Interview de M. Christian Poncelet, président du Sénat, dans "La Montagne" du 6 février 2001, sur l'union de la droite, la situation de la droite parisienne, la candidature de J. Chirac pour l'élection présidentielle et le rôle des conseils généraux dans le cadre de la décentralisation.

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Média : La Montagne

Texte intégral

1°) Monsieur le Président, l'union de la droite est-elle réalisable, selon quel projet, comment et quand doit-elle intervenir ?
La pluralité des sensibilités et des approches devrait être un atout considérable pour la droite. Or, on a aujourd'hui le sentiment que c'est, au contraire, son talon d'Achille. Mais j'ai envie de dire, l'union de la droite, elle marche lorsque l'on y croit et que l'on s'en donne les moyens. Elle doit se réaliser, elle se réalisera.
Je donnerai deux exemples. Les présidents des groupes de l'opposition nationale au Parlement se rencontrent au Sénat et parviennent très souvent à arrêter une position commune. Par ailleurs, les Ateliers de l'Alternance, qui réunissent l'ensemble des sénateurs et des députés de droite ont permis de faire des propositions concrètes sur les sujets de préoccupation majeurs des Français : la justice, les retraites et la sécurité.
Dans un autre ordre d'idée, toutes les initiatives prises par Edouard Balladur, Alain Juppé ou Nicolas Sarkozy vont dans le bon sens : celui de l'union. Je dis bien l'union, car aujourd'hui la fusion des partis de la droite me paraît une hypothèse peu vraisemblable. En revanche, l'organisation d'une véritable confédération de toute la droite parlementaire, dans le respect de ses différences sans cesse plus ténues, est aujourd'hui tout à fait réaliste. On pourrait imaginer qu'une telle confédération soit présidée alternativement par un représentant de ses composantes. C'est ce qui existe au Sénat avec l'intergroupe de la droite. S'agissant du programme, les Ateliers de l'Alternance permettent de tracer concrètement les premières perspectives de celui-ci.
2°) Quelle chance voyez-vous encore pour que Paris conserve un maire de droite ?
Une élection n'est jamais ni gagnée, ni perdue, jusqu'au soir du second tour ... Cela dit, ce qui se passe aujourd'hui à Paris démontre que la droite doit donner un coup d'arrêt à ses divisions.
Je ne cède pas au pessimisme des derniers sondages. Ceux-ci traduisent davantage le désarroi des Parisiens face à la situation politique à droite, qu'ils comprennent mal, qu'une évidente volonté de confier la gestion de Paris aux socialistes. La droite parisienne doit réaliser "l'union sacrée", si ce n'est au premier tour, du moins dans la perspective du second, pour être victorieuse à Paris. C'est une condition nécessaire et suffisante.
3°) Pensez-vous que Jacques Chirac doit être le seul candidat de droite au premier tour des élections présidentielles ?
Jacques Chirac paraît, à l'évidence, être le meilleur candidat. Son expérience, sa légitimité, son charisme et sa personnalité en font le plus apte à rassembler les forces de progrès autour d'un programme moderne et généreux.
En ce qui concerne l'éventuelle pluralité des candidatures de droite au premier tour, celles-ci ne sont pas illégitimes pour autant qu'elles s'exercent dans un esprit de compétition loyale et avec la volonté de faire " gagner son camp " au second tour.
4°) Etes-vous partisan de la libération de Maurice Papon ?
Si des arguments humanitaires devaient justifier la libération de Maurice Papon, ces mêmes arguments devraient bénéficier à l'ensemble des condamnés âgés.
Si Maurice Papon retrouvait la liberté et exprimait un sentiment de repentir et une demande de pardon, sa libération me créerait un moindre malaise.
5°) Vous êtes aujourd'hui en visite officielle dans le Cantal : partagez-vous le point de vue de certains considérant que le Conseil général est devenu un échelon de trop entre les nouvelles communautés urbaines et les Conseils régionaux ?
Certains esprits chagrins aiment à entretenir une querelle stérile sur " le niveau de trop ". Cela les exonère d'engager une urgente et véritable réforme de l'Etat et de pousser les feux en faveur de la décentralisation.
En ce qui concerne les Conseils généraux, gestionnaires de proximité par excellence, aménageurs du territoire, et chefs d'orchestre du social, je me félicite de voir que la commission sur l'avenir de la décentralisation, présidée par Pierre Mauroy, a reconnu pleinement l'existence et le rôle du Conseil général dans notre édifice institutionnel.
Il faudra néanmoins clarifier le partage des responsabilités entre les différentes structures territoriales pour que nos concitoyens sachent clairement qui fait quoi et comment. Pour chacune des politiques, cela impliquera la désignation d'une collectivité "chef de file", c'est-à-dire principalement responsable du choix des moyens et de leur mise en oeuvre. C'est essentiel : n'oublions jamais que les collectivités locales assument les trois-quarts des investissements de la Maison France.
(source http://www.senat.fr, le 12 février 2001)