Déclaration de M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'État, porte-parole du gouvernement, sur les enjeux de la coopération administrative et financière entre la France et le Liban pour la constitution d'un Etat moderne et indépendant, Beyrouth (Liban) le 30 octobre 2006.

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Circonstance : 10ème Anniversaire de l'Institut des Finances à Beyrouth au Liban le 30 octobre 2006

Texte intégral

Monsieur Le Premier Ministre,
Monsieur le Ministre des Finances,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs les Députés,
Monsieur l'Ambassadeur de France,
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Madame la Directrice de l'Institut des Finances,
Mesdames et Messieurs,
C'est avec un immense plaisir et beaucoup d'émotion que je suis venu à Beyrouth, à la demande du Président de la République Jacques Chirac, pour célébrer avec vous le 10ème anniversaire de l'Institut des Finances né d'une coopération fructueuse et parfaitement réussie entre la France et le Liban, et dont le succès en a fait un pôle d'excellence à vocation régionale en matière d'administration publique.
Fleuron de la coopération franco-libanaise, l'Institut porte depuis le 14 février dernier le nom de Bassel Fleihane, Ministre de l'économie et du commerce, décédé des suites de ses blessures lors de l'assassinat de Rafik Hariri et de ses compagnons. Je souhaite ici lui rendre hommage. Bassel Fleihane était un jeune ministre, un ministre de ma génération. A quelques semaines de la conférence de Paris en janvier prochain, souvenons-nous qu'il fit preuve d'un engagement sans relâche auprès du Président Hariri pour assurer la réussite des conférences de Paris I puis Paris II. Rappelons-nous aussi qu'il fut un artisan inlassable de l'entrée de son pays au sein de l'OMC et un farouche partisan d'une coopération active avec l'Union européenne.
Le nom de Bassel Fleihane retentit douloureusement associé à celui du Président Rafic Hariri. En perdant ces deux grandes personnalités, le Liban et tous ses partenaires et d'abord la France, ont perdu deux hommes d'une dimension exceptionnelle. Il m'est impossible de parler de l'un sans l'autre, tant leur complicité était forte, leur partenariat permanent et tant la confiance de Rafic Hariri pour Bassel Fleihane était sans limite.
Ces hommes sont tombés en héros dans la force et la grandeur de leur vision et de leur dévouement au service de leur pays et, pour reprendre le mot du Président de la République française que je cite : « ces hommes étaient des bâtisseurs inspirés, des visionnaires du Liban de demain, des militants inlassables de la réconciliation des Libanais et de la construction d'un Etat souverain, indépendant, libre et démocratique ».
Leur ambition était de rendre à leur pays, au Liban, toute sa place dans la région et dans le monde.
Bassel Fleihane a toujours entretenu avec la France une relation de confiance et fait preuve d'un engagement constant dans notre coopération bilatérale, en particulier lors du lancement de cet Institut des Finances qu'il voyait à raison comme un instrument sans égal pour la formation et la diffusion du savoir économique de tous les fonctionnaires relevant de la sphère économique et financière de l'Etat libanais.
Créé sous l'impulsion du Premier Ministre, Son Excellence Monsieur Fouad Siniora, lorsqu'il détenait le portefeuille des Finances, avec l'appui de Monsieur Jean Arthuis alors Ministre de l'économie et des finances, l'Institut des Finances a permis de constituer au sein du Ministère des Finances libanais un outil de formation moderne et efficace. Permettez-moi, monsieur le Premier Ministre, de saisir cette occasion pour vous dire au nom de la France toute notre admiration pour le travail exceptionnel que dans des conditions difficiles vous effectuez pour le Liban.
Pour atteindre l'objectif qu'il s'était assigné, l'Etat libanais -les personnes qui gèrent l'Institut le savent- a toujours pu compter sur le partenariat indéfectible de l'ADETEF. Ce groupement d'intérêt public pour le Développement des Echanges en Technologie Economique et Financière qui fédère les compétences disponibles au sein du Ministère français des finances a, dès l'origine, apporté son appui pour la mise en oeuvre du projet. L'ADETEF, dont je salue ici la délégation conduite en l'absence de son Président Daniel Morel par Monsieur Jean-Louis Bodin, accompagne toujours activement l'Institut en apportant son assistance technique et en participant au budget de fonctionnement de l'Institut.
Notre action auprès de l'Institut s'inscrit dans la poursuite du plan de développement des formations des cadres. Combien de cadres du Ministère des Finances ont été et sont encore accueillis, outre à l'ENA, dans les écoles de mon ministère, telles que l'Ecole Nationale des Impôts, l'Ecole des Douanes, l'Ecole du Trésor, ou dans les Administrations, où ils sont familiarisés aux domaines du recouvrement de l'impôt, du contrôle fiscal, de la TVA, ou encore, de la gestion des bureaux de perception et recettes ! Nous sommes particulièrement fiers d'avoir développé cet outil placé au service de la bonne gouvernance économique et financière du Liban.
Au service du Liban mais pas seulement. Car l'Institut, qui est aujourd'hui devenu une référence dans son domaine, a également acquis une véritable dimension régionale. Elle s'est confirmée par la conclusion d'accords et de partenariats avec des organisations internationales de la finance et de l'économie, parmi lesquelles l'Institut de la Banque Mondiale, l'Organisation mondiale des Douanes, ou bien encore le METAC, le centre d'assistance technique du FMI au Moyen-Orient qui a choisi, avec l'appui de la France, de s'implanter à Beyrouth. La France, bien entendu, soutient ces initiatives prises par l'Institut.
Si la célébration d'un dixième anniversaire est une invitation à retracer le chemin parcouru, il est aussi l'occasion d'aborder le futur. Je sais à cet égard qu'avec Benoît Chevauchez, Contrôleur général économique et financier dans mon ministère, vous avez élaboré un plan stratégique pour les dix prochaines années. Soyez assurez que l'ADETEF et plus généralement mes services seront à vos côtés pour sa mise en oeuvre.
Mesdames et messieurs, la coopération administrative et financière de nos deux pays est particulièrement nourrie. Elle est à l'image de notre relation : fraternelle.
Nous pouvons citer par exemple l'ambitieux programme de coopération entre le Parlement libanais et le Sénat, désormais étendu en France à l'Assemblée Nationale. C'est un programme qui consolide durablement les liens politiques de proximité entre la France et le Liban, avec l'organisation de nombreuses visites de parlementaires libanais qui sont aussi l'occasion d'une sensibilisation au processus de décentralisation. Il concerne également la formation des secrétaires de commission du Parlement libanais, assurée à Paris par le Sénat et l'ENA.
Je mentionnerai également le déploiement prochain à Beyrouth de l'Ecole Nationale d'Administration du Liban, autre projet essentiel que la France appuiera, dès que les conditions d'une mise en oeuvre réussie seront réunies par les autorités libanaises. L'ENA du Liban, comme son homologue, a vocation à concourir à la rationalisation de l'Administration de l'Etat, car elle porte en elle les fondements d'une gestion de la fonction publique orientée sur le mérite et la bonne gouvernance. La France, avec son Ecole Nationale de la Magistrature et ses hautes Cours de justice, se tient également prête à épauler le Liban pour relancer avec vigueur la coopération dans le domaine de la formation initiale et permanente des magistrats, et consolider ce-faisant l'édification d'un État de Droit.
Mais vous l'avez compris : l'objectif de cette coopération, bien au-delà de la formation des fonctionnaires, des magistrats, des décideurs, est surtout de construire un outil administratif qui permette à l'Etat de jouer son rôle, d'assurer ses missions essentielles, défense, sécurité pour les personnes et les biens, justice, éducation, solidarité nationale, dans la transparence, en offrant des services publics de qualité au meilleur coût. C'est un enjeu majeur pour le Liban d'aujourd'hui.
Je souhaite à cet égard vous dire un mot sur mon expérience de Ministre du Budget et de la Réforme de l'Etat. J'ai fait procéder depuis ma nomination à des audits permanents du fonctionnement des services publics. Une centaine de ces audits a été réalisé l'an dernier dans tous les ministères et ont été rendus publics sur un site Internet entièrement dédié à la performance de l'Etat. Ils ont constitué un levier majeur pour les ministres afin de moderniser leur administration car ils permettent de proposer aux Français des services publics plus efficaces pour une moindre dépense. Ils sont aussi un instrument permanent de modernisation puisqu'ils s'appuient totalement sur le benchmarking des meilleures pratiques étrangères.
Vous le voyez, l'enjeu de cette coopération administrative et financière c'est la constitution d'un Etat libanais moderne, souverain, indépendant libre et démocratique. Celui là même que voulaient construire Rafik Hariri et Bassel Fleihane. Mesdames et Messieurs,
Lors de la Conférence de Paris en janvier prochain, d'autres formes de soutien au Liban seront esquissées et proposées, en vue de contribuer à la reconstruction du pays.
Je souhaite rappeler les propos du Président de la République française : la France est déterminée à appuyer les efforts du gouvernement libanais et va accompagner la préparation de la Conférence pour la reconstruction et le développement du Liban. Et je peux vous assurer que d'ores et déjà, le gouvernement français a commencé à mobiliser ses partenaires dans cette perspective, non seulement ceux du G8, mais aussi l'Union européenne et ses Etats membres ainsi que les Institutions financières internationales. Car obtenir le concours de tous est essentiel.
Mais le Liban a lui-aussi un rôle central, un rôle primordial à jouer pour assurer le succès de la Conférence. Et ce succès que nous espérons tous devra aussi refléter la mobilisation et la détermination sans faille de la part des pays de la région, du Golfe en particulier. Sachez que la France appuiera pleinement les efforts déployés par votre pays.
Dans notre esprit cette conférence pourrait comporter à la fois :
- Un volet politique : réaffirmer solennellement l'engagement de la communauté internationale en faveur de la reconstruction et de la stabilisation du Liban et son association active aux efforts déployés en ce sens par votre gouvernement.
- Un volet consacré au suivi des engagements pris à la conférence de Stockholm.
- Et, naturellement, un volet économique et financier.
Il va sans dire que la Communauté internationale sera d'autant plus encline à accompagner la reconstruction du Liban que des garanties pourront lui être apportées en termes de transparence dans l'usage des fonds octroyés. L'efficacité de l'aide et son impact sur la situation des populations sont aujourd'hui au coeur des préoccupations des bailleurs de fonds et au nom des contribuables à qui nous devons rendre des comptes, c'est le Ministre du budget qui vous le dit.
Le consensus, l'ambition du programme pluriannuel de réformes que présenteront les autorités libanaises seront donc décisifs pour le succès de la Conférence.
Mesdames et Messieurs, c'est la fierté de la France que de s'engager à vos côtés. Notre effort est celui d'un pays ami qui croît dans un Liban souverain et indépendant, vivant dans la paix qui lui a trop souvent manqué. Un Liban qui aura aussi retrouvé son autorité sur l'ensemble de son territoire et le monopole de l'usage de la force dans tous le pays. Un Liban modèle en somme, pleinement intégré dans sa région, ouvert sur l'Europe et exemplaire pour le monde.
Source http://www.ambafrance-lb.org, le 27 novembre 2006