Conférence de presse de M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères, sur la proposition d'un accord humanitaire d'échange de prisonniers entre le gouvernement colombien et les FARC, Bogota le 26 janvier 2006.

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Circonstance : Voyage de Philippe Douste-Blazy en Colombie le 26 janvier 2006

Texte intégral

Q - Vous allez rencontrer le président Uribe. Que pouvez-vous nous dire ?
R - En venant ici, en Colombie, je voudrais dire que l'opinion publique française, l'opinion publique européenne, le gouvernement français, les différents gouvernements européens, sont très préoccupés par le sort des otages et la situation très douloureuse qui est vécue ici, en Colombie.
La France est porteuse de valeurs universelles, de Droits de l'Homme, et donc, chaque fois qu'elle le peut, elle est là pour être au rendez-vous de la dignité et du respect de la personne humaine.
Nous avons des compatriotes, en particulier Ingrid Bétancourt, et je voudrais dire, comprenez-le, que l'opinion publique française est touchée, profondément touchée, par ce qui est arrivé à Ingrid Bétancourt. Nous demandons au gouvernement Uribe d'accepter cet accord humanitaire pour, bien sûr, Ingrid Bétancourt, parce que nous avons une obligation particulière envers nos compatriotes, mais aussi pour tous les autres otages.
Il me paraît important de dire ici que nous souhaitons que le président Uribe réaffirme son désir d'un accord humanitaire tel que la France, l'Espagne et la Suisse l'ont défini. Une mission exploratoire a proposé qu'il y ait une rencontre entre les autorités colombiennes et les FARC.
Et, enfin, je voudrais dire qu'il est excessivement important que le choix politique pour régler ce problème soit bien le choix de l'accord humanitaire et en aucun cas un choix violent, ou armé ou militaire.

Q - Est-ce que le gouvernement français serait d'accord pour accueillir des FARC en échange de la libération d'otages ?
R - Chaque chose en son temps !
D'abord, qu'il y ait un accord humanitaire qui puisse être accepté par le gouvernement de M. Uribe et par les FARC. Nous verrons ensuite en quoi il consiste et comment nous pouvons aider, en effet, à le réaliser. Sachez que la France sera toujours là pour aider à réaliser cet accord humanitaire.

Q - Monsieur le Ministre, qu'avez-vous à dire aux FARC ? Comment comptez vous les convaincre ?
R - Il était important pour moi de venir en Colombie, d'y expliquer vraiment en toute transparence quel est notre état d'esprit, et, dans le même temps, de demander au gouvernement Uribe s'il est d'accord pour cet accord humanitaire. C'est la moindre des choses. J'ai lu la dernière communication des FARC ; je me dis qu'il est évident qu'il faudra que les deux parties se mettent d'accord pour parvenir à cet accord humanitaire. J'aurai l'occasion, probablement, de vous dire, pas à pas, où nous en sommes, où j'en suis. Pour l'instant, c'est prématuré.

Q - Monsieur le Ministre, concernant l'accord humanitaire, le gouvernement a déjà proposé un lieu de rencontres. Faut-il l'agrandir ? Deuxièmement, j'aimerais savoir si ces propositions de la France, de la Suisse et de l'Espagne sont des propositions politiques, parce que l'accord humanitaire peut être analysé comme un instrument politique en période de campagne électorale.
R - Dire que l'approche des trois pays est humanitaire, c'est vrai, mais dès l'instant où il s'agit de mettre ensemble deux parties qui ne se parlent pas et qui se font la guerre, c'est évidemment politique. C'est même quelque chose de très important.
Permettez-moi de le dire ici : je crois qu'il faut toujours préférer le dialogue à la violence, préférer le respect de l'autre aux actes violents. Il vaut mieux parler que se faire la guerre.
Il y a un lieu. Je ne sais pas s'il sera petit, moyen ou plus grand, c'est aux deux parties de le dire, de se mettre d'accord là-dessus. Ce que je sais, c'est que dès l'instant où les deux parties se retrouveront, ce sera un geste politique. Cela ne veut pas dire que l'un aura perdu par rapport à l'autre, les deux auront gagné ! Parce que c'est la Colombie qui perd, si l'on ne se rencontre pas, c'est la Colombie dont on dit : "il y a 5.000 otages dans ce pays".
La France est le troisième investisseur en Colombie. Nous échangeons 400 millions de dollars par an. Nous avons des projets magnifiques sur le plan économique avec vous. Nous souhaitons négocier prochainement un accord de protection d'investissement. Nous souhaitons avoir des relations et, en même temps, la Colombie a besoin, comme tout pays, comme la France, comme d'autres, de respectabilité internationale. Et donc, ça c'est politique, oui, bien sûr.

Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 30 janvier 2006