Déclaration de Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie, sur l'aide française au développement des Comores, à Moroni le 26 novembre 2006.

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Circonstance : Déplacement aux Comores les 26 et 27 novembre-signature du document-cadre de partenariat entre la France et l'Union des Comores, à Moroni le 26 novembre 2006

Texte intégral

Monsieur le Ministre des Relations extérieures,
Messieurs les Vice-Présidents,
Monsieur le Président de la Cour constitutionnelle,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames, Messieurs,
C'est pour moi un très grand plaisir d'avoir signé avec vous, Monsieur le Ministre des Relations extérieures, le Document-cadre de partenariat entre l'Union des Comores et la France, qui engage nos deux Etats pour les cinq prochaines années.
Cet engagement de la France d'un montant total de 88 millions d'euros, soit plus de 44 milliards de francs comoriens, sous forme de dons, vise à donner aux Comores les moyens financiers pour mettre en oeuvre des projets essentiels au développement de l'Union des Comores, au bien-être de sa population, des projets qui permettent un développement équilibré entre les îles qui composent votre Union.
Cet engagement confirme et amplifie celui qu'a pris la France envers les Comores lors de la Conférence des bailleurs à Maurice de décembre 2005.
Je veux souligner ici le fait que cet engagement accru concrétisé par la signature de ce document a été rendu possible grâce aux efforts réalisés pour mettre en place les nouvelles institutions de l'Union des Comores et pour renforcer l'Etat de droit et la démocratie.
La tenue, dans des conditions incontestables et incontestées, de l'élection présidentielle de mai 2006 est la preuve de cet engagement de tous les Comoriens pour renforcer la stabilité nécessaire au développement.
L'élection du président Sambi constitue la meilleure illustration de la normalisation de la situation des Comores. Elle permet leur participation active à la mondialisation en invitant tous vos partenaires extérieurs à accompagner les efforts engagés par les Comoriens eux-mêmes. Elle constitue de même pour la France une invitation à renforcer sa coopération avec votre pays.
Les engagements de la France contenus dans ce Document-cadre de partenariat se concentrent sur trois secteurs choisis d'un commun accord : la santé publique, l'agriculture et l'autosuffisance alimentaire, le secteur productif.
Le premier secteur de concentration de notre aide, la santé publique, permettra de renforcer vos structures dans les 3 îles. Notre effort dans ce domaine est complémentaire de celui que nous ferons dans le secteur de l'eau, pour lequel il est prévu de réaliser des travaux de sécurisation des approvisionnements en eau potable. La dernière éruption du Karthala et la pollution des citernes de la Grande Comore a souligné l'urgence d'une telle intervention.
Le deuxième domaine de concentration concerne l'agriculture. Il s'agira pour nous de vous aider à structurer et professionnaliser l'activité agricole, de façon à atteindre l'autosuffisance alimentaire mais également à permettre aux agriculteurs d'écouler une part croissante de leur production sur le marché, notamment vers Mayotte, en mettant en place le système de certification phytosanitaire nécessaire.
Enfin, le troisième secteur est consacré à un appui à l'initiative privée à travers la Banque comorienne de développement et la micro-finance, afin de développer le secteur productif et de favoriser la création d'emplois, qui constitue, nous le savons, des enjeux de développement essentiels.
Comme l'avait souhaité votre pays, lors de la commission mixte franco-comorienne tenue à Paris les 4 et 5 avril 2005, une part importante de notre effort sera consacrée à Anjouan, qui est actuellement l'île la plus touchée par la pauvreté et le chômage.
L'accroissement de l'effort français en faveur du développement des Comores s'accompagne aussi d'un accroissement des moyens nécessaires à sa gestion. Au sein de l'ambassade de France, notre dispositif de coopération vient d'être renforcé. Les capacités de gestion des administrations comoriennes le seront également avec le renforcement de notre assistance technique.
En effet, dès le début de l'année 2007, vous disposerez de 16 assistants techniques dont 4 conseillers auprès des ministères de la Santé, de l'Agriculture, de l'Education et des Finances, et de trois assistants techniques dans le secteur de la santé publique, en attendant la prise en charge de ce secteur par l'Agence française de développement, opérateur-pivot de la Coopération française.
Je souhaite également mentionner, car je sais que c'est un point important pour le président Sambi, la prochaine mise en place, au sein de ses services d'un assistant technique dans le secteur judiciaire.
Il sera à la disposition des Comores pour accompagner l'ambition légitime de réformer et renforcer la justice dans votre pays. Il préparera également un futur projet d'appui institutionnel destiné à la restructuration des administrations et à la formation des cadres.
Je souhaite également rappeler que nos deux pays ont signé cette année une convention de codéveloppement, qui a pour objet d'appuyer les projets de la nombreuse diaspora comorienne en faveur du développement local, mais également de favoriser la mobilisation de l'expertise et des compétences des cadres comoriens installés en France. Ce projet doté de 2 millions d'euros démarrera concrètement dès le mois prochain.
Comme vous le savez la diaspora comorienne installée en France, représente plus de 200.000 personnes, soit près du quart de la population totale de l'Union des Comores. Cette diaspora constitue un lien très fort entre nos deux pays.
Mayotte en constitue un autre et c'est là toute la singularité de notre relation dans laquelle ce qui nous divise est également ce qui nous unit.
Je sais parfaitement que ce sujet est sensible mais je souhaite ici l'évoquer avec franchise.
Je connais bien la position des autorités comoriennes. Je sais que vous connaissez la nôtre. Elle repose simplement sur le respect de la population de Mayotte et de ses choix.
Nous ne réglerons pas ce différend aujourd'hui, mais quelles que soient nos positions respectives, la proximité entre Mayotte et les autres îles de l'archipel est une réalité qui s'impose à tous. Il nous appartient en conséquence de gérer au mieux ce voisinage et de développer les échanges et les liens entre les îles.
Il ne me semble pas normal à cet égard d'avoir dû attendre près de 30 ans et la commission mixte de 2005 pour qu'une délégation officielle comorienne et des élus de Mayotte siègent autour de la même table.
Beaucoup de chemin a été parcouru depuis cette date et de nombreux engagements pris à cette occasion ont été mis en oeuvre. Je pense notamment à la mise en place d'une liaison maritime régulière entre Mayotte et Anjouan. Je pense également à l'ouverture d'un vice-consulat à Anjouan que je visiterai demain et qui va grandement faciliter la délivrance de visas.
Ces actions visent à faciliter la circulation régulière des personnes et à mettre un terme au scandale des trafics, des passeurs clandestins et des drames qui les accompagnent. Il ne doit s'agir là que d'un début et beaucoup reste à faire dans ce domaine.
Je pense également à la participation, pour la première fois en 2006, d'équipes sportives de Mayotte à des compétitions régionales, qu'il s'agisse des Jeux des jeunes de l'Océan indien à Maurice en août 2006 ou de la "Coupe de la Concorde" réunissant les clubs champion de football des quatre îles. Je pense enfin à la coopération qui se développe dans le domaine de la santé et de la formation professionnelle.
Monsieur le Ministre,
Lors de son discours d'investiture, le président Sambi a proposé aux Comoriens de déployer tous les efforts nécessaires, avec l'appui de la communauté internationale, pour atteindre un niveau de développement comparable à celui de Mayotte.
Il est dans notre intérêt commun, au-delà de nos différends, de réaliser cet objectif. Mayotte ne saurait accueillir toute la population de l'archipel et le développement les Comores ne saurait se concevoir sans le concours de ses forces vives.
Ma présence aujourd'hui à Moroni est beaucoup plus que symbolique. La dernière visite d'un ministre de la République française aux Comores dans un cadre bilatéral remonte en effet à douze ans. Mais la France n'ignore pas les liens particuliers qui unissent nos deux pays depuis bientôt 200 ans. Ces liens historiques, culturels, linguistiques et humains nourrissent nos deux patries.
La présence importante et paisible d'une communauté comorienne en France, largement bi-nationale, peut être un atout pour mon pays et je souhaite que cette communauté prenne toute sa place dans la représentativité de l'islam français.
En effet, vos traditions et votre pratique d'un islam tolérant et ouvert sur les autres cultures doit être un exemple non seulement en France mais aussi pour le monde.
L'exemple du président Sambi prouve, qu'il ne faut pas réduire l'islam aux extrémismes qui pervertissent la représentation que l'on se fait trop souvent de cette religion qui mérite, comme toutes les autres, le respect dans la réciprocité.
Je souhaiterais, en conclusion, vous assurer, que la France vous apportera tout son concours au développement des Comores. Elle le fera par la mise en oeuvre des engagements pris aujourd'hui dans ce Document-cadre de partenariat. Elle le fera également par la mobilisation des autres partenaires extérieurs de votre pays qui doivent prendre la mesure des changements intervenus et de la normalisation de sa situation politique.
Je vous remercie.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 29 novembre 2006