Texte intégral
Que faire des 908 immigrés kurdes débarqués sur la côte d'Azur?
Je crains que ce ne soit un précédent fâcheux et dangereux. On peut imaginer qu'il s'agisse d'un test de la part de certains "négriers" pour voir s'ils peuvent faire chez nous ce qu'ils ont déjà fait en Italie. Cette affaire pose tout d'abord un problème humanitaire. On est actuellement en train de s'en occuper en apportant les secours nécessaires à tous ces pauvres gens. Il faut cependant vérifier s'il s'agit de réfugiés économiques ou politiques, c'est-à-dire de personnes qui peuvent craindre pour leur vie dans leur pays. S'il s'agit de réfugiés économiques, il est évident que nous ne pouvons pas les garder. S'il s'agit de réfugiés politiques, il y a les dispositions prévues par la convention de Genève et, dans ce cas-là, c'est à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) de voir s'ils remplissent les conditions nécessaires à une demande d'asile politique.
Au-delà du problème humanitaire, quelle doit être l'attitude de la France?
Les pays industrialisés continuent à ne pas assumer leurs responsabilités vis-à-vis des personnes issues de pays en voie de développement qui fuient la misère. Je pense que, si toutes les nations ne consacrent pas 1 % de leur PIB à l'aide au développement, on ne s'en sortira pas. La France doit prendre la tête de cette croisade de la solidarité, ce serait conforme à ses traditions. Dans un même temps, il faut se montrer sévère vis-à-vis des organisateurs de ce trafic humain.
Les Kurdes posent-ils un problème spécifique?
Il s'agit là de 30 millions de personnes qui forment une nation, sans pour autant avoir de territoire et qui, en plus, sont persécutés là où ils sont. Nous avons entre les mains une véritable bombe dont il vaudrait mieux se saisir avant qu'elle n'explose. C'est une bombe d'autant plus dangereuse que les dirigeants de l'Union européenne prétendent accueillir la Turquie au sein de l'Europe. Là aussi, la démarche est complètement délirante.
Pensez-vous que l'Europe soit suffisamment armée contre l'immigration clandestine?
Je ne le crois pas. Et, surtout, je crois que nous manquons de cohérence. Il faut qu'il y ait une politique générale de l'Europe pour ce genre d'affaire. J'ajouterais aussi qu'il ne faut pas oublier que, lors du sommet de Nice, nous avons accepté de transférer tout ce qui concernait le contrôle des frontières et de la sécurité à l'Union européenne. Dorénavant, c'est à la Commission qu'incombe cette responsabilité. Et, naturellement, elle n'en a pas les moyens.
Ne regrettez-vous pas d'avoir signé les accords de Schengen?
Non, parce que Schengen est un plus. Encore faut-il que les accords soient appliqués. Schengen permet de repousser les frontières de l'Union et dispose que ce soit le premier pays dans lequel les clandestins ont mis le pied qui soit responsable. L'Europe est une vraie passoire avec ses milliers de kilomètres de côtes et l'absence de contrôle. A l'instar de l'Angleterre et de l'Italie, nous devons nous montrer plus durs. Tony Blair est logique, il a conservé la maîtrise de la gestion de l'immigration. Nous l'avons abandonnée à l'Union, cette démarche est abracadabrantesque.
Les réactions des politiques sont pour le moins inattendues: à gauche, Bertrand Delanoë et François Hollande préconisent le rapatriement des immigrés clandestins. A droite, Patrick Devedjian et Philippe Séguin demandent que nous les accueillions au mieux.
De toute façon, on ne peut pas les remettre dans leur bateau. Il a coulé. Il y a malheureusement, parmi les élus de la droite, la recherche permanente de la mode. Ils pensent que c'est bien de se montrer humanitaire, généreux, etc. Naturellement, c'est très beau, mais le problème n'est pas là. Il y a un problème de responsabilité et la responsabilité d'un Etat est de ne pas accueillir toute la misère du monde, comme disait Michel Rocard.
(source http://www.rpfie.org, le 1 mars 2001)
Je crains que ce ne soit un précédent fâcheux et dangereux. On peut imaginer qu'il s'agisse d'un test de la part de certains "négriers" pour voir s'ils peuvent faire chez nous ce qu'ils ont déjà fait en Italie. Cette affaire pose tout d'abord un problème humanitaire. On est actuellement en train de s'en occuper en apportant les secours nécessaires à tous ces pauvres gens. Il faut cependant vérifier s'il s'agit de réfugiés économiques ou politiques, c'est-à-dire de personnes qui peuvent craindre pour leur vie dans leur pays. S'il s'agit de réfugiés économiques, il est évident que nous ne pouvons pas les garder. S'il s'agit de réfugiés politiques, il y a les dispositions prévues par la convention de Genève et, dans ce cas-là, c'est à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) de voir s'ils remplissent les conditions nécessaires à une demande d'asile politique.
Au-delà du problème humanitaire, quelle doit être l'attitude de la France?
Les pays industrialisés continuent à ne pas assumer leurs responsabilités vis-à-vis des personnes issues de pays en voie de développement qui fuient la misère. Je pense que, si toutes les nations ne consacrent pas 1 % de leur PIB à l'aide au développement, on ne s'en sortira pas. La France doit prendre la tête de cette croisade de la solidarité, ce serait conforme à ses traditions. Dans un même temps, il faut se montrer sévère vis-à-vis des organisateurs de ce trafic humain.
Les Kurdes posent-ils un problème spécifique?
Il s'agit là de 30 millions de personnes qui forment une nation, sans pour autant avoir de territoire et qui, en plus, sont persécutés là où ils sont. Nous avons entre les mains une véritable bombe dont il vaudrait mieux se saisir avant qu'elle n'explose. C'est une bombe d'autant plus dangereuse que les dirigeants de l'Union européenne prétendent accueillir la Turquie au sein de l'Europe. Là aussi, la démarche est complètement délirante.
Pensez-vous que l'Europe soit suffisamment armée contre l'immigration clandestine?
Je ne le crois pas. Et, surtout, je crois que nous manquons de cohérence. Il faut qu'il y ait une politique générale de l'Europe pour ce genre d'affaire. J'ajouterais aussi qu'il ne faut pas oublier que, lors du sommet de Nice, nous avons accepté de transférer tout ce qui concernait le contrôle des frontières et de la sécurité à l'Union européenne. Dorénavant, c'est à la Commission qu'incombe cette responsabilité. Et, naturellement, elle n'en a pas les moyens.
Ne regrettez-vous pas d'avoir signé les accords de Schengen?
Non, parce que Schengen est un plus. Encore faut-il que les accords soient appliqués. Schengen permet de repousser les frontières de l'Union et dispose que ce soit le premier pays dans lequel les clandestins ont mis le pied qui soit responsable. L'Europe est une vraie passoire avec ses milliers de kilomètres de côtes et l'absence de contrôle. A l'instar de l'Angleterre et de l'Italie, nous devons nous montrer plus durs. Tony Blair est logique, il a conservé la maîtrise de la gestion de l'immigration. Nous l'avons abandonnée à l'Union, cette démarche est abracadabrantesque.
Les réactions des politiques sont pour le moins inattendues: à gauche, Bertrand Delanoë et François Hollande préconisent le rapatriement des immigrés clandestins. A droite, Patrick Devedjian et Philippe Séguin demandent que nous les accueillions au mieux.
De toute façon, on ne peut pas les remettre dans leur bateau. Il a coulé. Il y a malheureusement, parmi les élus de la droite, la recherche permanente de la mode. Ils pensent que c'est bien de se montrer humanitaire, généreux, etc. Naturellement, c'est très beau, mais le problème n'est pas là. Il y a un problème de responsabilité et la responsabilité d'un Etat est de ne pas accueillir toute la misère du monde, comme disait Michel Rocard.
(source http://www.rpfie.org, le 1 mars 2001)