Déclaration de M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères, lors du point de presse conjoint avec M. Soren Jessen-Petersen, représentant spécial du secrétaire général des Nations unies, sur le processus de négociations du futur statut du Kosovo, Pristina le 10 décembre .

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Circonstance : Voyage de Philippe Douste-Blazy au Kosovo le 10 décembre 2005

Texte intégral

Merci, Monsieur le Représentant spécial, je voudrais simplement vous dire combien j'ai été heureux, d'abord de travailler avec vous, avec le général Bout de Marnhac et M. Dussourd, responsables du pilier I de la MINUK ce matin, dans une réunion commune, et, ensuite, de rencontrer les dirigeants du Kosovo.
J'aimerais dire trois choses aujourd'hui, trois choses qui me semblent importantes.
Premièrement, la France, parce qu'elle est, comme vous l'avez rappelé, membre du Groupe de Contact, parce qu'elle est membre de l'Union européenne, parce qu'elle est membre du Conseil de sécurité, est particulièrement attentive au futur statut du Kosovo car c'est l'un des éléments fondamentaux de la stabilité des Balkans.
Deuxièmement, j'ai vu à Belgrade hier, à Pristina aujourd'hui, des propositions radicalement différentes et, en même temps, je crois qu'il y a la possibilité d'aboutir, à une condition, c'est que l'on soit réaliste, que, d'un côté, l'on comprenne qu'il y a 90 % d'Albanais et 10 % de Serbes ici au Kosovo, et de l'autre que ces négociations sont l'occasion pour que les Serbes puissent rentrer paisiblement et vivre tranquillement en étant respectés. C'est une opportunité aussi pour les dirigeants kosovars, maintenant qu'ils ont le pouvoir et qu'ils sont majoritaires, de montrer que, lorsque l'on a la majorité et le pouvoir, on a des droits mais aussi des devoirs, notamment celui de respecter les minorités.
Enfin, troisième message qui est, après l'ouverture de la négociation, celui de la fermeté.
Je salue ici le travail qui est le vôtre, je voudrais saluer aussi tous vos prédécesseurs, en particulier mon ami Bernard Kouchner qui a fait ici un excellent travail. Mais au-delà de votre travail, au-delà du souhait de l'Union européenne, de la communauté internationale, du Groupe de contact, que l'on ne se trompe pas ici. Cet endroit du monde a créé une instabilité grès grave à plusieurs reprises. Tout sera fait pour qu'il y ait, de toute façon, une solution. Après le Groupe de contact, il y a le Conseil de sécurité des Nations unies.
La France a toujours confiance dans le multilatéralisme, donc dans les Nations unies et envers le Conseil de sécurité des Nations unies.
Je terminerai sur une note d'espoir, je suis persuadé que le moment est venu pour qu'il y ait une négociation, dans un esprit constructif où chacun pourra avoir l'impression d'avoir écrit une nouvelle page positive de l'histoire.

Q - Le dispositif de la KFOR à Mitrovica est français. Est-ce à dire que votre pays à une responsabilité particulière pour cette partie du Kosovo ?
R - Je reste persuadé qu'aujourd'hui, il n'y a pas de responsabilité particulière. Il y a la KFOR. Je vais donner au général ici présent la possibilité de s'exprimer ; je voudrais en profiter pour lui dire ici l'admiration que nous avons pour la KFOR et je voudrais en même temps dire que, dans la période transitoire que nous vivons, il y a à la fois la nécessité pour la communauté internationale d'être présente, y compris après le statut final du Kosovo, mais que, là aussi, ne nous trompons pas, comme chaque fois qu'il y a un incident, l'image des peuples qui habitent le Kosovo se détériore aux yeux de la communauté internationale.
Le général Bout de Marnhac ? Monsieur le Ministre, comme vous l'avez souligné, de la même manière que la France appartient intégralement au Groupe de Contact, de la même manière la France appartient intégralement à la KFOR, il n'y a pas de politique de la France au sein de la KFOR et il n'y a qu'une politique de la KFOR, qui est essentiellement de contribuer à assurer un environnement aussi sain et aussi sécurisé que possible ici au Kosovo.
Le ministre - Je vais en profiter pour faire une remarque sur le multilatéralisme. Il y a des moments où la communauté internationale agit pour l'intérêt général, ce ne sont pas des pays par-ci ou par-là qui agissent. Il nous est même arrivé, pour la France, de le rappeler, fut-ce aux plus grandes nations, aux plus armées.

Q - Monsieur le Ministre, lorsqu'un visiteur international se rend au Kosovo, il n'évoque généralement pas une option pour le statut final du Kosovo. La communauté internationale est-elle consciente que cela puisse entraîner un risque pour le Kosovo ?
R - Au fur et à mesure que les acteurs de la communauté internationale viendront ici, ils donneront leur sentiment. Dans les voyages, il y a un moment où l'on décolle, un moment où nous sommes en l'air et un moment où l'on atterrit. Je pense que nous allons atterrir et c'est la raison pour laquelle il est bien sûr important d'atterrir le plus souplement possible sans casse, en respectant les uns et les autres et surtout en étant au rendez-vous des grands principes directeurs du Groupe de contact : pas de rattachement du Kosovo à un pays tiers, pas de partition, pas de retour à l'état d'avant 1999, respect des minorités, respect du patrimoine culturel et religieux. Autrement, le Kosovo doit avoir un jour, comme la Serbie, un avenir européen et pour cela, on est obligé de passer par les valeurs universelles européennes d'abord.
Enfin, car je suis obligé de repartir, je voudrais féliciter encore une fois, le Représentant spécial du fond du coeur, car le travail qu'il fait me paraît tout à fait remarquable. Je voudrais féliciter le général ainsi que le préfet Dussourd.

Source : http://www.diplomatie.gouv.fr, le 14 décembre 2005