Déclaration de M. François Bayrou, président de l'UDF, sur ses propositions dans le domaine de la politique de l'environnement, Paris le 22 avril 2006.

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Circonstance : Colloque organisé par l'UDF sur le thème "Environnement : pour un avenir durable", à Paris le 22 avril 2006

Texte intégral

Je remercie tous les intervenants qui ont participé à cette journée.
Sur la question de l'eau [abordée par la question d'un participant], je voudrais dire mon optimisme. Nous avons souvent le sentiment que cela allait mieux dans le passé et que la question s'aggrave ; mais à l'époque de Henri IV, les Français étaient constamment malades de fièvre comme la typhoïde, parce que l'eau était polluée. Nous sommes trois fois plus nombreux et avons une eau abondante et sûre. C'est donc simplement un problème d'investissement. Beaucoup de problèmes dans l'histoire de l'humanité, ou de problèmes d'aujourd'hui comme l'effet de serre, ne sont pas de simples problèmes d'investissement. On peut garantir l'eau à une grande partie de la planète.
Je vous remercie d'autant plus que c'est samedi de vacances !
Le sujet de ce colloque est crucial. Pendant longtemps, on a considéré l'écologie, le développement durable, comme une option politique parmi les autres, comme un choix politique. Il y a eu une deuxième étape, où on l'a considérée comme un chapitre nécessaire, obligé, dans tout programme politique. Il faut maintenant passer à une troisième étape : on considérera nécessairement l'écologie comme la condition de toute action politique.
Vous voyez bien que cela répond à un choix fondamental, celui de la responsabilité. Nous sommes responsables vis-à-vis de nous-mêmes. Nous sommes responsables vis-à-vis de la planète qui nous a été confiée. Nous sommes responsables vis-à-vis des générations futures. Nous sommes même responsables, parce que nous en sommes les héritiers, des erreurs des générations précédentes. Nous sommes responsables par rapport au passé, par rapport à l'avenir, par rapport au patrimoine, qui unit le passé et l'avenir.
Cela prend un tour d'autant plus aigu que c'est symbolisé, et résumé autour d'une question qui constitue la plus grande menace, la seule menace prévisible du 21ème siècle, c'est celle du changement climatique, dont il est démontré que la responsabilité principale incombe au développement sans frein de la consommation d'énergie -et notamment d'énergie fossile- dans les activités humaines.
Nous avons vécu avec l'illusion de l'abondance qui nous a fait mener une politique aveugle et sourde aux grands fondamentaux du patrimoine planétaire. En seulement six générations, dans l'histoire de l'humanité ce n'est rien, les habitants des seuls pays développés vont avoir dilapidé, en moins d'un siècle et demi, plus de la moitié des réserves totales d'énergie fossile qui s'étaient accumulées sur notre petite planète en quelques centaines de millions d'années.
Voilà notre responsabilité.
Il est évident pour tout le monde que nous sommes désormais devant un mur, que notre course folle ne pourra pas durer, à la fois en raison des pénuries qui se profilent et qui vont, on y est déjà, augmenter considérablement les prix, et en même temps en raison des conséquences que cette vitesse de libération des gaz à effet de serre vont produire sur la pollution de l'atmosphère.
Le groupe intergouvernemental des experts sur l'évolution du climat nous dit que le climat de la planète va être affecté par une augmentation des températures de l'ordre de 1,5 à au mieux, à 5,8° au pire, d'ici à la fin du 21ème siècle. Or 5° c'est la différence qui nous sépare des grandes glaciations qui se sont achevées il y a quatorze mille ans. Je vous rappelle qu'à cette époque pas si lointaine, l'ensemble de l'Europe du Nord, les deux tiers de l'Europe, était recouverte par un gigantesque glacier. Vous mesurez les conséquences incalculables, en terme de montée des océans par exemple, que recèle un réchauffement du même ordre.
Sans que d'ailleurs on sache dans quel sens ces conséquences vont jouer : dans un certain nombre de modèles climatiques, vous découvrez l'arrêt du gulf stream, ce qui bouleverserait notre continent européen, qui doit à cet immense courant marin son climat tempéré. De sorte que le réchauffement de la planète pourrait nous faire connaître des hivers infiniment rigoureux, ce qui n'empêcherait pas, disent-ils, des été caniculaires !
Les spécialistes de la biodiversité nous disent que des centaines de milliers d'espèces vivantes, certains disent un million, seraient menacées par pareils scénarios.
Ce qui est frappant aujourd'hui, même pour les esprits les plus sceptiques, c'est l'unanimité de la communauté scientifique qui s'est forgée autour de la même inquiétude et du même diagnostic.
Nous sommes devant une conclusion, naturellement insupportable pour beaucoup : de même que nous vivons à crédit sur les finances, nous vivons à crédit, sur l'environnement.
Le protocole de Kyoto n'a pas été ratifié par les Américains. Vous vous souvenez de cette phrase irresponsable du président américain Georges Bush père en 1992, au moment des discussions sur Kyoto : « le mode de vie américain n'est pas négociable » ! Or ce protocole de Kyoto, refusé par les Américains, n'est qu'une petite étape sur le chemin qui reste à faire, puisqu'il dispose que nous devons réduire notre consommation d'énergie, notamment fossile, de 5,2 % par rapport à 1990, pour l'horizon 2008-2012. Or même cette petite étape, même nous qui avons signé et sommes réputés attachés à ce sujet, nous ne la respecterons pas. Par exemple, la France a pris l'engagement de passer en 2010 de 16 à 21 % d'énergie renouvelable. Or non seulement, nous ne serons pas à 21 %, mais si nous continuons comme aujourd'hui, nous tomberons au-dessous de 16 %, parce que l'essentiel de notre production d'énergie renouvelable était hydroélectrique, et que la baisse de la pluviométrie a vidé les réservoirs, et donc diminué la production. De sorte que nous ne sommes plus à 16 %, nous sommes à un peu moins de 15 %.
Ce que nous avons à faire est immense - le risque l'est aussi.
Cette menace climatique et énergétique porte en elle-même trois grandes menaces de crash pour nos sociétés.
Premièrement, un crash climatique, nous en avons parlé, avec une menace sur la vie des populations proches du niveau de la mer ; un crash économique puisque l'ensemble de nos activités humaines sera évidemment profondément bouleversé et affecté par ces changements ; et, par voie de conséquence, un crash politique. De nombreux observateurs, par exemple Jean-Marc Jancovici, notent qu'il n'y a pas eu de bouleversement aussi grave dans l'histoire de l'humanité qui ne se soit traduit par la naissance de dictatures. Comme si l'homme, troublé par des phénomènes de cet ordre, ne trouvait d'autre recours que d'abandonner sa liberté.
Nous vivons à crédit, non seulement sur les générations futures, mais aussi sur les plus pauvres de la planète, puisque la consommation d'énergie dans un pays développé comme le nôtre est 15 fois plus importante que celle d'un pays comme l'Inde. Et nous ne pouvons pas prétendre que nous sommes, nous pays développés de l'Ouest, les seuls sur la planète à avoir le droit de gaspiller l'énergie qui en réalité appartient à tous !
C'est ce qui indique la dimension des efforts à conduire. Nous ne pourrons pas dire que nous ne savons pas. Parce que nous avons voté une loi, pour laquelle nous avons eu des rapports, et une démarche gouvernementale qui pour une fois a pris la juste mesure des efforts à faire, une loi qui annonçait que nous diminuerions nos émissions de gaz à effet de serre de 75 %, c'est-à-dire divisés par 4, à l'horizon 2050 ; nous l'avons votée sans la moindre émotion, et sans que naturellement aucune décision n'ait suivi.
C'est pourquoi nous avons une immense responsabilité devant nous. Et si l'on veut regarder en face les fondations du modèle de société qui doit être le nôtre, nous sommes là devant le premier problème qui va dominer le siècle qui vient, et probablement les siècles suivants.
La réponse ne peut être qu'une réponse politique. La réponse ne peut être que celle de la volonté d'un peuple qui s'exprime et se fait entendre au travers de ses dirigeants et au travers de son État. On pourrait même dire que s'il y a une réhabilitation à trouver de la démocratie et de l'État, nous avons là le sujet privilégié de cette réhabilitation. Car si nous laissons les choses aller selon leur propre logique, en prenant en compte uniquement les besoins immédiats, uniquement les marchés, uniquement les intérêts financiers de court terme, alors nous sommes certains d'aller dans le mur. Et c'est d'autant plus difficile et passionnant que derrière cette question de la volonté politique, il y en a une deuxième, celle de dépasser notre démocratie nationale ; car il faut dépasser les frontières de la France pour prendre une décision de cet ordre, pour réduire les tonnages de gaz à effets de serre. Aucune politique nationale ne peut inverser, seule, un mouvement de cette ampleur. Il y faut des instruments d'action à l'échelle de la planète. Et pour nous, France, il n'y a qu'un instrument d'action disponible, c'est l'Europe réinventée.
Autrement dit, sur ce sujet comme sur d'autres, le peuple français n'est pas responsable seulement pour lui-même, il est responsable pour l'Europe, et il est responsable, d'une certaine manière, pour les autres peuples de la planète.
Voilà donc le retour de la vocation européenne et de la vocation universelle de la France.
Pourquoi ce problème est-il si difficile à traiter ?
Parce que les demandes des peuples, et particulièrement du nôtre, sont absolument contradictoires. Les Français ne veulent pas des émissions de gaz à effet de serre. Ils ne veulent pas des déchets nucléaires. Pourtant ils veulent l'absolue abondance de l'énergie, et notamment de l'électricité. Ils ne veulent pas de la hausse des prix de l'énergie, notamment des carburants, et pourtant ils veulent, et ils exigent, la protection du climat. Ils ne veulent pas d'effort supplémentaire, mais ils veulent qu'on prenne des décisions. Ils ne veulent pas qu'on parle de la vitesse sur les routes, ni en termes d'impôts. Ils veulent la protection des paysages, l'enfouissement des lignes électriques, ils veulent les éoliennes mais chez les autres etc.
Je voudrais, pour fonder une politique sérieuse en matière d'écologie, de protection de l'environnement et de développement durable, vous donner trois ou quatre convictions de base.
1 - Il y a un grand gisement d'énergie disponible à bas prix : ce sont les économies d'énergie.
2 - La première clé d'une politique sérieuse en matière d'économie d'énergie, c'est la formation de la population. C'est un des domaines, je le crois, dans lesquels les Français et particulièrement les jeunes Français sont prêts à changer leur comportement. Encore faut-il leur expliquer pourquoi c'est indispensable. Car l'effort est individuel, familial, du foyer, du cercle familial, de l'entreprise, cet effort ne peut être conduit que si chacun a conscience des raisons qui le rendent nécessaire. Et donc les médias de communication de masse et l'Éducation nationale sont les moyens de ce changement de mentalité. Je suis d'accord avec des spots qui expliqueront aux Français ce qui se passe sous nos yeux, si on ne fait rien. Deuxième clé de cette politique sérieuse, moins idéaliste je le reconnais, il faut qu'il faut que ce soit plus cher de polluer que de ne pas polluer. Que ça coûte de polluer, et que ça permette de faire des économies de ne pas polluer. Et donc les questions de fiscalité écologique, de fiscalité des carburants, sont une clé absolument nécessaire. Il serait plus facile pour un responsable politique d'abonder dans le sens d'un "c'est trop cher" ... mais il n'y aucune possibilité d'arriver à une réponse si on ne programme pas l'action publique [sur ce plan].
3 - Dire la vérité sur la crise énergétique, c'est aussi avoir le courage de dire aux Français qu'il nous faut profondément modifier nos modes de vie. "Avoir le courage" est un terme inapproprié - car ma conviction est que ce n'est pas une menace, c'est une chance, et que la société que nous allons former au 21ème siècle vivra mieux si elle vit plus sobrement. C'est donc le modèle de développement qu'il va falloir changer, et, comme vous le sentez bien, ça ne se fera pas en assistant aux évolutions du monde comme il va.
4 - Il faut une politique de l'énergie européenne, qui ait les moyens d'induire ce changement réel de comportement et en même temps de s'adresser à l'ensemble de la planète pour que les autres puissances mondiales entendent cette nécessité.
Quels sont les piliers d'un plan pour une vraie croissance sobre ? J'en vois trois, là encore très simples :
1 - Se fixer des objectifs. L'objectif de diviser par 4 notre consommation en 50 ans, veut dire qu'il faut que nous ayons baissé notre consommation de 25 % en 2020. Cela a une signification précise, par exemple en matière d'énergie renouvelable, de biocarburants, etc.
2 - Il faut accentuer très fortement les crédits de recherche, et cela demande un effort public.
3 - Il nous faut aider les pays émergents à trouver des voies de croissance différentes, intégrant un modèle de développement énergétiquement plus sobre que celui dont nous leur avons donné l'exemple. La conviction n'y suffira pas.
Je voudrais maintenant en venir concrètement à ce qu'on pourrait vouloir comme plan national pour soutenir une politique de cet ordre.
En commençant par vous donner deux chiffres. Parler d'économie d'énergie, c'est parler bâtiments et transport.
Le bâtiment et les transports, c'est à peu près 50 % de la consommation d'énergie et des émissions de gaz à effet de serre ; et on n'a pas fait d'économie, on a augmenté cette consommation de 25 % en 15 ans.
Notre plan national éco veut dire :
1- Plan bâtiment éco : renforcement des normes pour notre construction neuve ; travaux sur la maison passive dans laquelle la consommation énergétique est égale à zéro (isolation, grande surface vitrée au sud, récupération de l'air et des calories, permettant d'arriver à 22° à l'intérieur avec -19° dehors) ; un plan équivalent pour l'ancien ; une production de chaleur renouvelable (solaire en particulier) pour le chauffage et l'eau chaude sanitaire. Toutes les maisons individuelles de France pourraient produire elles-mêmes leur eau chaude sanitaire et leur chauffage. Les marchés publics, qui représentent 15 % de notre activité économique, devraient donner l'exemple, et cela suffirait pour que les coûts de procédés nouveaux s'effondrent, parce que ce sont les séries qui font baisser les prix. L'avantage, c'est la création d'un très grand nombre d'emplois non délocalisables : quelque 120 000 emplois par an les vingt premières années.
2 - Un plan route éco. Naturellement, le type d'automobiles que nous utilisons joue un très grand rôle dans l'émission de gaz à effet de serre. Réduire la place de l'automobile, développer le ferroutage pour le fret, sont un immense enjeu, ainsi que l'allégement des véhicules. On a supprimé toute fiscalité sur la puissance ! La vignette était un moyen de la freiner, on l'a supprimée. L'encouragement à la motorisation mixte électrique/thermique est une piste à suivre. Je suis pour l'affichage obligatoire de la consommation instantanée. Je vous encourage à faire l'expérience, je l'ai fait faire par des dizaines de personnes ! Sur le même cycle de conduite, le même itinéraire, en partant à la même heure et en arrivant à la même heure, on fait 15 % d'économie de consommation, simplement parce que ça entraîne à ne pas pousser les rapports. Ça ne coûte pas un centime, simplement un équipement, et ça garantit une économie de carburant. Peut-être que certains ne l'ont pas souhaité, pour des raisons que nous pouvons apercevoir ! La question de la limitation de la vitesse sur les routes : 10 km/h de moins, ce serait un facteur de sécurité et d'économie très important, de l'ordre de 12 %. Cette question a été abordée par deux gouvernements successifs, mais dans des circonstances qui n'étaient pas justes démocratiquement, car elles étaient seulement liées à l'augmentation du prix de l'énergie : dans le cadre de la sauvegarde de la planète, et de notre responsabilité de citoyens, je crois que les gens pourraient l'accepter. La limitation de la consommation des véhicules, selon la nouvelle norme européenne : 120 g de CO2/km (actuellement 180g).
3 - Un plan "vie de tous les jours éco" : ça veut dire des seuils de consommations pour l'éclairage, etc., et des normes énergétiques pour tous les appareils ménagers, comme il y a des normes de sécurité. C'est une décision européenne qui ne coûterait pas, et serait une aide puissante. Ça existe déjà pour les appareils dédiés au froid, il faut que ça existe pour les appareils électroménagers, de même que pour les emballages.
4 - Un effort pour un plan agriculture éco. Par exemple en programmant une diminution de 500 000 tonnes des engrais azotés de notre agriculture. Ça veut dire la définition d'un bilan azoté à l'échelle de l'exploitation, et soit un "permis de consommation" de l'azote, soit un système de bonus-malus, à discuter avec la profession. Il y a dans ce sujet un enjeu formidable de réconciliation entre les paysans et la société. Au lieu de vivre le drame que le monde agricole a vécu - eux qui étaient à la fois des indépendants, libres de leur sort, et des amis et défenseurs de la nature, ils ont été en 20 ans perçus comme dépendants et comme des pollueurs - ils seront les producteurs d'énergie renouvelable (je suis un défenseur des biocarburants et de la biomasse), et leurs cultures piégeront le carbone de l'atmosphère. La production végétale est la meilleure machine pour y parvenir. Cet enjeu est psychologique, moral et économique. Nous sommes le pays d'Europe occidentale qui a les surfaces disponibles les plus grandes : ce territoire qui était en train de tomber devient une chance.
5 - Réfléchir à la taxation sur les carburants : Jean-Marc Jancovici et Alain Grandjean viennent de publier un livre sur le sujet. Je présente le problème de façon un peu différente, comme je l'ai fait à l'Université d'été : il y a là une des bases pour l'allègement des charges sociales ; on peut alléger le coût du travail en programmant l'augmentation des charges sur les carburants fossiles. Jean-Marc Jancovici propose 5 % d'augmentation programmée tous les ans, ce peut être moins, 3 % par exemple, de manière à ce que chaque foyer et chaque entreprise programme pour l'avenir son changement de comportement.
6 - Un plan nécessaire pour les énergies renouvelables en France, sur lequel je ne m'étendrai pas ; la partie solaire devrait faire l'objet d'un traitement plus poussé que nous ne l'avons fait jusqu'ici. Les technologies solaires sont banales, à la disposition technique de la plupart des Français.
Je veux finir en abordant deux sujets brûlants.
Le nucléaire
Je vais le dire clairement : je ne crois pas que l'on puisse, en France, remplir nos engagements en matière de gaz à effets de serre sans le nucléaire. Nous avons fait de lourds investissements, nous avons maîtrisé, nous qui n'avons pas de réserves fossiles, une filière de production énergétique de haute qualité. La Russie a son gaz, nous avons la maîtrise d'une filière qui est l'électricité nucléaire. Cela ne veut pas dire que le gaz résolve tous les problèmes de la Russie en matière énergétique, pas plus que le nucléaire ne résoudra tous nos problèmes énergétiques de la France. Mais en tout cas c'est la seule filière disponible de production énergétique sans émission de gaz à effet de serre.
Et il y a, à propos du nucléaire, une zone de consensus possible entre les pro et les anti, alors même que c'est un sujet passionnel. Cette zone de consensus, c'est l'obligation de transparence. Je ne vois pas ce que les pro nucléaires auraient à craindre de l'établissement de la transparence en matière d'information. Sur ces 4g1/2 de déchets nucléaires par an et par Français, qui sont déjà là à La Hague, les pro nucléaires, affirmant que les problèmes sont maîtrisés, n'ont rien à craindre de la transparence.
La transparence, avec la publication des rapports, la possibilité de saisine directe de l'instance de sécurité nucléaire par les associations, avec obligation de réponse, est un devoir pour ceux qui considèrent que le nucléaire est une arme dans la bataille économique.
J'ai été extrêmement réservé sur la privatisation partielle d'EDF, qui dans la bataille de l'énergie, va devoir prendre ses décisions selon les priorités de l'actionnaire et non plus selon des priorités d'intérêt général. On verra ce que signifie la décision de privatisation, par rapport au prix du courant.
Deuxième sujet, qui pour moi est central : celui des indices avec lesquels nous mesurons notre développement.
Le PIB donne la même valeur à une activité humaine qui détruit l'environnement et à une activité humaine qui le sauvegarde. Le travail de dépollution sur l'Erika est compté dans le PIB ! Cela ressemble à une entreprise qui ne proposerait pas de bilan, qui ne différencierait pas l'investissement et les frais généraux. Il faut que nous mesurions non pas l'activité, mais le développement humain . Il me semble nécessaire de définir internationalement un indice du développement humain.
Voilà les idées que je voulais aborder.

L'écologie devient la condition nécessaire de toute action politique. Le climat, est la grande menace du siècle. Partis comme nous sommes, si nous laissons faire le marché, la consommation, nous allons connaître la pire catastrophe humanitaire. Notre objectif, c'est de diviser par quatre notre consommation d'énergie fossile d'ici 2050. Et donc de la diminuer d'un quart d'ici 2020. Et nous n'y arriverons qu'en changeant, dans le bâtiment, dans les transports, dans les voitures, notre mode de vie. Et ce qui paraît une contrainte, est en fait la chance d'une vie différente.
Cette crise est une chance ! Elle est, bien sûr, pleine de risques et de difficultés. Mais elle est aussi pleine d'occasions nouvelles. En matière d'emplois non délocalisables. En matière de genre de vie, de social. Si nous dépensons moins, pour chaque foyer, c'est du niveau de vie disponible. Un modèle plus sobre, c'est aussi un modèle du vivre mieux.
Je vous remercie.



source http://www.udf.org, le 24 avril 2006