Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Je suis très heureuse de vous accueillir aujourd'hui pour le désormais traditionnel rendez-vous annuel entre mon ministère et les professionnels de la publicité.
Je vous remercie de l'honorer. Votre présence est le signe de votre engagement continu et de la responsabilité dont vous faites preuve dans l'utilisation des espaces publicitaires.
Depuis ma nomination comme Ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité, j'ai fait de la lutte contre les violences et les discriminations à raison du sexe une priorité.
Ces violences revêtent des formes multiples.
Il y a, bien sûr, la violence concrète, de personne à personne, qu'elle soit physique ou morale, contre laquelle le Parlement vient d'adopter une loi qui en renforce la répression.
Mais il y a aussi la violence représentée, véhiculée par les images et les discours, dont relève la publicité sexiste.
Vous vous êtes engagés fortement à lutter contre ce type de violences.
Mon ministère a signé le 27 novembre 2003 avec le Bureau de Vérification de la Publicité une déclaration commune pour renforcer la vigilance à l'encontre de toute annonce qui donnerait une image dégradante des femmes.
Cette déclaration a placé l'autodiscipline de la profession au coeur du dispositif.
Cette autodiscipline est une tradition déjà ancienne en France en matière de publicité, puisque la création de l'office de contrôle des annonces, qui allait devenir en 1953 le BVP, remonte à 1935.
Cette vigilance propre à vos professions s'inscrit dans le cadre général de notre politique de lutte contre les discriminations liées au sexe.
Comme vous le savez, le Gouvernement a engagé une action forte de lutte contre le sexisme en adoptant la loi du 30 décembre 2004 qui réprime les propos sexistes, homophobes et handiphobes.
Cette loi contribue à lutter contre l'instrumentalisation du corps de femmes.
Cependant, la répression ne suffit pas pour lutter contre les stéréotypes. Il faut aussi agir en amont, sur les mentalités.
C'est pourquoi j'ai demandé au Conseil supérieur de l'information sexuelle, de la régulation des naissances et de l'éducation familiale (CSIS) de me remettre prochainement un rapport sur les relations entre les filles et les garçons comme enjeu d'éducation à la sexualité.
Le Conseil est chargé, notamment, de repérer et d'analyser les causes des comportements sexistes puis de s'interroger sur les moyens de les prévenir dans le cadre d'une éducation à la mixité et à l'égalité entre les femmes et les hommes.
Nous allons aussi renouveler en juin prochain la Convention du 25 février 2000 pour la promotion de l'égalité des chances entre les filles et les garçons dans le système éducatif.
Une sensibilisation des jeunes aux stéréotypes sexistes véhiculées dans les médias y sera explicitement prévue.
L'enquête sur le respect de l'image de la personne humaine dans la publicité, que le BVP effectue depuis 2004, montre que des progrès indéniables ont été faits et que la proportion des manquements avérés aux règles déontologiques de la profession en matière d'image de la personne humaine est extrêmement faible.
L'enquête sur l'année 2005 semble confirmer cette tendance favorable, comme devrait nous l'annoncer Jean-Pierre TEYSSIER.
Je tiens à vous en féliciter.
Néanmoins, l'exploitation de l'image des femmes et de leur corps à des fins marchandes demeure encore fréquente aujourd'hui, tout comme la présence persistante dans les messages publicitaires de stéréotypes discriminants pour les femmes.
En outre, certaines publicités continuent de présenter des images incitant à la violence envers les femmes.
Ces images et les jeux de mots qui les accompagnent contribuent à banaliser la violence et entretiennent le sexisme ordinaire.
Comment ne pas penser, par exemple, à cette publicité pour un voyagiste européen faisant référence au quartier rouge d'Amsterdam ?
Sous-couvert de l'humour, les créatifs ont incité au tourisme prostitutionnel et à l'exploitation de jeunes femmes réduites à l'état de valeur marchande.
Cette publicité est d'autant plus choquante à l'heure où la communauté sportive, aux côtés des autorités et des associations de lutte contre les violences, s'engage pour prévenir l'essor de la prostitution lors de la Coupe du Monde de football en Allemagne.
Au-delà de cet exemple, qui n'est heureusement pas représentatif, je tiens à attirer votre attention sur la nécessité de mieux lutter contre les stéréotypes négatifs à l'égard des femmes dont sont encore porteurs un certain nombre de messages publicitaires.
La publicité, à la différence des livres ou des spectacles, tend à s'imposer à chacun d'entre nous sans que nous l'ayons choisie.
Par l'ampleur de sa diffusion, elle exerce une influence très forte sur les mentalités, au point de fixer des normes de comportement.
Vous êtes très conscients de cet impact social majeur, comme le montre l'avis récent du Conseil de l'éthique publicitaire qui affirme que « la publicité a une responsabilité sociale dans le processus d'évolution des mentalités ».
Même s'ils sont parfois tentés d'adopter des stratégies offensives, afin de se distinguer de leurs concurrents, les publicitaires doivent toujours veiller à ce que leurs messages ne remettent pas en cause la dignité des personnes, à quelque degré que ce soit.
Je vous remercie d'y veiller scrupuleusement.
Source http://www.femmes-egalite.gouv.fr, le 1 juin 2006