Déclaration de M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères, sur les relations entre la France et Israël, la lutte contre l'antisémitisme en France et l'aide européenne aux territoires palestiniens, et sur Paris le 1er mars 2006.

Prononcé le 1er mars 2006

Circonstance : Visite en France de Mme Tzipi Livni, ministre israélienne de la justice et des affaires étrangères : entretien avec Philippe Douste-Blazy le 1er mars 2006 à Paris

Texte intégral

Madame la Ministre, Chère Amie, d'abord je voudrais vous dire combien je suis heureux de vous recevoir ici au Quai d'Orsay. Je voudrais remercier mon homologue, Mme Tzipi Livni de sa présence aujourd'hui. Ce dîner nous permettra de faire connaissance après les conversations téléphoniques que nous avons eues ces derniers jours.
Avec les autorités israéliennes, je m'attache à construire une relation de confiance et je me réjouis que, pour sa part, Mme la Ministre soit attachée à la concertation avec les différents membres de l'Union européenne.
Nos discussions devraient porter, bien sûr, sur l'amitié franco-israélienne qui est forte, plus forte que jamais, mais aussi sur les conséquences de la victoire du Hamas aux élections législatives palestiniennes. La balle est dans le camp du Hamas, ce mouvement connaît les conditions pour que nous engagions un dialogue avec lui. C'est donc aux dirigeants du Hamas qu'il convient d'évoluer, qu'il convient de donner des signes clairs, dire qu'ils sont prêts à renoncer à la violence et à reconnaître le droit d'Israël à la sécurité et à l'existence de l'Etat d'Israël.
Pour autant, nous pensons que la victoire du Hamas ne doit pas nous faire renoncer à l'objectif de deux Etats vivant en paix et en sécurité. Nous estimons en outre qu'il est nécessaire de soutenir le président de l'Autorité palestinienne qui est le garant de la pérennité et de la légitimité des institutions palestiniennes.
J'imagine que Mme la ministre partage mon souhait de poursuivre la consolidation des relations bilatérales entre nos deux pays, entre la France et Israël. Nous devrions bien sûr évoquer ce projet très avancé de Fondation entre la France et Israël dont MM. Sharon et Chirac s'étaient entretenus en juillet dernier.
Q - Monsieur le Ministre, la France a, dans le passé, sévèrement critiqué les prises de positions israéliennes concernant l'antisémitisme en France. M. Sharon a parlé de ce danger pour les Juifs de France. La France a aussi critiqué les appels aux Juifs d'immigrer en Israël. Cette fois-ci, comprenez-vous les émotions suscitées en Israël par le crime d'Ilan Halimi aussi ?
(...)
R - Merci de ces mots, je m'associe totalement à ce que vient de dire Mme Livni. Il n'y a rien de plus atroce, que de plus horrible que des manifestations de racisme et tout particulièrement d'antisémitisme.
Comme nous l'avions dit à M. Sharon, et nous avions été très sensibles aux mots qu'il avait prononcés, comme je suis très sensible aux mots qui viennent d'être prononcés par mon homologue, le gouvernement français, depuis plusieurs années, depuis deux ans, a décidé d'agir concrètement et dans le domaine législatif pour lutter contre l'antisémitisme. Et nous avons vu le nombre d'actes d'antisémitismes baisser dans notre pays grâce à une action résolue, politique, éthique mais aussi législative au parlement de mon pays pour que les crimes d'antisémitisme soient très sévèrement punis.
A mon tour, je voudrais dire combien je pense à Ilan, combien je pense à sa famille, combien je pense à la communauté juive, combien je pense à ses proches et combien, par respect pour eux et par respect pour les très nombreux Français qui ont ressenti une émotion extrême devant cette atrocité, combien il est important, maintenant, qu'avec les autorités ivoiriennes, nous fassions ensemble acte de justice vis-à-vis de celui qui a commis ce crime.
Q ? La France est-elle sur la même longueur d'onde que les Israéliens sur Mahmoud Abbas ? Et au sujet de l'Iran, je voudrais vous demander quel est le risque de voir l'Iran remplacer l'aide européenne ?
R ? La France a été la première, par la voie de son Premier ministre Dominique de Villepin à poser trois conditions au dialogue avec le Hamas.
Ces principes sont toujours valables et notre position sur ce sujet reste totalement inchangée. Nous pensons en même temps qu'il serait dangereux d'assécher, d'ores et déjà, toute l'aide à l'Autorité palestinienne, au moins jusqu'à la mise en place du nouveau gouvernement, sans risquer un effondrement brutal de l'administration et de l'économie palestinienne. Ce ne serait dans l'intérêt de personne. Ceci aboutirait à un chaos social, économique y compris sécuritaire, avec la montée des violences.
Personne n'a à y gagner et il est évident qu'il est nécessaire, dans ces conditions, qu'il n'y ait personne d'autre qui vienne, en complément ou à la place de l'Union européenne, dans ces conditions et je le répète, les principes vis-à-vis du Hamas restent inchangés.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 6 mars 2006