Texte intégral
P. Lapousterle
Je voulais vous parler du nouveau signal d'alerte lancé par l'Agence française de sécurité sanitaire sur le mouton, qui pourrait lui aussi....
- "Cela fait longtemps qu'on sait que le mouton a la tremblante ! Mais est-ce nocif pour l'alimentation, on ne le sait pas ."
Mais qu'en pensent les Verts ?
- "Ce que l'on en pense, c'est ce qu'on en disait depuis 20 à 30 ans : la façon agricole de produire des aliments, tant au niveau des semences que de la production de animale n'est pas la bonne. L'agriculture industrielle a donné cela. Nos paysans sont en capacité de produire des produits de qualité."
Mais le mouton a la tremblante depuis des siècles !
- "Exactement. Mais là on est vraiment sur un principe de précaution réelle, où l'ensemble des politiques n'ont pas envie d'avoir affaire dans 10 ou 15 ans, si jamais il y avait des risques, à des choses dont on dirait qu'ils en sont responsables."
Pensez-vous que le Gouvernement a raison, sur un avis de ce genre, de prendre la décision éventuelle d'interdire les parties...
- "Oui, si on va bien vers une autre sorte d'agriculture. C'est ce que défend la Confédération paysanne, c'est ce que défend J. Bové. Si on produit une agriculture différente, de qualité, avec des produits sains. Si on va vers cela, on va changer les modes de production et après, on retrouvera confiance dans les produits."
Donc, il faut faire de la "surprécaution" en ce moment ?
- "On est obligé, vu les circuits alimentaires, vu ce qui se passe sur l'ESB et la vache folle, de prendre des principes de précaution."
Alors qu'il n'y a aucun cas qui a été découvert ... ?
- "On est obligé de le faire, sinon il pourrait y avoir le reproche dans 10 ou 15 ans - si jamais on découvrait quelque chose - disant : "vous avez rendu malades plusieurs centaines de personnes et pris des risques inutiles.""
Vous avez prononcé le nom de J. Bové. Le procureur de la République a requis hier deux mois de prison ferme contre lui pour avoir détruit, vous vous en souvenez, un champ de maïs transgénique destiné à la recherche. On se souvient que vous avez vous-même été soutenir monsieur Bové à Millau...
- "Je suis allé à Millau, je suis allé à Foix, j'ai moi-même participé à la destruction d'un champ prêt de Foix en Ariège...
Ne le dites pas trop fort, s'il y a un procureur qui vous écoute !
- "Oui, je le dis, il le sait très bien de toute façon ; j'étais avec plusieurs centaines de personnes, mais j'y allais résolument, en tant que secrétaire national des Verts. Je crois qu'à un moment donné, à ce niveau-là, le principe de précaution par rapport aux OGM n'a jamais été mis en demeure. A ce titre, ce que font J. Bové, la Confédération paysanne et d'autres citoyens aujourd'hui, est vraiment ce que l'on peut appeler une lutte non violente de précaution, au service des gens."
Deux mois fermes...
- "Si J. Bové était condamné à deux mois fermes, plus l'ensemble des sursis qui pèsent sur sa tête, cela serait un véritable scandale ! Je sais que J. Bové lui-même dit "tant pis, si je dois faire de la prison, j'en ferai." Ce sera absolument incroyable que des leaders syndicalistes, comme J. Bové et l'action qu'il porte, totalement non violente - il peut y avoir démontage, mais c'est non violent..."
Un démontage "musclé", on va dire ! Peut-être pas violent, mais musclé quand même...
- "Démontage réel, "musclé" le terme n'est pas le bon, un carreau a été cassé... Lors du procès d'hier, en audience, l'ensemble des dégâts a été à peu près calculé par les avocats et jamais le chiffre donné par les plaignants de Mac Donald's n'a été vérifié. C'est un simple devis."
Donc, on prend un champ pour la recherche, on le détruit et cela vous paraît anormal qu'on soit condamné ?
- "Que l'acte en lui-même soit condamnable, que la justice juge en disant qu'il y a condamnation au sens pénal, mais qu'il y ait après un jugement qui serait : d'accord, vous êtes coupable mais vous n'êtes condamné à rien" ; ce serait un bon jugement."
Vous êtes secrétaire national des Verts et vous avez annoncé votre démission, il y a plusieurs semaines, pour le mois de juin prochain. Vous connaissez la candidate à votre succession : il s'agit tout simplement de D. Voynet elle-même. Cela veut dire qu'il y a le feu à la maison ?
- "Je ne crois pas, pas exactement ! Je trouve cela extrêmement valorisant que pour me remplacer, il faille D. Voynet ! Mais il n'y a pas "le feu à la maison.""
C'est comme si L. Jospin était candidat au premier secrétariat du PS...
- "Cela ne serait pas complètement impossible, en politique, que L. Jospin, qui a déjà été secrétaire national du PS, se dise tout à coup que la place qu'il pourrait prendre s'il n'était plus Premier ministre et s'il ne réussissait pas à être Président de la République - car c'est bien vers cela qu'il va concourir - que la place qu'il doit prendre est celle de secrétaire national du PS. Cela ne me paraîtrait pas spécialement ahurissant. D. Voynet a fait un choix. On pouvait l'entendre - dans ses pensées, en tous les cas - dire qu'elle ne voulait pas réellement partir en primaires internes pour les présidentielles. Elle fait un choix logique de partir maintenant et de se dire que dans l'année 2002, il y a trois échéances : une échéance présidentielle - des candidats sont en présence, dont N. Mamère qui est un bon candidat, et quelques autres dont A. Lipietz. Après, il y a les échéances législatives et la remise à plat de l'accord Verts-PS par rapport à la participation gouvernementale."
Avec des négociations difficiles... Vous dites que c'est un choix de D. Voynet mais n'est-ce pas une fuite par hasard ?
- "Je ne crois pas que D. Voynet soit en train de fuir. Si elle l'a fait là, c'est aussi pour déconnecter réellement cette non-candidature..."
Ce n'est pas parce qu'elle a peur de perdre à Dole et de perdre contre Mamère en primaires ?
- "Non, justement. Le pire aurait été qu'elle l'annonce après Dole. Elle aurait gagné à Dole, on aurait dit qu'elle se présente parce qu'elle a gagné. Elle aurait perdu, on aurait dit que si elle ne se présente pas, c'est parce qu'elle a perdu à Dole. Donc c'est vraiment déconnecté. L'élection de Dole est difficile, elle le sait. Mais elle est aussi difficile pour E. Guigou en Avignon et pour monsieur Gayssot à Béziers. Donc, on verra. Elle a déconnecté - ce que je trouve très bien au niveau du tempo - de ces élections municipales, où les Verts sont présents dans 150 villes - Grenoble, Tours, Lille et autres - en listes autonomes. On verra les scores par rapport à cela. Elle a déconnecté ces élections-là de la présidentielle et je trouve cela très bien."
Quand on parle des Verts, vos amis socialistes disent qu' "ils sont désorganisés, inconstants, divisés, indécis..." Ils n'ont pas de mot assez dur pour vous.
- "Il faut que chacun balaie devant la porte de son parti politique. Les partis politiques ne sont pas en énorme forme aujourd'hui, sans être totalement discrédités. Les partis de gauche ou les Verts vont assez bien. On montre justement, par rapport à ces élections municipales, où nous serons présents dans plus de 500 villes..."
A ce propos, dans toutes ces villes, vous irez au deuxième tour avec les socialistes à chaque fois ?
- "Socialistes ou la majorité plurielle. C'est bien évidemment le but affirmé si nous sommes pris à notre juste poids politique, aussi bien au niveau du qualitatif - programmes et réalisations - que du quantitatif."
C'est une menace ?
- "Non il n'y a pas de menace, simplement être pris à son juste poids politique."
Le juste prix ?!
- "Oui, le juste prix", si vous voulez. Nous ne sommes pas le petit plus de la majorité plurielle. On est un gros plus."
Il peut y avoir des accidents ?
- "On est avant le 11 et le 18 mars, pour l'instant je ne parle pas d'accident. Tout le monde a entendu les propositions que faisaient les Verts, maintenant, il faudra que cela aboutisse."
B. Chirac en campagne, c'est le pompier de l'opposition ? Cela vous paraît-il sympathique ou complètement anormal ?
- "Cela me paraît sympathique mais complètement déconnecté. Je crois réellement que tout le monde s'en fout !"
(Source http://sig.premier-ministre.gouv.fr, le 16 février 2001)