Interview de Mme Laurence Parisot, présidente du MEDEF sur RTL le 23 décembre 2005, sur le protocole d'accord sur le financement de l'UNEDIC, notamment la teneur de l'accord et la position des différents partenaires sociaux.

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Média : Emission L'Invité de RTL - RTL

Texte intégral

Jean-Michel Aphatie : Bonjour, Laurence Parisot.
Laurence Parisot : Bonjour, Jean-Michel Aphatie.
Q- L'actuelle convention U.N.E.D.I.C, qui indemnise les chômeurs, expirait au 31 décembre. Une nouvelle convention a donc été conclue entre les partenaires sociaux, hier, soir, c'est-à-dire dans les délais. Cela, c'est sans doute bien, mais sur le front peu de choses changent. Et par exemple, les problèmes de déficit ne sont pas réglés, les cotisations patronales et salariales augmentent peu, dans la nouvelle convention. C'était le minimum qui puisse être fait pour la signature de cette convention, Laurence Parisot ?
R- Je trouve que c'est un bon accord, sous réserve que cet accord soit validé par les organisations syndicales, puis agréé par l'Etat. Donc, attendons que ces différentes formalités de ratification soient conclues pour exprimer une satisfaction.
Q- En quoi est-il bon, Laurence Parisot, cet accord ?
R- Tout simplement parce que c'est un accord responsable. C'est un accord équilibré. Et c'est un accord qui a une philosophie, qui est, à nos yeux, extrêmement importante : c'est-à-dire une philosophie qui repose sur le travail. Alors, c'est un accord responsable : qu'est-ce que ça veut dire ? Vous savez qu'en France, le régime d'assurance-chômage est géré, en partenariat, entre les organisations qui représentent les employeurs - comme le M.E.D.E.F - et les organisations qui représentent les salariés.
Q- C'est le paritarisme.
R- Exactement. Et, ensemble, nous avons dit que le déficit du régime de l'assurance-chômage, qui s'élève aujourd'hui à 14 milliards d'euros, devait être résorbé. C'est-à-dire, qu'ensemble, nous nous sommes mis autour de la table, et cela fait plusieurs mois que nous discutons pour prendre les mesures, pour mettre en place des procédures pour résorber ce déficit. Et l'accord qui a été convenu, hier, permet de résorber ce déficit : peut-être, en 2008, au plus tard, en 2009.
Q- Je lis : déficit cumulé en 2008, fin 2008 : 4 milliards 7. Donc, il n'est pas tout à fait optimiste. Ce n'est pas rien, 4 milliards d'euros !
R- Et excédent de 2 milliards, en 2009.
Q- D'accord !
R- Là-dessus, on a un plan qui est tout à fait clair. Et, je voudrais, quand même, attirer votre attention sur le fait que nous avons su prendre la mesure de la gravité de la situation, ce que ne fait pas toujours l'Etat face à ses propres déficits. On a beaucoup entendu parler de la gravité de la dette publique de notre pays, aujourd'hui. Je n'ai pas vu une mobilisation comparable à celle des partenaires sociaux, face à cette situation.
Je voudrais aussi ajouter une chose très importante. Nous avons tout fait - et personnellement, je me suis beaucoup engagée - pour aboutir à un accord qui évite une augmentation trop forte des cotisations, tant pour les entreprises que pour les salariés. Une augmentation forte des cotisations : certains parlaient, au début des négociations, de 0,1. Et cela voulait dire des charges significatives en plus, notamment pour nos P.M.E et pour nos T.P.E, et cela voulait dire aussi - il faut bien le savoir - une amputation du pouvoir d'achat.
Nous sommes arrivés à une situation où nous n'avons augmenté les cotisations de chacun que de 0,04% - donc, voyez, nous sommes partis de 0,1. Nous arrivons à 0,04 - et pour un an seulement. Alors que, l'origine, c'était pour 3 ans.
Q- Parmi les grands syndicats, la C.G.T ne va pas signer. La C.F.D.T va signer la convention U.N.E.D.I.C. Et on ne sait pas ce que va faire Force Ouvrière. Est-ce que vous, Laurence Parisot, vous attachez une importance particulière à la réponse de Force Ouvrière ? Est-ce important, pour vous, que Force Ouvrière rejoigne cet accord ?
R- J'ai toujours dit que je souhaitais que l'accord soit le plus large possible. J'aurais souhaité que la C.G.T y adhère. Je regrette qu'elle ait déjà fait savoir qu'elle ne souhaitait pas agréer cet accord. F.O est, je crois, en réflexion sur le sujet. On peut souhaiter une réponse favorable de F.O.
Q- Si elle était négative ?
R- F.O, sachez-le, a toujours eu un rôle très important dans l'U.N.E.D.I.C. Rappelez-vous, c'est André Bergeron qui, pendant près de 20 ans, a présidé l'U.N.E.D.I.C.
Q- Cela fait 10 ans qu'elle a pris ses distances avec les conventions successives qui ont été signées. Si F.O ne signe pas cette convention U.N.E.D.I.C, cela affaiblirait cette convention, selon vous, Laurence Parisot ?
R- Non, parce que les principes qui ont été décidés, après de longues discussions, sont très clairs, sont importants parce qu'il y a beaucoup, dans cet accord, pour favoriser et accélérer le retour à l'emploi des chômeurs. Il y a beaucoup, aussi, qui est fait en matière de formation : on a décidé d'investir encore plus dans ce domaine.
Et puis, il y a une chose très importante, aussi, qui a été dite entre ceux qui sont prêts à signer cet accord : c'est qu'une fois que cette nouvelle convention, comme je l'espère, sera mise en place, à froid - c'est-à-dire en dehors de la pression des négociations, de la pression des échéances - nous avons décidé de réfléchir profondément à l'ensemble du système.
Il faut bien voir que le régime tel qu'il est, aujourd'hui, a été conçu dans les années 50, dans les années 60, c'est-à-dire dans des années d'économie tellement différentes de celles que nous connaissons aujourd'hui.
Q- Vous avez mis de côté le régime des intermittents. Vous y reviendrez en janvier. Cela va être difficile de trouver un accord, là-dessus ?
R- Bien sûr, nous allons travailler sur la question des artistes et des techniciens du spectacle : il n'est pas question de négliger cette dimension. Je voudrais vous dire que, nous-mêmes, les chefs d'entreprises, sommes très proches du monde culturel dans bien des occasions. J'en profite, d'ailleurs, pour vous dire que nous ne soutenons pas l'amendement qui a été voté, très étrangement, à l'Assemblée, il y a quelques jours.
Q- Sur les droits d'auteurs.
R- Oui, tout à fait.
Q- Vous êtes plutôt du côté du gouvernement.
R- Nous sommes du côté des artistes. Il est tout à fait important de protéger la propriété intellectuelle, la propriété artistique, dans notre pays.
Q- Il y a quelques jours, le Premier ministre, Dominique de Villepin, annonçait la mise en place d'un "contrat de transition professionnelle" qui serait expérimenté sur 6 bassins d'emploi. Vous vous étiez dit "choquée" quand le Premier ministre avait annoncé cela. Vous avez eu l'occasion d'en discuter avec lui ?
R- J'ai été choquée par l'annonce du ministre, Jean-Louis Borloo.
Q- Non. C'est Dominique de Villepin qui l'a annoncé !
R- C'est Jean-Louis Borloo qui l'a annoncé, dans une interview, le matin même de la réunion générale avec les partenaires sociaux. Nous étions étonnés puisque les partenaires sociaux, justement - c'est-à-dire, les organisations syndicales et patronales, ensemble - quelques mois auparavant, en avril 2005, avions mis au point une "convention de reclassement personnalisé" qui commence à porter ses effets. Donc, nous sommes toujours très étonnés quand quelque chose que nous avons élaboré est ensuite détruit, détourné, par une invention à laquelle nous n'avons pas participé alors que c'est nous, syndicalistes et patronat, qui sommes au plus près du terrain, qui savons ce qu'il faut faire.
Q- Vous avez eu l'occasion d'en parler avec Dominique de Villepin, qui est Premier ministre ?
R- Je parle avec les ministres et le Premier ministre. Il y a des sujets d'accords. Il y a des sujets de désaccords. Ce qui compte, c'est de discuter et de travailler ensemble, c'est comme cela que nous avançons.Laurence Parisot qui n'a pas tout à fait répondu ?? la dernière question - Mais, bon, on se reverra un autre jour - était l'invitée de RTL, ce matin. Bonne journée !