Déclaration de Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés, sur la télémédecine notamment la téléformation, le téléenseignement, la télééducation, la téléinformation, la téléprévention et les réseaux de soins, Paris le 12 janvier 2001.

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Circonstance : Cartographie des applications de télésanté : télémédecine 2000

Texte intégral

Monsieur le Directeur,
Mesdames, Messieurs,
C'est avec beaucoup de plaisir que je suis parmi vous aujourd'hui pour la présentation d'une réalisation de la direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins très attendue des professionnels de santé, mais aussi des patients, des industriels, des médias ainsi que des services de l'Etat : je veux parler de la cartographie des applications de télésanté - télémédecine 2000 -
Le domaine sanitaire et social - tout comme ceux de l'éducation, de l'enseignement supérieur, de la recherche ou de la culture - n'échappe pas aux profondes mutations qu'entraîne l'utilisation des technologies de l'information et de la communication.
Parler des technologies de l'information et de la communication dans le champ sanitaire et social, c'est évoquer une nouvelle organisation des soins en réseaux utilisant informatique et télécommunications : c'est parler de télémédecine. Celle-ci résulte du croisement de deux mondes totalement différents, la médecine avec sa culture millénaire, et l'informatique, l'internet, les réseaux sécurisés qui n'explosent véritablement que depuis une décennie.
La télémédecine est un outil formidable proposé aux professionnels de santé qui introduit une autre façon de travailler, un autre mode de compagnonnage : nouvelle forme de pratique médicale coopérative entre professionnels distants, en temps réel ou différé, elle nécessite le consentement du patient.
Quelles que soient les typologies de la télémédecine, il est clair que l'enjeu majeur de la télémédecine est de favoriser et d'accompagner une évolution des pratiques médicales. C'est le passage d'un exercice médical isolé, individualiste, caractérisé par le colloque singulier, à une pratique médicale collective, coordonnée, reposant sur le partage de l'information médicale et le partage des connaissances.
Ces nouvelles pratiques ont pour conséquence d'introduire un certain bouleversement dans les organisations traditionnelles, d'impliquer la transparence et la visibilité des pratiques, la transversalité plutôt que la hiérarchie. Un nombre croissant d'actes de soins s'effectue ou s'effectuera à distance dans les prochaines années. Mais ce n'est qu'un outil complémentaire qui ne remplace pas la consultation traditionnelle - médecin-patient-.
La télémédecine n'est pas en soi un phénomène nouveau. Elle a connu bien des développements depuis les années 1950, mais ce sont les progrès considérables dans le domaine des hautes technologies ainsi que l'augmentation continue de la qualité des réseaux de télécommunication qui ont ouvert une nouvelle période au cours des années 1990.
L'appel à projets " autoroutes de l'information " lancé en 1994 par le Ministère de l'industrie avait déjà été révélateur des potentialités des technologies de l'information et de la communication dans le domaine santé-social.
En 1996-1997, la direction des hôpitaux réalisait la première cartographie des applications de télémédecine en France (métropole et D.O.M.) et parallèlement réalisait un état des lieux de la télémédecine dans le monde.
Par typologie d'applications, par domaines et spécialités médicales, les retombées de cette enquête avaient permis de définir une stratégie nationale et de préciser les orientations du développement de la télémédecine :
ainsi depuis quatre ans un comité national d'orientation et de pilotage de la télémédecine, regroupant des professionnels de santé, et les ministères concernés (aménagement du territoire, industrie, recherche et technologie) ont assisté les services de la direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins dans la réalisation d'études thématiques et la production de guides.
En 2000, la refonte de cette cartographie, déjà ancienne et ponctuellement mise à jour en 1999, a été décidée : en effet cette cartographie devait être modernisée, évolutive et son champ élargi à tous les aspects de télésanté.
Cette réalisation vous sera présentée dans quelques instants et je veux ici rendre hommage à la qualité de ce travail et en particulier à l'équipe qui l'anime au sein de la DHOS.
Les objectifs de cette nouvelle version étaient multiples, avec notamment :
D' être un vecteur de communication vers les patients, les citoyens et les structures de soins,
De créer un réseau de connaissance autour de la " télémédecine " formant ainsi une véritable communauté virtuelle en France,
Et d'être une aide pour les industriels du secteur afin que le marché soit connu et que leur offre soit ainsi mieux ciblée,
Derrière ce terme générique de télémédecine, qui dépasse les considérations purement techniques et la fascination du progrès, se déclinent aussi toute une série de téléservices au bénéfice du citoyen, du patient et des professionnels de santé : on parle alors de télématique de santé : télésanté en abréviation.
Les applications de télésanté englobent ainsi:
la télémédecine au sens strict - médecine à distance - directement liée à la production des soins - qui constitue la plus grande partie des applications décrites dans la cartographie, téléconsultation, téléexpertise, télésurveillance, téléchirurgie,
la téléformation et le téléenseignement destinés aux étudiants et aux professionnels en activité par l'utilisation de la visioconférence et de l'internet,
la télééducation, la téléinformation et la téléprévention destinées aux citoyens et aux patients dont les vecteurs sont l'internet et la télévision, qui se développent beaucoup actuellement,
et enfin les réseaux de soins, organisés pour une population donnée ou une pathologie chronique ainsi que les réseaux dénommés réseau ville-hôpital, ou hôpital-hôpital. L'objet de ces types de réseaux étant la communication, le partage et la gestion de l'information médicale entre acteurs de soins.
Le contexte est aujourd'hui favorable au développement de la télémédecine :
la société: le vieillissement de la population, le développement de maladies liées à des phénomènes sociaux font que l'on ne peut plus dissocier le domaine sanitaire du domaine social,
la médecine : de plus en plus spécialisée, elle évolue et les nouvelles pratiques médicales incitent de plus en plus les médecins à coopérer dans le cadre de protocoles de soins,
les citoyens et les patients eux-mêmes ont de nouvelles attentes : ils réclament la transparence et une prise en charge globale de leur santé : les soins dispensés par les différents acteurs du système de santé, quel que soit leur statut, public ou privé ne peuvent plus être dissociés.
enfin la technique de plus en plus performante garantit sécurité et confidentialité des échanges d'informations médicales.
Dans ce contexte les réseaux de télémédecine sont une excellente opportunité dont les enjeux sont clairs. Ils nous permettent :
d' améliorer l'organisation des soins : la médecine moderne qui suppose l'intervention de multiples professionnels de santé, du généraliste au spécialiste appelle l'échange d'informations et de savoir entre ces différents acteurs ; c'est pourquoi la télémédecine en rapprochant virtuellement ces professionnels, peut constituer un des outils favorisant l'évolution des pratiques médicales et une meilleure organisation des soins - nous sommes là dans un objectif de santé publique majeur,
de faciliter l'accès à des soins de proximité de qualité : sous réserve d'une organisation concertée dans une région, la télémédecine apporte des solutions pour une prise en charge de proximité crédible, en matière de sécurité sanitaire, notamment dans le domaine des urgences - nous sommes là dans un objectif d'aménagement du territoire,
de participer à l'enseignement et la formation des professionnels de santé en créant de véritables réseaux de compétence contribuant :
à promouvoir une dynamique nouvelle de formation médicale continue
et à rompre l'isolement professionnel de certains praticiens dans leur exercice. Or, l'isolement professionnel est source de dévalorisation d'attractivité de certains postes bien plus que leur isolement géographique éventuel.
De contribuer à la maîtrise des dépenses de santé par la définition des stratégies de soins les plus adaptées entre les différents acteurs sanitaires pour chaque patient et c'est un enjeu d'économie de la santé.
Enfin de s'intégrer à la mondialisation des pratiques médicales, participant de l'échange des connaissances et du rayonnement de la France.
Toutefois, aujourd'hui, deux chantiers sont encore ouverts qui concernent
- l'un la responsabilité médicale,
- l'autre la reconnaissance de cette nouvelle forme d'activité médicale, en termes de codification et de tarification.
J'ai demandé que des propositions me soient faites prochainement sur ces aspects.
Le développement des réseaux de télémédecine a véritablement été renforcé par un certain nombre d'actions de l'Etat et notamment depuis le lancement du programme d'action gouvernemental pour la société de l'information en 1998 (PAGSI).
Le développement des applications de télésanté progresse et fait l'objet d'une attention particulière des pouvoirs publics.
Ainsi en 1999 le premier programme national de mise en réseaux des maternités dit projet "Périn@t", qui avait un double objectif de santé publique et d'aménagement du territoire, a été réalisé. Financé par la DATAR à hauteur de 20 MF, il a permis la mise en réseau de plus de 400 maternités.
Plus récemment , l'appel à projets e.s@nté 2000 ("i-santé 2000") a permis de financer 35 projets de réseaux, soit 95 établissements, pour un montant de 10MF.
Un prochain appel à projets e.s@nté 2001 va être lancé prochainement sur les mêmes thèmes à hauteur de 20MF.
Et enfin dans les années qui viennent cette action sera poursuivie dans le cadre des CPER (Contrats de Plan Etat Région).
L'objectif est que les réseaux de télémédecine se généralisent sur notre territoire pour couvrir toutes les spécialités médicales. Bien évidemment ce développement doit être cohérent avec les schémas régionaux d'organisation sanitaire et donc permettre l'adéquation entre l'offre de soins et les besoins de santé, voire l'amplifier.
Les premières analyses de la base de données ont montré une progression considérable :
. le nombre d'établissements en réseaux a triplé : 260 en 1997, 810 en 2000
. le nombre d'applications a presque doublé : 168 en 1997, 308 en 2000
Vous trouverez dans le dossier qui vous a été remis la répartition par disciplines médicales, par typologie, et quelques autres chiffres. Une analyse plus fine de cette base de données sera prochainement publiée.
En conclusion je dirai que :
. La télémédecine est un remarquable outil susceptible d'apporter à la pratique médicale actuelle et future un moyen de répondre aux contraintes nouvelles de planification des soins et de recomposition hospitalière. Mais ceci ne peut suffire à régler tous les aspects d'organisation des soins, d'efficience et de démographie médicale.
. C'est un outil fédérateur qui, en rompant l'isolement des patients, mais aussi des professionnels de santé, permet indiscutablement, en termes d'aménagement du territoire, une meilleure articulation entre les médecins de ville, les hôpitaux de proximité et les plus grands centres hospitaliers.
Mais la télémédecine, c'est avant tout de l'interactivité. Aussi, je vous invite maintenant à regarder la présentation de cette cartographie 2000.
(source http://www.sante.gouv.fr, le 16 janvier 2001)