Texte intégral
Monsieur le Président,
Monsieur le Rapporteur,
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
L'accord qui est soumis à votre approbation aujourd'hui est le résultat d'un long processus engagé en 2001, visant à régler une situation complexe héritée de l'histoire. Il est pour nous important à bien des égards ; de par ses implications politiques tout d'abord, mais également en ce qu'il nous a permis de mettre un terme à un problème juridique complexe.
Comme vous le savez, cet accord signé par la France et la Russie le 10 décembre 2004 à l'occasion du Xème Séminaire intergouvernemental franco-russe est le prolongement logique des trois accords signés respectivement avec l'Estonie, la Lettonie et la Lituanie le 13 décembre 2001 et approuvés eux aussi par le Parlement. Ceux-ci indemnisaient pour solde de tout compte ces trois Etats en échange de la remise des titres de propriété de leurs anciennes ambassades sises à Paris et ne constituaient que le premier volet de ce long processus.
Un bref rappel historique me semble à ce stade nécessaire afin de mieux exposer les difficultés de la négociation de cet accord mais également les avantages que nous retirons de sa conclusion.
En 1940, l'occupation par l'URSS des trois Etats baltes marque la fin de leur existence en tant que sujets de droit international et aboutit, dans le contexte troublé de l'époque, à la remise des clés de leurs anciennes ambassades aux Soviétiques par l'administration française. Cette démarche se reproduira en 1944 après que les Allemands, qui avaient occupé les locaux entre 1941 et 1944, les ont évacués.
A partir de 1991, ayant recouvré leur indépendance, les Etats baltes effectuèrent en vain de nombreuses démarches auprès des Soviétiques puis des Russes en vue de récupérer leurs biens. Malgré de nombreuses requêtes auprès des tribunaux français et en dépit de la reconnaissance de leurs droits par le Conseil de l'Europe, le recouvrement par ces trois pays de leurs anciennes ambassades ne pût se faire en raison de l'immunité diplomatique dont jouissaient ces bâtiments alors occupés par l'URSS puis la Fédération de Russie.
Pour la France se posait dès lors un double problème. Tout d'abord, notre relation avec les Etats baltes, amenés à entrer dans l'Union européenne, risquait de pâtir de cette situation et le dossier de leurs anciennes ambassades de devenir un irritant sérieux. Sur un plan juridique, la situation d'occupant sans titre de la Fédération de Russie n'était pas non plus satisfaisante en ce qu'elle nous exposait, en cas de sinistre, au risque d'une responsabilité des Baltes pour des bâtiments dont ils étaient propriétaires sans en avoir la jouissance effective. La France se trouvait donc dans la position inconfortable d'un tiers pris dans un litige opposant deux autres parties.
Afin de lever cette double hypothèque, la France a pris l'initiative, début 2001, par l'intermédiaire du ministère des Affaires étrangères, d'un règlement en deux étapes. La première consistait en un rachat des bâtiments aux Baltes et la seconde reposait sur une participation de la Russie à la charge financière que représentait cette opération en échange d'une remise à cette dernière des titres de propriété des bâtiments.
Suite à la visite du président de la République dans les Etats baltes en juillet 2001, le premier volet fût conclu en décembre 2001 et la France entra ensuite dans une longue négociation avec la Russie qui ne fut finalisée qu'en juin 2004. Selon les modalités de celle-ci, la Fédération de Russie participe financièrement, à hauteur de 6 millions d'euros, à la moitié du coût ce cette opération.
En conclusion, nous pouvons insister sur le fait qu'à travers ce règlement, nous avons à la fois mis fin à une situation délicate vis à vis des trois Etats baltes mais également trouvé une issue à une situation juridique qui représentait un risque potentiel et n'était pas non plus satisfaisante pour nos relations avec la Fédération de Russie.
Si l'accord avec les pays baltes fût trouvé avant leur entrée dans l'Union européenne, les négociations furent plus difficiles avec la Russie en raison de la position qui était la sienne mais aussi dans la mesure où ce dossier renvoyait les Russes à une période de leur histoire dont la lecture est encore loin de faire l'unanimité chez eux.
Nous pouvons cependant nous féliciter aujourd'hui d'avoir trouvé une issue à ce problème vieux de plus de 60 ans.
Telles sont, Monsieur le Président, Monsieur le Rapporteur, Mesdames et Messieurs les Sénateurs, les principales dispositions de l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la Fédération de Russie relatif à certaines questions immobilières, qui fait l'objet du projet de loi aujourd'hui proposé à votre approbation.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 20 janvier 2006