Texte intégral
Mesdames, Messieurs,
Le refus de prise en charge des patients qui bénéficient de la CMU existent comme l'a prouvé le test réalisé au mois de juin par Jean-François Chadelat au nom du fonds de financement de la couverture maladie universelle (FFCMU) : le taux de refus est de 14 % chez les médecins, un taux qui varie de 0,7 % chez les généralistes en secteur 1 (4,8 % en moyenne chez les généralistes) à 49,2 % chez les spécialistes en secteur 2 (41 % chez les spécialistes en moyenne) ; pour les dentistes, le taux de refus est de 39 %.
Ce testing montre bien qu'il y a un problème ; il ne montre pas la réalité du problème, il ne montre pas son ampleur ni ses causes. Bien sur, le refus de prise en charge des patients qui bénéficient de la CMU est intolérable. Mais il faut aller au-delà de l'indignation et apporter une réponse d'ensemble, globale et surtout, durable. Je veux qu'on aille au fond des choses. Rien n'est excusable. Mais je veux comprendre les raisons que certains avancent.
Le sujet est aujourd'hui sur la table et je veux agir sans attendre : j'ai décidé, de suivre immédiatement une des propositions du Rapport Chadelat en réunissant toutes les parties prenantes de ce dossier sans délai, : ordres, syndicats, assurance maladie. La réunion est fixée dès mardi prochain, le 19 décembre.
Car si je veux comprendre pourquoi de telles pratiques existent, je veux aussi chacun aient conscience de ses responsabilités.
Dès la publication de cette étude, j'ai saisi l'ensemble des partenaires concernés (Ordres, syndicats médicaux et de dentistes, CNAMTS) en leur demandant de me faire des propositions.
C'est dans ce même esprit que j'ai confié le 4 octobre dernier cette mission à M. Jean-François Chadelat, directeur du Fonds CMU. Ce rapport vient de m'être remis, et il contient de nombreuses propositions intéressantes que je vais rendre publiques. Certaines de ces propositions s'imposent dores et déjà. D'autres nous imposent, d'en discuter avec nos partenaires. Sur un tel sujet, il ne s'agit pas de faire des effets d'annonce mais bien de faire durablement bouger les choses, et ce en associant, rapidement, tous les acteurs : ordres, syndicats, caisses d'assurance maladie, associations de patients et la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'Egalité.
I/ Nous manquons encore de connaissances sur ce phénomène. Or, on ne peut prétendre y répondre durablement sans en avoir une connaissance approfondie :
C'est pourquoi je mandate la Direction des études économiques et statistiques du Ministère, en lien avec l'Observatoire de lutte contre les pauvretés pour étudier, au niveau national, l'ampleur du phénomène et les motivations qu'invoquent les professionnels pour expliquer ces refus de patients en CMU.
Je vais aussi veiller à ce que les conclusions du groupe de travail spécifique de l'Ordre des dentistes me soient remises avant le 1er février.
II/ Dores et déjà certains propositions du rapport Chadelat s'imposent :
Le rapport note que dès lors que le patient est adressé par son médecin traitant, il ne rencontre a priori plus d'ostracisme de la part des professionnels de santé.
. Or le taux de bénéficiaires de la CMU ayant choisi un médecin traitant est de 63 %, soit 15 points de moins que la moyenne nationale.
Je demande donc à la CNAM de mettre en oeuvre une politique active d'incitation au choix d'un médecin traitant lors de chaque ouverture de droits CMU.
. Dans le même esprit, tous les professionnels de santé reconnaissent qu'il n'y a pas de problème quand le patient a une carte Vitale.
Nous devons donc améliorer la diffusion de la carte Vitale et poursuivre notre mouvement de simplification administrative. Je travaille avec la CNAM sur ce dossier qui concernera les assurés sociaux comme les bénéficiaires de la CMU. Les caisses seront invitées, pour la délivrance de la nouvelle carte Vitale qui montera en charge à compter de 2007, à accueillir tout assuré dans leurs locaux pour vérifier sur place les justificatifs, ce qui permettra d'accélérer la délivrance de la carte.
Tout ce qui doit être fait pour simplifier les procédures de remboursement des soins des bénéficiaires de la CMU, en tiers payant, aux professionnels, le sera d'une part parce qu'il n'y a pas de raison que les professionnels soient pénalisés parce qu'ils soignent cette population, et, d'autre part, parce que je ne veux pas que la complexité des procédures soit un argument pour les professionnels pour procéder à des discriminations. Les médecins ne doivent plus être pénalisés par le fait de prendre en charge ces patients.
. La mauvaise information des professionnels de santé comme des bénéficiaires CMU peut aussi être la cause de ces refus.
J'ai donc demandé à la CNAM de diffuser dans les plus brefs délais des fiches d'information aux patients et aux professionnels de santé et ce, dès le premier trimestre pour l'ensemble des caisses et dans une caisse pilote du Cher dès le mois de janvier.
III/ Enfin, nous devons élargir la possibilité de porter plainte contre ces pratiques inadmissibles.
. En effet, le Conseil national de l'Ordre des médecins, qui joue un rôle central dans le respect de la déontologie par les médecins, m'a indiqué, dans un courrier en date du 7 décembre, que le nombre de plaintes ou de réclamations au sujet du refus de soins est limité.
Cela tient notamment à l'étroitesse des voies de saisine. J'ai donc décidé d'ouvrir aux associations la possibilité de saisir de l'Ordre au nom des bénéficiaires de la CMU.
Je réunirai donc mardi prochain une Conférence rassemblant les différents acteurs parties prenantes sur ce sujet : ordres, syndicats, assurance maladie, HALDE. Elle nous permettra entre autres d'examiner s'il y a lieu d'ouvrir d'autres possibilités d'élargir le mode de saisine et de sanctions, en lien avec l'ordre, les syndicats et l'assurance maladie.
Face à un tel sujet, il ne suffit pas de répéter que cela est inacceptable, inacceptable déontologiquement, éthiquement, légalement, moralement, ce que nous savons tous. Chacun doit être face à ses responsabilités et agir en conséquence. C'est l'accès aux soins de près de 5 millions de nos concitoyens qui est en jeu : je veux apporter une réponse durable et efficace à ce problème.Source http://www.sante.gouv.fr, le 14 décembre 2006