Texte intégral
Mesdames, Messieurs, avant de rentrer en France ce soir, je voudrais vous dire deux choses : premièrement, la réunion que nous avons eu avec M. Uribe a été positive. Positive pour deux raisons : la première, c'est qu'il y a un esprit d'ouverture, me semble-t-il aujourd'hui, de la part du gouvernement Uribe sur un accord humanitaire qui permettrait à la France, à l'Espagne, à la Suisse de travailler sur le plan interne, en toute discrétion, pour aboutir à un accord humanitaire.
Ensuite, nos relations bilatérales : nous avons fait le point avec Mme Barco, mon homologue, ministre des Affaires Etrangères, pour développer encore les relations culturelles, éducatives, universitaires, économiques entre nos deux pays.
Est-ce qu'il y a des questions ?
Q - Je voudrais poser une question concrète : Yolanda Pulecio, la mère d'Ingrid Bétancourt, a déclaré à plusieurs reprises que le gouvernement colombien avait violé la confidentialité du processus et aujourd'hui, le haut commissaire a évoqué le fait que le président s'était rangé à la recommandation des trois pays de démobiliser le régiment de Valle del Cauca car ces trois pays avaient exigé une réponse publique. Quelle est la vérité ? Le gouvernement a-t-il violé la confidentialité ?
R - Je voudrais vous dire que, dans un moment comme celui là, il est nécessaire de sortir du cercle vicieux. Il y a deux parties qui ne se parlent pas, et on le comprend. Il faut dans les moments historiques avoir des réactions historiques. Cela veut dire qu'il faut, à un moment donné, accepter un accord humanitaire pour des femmes et des hommes innocents et qui n'ont rien demandé. La France, l'Espagne, la Suisse proposent de manière confidentielle de travailler avec les deux parties pour trouver un endroit et un accord. Il est évident que les deux parties doivent rester elles-mêmes dans la confidentialité tant que nous ne sommes pas arrivés au bout. Je pense qu'il ne faut pas souffler sur les braises. Il faut au contraire, aujourd'hui, être très responsables les uns et les autres. Que ce soient les deux parties. Que ce soient évidemment les pays qui essaient de rendre service. Que ce soit la presse. Que ce soit enfin chacune et chacun d'entre nous.
Q - Je voudrais savoir si votre gouvernement, comme les deux autres gouvernements, n'a pas été gêné par le fait que le gouvernement colombien publie la proposition de vos trois pays ? N'y a-t-il pas eu rupture de la confidentialité ?
R - Ce qui m'intéresse, c'est ce qu'il y a devant moi. J'ai rarement conduit en regardant le rétroviseur en permanence ; parce que c'est très dangereux. Alors, ce que je sais, c'est que j'ai eu le président Uribe devant moi, que j'ai eu M. Restrepo devant moi, que j'ai eu Mme Barco devant moi, et je peux repartir confiant, en me disant que oui, si les FARC disent qu'elles sont pour un accord humanitaire, et je veux savoir exactement à quelles conditions, et comment et pourquoi, alors du côté de M. Uribe, il y aura cet accord. Et donc, il sera important, je pense, historiquement de les faire se retrouver pour que l'on accepte cet accord humanitaire.
Q - Vous avez dit que devant des moments historiques il faut avoir des réactions historiques. Premièrement, le moment est-il venu de faire pression sur les parties afin qu'ils décident d'un lieu de rencontre ? Deuxièmement, l'heure est-elle également venue de dire aux FARC qu'il faut révéler des preuves de vie afin de faciliter le travail ? Et troisièmement, l'heure est-elle venue de dire aux deux parties qu'il n'est pas justifiable devant le monde que certains otages soient séquestrés depuis plus 9 ans et qu'Ingrid Bétancourt soit la seule citoyenne franco-colombienne retenue depuis plus de trois ans ?
R - Je n'ai pas grand-chose à ajouter à ce que vous avez dit. Ce n'est pas une question, c'est une sorte de souhait, que la communauté internationale évidemment partage. Et donc, maintenant, tout le travail diplomatique de la France, de l'Espagne et de la Suisse, c'est d'arriver à obtenir un accord, et le moment, me semble-t-il est venu, et la période électorale que vous vivez ici n'est pas obligatoirement un handicap.
Q - Je voudrais savoir si vous avez prévu une réunion des délégués des trois pays avec les FARC et dans combien de temps ? Est-ce prévu avant la fin janvier ?
R - Il y a d'abord une première chose qu'il faut faire, c'est regarder le dernier communiqué des FARC qui réagit très fermement sur l'élection présidentielle, mais qui, me semble-t-il, laisse ouverte une possibilité de rencontre. Je l'ai dit ce matin dans El Tiempo, et je le pense profondément, les FARC restent encore ouvertes à une possibilité. A partir de là, j'attends la réponse. Quand je l'aurais, je pourrais répondre à votre question. Mais chaque chose en son temps. C'est vrai que le temps diplomatique est souvent long. En tout cas, moi je le trouve parfois long. Mais il faut le respecter.
Je voudrais conclure en disant une chose qui me paraît importante : le drame qui est vécu par des centaines de familles ici, qui est un drame quotidien, est un drame qui touche au-delà de la population colombienne. Elle touche au-delà de l'océan puisqu'elle touche aussi l'Europe, et en particulier la France. Donc, je suis venu aussi vous dire qu'il faudra trouver un accord humanitaire, parce que c'est un problème de Droits de l'Homme. C'est le problème aussi de l'ensemble de la communauté internationale. Je fais confiance aux autorités colombiennes, mais j'espère également, que les FARC répondront à cet appel de la communauté internationale car c'est l'avenir de la Colombie, de l'image du pays qui est en cause. Dans ce pays qui réussit aujourd'hui, dans un pays qui a un avenir économique splendide, il faut que nous trouvions des solutions politiques, c'est à dire un accord humanitaire. Je vous remercie.
Merci. Je repars en France, mais je reviendrais !.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 31 janvier 2006