l'a fait en toute indépendance. D'habitude, le ministre des Finances prend toujours un peu plus que le prix de la Commission. Là, j'ai retenu exactement le prix de la Commission. À partir du moment où le prix était dans la fourchette indicative initiale, pourquoi dire après coup que c'est un euro de trop ou de pas assez. Quand on est actionnaire, c'est dans la durée qu'il faut s'inscrire : on accompagne la vie de l'entreprise. Après cela, c'est à l'entreprise de performer... EDF a de très beaux actifs, de grands projets, un très bon management. C'est ce qui fera que, progressivement, le cours de Bourse pourra augmenter. Et rien d'autre. La Bourse, ce n'est pas un jeu.
(Source http://www.u-m-p.org, le 30 novembre 2005)