Déclaration de M. Dominique Perben, ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer, sur les politiques foncières et l'aménagement urbain, Strasbourg le 10 octobre 2006.

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Circonstance : Congrès de la Fédération des sociétés d'économie mixte d'aménagement à Strasbourg le 10 octobre 2006

Texte intégral

Mesdames,
Messieurs,
Je suis particulièrement heureux que cette manifestation me donne l'occasion de rencontrer les acteurs qui façonnent nos villes de demain. Mon message, c'est de vous rappeler que j'entends partager avec vous les nouveaux enjeux de l'aménagement. Je tiens à vous féliciter d'avoir su donner une visibilité à votre activité. Et surtout d'avoir su consolider des savoirs et des compétences au service des élus et de nos concitoyens.
Aujourd'hui, cependant, le monde de l'aménagement connaît d'importantes mutations et certains d'entre vous nourrissent légitimement quelques inquiétudes.
Je tiens donc tout d'abord à vous rassurer : la réforme des concessions d'aménagement ne menace en aucune façon l'avenir des SEM d'aménagement.
Il fallait faire cette réforme pour respecter nos obligations communautaires en matière de contrat marché public. Il est vrai que l'aménagement à la française était relativement atypique dans le paysage européen et qu'il convenait de restaurer une certaine égalité entre les professionnels.
Nous souhaitons aussi que des clarifications soient apportées au plan communautaire dans le domaine des « relations in-house » et, notamment, que face à une jurisprudence de plus en plus restrictive, des règles claires soient arrêtées.
Pour autant, le gouvernement n'a pas sacrifié le modèle français sur l'autel de la concurrence. La réforme que le législateur a adoptée est souple et adaptée. Certains ont pu la percevoir comme un bouleversement des pratiques, alors qu'elle ne fait en réalité qu'accroître la publicité et la transparence des décisions locales.
Elle protège les élus, comme les opérateurs qu'ils choisissent. Le décret qui est venu la préciser ne crée d'ailleurs aucune contrainte superfétatoire pour les aménageurs et les décideurs publics.
D'ici à la fin de cette année, je publierai la circulaire d'application que vous attendez, avec l'arrêté définissant le modèle d'avis de publicité. Je l'ai voulu le plus simple possible.
Mes services vérifient actuellement sa conformité avec les règles européennes. Le cadre qui fixe vos interventions sera donc, à très court terme, stabilisé.
Certains ont pu s'inquiéter de cette ouverture à la concurrence. Elle me paraît, au contraire, comporter quelques bienfaits qu'il convient de souligner.
D'une part, un avantage inhérent au principe même de la concurrence : l'amélioration des performances. Vous serez de plus en plus enclins à développer des systèmes de management de projet de plus en plus efficaces. Beaucoup d'entre vous se sont déjà engagés dans cette voie.
D'autre part, comme je viens de l'évoquer, une transparence accrue des actions locales menées en matière d'aménagement, au bénéfice des professionnels. Car ils seront traités avec égalité, mais, surtout, en regard des attentes de nos concitoyens.
Car cette mise en conformité avec le droit européen induit bien une nouvelle manière de penser l'intervention des aménageurs. Elle donne plus de poids politique à la définition des objectifs d'aménagement. Elle remet à leur juste place les études préalables. Et cela coïncide avec la nécessité que les collectivités locales réinvestissent le champ de l'aménagement opérationnel.
A cet effet, elles doivent d'abord prendre toute la mesure des grandes tendances sociétales du « vivre la ville », et en saisir les enjeux.
La péri-urbanisation désordonnée, et de plus en plus éloignée des centres urbains, doit être davantage maîtrisée et correspondre à un mode de développement durable.
Il s'agit aussi de surmonter les difficultés à construire des logements dans les zones où le marché est plus tendu. Ces difficultés ne posent pas seulement la question de l'adéquation de l'offre et de la demande. Elles pèsent également sur la capacité des acteurs publics à contrecarrer les phénomènes de ségrégation sociale. Luttons contre cette logique d'évitement qui traverse tout le corps social, en reléguant les populations défavorisées dans les quartiers de la « politique de la ville » !
J'affirme ici avec conviction que ces problèmes doivent être appréhendés aux échelles intercommunales. Seules des politiques foncières mobilisant des solidarités à cette échelle seront à même de désamorcer ces phénomènes. Un premier pas en ce sens pourrait être notamment la création d'outils tels que les établissements publics fonciers. Pour être à la hauteur de ces enjeux, nous avons besoin d'une ingénierie territoriale et urbaine de qualité. Les aménageurs sont à la croisée des chemins sur cette question essentielle.
Ils doivent relever plusieurs défis : assurer le maintien du rythme actuel de construction de logements et favoriser le développement durable des villes. Mais surtout produire des espaces, et particulièrement des espaces publics, où les générations à venir auront plaisir à vivre.
C'est à cette étape de l'urbanisme opérationnel, vous le savez, que se joue l'essentiel de la qualité urbaine.
Il faut en effet construire des quartiers qui répondent aux nouveaux modes de vie, et concilient les exigences multiples de nos concitoyens : densité urbaine et contact avec la nature, accessibilité des services quotidiens, et en particulier des transports, protection des nuisances, facilité de rencontre et préservation de l'intimité.
Il faut construire des quartiers favorables à la mixité sociale, où la diversité des usages de l'espace public permet la rencontre des jeunes et des moins jeunes, des familles et des personnes seules, des ménages plus prospères et de ceux qui sont défavorisés.
Car cet espace public, qui est le coeur de la «socialité urbaine» dans un pays comme le nôtre, ne doit pas devenir un espace d'exclusion. Mais être au contraire le creuset de la citoyenneté républicaine.
Tous les élus y sont attentifs. Ils attendent des professionnels que vous êtes des réponses à leur attente de qualité urbaine, indispensable au développement durable de nos villes.
Sachez que dans cette quête permanente de la qualité et du progrès, le ministre de l'Equipement sera toujours à vos côtés.
Source http://www.equipement.gouv.fr, le 16 octobre 2006