Texte intégral
Florence Duprat : Retour sur la journée de mobilisation de demain avec notre invité Bernard van Craeynest. Vous êtes président de la CFE CGC. Alors les syndicats veulent mobiliser en masse demain, est-ce que vous avez déjà un petit peu une idée bien sûr des perturbations mais aussi du monde qu'il y aura dans les rues ?
Bernard van Craeynest : Je pense qu'il y aura beaucoup de monde et en tous les cas plus qu'il n'y en avait les 7 février, 7 mars et 18 mars. Visiblement tous les éléments que nous avons en notre possession à cette heure vont dans le sens d'une mobilisation croissante.
FD : Alors une mobilisation croissante pour quoi faire ? Pour faire plier Dominique de Villepin ?
BVC : Je pense que beaucoup de nos concitoyens ont compris qu'il y avait un véritable problème dans ce pays de dialogue, de concertation, de méthode et l'obstination du Premier ministre a incontestablement entraîné un phénomène de rejet vis à vis de ce CPE et un agacement et donc une mobilisation croissante vis à vis de l'entêtement du Premier ministre.
FD : Alors vous l'avez rencontré vendredi dernier. Dominique de Villepin se dit ouvert au dialogue.
BVC : Il était temps.
FD : Est-ce que vous avez eu d'autres contacts avec lui depuis ?
BVC : Non pas d'éléments nouveaux durant ce week end si ce n'est qu'en venant vous voir j'ai appris que nous devrions recevoir probablement demain matin une lettre d'invitation du Premier ministre pour une réunion qu'il nous propose mercredi après midi. Mais à mon avis, ça a peu de chances d'être suivi d'effets tout au moins pour ce mercredi. Car en effet, nous avons prévu ce jour là de nous retrouver en intersyndicale pour tirer les enseignements de la journée de mobilisation de demain.
FD : Alors l'idée si Dominique de Villepin vous propose de venir vous voir mais si il refuse, enfin que vous alliez le voir, mais si il refuse toujours de retirer le CPE, la suspension du CPE ? Le fait qu'il le retire c'est toujours le préalable à toute négociation ou vous retournerez quand même le rencontrer ?
BVC : Ecoutez là on a vraiment un problème de clarification qui devient urgent compte tenu de la situation de notre pays. Il fait un, il ne veut absolument pas retirer ce CPE. Il considère que la période entre aujourd'hui et la promulgation de la loi doit être propice pour dialoguer, négocier sur les éventuels aménagements de ce CPE. Nous, nous disons retirez votre CPE et nous allons effectivement négocier sur la manière de se préoccuper de l'insertion durable dans l'emploi des jeunes. Je crois qu'à un moment, il faudra quand même qu'on trouve l'articulation pour faire en sorte que nous commencions par exemple par débattre du fait de si nous apportons des modifications au CPE, comme en l'état actuel c'est une loi il va bien falloir la modifier cette loi. Il serait bien que le Premier ministre nous dise clairement comment il compte la modifier de manière à ce que nous voyons dans quel sens nous pourrions éventuellement travailler dans les jours qui viennent.
FD : Oui donc ça veut dire que le retrait du CPE, ce n'est peut-être plus le préalable.
BVC : En l'état actuel des choses quand on a affaire à quelqu'un d'aussi obstiné qui a mis le pays dans l'état que l'on connaît aujourd'hui, qui durant deux mois alors que nous, CFE-CGC, où le 16 janvier nous lui avions fait des propositions pour justement aménager ce CPE qui nous semblait dès le départ un peu excessif, surtout venant après le CNE.
FD : Mais vous n'étiez pas complètement hostile quand même vous, la CFE-CGC, au contrat première embauche ?
BVC : Nous sommes conscients qu'il y a un réel problème d'insertion durable d'emploi des jeunes. Nous avons travaillé sur ce sujet depuis des années et pas plus tard que l'an dernier au conseil économique et social sur l'insertion des jeunes issus de l'enseignement supérieur puisque vous savez que malheureusement, il y a un taux d'échec notamment au niveau du Deug extrêmement important. Mais même pour des diplômés bac plus 5 qui se sont engagés dans des filières qui n'ont pas de débouchés professionnels, nous avons une réelle difficulté d'insertion dans l'emploi. Donc nous sommes conscients du problème. Nous voulions y travailler mais voilà un Premier ministre qui croit qu'il va régler les problèmes de ce pays qui n'ont pas pu l'être depuis 20 ans en un coup de baguette magique. En l'occurrence avec un nouveau texte.
FD : C'est peut-être pas un coup de baguette magique, c'est tout simplement faire sauter les verrous à l'embauche. Est-ce qu'on n'a pas besoin de ça dans ce pays parce que finalement, on est en train de la payer justement au niveau du taux d'inactivité des jeunes et puis de la croissance.
BVC : Et puis également des seniors.
FD : Alors voilà et les seniors, vous avez raison. Donc qu'est-ce qu'on fait aujourd'hui pour inciter les patrons à embaucher ?
BVC : Je crois que ça passe par un dialogue déjà pour rétablir la confiance car il y a un vrai problème de confiance dans notre pays. Et en particulier vis à vis des chefs d'entreprise, les plus petites, les moyennes entreprises qui considèrent qu'à la limite ils n'ont pas besoin de développer leur activité parce que ce serait prendre trop de risque, ce serait effectivement embaucher du personnel dont on est pas sûr qu'il donne satisfaction et qui éventuellement peut poser des problèmes en cours d'activité. Donc il faut que nous débattions de cela et il faut également que nous travaillions sur la croissance. Moi ce qui m'avait surpris dans le discours de politique générale du Premier ministre le 8 juin dernier, c'est qu'il a érigé en totem la bataille pour l'emploi mais à aucun moment, il n'avait à ce moment là parlé de relance de la croissance. C'est quand même l'amélioration de notre niveau de croissance et le développement de notre économie qui crée l'emploi.
FD : Oui mais pour le moment, ce n'est pas trop vrai donc on a l'impression quand même qu'on peut pas faire de réforme dans ce pays.
BVC : Si bien sûr que si mais encore une fois, il faut que ce soit partagé, il faut que ce soit compris. Et donc ça passe par une phase pédagogique.
FD : Là on voit les syndicats qui refont l'unité. On n'avait pas vu ça même lors de la réforme des retraites très contestée. Qu'est-ce qui fait qu'aujourd'hui les syndicats sont vent debout contre le CPE et qu'ils n'ont pas bougé au moment du CNE ? C'est la même chose.
BVC : Nous avons bougé au moment du CNE de deux manières. D'une part nous avons déposé un recours devant le conseil d'Etat qui n'a pas porté ses fruits et d'autre part, nous étions dans la rue le 4 octobre dernier. Et c'est précisément parce que nous avons constaté nous, à la CFE CGC, que ces recours n'avaient pas porté leurs fruits que nous voulions dialoguer avec le Premier ministre dès le 16 janvier pour voir comment aménager tout cela. Alors vous me posiez la question, comment se fait t-il que nous parvenions à une telle unité syndicale, ben je crois que c'est le plus bel exploit du Premier ministre. C'est d'avoir fait de par son attitude la parfaite unité syndicale parce que véritablement, on ne peut pas comprendre qu'on soit à ce point obstiné sans tenir compte d'un certain nombre de réalités de notre pays.
FD : Mais derrière cette obstination, est-ce qu'il y a pas la volonté justement de faire voler en éclat cette unité syndicale ? Par exemple Force ouvrière appelle à continuer donc la grève après la journée de demain, vous y êtes prêts vous à la CFE-CGC ?
BVC : Certainement pas. Vous savez qu'à la CFE-CGC, nous sommes plutôt une organisation qui aimons dialoguer et nous concerter pour faire évoluer les dossiers, faire progresser notre pays. Simplement ce que j'observe, c'est qu'encore aujourd'hui j'ai eu une bonne partie de mes homologues syndicaux au téléphone et en tout état de cause, précisément nous avions prévu de nous retrouver en intersyndicale mercredi pour tirer les enseignements de la journée de demain et pour voir quelle suite nous allons donner et je crois que nous sommes tout à fait en capacité de nous entendre sur l'essentiel et rester unis.
FD : Merci beaucoup Bernard van Craeynest, donc président de la CFE CGC. Source http://www.cfecgc.org, le 31 mars 2006
Bernard van Craeynest : Je pense qu'il y aura beaucoup de monde et en tous les cas plus qu'il n'y en avait les 7 février, 7 mars et 18 mars. Visiblement tous les éléments que nous avons en notre possession à cette heure vont dans le sens d'une mobilisation croissante.
FD : Alors une mobilisation croissante pour quoi faire ? Pour faire plier Dominique de Villepin ?
BVC : Je pense que beaucoup de nos concitoyens ont compris qu'il y avait un véritable problème dans ce pays de dialogue, de concertation, de méthode et l'obstination du Premier ministre a incontestablement entraîné un phénomène de rejet vis à vis de ce CPE et un agacement et donc une mobilisation croissante vis à vis de l'entêtement du Premier ministre.
FD : Alors vous l'avez rencontré vendredi dernier. Dominique de Villepin se dit ouvert au dialogue.
BVC : Il était temps.
FD : Est-ce que vous avez eu d'autres contacts avec lui depuis ?
BVC : Non pas d'éléments nouveaux durant ce week end si ce n'est qu'en venant vous voir j'ai appris que nous devrions recevoir probablement demain matin une lettre d'invitation du Premier ministre pour une réunion qu'il nous propose mercredi après midi. Mais à mon avis, ça a peu de chances d'être suivi d'effets tout au moins pour ce mercredi. Car en effet, nous avons prévu ce jour là de nous retrouver en intersyndicale pour tirer les enseignements de la journée de mobilisation de demain.
FD : Alors l'idée si Dominique de Villepin vous propose de venir vous voir mais si il refuse, enfin que vous alliez le voir, mais si il refuse toujours de retirer le CPE, la suspension du CPE ? Le fait qu'il le retire c'est toujours le préalable à toute négociation ou vous retournerez quand même le rencontrer ?
BVC : Ecoutez là on a vraiment un problème de clarification qui devient urgent compte tenu de la situation de notre pays. Il fait un, il ne veut absolument pas retirer ce CPE. Il considère que la période entre aujourd'hui et la promulgation de la loi doit être propice pour dialoguer, négocier sur les éventuels aménagements de ce CPE. Nous, nous disons retirez votre CPE et nous allons effectivement négocier sur la manière de se préoccuper de l'insertion durable dans l'emploi des jeunes. Je crois qu'à un moment, il faudra quand même qu'on trouve l'articulation pour faire en sorte que nous commencions par exemple par débattre du fait de si nous apportons des modifications au CPE, comme en l'état actuel c'est une loi il va bien falloir la modifier cette loi. Il serait bien que le Premier ministre nous dise clairement comment il compte la modifier de manière à ce que nous voyons dans quel sens nous pourrions éventuellement travailler dans les jours qui viennent.
FD : Oui donc ça veut dire que le retrait du CPE, ce n'est peut-être plus le préalable.
BVC : En l'état actuel des choses quand on a affaire à quelqu'un d'aussi obstiné qui a mis le pays dans l'état que l'on connaît aujourd'hui, qui durant deux mois alors que nous, CFE-CGC, où le 16 janvier nous lui avions fait des propositions pour justement aménager ce CPE qui nous semblait dès le départ un peu excessif, surtout venant après le CNE.
FD : Mais vous n'étiez pas complètement hostile quand même vous, la CFE-CGC, au contrat première embauche ?
BVC : Nous sommes conscients qu'il y a un réel problème d'insertion durable d'emploi des jeunes. Nous avons travaillé sur ce sujet depuis des années et pas plus tard que l'an dernier au conseil économique et social sur l'insertion des jeunes issus de l'enseignement supérieur puisque vous savez que malheureusement, il y a un taux d'échec notamment au niveau du Deug extrêmement important. Mais même pour des diplômés bac plus 5 qui se sont engagés dans des filières qui n'ont pas de débouchés professionnels, nous avons une réelle difficulté d'insertion dans l'emploi. Donc nous sommes conscients du problème. Nous voulions y travailler mais voilà un Premier ministre qui croit qu'il va régler les problèmes de ce pays qui n'ont pas pu l'être depuis 20 ans en un coup de baguette magique. En l'occurrence avec un nouveau texte.
FD : C'est peut-être pas un coup de baguette magique, c'est tout simplement faire sauter les verrous à l'embauche. Est-ce qu'on n'a pas besoin de ça dans ce pays parce que finalement, on est en train de la payer justement au niveau du taux d'inactivité des jeunes et puis de la croissance.
BVC : Et puis également des seniors.
FD : Alors voilà et les seniors, vous avez raison. Donc qu'est-ce qu'on fait aujourd'hui pour inciter les patrons à embaucher ?
BVC : Je crois que ça passe par un dialogue déjà pour rétablir la confiance car il y a un vrai problème de confiance dans notre pays. Et en particulier vis à vis des chefs d'entreprise, les plus petites, les moyennes entreprises qui considèrent qu'à la limite ils n'ont pas besoin de développer leur activité parce que ce serait prendre trop de risque, ce serait effectivement embaucher du personnel dont on est pas sûr qu'il donne satisfaction et qui éventuellement peut poser des problèmes en cours d'activité. Donc il faut que nous débattions de cela et il faut également que nous travaillions sur la croissance. Moi ce qui m'avait surpris dans le discours de politique générale du Premier ministre le 8 juin dernier, c'est qu'il a érigé en totem la bataille pour l'emploi mais à aucun moment, il n'avait à ce moment là parlé de relance de la croissance. C'est quand même l'amélioration de notre niveau de croissance et le développement de notre économie qui crée l'emploi.
FD : Oui mais pour le moment, ce n'est pas trop vrai donc on a l'impression quand même qu'on peut pas faire de réforme dans ce pays.
BVC : Si bien sûr que si mais encore une fois, il faut que ce soit partagé, il faut que ce soit compris. Et donc ça passe par une phase pédagogique.
FD : Là on voit les syndicats qui refont l'unité. On n'avait pas vu ça même lors de la réforme des retraites très contestée. Qu'est-ce qui fait qu'aujourd'hui les syndicats sont vent debout contre le CPE et qu'ils n'ont pas bougé au moment du CNE ? C'est la même chose.
BVC : Nous avons bougé au moment du CNE de deux manières. D'une part nous avons déposé un recours devant le conseil d'Etat qui n'a pas porté ses fruits et d'autre part, nous étions dans la rue le 4 octobre dernier. Et c'est précisément parce que nous avons constaté nous, à la CFE CGC, que ces recours n'avaient pas porté leurs fruits que nous voulions dialoguer avec le Premier ministre dès le 16 janvier pour voir comment aménager tout cela. Alors vous me posiez la question, comment se fait t-il que nous parvenions à une telle unité syndicale, ben je crois que c'est le plus bel exploit du Premier ministre. C'est d'avoir fait de par son attitude la parfaite unité syndicale parce que véritablement, on ne peut pas comprendre qu'on soit à ce point obstiné sans tenir compte d'un certain nombre de réalités de notre pays.
FD : Mais derrière cette obstination, est-ce qu'il y a pas la volonté justement de faire voler en éclat cette unité syndicale ? Par exemple Force ouvrière appelle à continuer donc la grève après la journée de demain, vous y êtes prêts vous à la CFE-CGC ?
BVC : Certainement pas. Vous savez qu'à la CFE-CGC, nous sommes plutôt une organisation qui aimons dialoguer et nous concerter pour faire évoluer les dossiers, faire progresser notre pays. Simplement ce que j'observe, c'est qu'encore aujourd'hui j'ai eu une bonne partie de mes homologues syndicaux au téléphone et en tout état de cause, précisément nous avions prévu de nous retrouver en intersyndicale mercredi pour tirer les enseignements de la journée de demain et pour voir quelle suite nous allons donner et je crois que nous sommes tout à fait en capacité de nous entendre sur l'essentiel et rester unis.
FD : Merci beaucoup Bernard van Craeynest, donc président de la CFE CGC. Source http://www.cfecgc.org, le 31 mars 2006