Texte intégral
Q - Pour la première fois depuis le début de la législature, l'UDF a voté contre le budget. Enfin, une partie de l'UDF?
R - La décision de refuser le budget a été celle de tous les députés UDF : certains l'ont fait en s'abstenant, la majorité en décidant de voter contre. C'est qu'on ne peut plus taire la vérité. Ce budget 2006 prolonge les dérives de notre pays au lieu de les corriger : les dépenses publiques vont augmenter à un rythme trois fois plus élevé que prévu. Depuis 2002, on a laissé augmenter la dette du pays de 300 milliards d'euros ! Elle atteint aujourd'hui 1.150 milliards ! La totalité de l'impôt sur le revenu sera bientôt absorbée par le remboursement des seuls intérêts. Et au lieu d'appeler à l'effort de tous, on accumule des mesures fiscales injustes. Un pour cent des contribuables, les plus favorisés, vont recevoir à eux seuls plus de 30 % des 5 milliards d'euros de cadeaux fiscaux. Encore vendredi soir, au Sénat, on a décidé de supprimer les avantages des Plans d'épargne logement de plus de douze ans. Or, qui sont les Français qui mettent leurs économies sur un plan d'épargne ? Ce sont les classes moyennes modestes ! Alors nous actionnons la sirène d'alarme.
Q - Malgré tout, les sénateurs UDF ne semblent pas prêts à voter, à leur tour, contre ce budget?
R - Les critiques exprimées par l'UDF au Sénat sont les mêmes qu'à l'Assemblée nationale. Le discours tenu par Jean Arthuis, le président de la commission des finances, a été au moins aussi sévère que celui prononcé par l'Assemblée nationale par Charles de Courson. Chez nous, le vote est libre, mais je suis prêt à parier que les sénateurs de notre groupe ne voteront pas le budget.
Q - Oui, mais une abstention, ce n'est pas un vote « contre ».
R - Cela veut dire qu'on refuse de donner sa voix. C'est un signe de plus pour dire que les choses ne vont pas.
Q - L'UDF est-elle toujours dans la majorité ?
R - L'UDF est libre. Quand elle approuve, elle vote oui. Nous l'avons fait pendant la crise des banlieues. Quand elle refuse, elle vote non. C'est ce que nous faisons pour le budget. S'enfermer dans la question majorité/opposition, c'est accepter le piège bipolaire. Cela voudrait dire qu'il n'y a, pour l'avenir du pays, que deux choix possible : le PS ou l'UMP. Ce serait désespérant. Notre choix, au contraire, c'est le pluralisme, la liberté de penser et de voter.
Q - Les représailles ne se sont pas fait attendre : Bernard Accoyer, le président du groupe UMP, a saisi le CSA pour que le temps de parole de l'UDF soit désormais compté dans celui de l'opposition ; Jean-Claude Gaudin, le président délégué de l'UMP, a laissé entendre qu'il n'y aura plus de circonscriptions « réservées » à l'UDF en 2007. C'est la guerre.
R - Toutes ces menaces, toutes ces représailles et intimidations sont ridicules, et elles me laissent de marbre. L'UMP a tous les pouvoir, la majorité absolue dans toutes les assemblées, autant de députés que de jours dans l'année, et elle entre en éruption dès que quelqu'un refuse de se soumettre ! Il leur faut tous les pouvoirs, et en plus, que ceux qui ne sont pas d'accord disparaissent? Faut-il que la culture de l'alignement ait causé des ravages pour qu'on fasse ainsi donner la garde contre les « rebelles » ? Mais cela ne nous fera pas varier d'un pouce. Au contraire. Cela justifie notre choix. Car, si personne n'ose dire aux Français que l'on va dans le mur, à quoi bon les élus, leur écharpe et tout le tremblement ? Si l'on siège au Parlement et qu'on n'est pas libre de son vote, à quoi sert-on ?
Q - Gilles de Robien, le seul ministre UDF du gouvernement, réclame un vote des militants sur cette ligne séparatiste.
R - L'UDF fonctionne selon une règle d'or : la démocratie. Depuis plusieurs semaines, j'entends certains dire que le choix de l'autonomie de l'UDF ne serait pas celui des militants et que les instances, même les plus nombreuses (le conseil national copte plus de 3,000 membres) seraient « manipulées ». Qu'à cela ne tienne vérifions-le : je vais demander fin janvier à tous les militants de l'UDF de s'exprimer par un vote sur la ligne de leur mouvement. Comme cela, tous sera clair. Et quand les militants se seront exprimés, j'espère qu'on ne mettra plus en doute leur choix.
Q - Etes-vous si sûr de vos militants ?
R - Oui, je suis sûr d'être en phase avec eux. Leurs combats de tous les jours, ce sont les miens. Ils aspirent à un vrai centre, fort, autonome face à l'UMP et face au PS. C'est exactement pour cela qu'ils sont engagés avec foi à l'UDF. Ils ne veulent pas d'une UDF cantonnée dans le rôle de succursale. Et ils savent que c'est cette stratégie de la soumission qui a, depuis longtemps, empêché les Français de prendre le centre au sérieux, comme une solution possible pour la France.
Q - Le centre a-t-il encore une place sur l'échiquier politique, alors que l'électorat semble se radicaliser ?
R - Il y a une chose qui s'est toujours vérifiée dans l'histoire : chaque fois qu'on laisse un peuple se radicaliser, en France comme ailleurs, cela conduit à des catastrophes terribles. Pousser les gens à se détester et à se battre, c'est facile, mais toujours dangereux. L'effort des gouvernants, au contraire, doit tendre à la réunion des Français, même s'ils viennent d'horizons différents, à les souder. Et à les rassembler autour de valeurs communes. Je crois que nombreux sont les citoyens qui le savent et qui l'attendent. En Allemagne, par exemple, ce sont les électeurs qui ont contraint les états-majors à dépasser leurs logiques partisanes pour bâtir, inventer allais-je dire, un gouvernement d'union nationale. Un jour viendra où cet impératif s'imposera aussi en France.
Q - Craignez-vous un exode de vos élus vers l'UMP ?
R - Vous croyez qu'ils ont mené ces années de combat pour céder au chantage ? Ils en ont vu bien d'autres. Ils sont solides et mettront en échec toute entreprise de débauchage. Au contraire, cela les renforcera.
Q - Finalement, le vote du budget 2006, c'est votre moment de vérité?
R - Cela nous permet, une bonne fois pour toutes, de lever toutes les hypothèques et de répondre à toutes les interrogations. Il est enfin possible, en France, d'opposer un projet différent à l'UMP et au PS. C'est possible et cela devient une option crédible. Et les centaines de messages d'encouragement parvenus ces derniers jours au siège de l'UDF nous confortent, si besoin est, dans ce sens.
R - La décision de refuser le budget a été celle de tous les députés UDF : certains l'ont fait en s'abstenant, la majorité en décidant de voter contre. C'est qu'on ne peut plus taire la vérité. Ce budget 2006 prolonge les dérives de notre pays au lieu de les corriger : les dépenses publiques vont augmenter à un rythme trois fois plus élevé que prévu. Depuis 2002, on a laissé augmenter la dette du pays de 300 milliards d'euros ! Elle atteint aujourd'hui 1.150 milliards ! La totalité de l'impôt sur le revenu sera bientôt absorbée par le remboursement des seuls intérêts. Et au lieu d'appeler à l'effort de tous, on accumule des mesures fiscales injustes. Un pour cent des contribuables, les plus favorisés, vont recevoir à eux seuls plus de 30 % des 5 milliards d'euros de cadeaux fiscaux. Encore vendredi soir, au Sénat, on a décidé de supprimer les avantages des Plans d'épargne logement de plus de douze ans. Or, qui sont les Français qui mettent leurs économies sur un plan d'épargne ? Ce sont les classes moyennes modestes ! Alors nous actionnons la sirène d'alarme.
Q - Malgré tout, les sénateurs UDF ne semblent pas prêts à voter, à leur tour, contre ce budget?
R - Les critiques exprimées par l'UDF au Sénat sont les mêmes qu'à l'Assemblée nationale. Le discours tenu par Jean Arthuis, le président de la commission des finances, a été au moins aussi sévère que celui prononcé par l'Assemblée nationale par Charles de Courson. Chez nous, le vote est libre, mais je suis prêt à parier que les sénateurs de notre groupe ne voteront pas le budget.
Q - Oui, mais une abstention, ce n'est pas un vote « contre ».
R - Cela veut dire qu'on refuse de donner sa voix. C'est un signe de plus pour dire que les choses ne vont pas.
Q - L'UDF est-elle toujours dans la majorité ?
R - L'UDF est libre. Quand elle approuve, elle vote oui. Nous l'avons fait pendant la crise des banlieues. Quand elle refuse, elle vote non. C'est ce que nous faisons pour le budget. S'enfermer dans la question majorité/opposition, c'est accepter le piège bipolaire. Cela voudrait dire qu'il n'y a, pour l'avenir du pays, que deux choix possible : le PS ou l'UMP. Ce serait désespérant. Notre choix, au contraire, c'est le pluralisme, la liberté de penser et de voter.
Q - Les représailles ne se sont pas fait attendre : Bernard Accoyer, le président du groupe UMP, a saisi le CSA pour que le temps de parole de l'UDF soit désormais compté dans celui de l'opposition ; Jean-Claude Gaudin, le président délégué de l'UMP, a laissé entendre qu'il n'y aura plus de circonscriptions « réservées » à l'UDF en 2007. C'est la guerre.
R - Toutes ces menaces, toutes ces représailles et intimidations sont ridicules, et elles me laissent de marbre. L'UMP a tous les pouvoir, la majorité absolue dans toutes les assemblées, autant de députés que de jours dans l'année, et elle entre en éruption dès que quelqu'un refuse de se soumettre ! Il leur faut tous les pouvoirs, et en plus, que ceux qui ne sont pas d'accord disparaissent? Faut-il que la culture de l'alignement ait causé des ravages pour qu'on fasse ainsi donner la garde contre les « rebelles » ? Mais cela ne nous fera pas varier d'un pouce. Au contraire. Cela justifie notre choix. Car, si personne n'ose dire aux Français que l'on va dans le mur, à quoi bon les élus, leur écharpe et tout le tremblement ? Si l'on siège au Parlement et qu'on n'est pas libre de son vote, à quoi sert-on ?
Q - Gilles de Robien, le seul ministre UDF du gouvernement, réclame un vote des militants sur cette ligne séparatiste.
R - L'UDF fonctionne selon une règle d'or : la démocratie. Depuis plusieurs semaines, j'entends certains dire que le choix de l'autonomie de l'UDF ne serait pas celui des militants et que les instances, même les plus nombreuses (le conseil national copte plus de 3,000 membres) seraient « manipulées ». Qu'à cela ne tienne vérifions-le : je vais demander fin janvier à tous les militants de l'UDF de s'exprimer par un vote sur la ligne de leur mouvement. Comme cela, tous sera clair. Et quand les militants se seront exprimés, j'espère qu'on ne mettra plus en doute leur choix.
Q - Etes-vous si sûr de vos militants ?
R - Oui, je suis sûr d'être en phase avec eux. Leurs combats de tous les jours, ce sont les miens. Ils aspirent à un vrai centre, fort, autonome face à l'UMP et face au PS. C'est exactement pour cela qu'ils sont engagés avec foi à l'UDF. Ils ne veulent pas d'une UDF cantonnée dans le rôle de succursale. Et ils savent que c'est cette stratégie de la soumission qui a, depuis longtemps, empêché les Français de prendre le centre au sérieux, comme une solution possible pour la France.
Q - Le centre a-t-il encore une place sur l'échiquier politique, alors que l'électorat semble se radicaliser ?
R - Il y a une chose qui s'est toujours vérifiée dans l'histoire : chaque fois qu'on laisse un peuple se radicaliser, en France comme ailleurs, cela conduit à des catastrophes terribles. Pousser les gens à se détester et à se battre, c'est facile, mais toujours dangereux. L'effort des gouvernants, au contraire, doit tendre à la réunion des Français, même s'ils viennent d'horizons différents, à les souder. Et à les rassembler autour de valeurs communes. Je crois que nombreux sont les citoyens qui le savent et qui l'attendent. En Allemagne, par exemple, ce sont les électeurs qui ont contraint les états-majors à dépasser leurs logiques partisanes pour bâtir, inventer allais-je dire, un gouvernement d'union nationale. Un jour viendra où cet impératif s'imposera aussi en France.
Q - Craignez-vous un exode de vos élus vers l'UMP ?
R - Vous croyez qu'ils ont mené ces années de combat pour céder au chantage ? Ils en ont vu bien d'autres. Ils sont solides et mettront en échec toute entreprise de débauchage. Au contraire, cela les renforcera.
Q - Finalement, le vote du budget 2006, c'est votre moment de vérité?
R - Cela nous permet, une bonne fois pour toutes, de lever toutes les hypothèques et de répondre à toutes les interrogations. Il est enfin possible, en France, d'opposer un projet différent à l'UMP et au PS. C'est possible et cela devient une option crédible. Et les centaines de messages d'encouragement parvenus ces derniers jours au siège de l'UDF nous confortent, si besoin est, dans ce sens.