Déclaration de M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères, lors du point de presse conjoint avec Mme Ursula Plassnik, ministre autrichienne des affaires étrangères, sur le soutien de la France aux priorités de la présidence autrichienne de l'Union européenne pour relancer le projet européen et sur la crise de prolifération nucléaire créée par l'Iran, Paris le 10 janvier 2006.

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Circonstance : Visite en France d'Ursula Plassnik le 10 janvier 2006 à Paris

Texte intégral

Mesdames et Messieurs,
D'abord, je voudrais dire à Ursula combien je suis heureux de la recevoir ici au Quai d'Orsay. Nous avons pu faire un tour global de l'Union européenne, des perspectives, des sujets qui nous intéressent le plus aujourd'hui et je voudrais la remercier d'avoir commencé, cette année, ses voyages par la France.
Cette visite à Paris intervient au début de la présidence autrichienne de l'Union qui s'annonce décisive pour la construction européenne, après une année difficile. Je suis, pour ma part, convaincu que 2006 doit être et peut être une année clé pour remettre l'Union sur le chemin de l'ambition politique et je sais qu'Ursula Plassnik jouera un rôle important pour que nous y parvenions.
J'ai tenu à assurer Ursula du soutien fort que nous apporterons à toutes les initiatives de la présidence qui sont susceptibles de donner, de redonner de l'élan au projet européen. La présidence autrichienne intervient après l'accord obtenu en décembre sur la question des perspectives financières de l'Union. C'est un accord qui est fondamental pour le développement des nouveaux Etats, pour la croissance économique de toute l'Europe et qui a donné lieu à une étroite concertation entre l'Autriche et la France, tout au long de ces négociations.
Sur tous les autres sujets de l'agenda européen que nous avons abordés, j'ai également été frappé par la proximité de vues entre nos deux pays et surtout par la volonté de la présidence autrichienne de relancer, sur chaque sujet, la dynamique européenne en prenant en compte les attentes exprimées par nos concitoyens. Je pense notamment au débat de fond sur l'élargissement qui inclut, dorénavant, cette capacité d'absorption de l'Union européenne. Le débat sur l'élargissement est évidemment indissociable de celui des institutions.
Je pense aussi au souhait de l'Autriche de faire progresser le modèle social européen, dans le cadre par exemple des débats sur la directive services et sur la directive temps de travail.
Enfin, je pense à notre attachement commun à une politique extérieure européenne plus active, plus ambitieuse, ce qui implique bien sûr, que nous nous en donnions les moyens.
Sur tous ces sujets dont nous avons parlé, notre conviction est qu'il faut avancer de manière pragmatique pour relancer la dynamique européenne, tout en répondant aux préoccupations de la vie quotidienne des Européens. Dans le domaine de la gouvernance économique, par exemple, il y a sans doute, des initiatives à prendre pour renforcer la dimension politique de la zone euro. Il faut surtout avancer sur l'Europe des projets, sur l'Europe de la Recherche, des universités, sur les questions démographiques, d'immigration et de sécurité. Et puis, on l'a vu récemment avec le conflit gazier entre l'Ukraine et la Russie, il faut avancer sur la question de l'énergie.
Tout cela a montré combien il était urgent de mettre en ?uvre une véritable politique européenne de l'Union européenne de l'énergie.
Dans tous ces domaines, il faut faire la démonstration à nos citoyens de la valeur ajoutée de l'action européenne. Cette visite a aussi confirmé le caractère extrêmement confiant de notre dialogue bilatéral. La qualité de notre relation bilatérale mais aussi la place occupée par l'Autriche, au c?ur de l'Europe centrale, sa grande connaissance de la région des Balkans, en font pour nous, un partenaire de première importance pour l'Europe.
Enfin, la richesse et la diversité de nos relations culturelles et même linguistiques puisque l'Autriche promeut activement la francophonie. Tu en es, Ursula, un symbole est un facteur supplémentaire de rapprochement.
Mme Plassnik visitera tout à l'heure, la remarquable exposition du Grand Palais "Vienne 1900" consacrée à quatre grands peintres viennois.
Une fois encore, je tiens à adresser tous mes encouragements à la présidence autrichienne et à l'assurer de notre volonté d'?uvrer avec elle au dynamisme du projet européen.
Q - Ce n'est pas un hasard que Mme Plassnik soit venue tout de suite à Paris. On pense tout de suite à la Constitution, pourriez-vous préciser avec quelles idées maîtresses Mme la ministre est venue vous voir aujourd'hui, concernant la Constitution et la situation française, sachant que le président Chirac a promis ou annoncé quelques propositions ambitieuses. On parle d'agenda, a-t-on quelque chose d'un peu plus concret à annoncer ?
Par la suite, Mme la ministre pourrait-elle dire quelques phrases à ce sujet ?
R - Le président a dit qu'il ferait des propositions, il les fera. Ce n'est pas à moi d'en parler.
Concernant la Constitution, je suis persuadé que si les Français ont dit non à cette Constitution, ce n'est pas par manque d'envie d'Europe. Je suis persuadé qu'aujourd'hui, il faut justement que nous travaillions dans le cadre de la préparation du Conseil européen de juin, sous présidence autrichienne. Il faut que nous ayons des contacts. Je vais jeudi à Berlin rencontrer mon homologue allemand.
Avec Ursula, nous avons parlé, nous parlerons avec d'autres ministres des Affaires européennes, nous nous préparerons pour savoir justement ce que nous pouvons proposer, à la fois sur l'Europe des projets, que j'ai abordé, et, pourquoi pas, dans le cas des traités actuels, sur des avancées que nous pourrons faire. On verra cela en travaillant ensemble pendant cette présidence autrichienne.
Q - Le dossier de l'Iran concernant le nucléaire, comptez-vous l'aborder jeudi, lorsque vous vous rendrez à Berlin ?
R - La France, l'Allemagne et le Royaume-Uni se sont engagés, comme vous le savez, avec le soutien de l'Union européenne et du G8, dans un difficile processus visant à résoudre la crise de prolifération nucléaire créée par l'Iran. Le levée des scellées sur les sites, les matières et équipements qui permettent la production d'uranium enrichi a été confirmé aujourd'hui par M. El Baradeï. La reprise de ces activités nucléaires très sensibles, visant justement l'enrichissement de l'uranium en attente est une cause aujourd'hui de graves préoccupations. Elle va clairement et directement à l'encontre des demandes du Conseil des gouverneurs de l'AIEA, exprimées dans la résolution du 24 septembre 2005.
Je rappelle qu'aucun besoin civil, identifiable, ne peut justifier la reprise de ces activités aujourd'hui en Iran tandis que les doutes sur la nature des objectifs du programme nucléaire demeurent entiers. Ils ont même été renforcés par les derniers éléments découverts par l'AIEA en Iran, en novembre dernier.
Devant ce constat d'activités d'enrichissement de l'uranium qui va à l'encontre des demandes du Conseil des gouverneurs de l'AIEA, nous appelons l'Iran à revenir sur cette décision sans délai et sans condition. L'Iran doit comprendre que c'est l'ensemble de la communauté internationale qui est aujourd'hui très gravement préoccupé.
Comme le président de la République l'a souligné ce matin, la communauté internationale doit faire, impérativement, respecter les engagements consentis pour la sécurité de tous et l'Iran commettrait une grave erreur en ne saisissant pas la main que nous lui tendons.
Je vous rappelle que la résolution du Conseil des gouverneurs de l'AIEA du 24 septembre 2005 a posé des principes clairs, l'Iran a violé ces engagements internationaux. Des questions relevant de la compétence du Conseil de sécurité des Nations unies sont apparues.
Nous avons décidé d'explorer, toutefois, toutes les voies permettant de reprendre la négociation avec les Iraniens. Nous les avions rencontré en décembre à Vienne.
La décision iranienne remet en cause très gravement les efforts européens et la poursuite des discussions entamées le 21 décembre à Vienne avec le Royaume-Uni, l'Allemagne et la France.
Le Conseil européen de décembre 2005 a souligné que l'amélioration ou la détérioration des relations à long terme de l'Union européenne avec l'Iran dépendront des progrès qui seront réalisés sur tous les sujets de préoccupation.
Nous avons décidé de nous retrouver avec Javier Solana et mes homologues britannique et allemand, prochainement, pour discuter de la situation et décider des actions à entreprendre.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 12 janvier 2006