Déclaration de M. Jean-François Roubaud, président de la CGPME, sur les actions menées par la CGPME au cours de l'année 2005 et lignes d'actions définies pour l'année 2006, Paris le 18 janvier 2006.

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Circonstance : Voeux de la CGPME à l'automobile club de France le 18 janvier 2006

Texte intégral

Monsieur le Ministre,
Messieurs les Députés et Sénateurs,
Chers amis, Cher Président Rebuffel,
En ce début d'année, et selon une tradition bien établie, je vous présenterai dans quelques instants à tous et à toutes mes voeux les plus sincères et les plus chaleureux pour cette année 2006.
Permettez-moi auparavant de revenir sur quelques éléments marquants de cette année 2005 qui vient de s'achever.
Je crains malheureusement que cette année ne reste dans l'Histoire comme celle d'un recul de l'Europe en France. L'échec du référendum sur la nouvelle constitution européenne est également le nôtre : nous n'avons pas su faire partager notre conviction que dans une France ouverte aux vents de la mondialisation, il vaut mieux s'organiser pour être plus fort collectivement que se replier chacun chez soi.
Nous, Chefs d'entreprises, restons convaincus que l'Europe est une formidable opportunité en terme de développement pour nos entreprises. Mais cela passe par une prise en compte des craintes et des aspirations des PME confrontées brutalement au dumping économique et social des pays émergents et des pays nouvellement adhérents à l'Union. Pour réagir, il faut renforcer nos institutions européennes et ne pas hésiter à aller vers davantage d'harmonisation, en particulier au plan fiscal.
La CGPME a donc mis à profit l'année écoulée pour mieux se positionner à Bruxelles en renforçant sa représentation permanente. Nous avons également lancé les rencontres avec les parlementaires européens car il ne faut pas se leurrer, une grande partie de la législation applicable en France provient aujourd'hui de Bruxelles. Alors, oui, nous avons mis le « Cap sur l'Europe », thème retenu pour notre prochaine journée nationale de la CGPME qui se tiendra, cette année encore, au Palais des Congrès de Paris, le 13 juin prochain.
L'Europe nous a permis d'agir dans un sens déterminant lors du projet de réforme de la taxe professionnelle entériné récemment par la Loi de Finances rectificative. Ce projet qui visait à établir une assiette basée sur la valeur ajoutée nous n'en voulions pas car il était fortement préjudiciable aux commerces et aux services... sans pour autant être bénéfique à l'industrie. Nous avons été entendu et avons obtenu un plafonnement de la VA prise en compte tout en assurant la pérennité du dégrèvement pour nouvel investissement. L'industrie peut être satisfaite, les commerces et les services également. Quant à la CGPME, elle aura démontré qu'elle peut peser de manière déterminante pour faire pencher la balance dans le sens de l'entreprise.
Il est cependant amusant de constater que quelques mois plus tard le débat sur la Valeur Ajoutée rebondit au sujet, cette fois-ci, du financement de la Protection Sociale. Notre position n'a pas changé et nous n'y sommes toujours pas favorables car nous craignons les déséquilibres favorisant, il est vrai, certains emplois d'aujourd'hui mais au détriment des emplois de demain !!!
En tout état de cause, ce débat est trop important pour être mené tambour battant et nous sommes prêts à y participer mais dans le calme et la sérénité.
Quant à la réforme de la Loi Galland, elle ne se sera malheureusement pas faite dans le sens que nous souhaitions et si nous sommes malgré tout parvenus à limiter les dégâts, la levée « de facto » de l'interdiction de revente à perte n'est pas une bonne nouvelle pour nos commerces de proximité. La guerre des prix qui se dessine dans la grande distribution tend à prouver que nos craintes étaient fondées... De plus, le débat quelque peu surréaliste auquel on vient d'assister sur les soldes montre que le « demain on rase gratis » a encore de beaux jours devant lui !
La Loi de Finances 2006 a heureusement vu entériner certaines mesures pour lesquelles nous nous battions depuis des années. A cet égard la réforme des plus values mobilières est fondamentale, et ce à plusieurs titres. L'exonération totale, hors prélèvements sociaux au bout de 8 ans est au premier chef une excellente nouvelle sur un plan financier. Mais c'est également, et j'insiste tout particulièrement sur ce point, la reconnaissance du fait qu'une entreprise est avant tout un capital de croissance et d'emploi qu'il faut préserver et encourager.
Ce type de signal est positif car il marque une considération pour les efforts et les risques que nous prenons tous au quotidien pour faire vivre et développer nos entreprises. Tous les discours du monde sur le « patriotisme économique » ne parviendront jamais à égaler une véritable mesure de ce type en notre faveur, et ce d'autant plus qu'en matière de patriotisme les PME n'ont de leçon à recevoir de personne : elles contribuent de manière très importante au financement de notre protection sociale et parviennent malgré tout à créer des emplois.
Alors lorsqu'à la Conférence des Finances Publiques qui s'est tenue la semaine dernière à Bercy, M Breton nous a interrogé sur notre vision de l'action à apporter pour assainir les finances publiques, je n'ai pu m'empêcher de rappeler qu'il ne suffit pas de ralentir les hausses mais qu'il est impératif de réduire les dépenses en agissant sur le poste principal, celui de la masse salariale. En clair, il faut diminuer le nombre de fonctionnaires en profitant de l'opportunité historique offerte alors que chaque année plus de 60 000 d'entre eux partent en retraite ! Je dis cela devant le Ministre de la Fonction Publique, ancien Ministre des PME avec lequel nous avons travaillé de manière étroite, Monsieur Christian Jacob, en l'assurant de mon amitié et de mes encouragements dans la mission, ô combien délicate, qui est la sienne aujourd'hui.
Autre succès, en matière sociale celui-là, la création du Contrat Nouvelle Embauche (CNE) redonne aux petites entreprises un ballon d'oxygène qui leur permettra d'embaucher avec davantage de souplesse.
Mais nous ne trompons pas, les PME embauchent lorsque l'activité économique le permet, si la croissance engendre un cercle vertueux créateur d'emploi. L'inverse n'est malheureusement pas exact?
La CGPME qui a été à l'origine, à travers toute la France, de plus de 80 réunions sur ce thème, continuera à faire la promotion de cette formule du CNE qui a comme simple et immense mérite de répondre à nos besoins, n'en déplaise à ses détracteurs qui la charge de tous les pêchés en l'accusant d'aller vers davantage de précarité. Je l'ai dit et je le répète beaucoup en ces jours de création du CPE (Contrat Première Embauche) : est-on en situation plus précaire embauché en CNE ou en CPE, ou au chômage ? Interrogez les 280 000 personnes embauchées en CNE depuis le mois d'août, et vous aurez la réponse.
L'assurance chômage justement vient de faire l'objet d'une difficile négociation entre les partenaires sociaux. La CGPME a occupé sa place : celle d'une organisation responsable soucieuse de ne pas basculer dans des positions outrancières et irréalistes au risque de faire échouer la négociation entraînant ainsi une étatisation du régime. L'accord obtenu, en particulier grâce à la CGPME, est un accord équilibré, chacune des parties ayant accepté de faire des concessions dans l'intérêt général. C'est là notre conception du paritarisme car, aujourd'hui plus que jamais nous en sommes convaincus, l'intérêt de l'entreprise n'est pas différent de celui de ses salariés.
Ces principes fondent notre identité et c'est peut-être cela, conjugué à la dimension patrimoniale de nos entreprises, qui nous différencie et explique pourquoi les français ont une bonne opinion de notre action.
Bonne nouvelle : ils ne sont plus les seuls à avoir une bonne opinion de nous. Les parlementaires se sont prononcés par vote et ils ont placé la CGPME en tête des organisations professionnelles les plus efficaces et les plus réactives auprès d'eux. Le Trophée des Relations institutionnelles qui m'a été remis au Sénat il y a quelques semaines vaut, je peux vous l'assurer, beaucoup plus que son poids en fonte. Il symbolise un travail d'équipe ? et c'est pourquoi j'ai voulu ce soir m'adresser à vous entouré des membres du Comité exécutif de la CGPME - et marque la place retrouvée de la Confédération, capable de porter haut et fort les couleurs de ces PME dont nous sommes si fiers.
Mesdames et messieurs les parlementaires, merci de votre soutien et (pardonnez moi ce petit passage publicitaire) soyez nombreux à notre prochaine réunion d'Amicale parlementaire le 08 février prochain à l'Assemblée Nationale sur le thème « SBA, accélérateur de croissance et de développement : fantasme ou réalité ? ».
Pour revenir à l'année écoulée, la France en 2005 aura malheureusement été le théâtre d'émeutes dans les banlieues. Cela dénote un malaise et les PME, comme les autres acteurs économiques et sociaux, doivent en tenir compte. Il nous faut mieux faire connaître le monde de l'entreprise à ces jeunes qui voient parfois en nous des extra-terrestres du simple fait que nous portons une cravate. La CGPME s'engagera donc au côté du Garde des Sceaux, Pascal Clément, dans l'opération de parrainage de jeunes « placés sous main de justice ». De même, nous travaillons actuellement pour adapter la Charte de la Diversité aux PME.
Mais attention. Qu'on ne voit pas là une quelconque reconnaissance de culpabilité de l'entreprise, bien au contraire.
La PME du fait de la proximité patron-salarié, et de son implantation géographique au coeur même des zones d'habitat, est le meilleur moteur d'intégration. Le problème d'une PME du bâtiment n'est pas de favoriser la diversité mais de la gérer ! Alors attention aux fausses bonnes idées : le CV anonyme est peut-être gérable dans une multinationale, il est inapplicable dans une PME ! Verra-t on demain des CV sans photo, sans nom et, pourquoi pas, sans âge, sans sexe, sans études et sans adresse ? Soyons sérieux.
La négociation interprofessionnelle sur la diversité qui s'ouvrira bientôt, et pour laquelle j'ai voulu attendre que les esprits s'apaisent, nous donnera l'occasion d'exprimer notre sensibilité faite d'ouverture et de réalisme.
Il en sera de même durant les négociations sur la pénibilité, les accidents du travail ou les maladies professionnelles. Accepter de reconnaître les évolutions est une nécessité. Faire évoluer les droits est naturel?à condition de faire évoluer en parallèle les devoirs.
La CGPME inscrit donc son action dans le sens d'un dialogue constructif, au service des TPE/PME dans l'intérêt de la Nation toute entière.
Si j'avais à formuler des voeux collectifs, ce serait tout simplement qu'ensemble nous parvenions à faire avancer ce dialogue pour améliorer la France d'aujourd'hui en préparant mieux la France de demain?, faisant ainsi mentir Gustave Flaubert qui prétendait que « l'avenir est ce qu'il y a de pire dans le présent. »
source http://www.cgpme.fr, le 23 janvier 2006