Texte intégral
Travailleuses, travailleurs, camarades et amis,
Vous avez peut-être entendu à la télévision ou à la radio parler de ce licenciement qui vient d'avoir lieu à Orléans. Une caissière du supermarché Champion du quartier populaire de La Source, connue et appréciée de la population, vient d'être jetée à la porte sans préavis ni indemnité pour faute grave, prétend la direction : elle avait payé de sa poche des sandwichs que des gamins avaient pris sans avoir l'argent. Et la direction aurait découvert qu'il arrivait à cette caissière de consentir un petit crédit à ceux, RMIstes ou chômeurs, qui ne pouvaient payer avant qu'ils touchent leur RMI ou leur allocation de chômage. Crime insupportable pour le gérant du magasin, manifestement couvert par ses supérieurs de cette chaîne de distribution qui, outre Champion, possède Carrefour et bien d'autres supermarchés. La population du quartier s'est mobilisée en faveur de la caissière licenciée, et j'espère bien qu'elle parviendra à faire reculer les licencieurs dignes du patronat du XIXème siècle.
De tels licenciements, il y en a bien d'autres dans le pays chaque jour. Mais il est révélateur de la mentalité de tels patrons dépourvus d'humanité qui croient pouvoir tout se permettre.
Mais les travailleurs, la population, de votre région ont eu bien d'autres occasions et bien plus dramatiques de payer de leur santé et, pour beaucoup, de leur vie la rapacité du patronat. Combien d'hommes meurent année après année de l'amiante, que l'on a utilisé pendant des décennies alors que son caractère cancérigène était déjà connu ?
On nous fait des discours sur le principe de précaution, mais pour les exploités, ce principe n'existe pas ou, plutôt, il s'efface devant un autre : celui de la recherche du maximum de profit.
Notre société se prétend démocratique mais, dans le domaine de l'économie qui détermine les conditions d'existence de toute la population, ceux qui, au-dessus des politiques, décident vraiment ne sont ni contrôlés ni contrôlables. Et c'est vrai ici, dans la région, pour l'entreprise Stora-Enso à Corbehem, comme cela l'a été pour Métaleurop et aujourd'hui encore pour Delphy.
Les conseils d'administration de quelques centaines de grandes entreprises ont plus de poids sur la vie de la société que ceux qui sont élus, y compris le président de la République, et pour lesquels on ne vote qu'une fois tous les cinq ans.
C'est, en fait, une véritable dictature économique qui domine la politique et où une toute petite minorité de possesseurs de capitaux a le droit de tout faire : fermer des entreprises, délocaliser, licencier, sans avoir de comptes à rendre à quiconque.
Tout fonctionne à l'envers. Ceux qui font marcher la société et produisent les richesses ne sont pas ceux qui en bénéficient. Au contraire.
Par contre, ceux qui vivent du travail des autres sont ceux qui accaparent une part croissante de la richesse produite.
Le pouvoir d'achat se détériore même pour ceux qui ont un emploi stable. Car tout augmente : le logement, le chauffage, l'électricité, les transports, les prélèvements de toute sorte. Mais, au train où vont les choses, avoir un emploi stable sera considéré par ceux qui nous gouvernent comme un privilège tant la précarité, la flexibilité comme disent les patrons, se généralise, tant monte la misère à travers des emplois à temps partiel imposé, des contrats de courte durée, parfois même, cela s'est vu, des embauches pour une seule journée !
Le gouvernement prétend que le chômage baisse. C'est un mensonge. Les statistiques du chômage sont trafiquées, comme sont trafiquées les informations. En effet, qui ne voit la pauvreté qui monte ? Qui ne sait que, lorsqu'on a perdu un emploi à peu près convenablement payé, on n'a aucune chance d'en retrouver un autre de même nature ? Les emplois nouvellement créés sont insuffisants et, de plus, les deux tiers d'entre eux sont des emplois précaires ! Ce qui signifie que, si on sort du chômage aujourd'hui, c'est pour y retomber demain !
Par contre, lorsque les journaux économiques annoncent triomphalement que les profits des entreprises s'envolent, cela signifie en clair que leurs actionnaires encaissent des dividendes de plus en plus élevés, sans rien faire de leurs dix doigts.
Ces profits servent si peu aux investissements utiles. Ils ne servent pas à créer de nouvelles usines et de nouveaux emplois.
Ces profits ne servent qu'à enrichir un peu plus ceux qui sont déjà riches. Ils servent à augmenter la consommation de luxe. Et ils ne servent surtout qu'à alimenter des batailles boursières où les entreprises se rachètent les unes les autres, en jetant, au passage, à la rue un contingent supplémentaire de travailleurs.
Alors oui, l'emprise actuelle des conseils d'administration des grandes entreprises sur la société, avec comme motivation la seule recherche du profit, conduit à la catastrophe.
Le seul moyen d'empêcher la situation sociale d'empirer encore est de soumettre les grandes entreprises, les banques, au contrôle de la collectivité.
Tout le reste en découle. Résorber le chômage ne pourra se faire qu'en donnant un droit de regard aux travailleurs, à la population, sur la gestion des finances des grandes entreprises.
Il faut que toute la population, à commencer par l'ensemble des travailleurs de ces grandes entreprises qui sont les mieux placés pour le faire, puissent contrôler les circuits de l'argent de ces grandes entreprises, celui qui entre, par où il passe, vers qui il sort, vérifier les choix qui sont faits, en fonction de quoi et au profit de qui. On pourrait alors se rendre compte que les fermetures d'usines, que les licenciements, sont des choix, et que des choix, il y en aurait d'autres. Moins favorables, sans doute, aux actionnaires, mais plus favorables à toute la société, et surtout aux travailleurs qui les enrichissent.
Il faut que les travailleurs, que la population, puissent avoir connaissance longtemps à l'avance des projets des entreprises et qu'ils puissent peser sur leurs décisions. C'est le seul moyen de créer des emplois utiles en montrant qu'on pourrait offrir du travail à tout le monde en répartissant les heures de travail, et cela sans même de baisse des salaires. Cela permettra même sûrement de prouver qu'il est possible d'augmenter les salaires pour que chacun puisse vivre correctement.
Cela diminuerait les dividendes et, donc, les revenus des actionnaires ? Mais il n'y a pas de raisons que ces gens-là accumulent de plus en plus, vivent dans le luxe, pendant que la classe productive s'appauvrit !
Toutes les mesures du gouvernement visent, au contraire, à ouvrir devant la bourgeoisie de nouvelles possibilités de prélever une dîme croissante sur les consommateurs, c'est-à-dire sur la population.
Regardez ce qui se passe pour Gaz de France. Ils ont coupé d'abord en deux l'ancienne EDF-GDF, pour prétendre ensuite que GDF toute seule n'est pas assez puissante pour faire le poids dans la concurrence internationale. Puis, au nom de cette affirmation, les voilà qui livrent GDF au trust Suez, ce qui revient à la privatiser. Ils osent prétendre que les consommateurs y gagneront. Mais les consommateurs devront payer, en plus du prix du gaz, les dividendes des actionnaires privés. Et les travailleurs de l'entreprise ont toutes les raisons de protester car ils sont bien placés pour savoir que, même si le gouvernement promet de ne pas toucher à leur emploi et à leur salaire, cette promesse n'engage que ceux qui la croient. Et il y a à peine deux ans, Sarkozy avait « promis-juré » qu'il n'était pas question de privatiser Gaz de France ! Ces gens-là mentent pire que des arracheurs de dents qui, eux, servent au moins à quelque chose.
Il faut aussi développer et favoriser les services publics utiles aux classes populaires, comme les hôpitaux publics, les écoles, les transports en commun, les logements sociaux. Il faut leur donner tous les moyens dont ils ont besoin, en cessant de diminuer et, au contraire, en augmentant les impôts sur les profits des entreprises comme sur les hauts revenus.
Ces objectifs-là sont vitaux pour le monde du travail. On ne peut pas les obtenir sans prendre sur les profits des entreprises. Ces profits, la collectivité y a droit. Elle y a droit parce qu'ils résultent du travail collectif. Ils devraient servir d'abord à ce qui est indispensable à la collectivité.
Tout cela ne peut se réaliser simplement par des élections. Cela ne peut être imposé que par la lutte collective du monde du travail. Mais, à l'élection présidentielle, on peut au moins s'exprimer par son vote sur de tels objectifs clairement affirmés, sans se contenter de soutenir ceux qui nous mentent ou ceux qui nous bercent de vagues promesses.
Aucune élection ne change en elle-même le rapport de forces entre la bourgeoisie qui dirige l'économie et les classes travailleuses. Mais il est important que, face aux grands partis qui, tous, se situent sur le terrain de l'économie capitaliste, s'affirme un courant exprimant les intérêts politiques, économiques et sociaux des travailleurs.
Il faut que ce courant s'affirme, en premier lieu, contre la droite au pouvoir. Ces gens-là, les Chirac, Villepin, Sarkozy, sont tous ouvertement au service des plus riches. Leur préoccupation constante est de leur donner des moyens supplémentaires pour s'enrichir davantage. Réduire leurs impôts, quitte à ce que le budget de l'Etat manque d'argent pour les hôpitaux ou l'Education nationale. Réduire, voire supprimer, leurs charges sociales, quitte à enfoncer la Sécurité sociale dans le déficit et, ensuite, à exhiber ce déficit pour faire payer les salariés. Arroser les entreprises déjà largement bénéficiaires d'aides et de subventions.
Pour les salariés, en revanche, les cinq années que les hommes de la droite auront passées au pouvoir, sont une succession de mauvais coups.
La « réforme » des retraites, c'est l'allongement de la durée de travail et l'amputation des pensions.
La « réforme » de l'assurance maladie, c'est l'augmentation des cotisations des salariés et la diminution des prestations.
La réforme du code du travail, c'est débarrasser la législation sociale du peu qui protège les travailleurs. Comme, par exemple, le CNE ou Contrat nouvelle embauche, qui permet à de nombreuses entreprises d'embaucher tous les nouveaux salariés avec une période d'essai de deux ans, situation encore pire qu'un contrat à durée déterminée qui doit en principe aller jusqu'à son terme. En fait, la plupart de celles de moins de 20 salariés auxquelles le CNE s'applique useront et abuseront de cette possibilité.
La seule réforme qu'ils n'ont pas réussi à imposer est le CPE, que la mobilisation de la jeunesse les a obligés à remballer.
Tout laisse à penser que la droite sera représentée à l'élection présidentielle par Sarkozy, le clone de Le Pen, l'homme de la chasse aux travailleurs immigrés, l'homme dont les classes populaires ne peuvent attendre que des coups redoublés.
Si son cynisme frise la franchise, c'est qu'il cible l'électorat de droite et d'extrême droite, le plus haineusement anti-ouvrier et anti-pauvre. Ce qu'il dit aux électeurs d'extrême droite, c'est « voyez donc, j'ai le même programme que Le Pen mais, moi, je l'applique déjà comme ministre et, contrairement à lui, j'ai toutes les chances d'être élu président de la République ».
Il s'adresse à cet électorat réactionnaire qui estime qu'un salarié n'est jamais assez flexible, mais toujours trop payé. Cet électorat qui pense que les chômeurs ne le sont que parce qu'ils ne veulent pas travailler. Un électorat qui aime entendre la promesse de multiplier, dans les quartiers populaires, le nombre des policiers plutôt que celui des enseignants.
Mais, même là, c'est de la démagogie. Sarkozy se paie de mots provocateurs parce qu'il n'y a pas d'argent, ni pour les uns ni pour les autres, lorsqu'il s'agit des quartiers populaires. Non, l'argent de l'Etat est réservé au grand patronat !
Alors, ma candidature sera celle du rejet radical non seulement de cet homme et de la clique politique qu'il représente, mais aussi de l'exploitation économique de la classe travailleuse par la minorité riche que la droite défend avec acharnement.
Mais il faut aussi affirmer les intérêts politiques et les objectifs économiques et sociaux des travailleurs face au candidat ou à la candidate du PS.
Comme vous le savez, il en reste trois en lice : l'un, Dominique Strauss-Kahn, se présentant comme social-démocrate ; l'autre, Ségolène Royal, comme pragmatique et moderniste ; et, enfin, le troisième, Laurent Fabius. Celui-là se fait passer pour plus à gauche que ses rivaux, ce qui ne manque pas de sel s'agissant d'un homme issu d'une famille de riches bourgeois qui a choisi le PS pour faire carrière et dont les travailleurs ont eu à subir la politique au temps où il était Premier ministre de Mitterrand !
De par leur passé, les trois se ressemblent beaucoup, et ils se ressemblent encore plus par leur politique. Il faut toute l'imagination fertile des journalistes pour trouver des différences et faire des pages de commentaires après chaque phrase de l'un ou de l'autre. « Même quand je me tais, cela fait du bruit », a paraît-il affirmé Ségolène Royal. Mais la phrase vaut certainement pour les trois car, derrière le bruit de leur rivalité, il n'y a pas grand-chose. Surtout pas un bilan critique des cinq ans du gouvernement Jospin. Tous les trois ont été pourtant les ministres de ce dernier et ils ont leur part de responsabilité dans le fait que leur gouvernement a dégoûté l'électorat au point que deux millions et demi d'électeurs du PS n'ont pas voté pour le candidat socialiste Jospin aux élections de 2002.
Je me garderai bien de faire des pronostics sur qui des trois l'emportera. Que ce soit l'une ou un autre, son seul argument réellement efficace dans la campagne électorale sera que son élection nous débarrasserait de Sarkozy.
C'est un argument de poids, en effet.
Mais qui peut espérer raisonnablement qu'une présidence socialiste, qu'un gouvernement socialiste, veuille et puisse changer réellement le sort des travailleurs ? Qui peut raisonnablement espérer qu'un gouvernement socialiste annule toutes les mesures anti-ouvrières prises par la droite ?
Et, à bien plus forte raison, qui peut espérer qu'il résorbe le chômage, augmente les salaires, assure aux retraités une pension qui permette de vivre ? Comment croire qu'il fera ce que le gouvernement Jospin n'a pas fait pendant les cinq ans de son existence ?
Alors, il ne faut pas que, par refus de la droite et de l'extrême droite, l'électorat populaire en vienne à ne rien exiger du Parti socialiste, en oubliant tout ce que la gauche au pouvoir a fait pour le grand patronat, tout ce qu'elle n'a pas fait pour le monde du travail, en oubliant les déceptions. La haine, oh combien légitime, de la droite ne doit pas se transformer en quitus pour la politique passée de la gauche, ni surtout en un encouragement à recommencer dans l'avenir.
Dans son discours à la fête de L'Huma, Marie-George Buffet a fixé comme objectif de son parti : « Il faut une gauche populaire, courageuse, audacieuse, qui porte contre vents et marées une politique qui change la vie ». Et d'ajouter un peu plus tard : « Je veux le rassemblement le plus large possible, et donc majoritaire ». Marie-George Buffet sait parfaitement que, sur le plan électoral, auquel elle se réfère, la gauche ne peut être majoritaire qu'avec et autour du PS.
Alors, Strauss-Kahn, Fabius, Royal, c'est cela la « gauche populaire, courageuse et audacieuse » qui « change la vie » ?
Les dirigeants du PC prétendent que, si leur parti recueille beaucoup de suffrages, il se créera au sein de la gauche un rapport de forces qui obligera le PS à infléchir son programme. Mais, même entre 1981 et 1984, où les résultats électoraux du PC dépassaient les 16 %, il n'a pas du tout pesé sur la politique du gouvernement socialiste, ou alors c'est que les ministres du PC étaient d'accord sur tout !
Une fois de plus, le PC reprend, sous une forme à peine renouvelée et enveloppée dans un langage qui se veut revendicatif, la politique qui est la sienne depuis des années. Une politique destinée à convaincre les travailleurs que la seule perspective qui s'offre à eux, le seul débouché politique possible, est un gouvernement socialiste avec la participation de ministres communistes. En défendant cette politique avec les moyens militants dont il dispose, le PC a contribué à désarmer les travailleurs, à les détourner de la lutte de classe, le seul moyen pour les travailleurs de peser vraiment sur les décisions politiques. Et les ministres du PC n'ont fait que cautionner devant les travailleurs la politique des gouvernements auxquels ils appartenaient, y compris dans ses aspects les plus anti-ouvriers.
Ce que j'entends donc dire dans cette campagne, ce n'est pas seulement la dénonciation d'un système économique injuste et fou, ce n'est pas seulement celle d'une caste politique qui gère loyalement ce système, je veux surtout populariser les objectifs de lutte qui en découlent pour les travailleurs.
Et cela, personne ne le fera à notre place.
Bien sûr, nous avons encore un obstacle à franchir, celui de l'obligation légale de présenter 500 parrainages d'élus. Le mode de scrutin, conçu pour favoriser les grands partis, fait que nous n'avons jamais eu le nombre d'élus correspondant à notre représentativité électorale réelle, c'est-à-dire au pourcentage de nos voix. Comme dans le passé, nous ne pouvons compter que sur les sentiments démocratiques d'un certain nombre d'élus, généralement des maires de petites communes qui pensent que ma présence aux élections se justifie et qui sont assez courageux et indépendants pour résister à toutes les pressions des appareils, même s'ils ne partagent pas nos opinions politiques.
Eh bien, nous nous rapprochons du but car nous ne sommes pas très loin des 500 promesses de parrainages. Mais, en disant que nous n'en sommes pas loin, je veux dire aussi que nous ne les avons pas encore. Les pressions qui s'exercent sur les élus sont fortes et elles se feront sentir jusqu'au dernier moment. Et il suffit qu'une seule signature me manque le jour venu pour que ma candidature ne soit pas possible. C'est pourquoi nous ne pouvons pas relâcher nos efforts.
Alors, camarades, je vous souhaite une bonne fin de fête pour aujourd'hui et du courage dans l'activité qui me permettra d'être candidate et, ensuite, pour mener la campagne électorale !
Source http://www.lutte-ouvriere.org, le 11 octobre 2006
Vous avez peut-être entendu à la télévision ou à la radio parler de ce licenciement qui vient d'avoir lieu à Orléans. Une caissière du supermarché Champion du quartier populaire de La Source, connue et appréciée de la population, vient d'être jetée à la porte sans préavis ni indemnité pour faute grave, prétend la direction : elle avait payé de sa poche des sandwichs que des gamins avaient pris sans avoir l'argent. Et la direction aurait découvert qu'il arrivait à cette caissière de consentir un petit crédit à ceux, RMIstes ou chômeurs, qui ne pouvaient payer avant qu'ils touchent leur RMI ou leur allocation de chômage. Crime insupportable pour le gérant du magasin, manifestement couvert par ses supérieurs de cette chaîne de distribution qui, outre Champion, possède Carrefour et bien d'autres supermarchés. La population du quartier s'est mobilisée en faveur de la caissière licenciée, et j'espère bien qu'elle parviendra à faire reculer les licencieurs dignes du patronat du XIXème siècle.
De tels licenciements, il y en a bien d'autres dans le pays chaque jour. Mais il est révélateur de la mentalité de tels patrons dépourvus d'humanité qui croient pouvoir tout se permettre.
Mais les travailleurs, la population, de votre région ont eu bien d'autres occasions et bien plus dramatiques de payer de leur santé et, pour beaucoup, de leur vie la rapacité du patronat. Combien d'hommes meurent année après année de l'amiante, que l'on a utilisé pendant des décennies alors que son caractère cancérigène était déjà connu ?
On nous fait des discours sur le principe de précaution, mais pour les exploités, ce principe n'existe pas ou, plutôt, il s'efface devant un autre : celui de la recherche du maximum de profit.
Notre société se prétend démocratique mais, dans le domaine de l'économie qui détermine les conditions d'existence de toute la population, ceux qui, au-dessus des politiques, décident vraiment ne sont ni contrôlés ni contrôlables. Et c'est vrai ici, dans la région, pour l'entreprise Stora-Enso à Corbehem, comme cela l'a été pour Métaleurop et aujourd'hui encore pour Delphy.
Les conseils d'administration de quelques centaines de grandes entreprises ont plus de poids sur la vie de la société que ceux qui sont élus, y compris le président de la République, et pour lesquels on ne vote qu'une fois tous les cinq ans.
C'est, en fait, une véritable dictature économique qui domine la politique et où une toute petite minorité de possesseurs de capitaux a le droit de tout faire : fermer des entreprises, délocaliser, licencier, sans avoir de comptes à rendre à quiconque.
Tout fonctionne à l'envers. Ceux qui font marcher la société et produisent les richesses ne sont pas ceux qui en bénéficient. Au contraire.
Par contre, ceux qui vivent du travail des autres sont ceux qui accaparent une part croissante de la richesse produite.
Le pouvoir d'achat se détériore même pour ceux qui ont un emploi stable. Car tout augmente : le logement, le chauffage, l'électricité, les transports, les prélèvements de toute sorte. Mais, au train où vont les choses, avoir un emploi stable sera considéré par ceux qui nous gouvernent comme un privilège tant la précarité, la flexibilité comme disent les patrons, se généralise, tant monte la misère à travers des emplois à temps partiel imposé, des contrats de courte durée, parfois même, cela s'est vu, des embauches pour une seule journée !
Le gouvernement prétend que le chômage baisse. C'est un mensonge. Les statistiques du chômage sont trafiquées, comme sont trafiquées les informations. En effet, qui ne voit la pauvreté qui monte ? Qui ne sait que, lorsqu'on a perdu un emploi à peu près convenablement payé, on n'a aucune chance d'en retrouver un autre de même nature ? Les emplois nouvellement créés sont insuffisants et, de plus, les deux tiers d'entre eux sont des emplois précaires ! Ce qui signifie que, si on sort du chômage aujourd'hui, c'est pour y retomber demain !
Par contre, lorsque les journaux économiques annoncent triomphalement que les profits des entreprises s'envolent, cela signifie en clair que leurs actionnaires encaissent des dividendes de plus en plus élevés, sans rien faire de leurs dix doigts.
Ces profits servent si peu aux investissements utiles. Ils ne servent pas à créer de nouvelles usines et de nouveaux emplois.
Ces profits ne servent qu'à enrichir un peu plus ceux qui sont déjà riches. Ils servent à augmenter la consommation de luxe. Et ils ne servent surtout qu'à alimenter des batailles boursières où les entreprises se rachètent les unes les autres, en jetant, au passage, à la rue un contingent supplémentaire de travailleurs.
Alors oui, l'emprise actuelle des conseils d'administration des grandes entreprises sur la société, avec comme motivation la seule recherche du profit, conduit à la catastrophe.
Le seul moyen d'empêcher la situation sociale d'empirer encore est de soumettre les grandes entreprises, les banques, au contrôle de la collectivité.
Tout le reste en découle. Résorber le chômage ne pourra se faire qu'en donnant un droit de regard aux travailleurs, à la population, sur la gestion des finances des grandes entreprises.
Il faut que toute la population, à commencer par l'ensemble des travailleurs de ces grandes entreprises qui sont les mieux placés pour le faire, puissent contrôler les circuits de l'argent de ces grandes entreprises, celui qui entre, par où il passe, vers qui il sort, vérifier les choix qui sont faits, en fonction de quoi et au profit de qui. On pourrait alors se rendre compte que les fermetures d'usines, que les licenciements, sont des choix, et que des choix, il y en aurait d'autres. Moins favorables, sans doute, aux actionnaires, mais plus favorables à toute la société, et surtout aux travailleurs qui les enrichissent.
Il faut que les travailleurs, que la population, puissent avoir connaissance longtemps à l'avance des projets des entreprises et qu'ils puissent peser sur leurs décisions. C'est le seul moyen de créer des emplois utiles en montrant qu'on pourrait offrir du travail à tout le monde en répartissant les heures de travail, et cela sans même de baisse des salaires. Cela permettra même sûrement de prouver qu'il est possible d'augmenter les salaires pour que chacun puisse vivre correctement.
Cela diminuerait les dividendes et, donc, les revenus des actionnaires ? Mais il n'y a pas de raisons que ces gens-là accumulent de plus en plus, vivent dans le luxe, pendant que la classe productive s'appauvrit !
Toutes les mesures du gouvernement visent, au contraire, à ouvrir devant la bourgeoisie de nouvelles possibilités de prélever une dîme croissante sur les consommateurs, c'est-à-dire sur la population.
Regardez ce qui se passe pour Gaz de France. Ils ont coupé d'abord en deux l'ancienne EDF-GDF, pour prétendre ensuite que GDF toute seule n'est pas assez puissante pour faire le poids dans la concurrence internationale. Puis, au nom de cette affirmation, les voilà qui livrent GDF au trust Suez, ce qui revient à la privatiser. Ils osent prétendre que les consommateurs y gagneront. Mais les consommateurs devront payer, en plus du prix du gaz, les dividendes des actionnaires privés. Et les travailleurs de l'entreprise ont toutes les raisons de protester car ils sont bien placés pour savoir que, même si le gouvernement promet de ne pas toucher à leur emploi et à leur salaire, cette promesse n'engage que ceux qui la croient. Et il y a à peine deux ans, Sarkozy avait « promis-juré » qu'il n'était pas question de privatiser Gaz de France ! Ces gens-là mentent pire que des arracheurs de dents qui, eux, servent au moins à quelque chose.
Il faut aussi développer et favoriser les services publics utiles aux classes populaires, comme les hôpitaux publics, les écoles, les transports en commun, les logements sociaux. Il faut leur donner tous les moyens dont ils ont besoin, en cessant de diminuer et, au contraire, en augmentant les impôts sur les profits des entreprises comme sur les hauts revenus.
Ces objectifs-là sont vitaux pour le monde du travail. On ne peut pas les obtenir sans prendre sur les profits des entreprises. Ces profits, la collectivité y a droit. Elle y a droit parce qu'ils résultent du travail collectif. Ils devraient servir d'abord à ce qui est indispensable à la collectivité.
Tout cela ne peut se réaliser simplement par des élections. Cela ne peut être imposé que par la lutte collective du monde du travail. Mais, à l'élection présidentielle, on peut au moins s'exprimer par son vote sur de tels objectifs clairement affirmés, sans se contenter de soutenir ceux qui nous mentent ou ceux qui nous bercent de vagues promesses.
Aucune élection ne change en elle-même le rapport de forces entre la bourgeoisie qui dirige l'économie et les classes travailleuses. Mais il est important que, face aux grands partis qui, tous, se situent sur le terrain de l'économie capitaliste, s'affirme un courant exprimant les intérêts politiques, économiques et sociaux des travailleurs.
Il faut que ce courant s'affirme, en premier lieu, contre la droite au pouvoir. Ces gens-là, les Chirac, Villepin, Sarkozy, sont tous ouvertement au service des plus riches. Leur préoccupation constante est de leur donner des moyens supplémentaires pour s'enrichir davantage. Réduire leurs impôts, quitte à ce que le budget de l'Etat manque d'argent pour les hôpitaux ou l'Education nationale. Réduire, voire supprimer, leurs charges sociales, quitte à enfoncer la Sécurité sociale dans le déficit et, ensuite, à exhiber ce déficit pour faire payer les salariés. Arroser les entreprises déjà largement bénéficiaires d'aides et de subventions.
Pour les salariés, en revanche, les cinq années que les hommes de la droite auront passées au pouvoir, sont une succession de mauvais coups.
La « réforme » des retraites, c'est l'allongement de la durée de travail et l'amputation des pensions.
La « réforme » de l'assurance maladie, c'est l'augmentation des cotisations des salariés et la diminution des prestations.
La réforme du code du travail, c'est débarrasser la législation sociale du peu qui protège les travailleurs. Comme, par exemple, le CNE ou Contrat nouvelle embauche, qui permet à de nombreuses entreprises d'embaucher tous les nouveaux salariés avec une période d'essai de deux ans, situation encore pire qu'un contrat à durée déterminée qui doit en principe aller jusqu'à son terme. En fait, la plupart de celles de moins de 20 salariés auxquelles le CNE s'applique useront et abuseront de cette possibilité.
La seule réforme qu'ils n'ont pas réussi à imposer est le CPE, que la mobilisation de la jeunesse les a obligés à remballer.
Tout laisse à penser que la droite sera représentée à l'élection présidentielle par Sarkozy, le clone de Le Pen, l'homme de la chasse aux travailleurs immigrés, l'homme dont les classes populaires ne peuvent attendre que des coups redoublés.
Si son cynisme frise la franchise, c'est qu'il cible l'électorat de droite et d'extrême droite, le plus haineusement anti-ouvrier et anti-pauvre. Ce qu'il dit aux électeurs d'extrême droite, c'est « voyez donc, j'ai le même programme que Le Pen mais, moi, je l'applique déjà comme ministre et, contrairement à lui, j'ai toutes les chances d'être élu président de la République ».
Il s'adresse à cet électorat réactionnaire qui estime qu'un salarié n'est jamais assez flexible, mais toujours trop payé. Cet électorat qui pense que les chômeurs ne le sont que parce qu'ils ne veulent pas travailler. Un électorat qui aime entendre la promesse de multiplier, dans les quartiers populaires, le nombre des policiers plutôt que celui des enseignants.
Mais, même là, c'est de la démagogie. Sarkozy se paie de mots provocateurs parce qu'il n'y a pas d'argent, ni pour les uns ni pour les autres, lorsqu'il s'agit des quartiers populaires. Non, l'argent de l'Etat est réservé au grand patronat !
Alors, ma candidature sera celle du rejet radical non seulement de cet homme et de la clique politique qu'il représente, mais aussi de l'exploitation économique de la classe travailleuse par la minorité riche que la droite défend avec acharnement.
Mais il faut aussi affirmer les intérêts politiques et les objectifs économiques et sociaux des travailleurs face au candidat ou à la candidate du PS.
Comme vous le savez, il en reste trois en lice : l'un, Dominique Strauss-Kahn, se présentant comme social-démocrate ; l'autre, Ségolène Royal, comme pragmatique et moderniste ; et, enfin, le troisième, Laurent Fabius. Celui-là se fait passer pour plus à gauche que ses rivaux, ce qui ne manque pas de sel s'agissant d'un homme issu d'une famille de riches bourgeois qui a choisi le PS pour faire carrière et dont les travailleurs ont eu à subir la politique au temps où il était Premier ministre de Mitterrand !
De par leur passé, les trois se ressemblent beaucoup, et ils se ressemblent encore plus par leur politique. Il faut toute l'imagination fertile des journalistes pour trouver des différences et faire des pages de commentaires après chaque phrase de l'un ou de l'autre. « Même quand je me tais, cela fait du bruit », a paraît-il affirmé Ségolène Royal. Mais la phrase vaut certainement pour les trois car, derrière le bruit de leur rivalité, il n'y a pas grand-chose. Surtout pas un bilan critique des cinq ans du gouvernement Jospin. Tous les trois ont été pourtant les ministres de ce dernier et ils ont leur part de responsabilité dans le fait que leur gouvernement a dégoûté l'électorat au point que deux millions et demi d'électeurs du PS n'ont pas voté pour le candidat socialiste Jospin aux élections de 2002.
Je me garderai bien de faire des pronostics sur qui des trois l'emportera. Que ce soit l'une ou un autre, son seul argument réellement efficace dans la campagne électorale sera que son élection nous débarrasserait de Sarkozy.
C'est un argument de poids, en effet.
Mais qui peut espérer raisonnablement qu'une présidence socialiste, qu'un gouvernement socialiste, veuille et puisse changer réellement le sort des travailleurs ? Qui peut raisonnablement espérer qu'un gouvernement socialiste annule toutes les mesures anti-ouvrières prises par la droite ?
Et, à bien plus forte raison, qui peut espérer qu'il résorbe le chômage, augmente les salaires, assure aux retraités une pension qui permette de vivre ? Comment croire qu'il fera ce que le gouvernement Jospin n'a pas fait pendant les cinq ans de son existence ?
Alors, il ne faut pas que, par refus de la droite et de l'extrême droite, l'électorat populaire en vienne à ne rien exiger du Parti socialiste, en oubliant tout ce que la gauche au pouvoir a fait pour le grand patronat, tout ce qu'elle n'a pas fait pour le monde du travail, en oubliant les déceptions. La haine, oh combien légitime, de la droite ne doit pas se transformer en quitus pour la politique passée de la gauche, ni surtout en un encouragement à recommencer dans l'avenir.
Dans son discours à la fête de L'Huma, Marie-George Buffet a fixé comme objectif de son parti : « Il faut une gauche populaire, courageuse, audacieuse, qui porte contre vents et marées une politique qui change la vie ». Et d'ajouter un peu plus tard : « Je veux le rassemblement le plus large possible, et donc majoritaire ». Marie-George Buffet sait parfaitement que, sur le plan électoral, auquel elle se réfère, la gauche ne peut être majoritaire qu'avec et autour du PS.
Alors, Strauss-Kahn, Fabius, Royal, c'est cela la « gauche populaire, courageuse et audacieuse » qui « change la vie » ?
Les dirigeants du PC prétendent que, si leur parti recueille beaucoup de suffrages, il se créera au sein de la gauche un rapport de forces qui obligera le PS à infléchir son programme. Mais, même entre 1981 et 1984, où les résultats électoraux du PC dépassaient les 16 %, il n'a pas du tout pesé sur la politique du gouvernement socialiste, ou alors c'est que les ministres du PC étaient d'accord sur tout !
Une fois de plus, le PC reprend, sous une forme à peine renouvelée et enveloppée dans un langage qui se veut revendicatif, la politique qui est la sienne depuis des années. Une politique destinée à convaincre les travailleurs que la seule perspective qui s'offre à eux, le seul débouché politique possible, est un gouvernement socialiste avec la participation de ministres communistes. En défendant cette politique avec les moyens militants dont il dispose, le PC a contribué à désarmer les travailleurs, à les détourner de la lutte de classe, le seul moyen pour les travailleurs de peser vraiment sur les décisions politiques. Et les ministres du PC n'ont fait que cautionner devant les travailleurs la politique des gouvernements auxquels ils appartenaient, y compris dans ses aspects les plus anti-ouvriers.
Ce que j'entends donc dire dans cette campagne, ce n'est pas seulement la dénonciation d'un système économique injuste et fou, ce n'est pas seulement celle d'une caste politique qui gère loyalement ce système, je veux surtout populariser les objectifs de lutte qui en découlent pour les travailleurs.
Et cela, personne ne le fera à notre place.
Bien sûr, nous avons encore un obstacle à franchir, celui de l'obligation légale de présenter 500 parrainages d'élus. Le mode de scrutin, conçu pour favoriser les grands partis, fait que nous n'avons jamais eu le nombre d'élus correspondant à notre représentativité électorale réelle, c'est-à-dire au pourcentage de nos voix. Comme dans le passé, nous ne pouvons compter que sur les sentiments démocratiques d'un certain nombre d'élus, généralement des maires de petites communes qui pensent que ma présence aux élections se justifie et qui sont assez courageux et indépendants pour résister à toutes les pressions des appareils, même s'ils ne partagent pas nos opinions politiques.
Eh bien, nous nous rapprochons du but car nous ne sommes pas très loin des 500 promesses de parrainages. Mais, en disant que nous n'en sommes pas loin, je veux dire aussi que nous ne les avons pas encore. Les pressions qui s'exercent sur les élus sont fortes et elles se feront sentir jusqu'au dernier moment. Et il suffit qu'une seule signature me manque le jour venu pour que ma candidature ne soit pas possible. C'est pourquoi nous ne pouvons pas relâcher nos efforts.
Alors, camarades, je vous souhaite une bonne fin de fête pour aujourd'hui et du courage dans l'activité qui me permettra d'être candidate et, ensuite, pour mener la campagne électorale !
Source http://www.lutte-ouvriere.org, le 11 octobre 2006