Texte intégral
Madame la Ministre,
Mesdames et Messieurs,
La tenue de ce rendez-vous est une initiative très importante, car elle aborde la question du réchauffement climatique, essentielle pour notre pays, l'Europe et le monde.
Je suis venu vous dire que le Ministère des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer est bien décidé à être pleinement engagé dans cette lutte collective contre l'effet de serre, que nous déclinons à travers le plan climat.
1. Il participera à cette lutte, tout d'abord, en s'appuyant sur l'action de
Météo-France, car pour agir il faut d'abord savoir et comprendre les
phénomènes.
Cet établissement, qui dépend de mon Ministère, a la mission essentielle de surveiller l'évolution du climat, de simuler les changements futurs et leurs impacts.
L'analyse des observations confirme qu'en moyenne annuelle, la température a augmenté de 0,8 à 1,1 degré en France au cours du 20ème siècle, soit plus que la moyenne mondiale, estimée à 0,6 degrés.
Grâce à la coopération entre Météo-France, le CEA et le CNRS, dans le domaine de la simulation numérique du changement climatique, la France joue un rôle de premier plan dans le prochain rapport du GIEC, qui sera publié en 2007.
Les premières simulations montrent qu'à la fin du 21ème siècle, on constatera au niveau planétaire une augmentation de la température moyenne de 2 à 6°C, une élévation au niveau des mers de 30 cm à un mètre.
Les résultats confirment également que l'évolution du climat, jusqu'en 2030, est pré-déterminée par nos rejets passés, mais que nos politiques de réduction des émissions peuvent avoir une influence positive significative après 2030. Mais pour cruciale qu'elle soit, l'observation ne constitue pas en tant que telle une politique.
2. Mon Ministère doit également contribuer activement à la diminution de la consommation d'énergie fossile dans les transports et par conséquent à la réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Pour y parvenir, nous avons mis sur pied un plan global, qui agira sur plusieurs
leviers de manière simultanée :
- Tout d'abord, en favorisant l'efficacité énergétique des véhicules routiers. C'est là que le gisement est le plus important à court terme, et il s'agit d'adapter mieux les caractéristiques de la voiture à son usage :
- L'industrie automobile, notamment française, sait aujourd'hui fabriquer des voitures peu émettrices de CO² pour la grande majorité des usages. Elle s'est engagée à l'horizon 2008 à passer sous la barre des
140 grammes de CO² par kilomètre en moyenne sur les véhicules neufs. Si les accords avec les constructeurs ne permettent pas d'atteindre la diminution escomptée, je suis prêt à envisager un renforcement de la réglementation européenne en introduisant des normes d'émission pour le
CO².
- Nous devons aussi mieux informer les consommateurs. Dans ce but, nous venons de créer l'étiquette énergie lors de l'achat de véhicules. Elle sera rendue obligatoire pour la vente de tout véhicule neuf dans 6 mois et facilitera le choix des consommateurs en catégorisant les véhicules selon 7 classes, en fonction de leurs émissions de CO².
- Enfin, nous aidons la recherche. Le Plan Véhicule Propre a permis d'engager ces deux dernières années 40 Meuros dans des projets innovants qui mettront nos laboratoires et nos industriels à la pointe des technologies propres. Et pour ce qui concerne les établissements de recherche, je m'apprête à signer avec François GOULARD le prochain contrat quadriennal de l'INRETS. Il prévoira une augmentation très sensible des moyens humains sur 3 priorités dont, explicitement, « l'évaluation et la réduction des émissions de gaz à effet de serre et des polluants ». A 'horizon 2009, les moyen humains consacrés à cette thématique seront en croissance de 30 % dans cet établissement.
- Notre seconde priorité, c'est le carburant, et, d'un point de vue général, l'énergie utilisée par les véhicules. Je ne m'étendrai pas sur l'action du Gouvernement en faveur des biocarburants puisque François LOOS vous a détaillé le plan ambitieux qui est mis en oeuvre. Permettez moi simplement de souligner encore l'importance de mobiliser nos compétences techniques sur le thème des énergies alternatives au pétrole.
Je soutiens le développement de la voiture électrique de nouvelle génération, car je suis convaincu qu'elle a un véritable avenir, notamment en milieu urbain
et pour des flottes captives. C'est pourquoi, dans le cadre du PREDIT, une expérimentation a été lancée pour tester en situation le véhicule CLEANOVA mis au point par la Société de Véhicules Electriques.
Il nous faut aussi travailler sur la génération future de biocarburants et surl'utilisation de l'hydrogène dans les transports.
- Notre troisième priorité concerne l'éducation et la formation des conducteurs.
Dans mon esprit, cette priorité n'est pas sans lien avec la formidable dynamique impulsée depuis 2002 par le Président de la République, en déclarant la Sécurité routière cause nationale.
Nous devons, à tous les niveaux, inciter l'ensemble des conducteurs à une plus grande responsabilité, à un meilleur civisme. C'est sur ce principe que se fonde aussi "l'écoconduite".
Des questions portant sur les consommations énergétiques et la sécurité
seront intégrées à l'examen du permis de conduire au début de l'année
prochaine.
- Enfin, et vous me permettrez de m'étendre sur ce point, mon Ministère agit sur l'évolution des différents modes de transport.
C'est un point central pour la lutte contre le réchauffement climatique. Les compléments à la route que sont le ferroutage, le transport ferroviaire ou le transport fluvial ou maritime permettent de réaliser des gains très significatifs en termes d'émissions de gaz à effet de serre.
Je suis donc résolument engagé dans un plan en faveur du développement des modes de transport de marchandises complémentaires à la route.
Mon plan se situe dans l'action.
Il s'agit de construire, à travers des projets concrets, une offre complémentaire crédible pour les chargeurs. Ces projets ne seront judicieux que s'ils sont économiquement pertinents -c'est le critère premier du choix modal-
assurant le niveau de qualité de service que les chargeurs sont en droit d'attendre.
Le projet d'autoroute ferroviaire de plaine entre Luxembourg et Perpignan témoigne de cette ambition.
Il faut que le service commercial soit mis en service début 2007 et dans cette optique, des travaux de mise au gabarit de l'itinéraire, financés par l'Etat, seront lancés dès le début de l'année prochaine.
Je suis également heureux de vous annoncer que j'ai demandé à ce que soit engagé l'avant projet sommaire pour la mise au gabarit de l'itinéraire d'un second projet d'autoroute ferroviaire de plaine : sur un axe de transit majeur, entre le Nord de la France et le pays basque français.
C'est la même logique qui préside à ma démarche sur les autoroutes de la mer. Après la déclaration commune signée avec les autorités espagnoles le 17 octobre dernier, nous travaillons pour que l'autoroute de la mer de la façade
atlantique devienne une réalité commerciale dès 2007.
Pour le transport fluvial, qui connaît des taux de croissance à deux chiffres ces dernières années, c'est à travers un programme de modernisation des ouvrages que nous sommes en train d'améliorer l'offre. Là encore, l'amélioration de la qualité de service se situe au coeur de notre action.
Je rappellerai enfin, pour ne pas négliger les transports de personnes, que pour la première fois en 2006, nous aurons trois nouvelles lignes à grande vitesse simultanément en chantier !
Au delà des projets, j'ai aussi souhaité que nous mettions en place l'environnement le plus favorable aux modes complémentaires.
Un exemple : l'aide au transport combiné. Elle va croître de 50 % dans le budget 2006 et j'ai demandé que les augmentations soient ciblées sur les situations où l'effet de levier sera le plus significatif et que le nouveau dispositif apporte plus de visibilité aux opérateurs.
En ce qui concerne le fret en général, le plan fret de la SNCF doit permettre de redonner au fret ferroviaire une base saine et compétitive. Je me félicite de voir que, malgré un début d'année difficile, les objectifs 2005 du plan sont en bonne voie d'être atteints.
Dans ces conditions, rien ne devrait s'opposer au versement du complément de soutien de l'Etat à ce plan.
En corollaire, le rail ne doit pas se considérer comme un mode intrinsèquement propre. J'attends aussi des progrès au niveau des performances environnementales de la traction et je vais donc demander à la SNCF de me faire des propositions dans ce sens en particulier pour faire croître la proportion des sources d'énergie alternatives au pétrole dans la traction du fret.
Voici, tiré à grands traits, mon plan d'action pour le développement des modes complémentaires à la route. Il est au coeur de ma politique de lutte contre le réchauffement climatique.
Voyons cependant les choses en toute lucidité. La route, représente 80 à 85 % du transport de marchandises, et les projets que nous envisageons permettront de stabiliser voire de légèrement abaisser cette part.
C'est pourquoi je suis très attaché à ce que, à côté de la recherche sur la voiture propre, nous ayons un programme ambitieux de recherche technologique sur le "camion propre".
Je me félicite donc de l'émergence d'un pôle de compétitivité à Lyon sur ce thème.
Je souhaite aussi que la programmation 2006 du PREDIT fasse une large place à cette problématique.
J'évoquerai enfin le domaine de l'aviation, qui va être l'objet de votre prochaine table ronde.
Les émissions de ce mode apparaissent aujourd'hui marginales dans le secteur des transports, mais la tendance est à la hausse dans un contexte général de stabilisation ou de réduction des émissions. Il faut donc agir.
La solution que nous défendons consiste à inclure les vols intra-européens dans le marché européen des gaz à effet de serre dès 2008. C'est le mécanisme le plus efficace et l'Europe sera exemplaire en agissant ainsi.
Pour ce qui concerne les autres gaz à effet de serre, nous militons aussi pour des normes internationales plus sévères .
Enfin, et en corollaire, notre effort de recherche dans le domaine de l'aéronautique intégrera de plus en plus la dimension environnementale. J'ai ainsi demandé à la DGAC qu'en 2006, 40 % au moins des crédits du soutien à la recherche aéronautique amont soient consacrés aux questions d'amélioration des performances environnementales des avions.
Je voudrais enfin souligner les actions mises en oeuvre pour inciter à la modernisation des flottes d'aéronefs. Elles ont pour vocation première de réduire les nuisances sonores autour des aéroports mais s'inscrivent en parfaite cohérence avec nos objectifs en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Les appareils de nouvelle génération consomment en effet en moyenne 20 % de moins de fuel que les appareils des années 80 et 40 % de moins que les appareils d'ancienne génération.
C'est aussi pour cette raison que le rendement de la taxe sur les nuisances sonores aériennes va augmenter très substantiellement dès le 1er janvier 2006.
Je conclurai finalement mon propos dans le prolongement de la table ronde qui vient de se dérouler. Chacun constate que des technologies performantes ou des comportements responsables peuvent conduire à limiter la pollution et les émissions de gaz à effet de serre issues des transports. Je viens d'évoquer les nombreuses actions mises en oeuvre dans ce sens.
Force est de constater que les utilisateurs ce ces « transports propres » rendent un service à la collectivité sans forcément en obtenir un retour. Il y a là à la fois un problème d'équité et un manque d'incitation à recourir à ces bonnes pratiques.
Mais comment progresser dans le bon sens, de façon pragmatique et efficace ? C'est un débat d'experts connu sur d'autre secteurs mais à mon sens trop peu exploré dans le domaine des transports.
Pourtant, on peut aisément énumérer quelques méthodes pour avancer : moduler différemment les taxes applicables pour inciter aux carburants ou aux modes de « transports propres » ; subventionner davantage leur usage ; recourir à des systèmes de permis analogues à ceux créés dans le cadre du protocole de Kyoto.
Je pense sur ce dernier aspect aux systèmes d'écopoints ou de certificats verts que certains économistes ont conceptualisé et qui permettent d'exploiter
Il y a là une réflexion de fond à mener et certainement pas de réponse unique. Je veux réfléchir de façon méthodique à la situation où nous sommes et aux évolutions possibles pour être en mesure de faire un diagnostic orienté vers des propositions début 2006.
Mesdames et Messieurs,
- Les transports sont, avec le logement, le secteur où les évolutions sont les plus attendues.
L'examen des statistiques montre que, s'il ne se passe rien dans les transports, qui représentent à eux seuls 26 % des émissions des gaz à effet de serre, on ne parviendra pas à diviser par quatre les émissions à l'horizon 2050.
- L'économie et la réglementation sont deux instruments puissants pour progresser.
Le Ministère des Transports, de l'Equipement, du Tourisme et de la Mer, a la mission de moderniser la France et dispose pour ce faire de nombreux atouts.
Il est au coeur de l'économie. Il est une locomotive pour l'emploi.
Je souhaite donc qu'il soit non seulement le Ministère du Progrès, mais aussi celui du Respect de l'environnement. Vous pouvez comptez sur l'ensemble de mes services pour être à votre écoute et contribuer, avec vous, de manière résolue et efficace, au développement durable !
(Source http://www,equipement.gouv.fr, le 29 novembre 2005)