Interview de Mme Christine Lagarde, ministre déléguée au commerce extérieur, sur "BFM" le 21 décembre 2006, sur la mondialisation expliquée aux enfants de CM2 grâce au livre "Le Monde de Zoé".

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Texte intégral

Fabrice LUNDY - Dans Le Grand Journal sur BFM, on va démarrer avec ce livre que j'ai sous les yeux. Il s'appelle Le Monde de Zoé. C'est le printemps, Zoé a 10 ans aujourd'hui, Zoé aime bien regarder la télévision, écouter des chansons à la radio, se raconter des histoires. Or, Zoé a un don : elle sait parler aux objets qui lui racontent leur histoire. Le Monde de Zoé, c'est vous, Christine LAGARDE, qui en avez eu l'idée. Bonsoir.
Christine LAGARDE - Bonsoir.
Fabrice LUNDY - Christine LAGARDE, la ministre déléguée au commerce extérieur. C'est un livre distribué à 300 000 exemplaires aux enfants de CM2, qui va être distribué dans pas mal d'écoles pour expliquer les atouts de la mondialisation et montrer que la mondialisation, il y a des côtés positifs.
Christine LAGARDE - Absolument. Et c'est surtout destiné à montrer aux enfants que, d'une part, ils sont eux-mêmes les acteurs de la mondialisation lorsqu'ils consomment, lorsqu'ils participent à des échanges culturels, lorsqu'ils téléchargent de la musique, etc, et pour qu'ils comprennent bien que la mondialisation c'est aussi cela et que ça a donc des côtés extrêmement positifs.
Fabrice LUNDY - Le fait de vendre la mondialisation aux jeunes Français, est-ce que c'est aisé dans le climat actuel, Christine LAGARDE ?
Christine LAGARDE - Ecoutez, le climat actuel ce n'est pas ça qui est le plus important.
Fabrice LUNDY - Non mais quand je parle du climat actuel, c'est le fait que 7 parents sur 10 considèrent que la mondialisation a surtout des côtés négatifs.
Christine LAGARDE - Il y a des côtés négatifs, c'est évident, mais vous savez, ce qui m'a beaucoup surprise dans les réunions que j'ai pu avoir les élèves - parce que je vais souvent dans les classes pour parler de ce petit livre qu'on diffuse auprès des CM2, et d'un autre qu'on diffuse auprès des élèves de 4ème, c'est que les élèves eux-mêmes ont une vision beaucoup plus juste de la mondialisation. C'est-à-dire qu'ils en comprennent les mauvais côtés, bien sûr, mais ils en comprennent aussi les bons côtés et ils s'aperçoivent particulièrement que la mondialisation peut être propice au développement des pays les plus pauvres, qu'elle a pu aider à sortir de la misère toute une série d'habitants des pays les plus démunis et que ça peut être utile aussi pour favoriser le développement des médicaments. Il y a donc tout un tas de choses qui présentent des aspects positifs pour la santé publique, pour l'humanité dont les enfants sont très conscients, beaucoup plus probablement que la plupart d'entre nous, les adultes.
Fabrice LUNDY - Oui, quand vous faites la tournée des classes - enfin, vous en avez fait quelques-unes, la tournée c'est un bien grand mot, parce que vous êtes quand même pas mal occupée, Christine LAGARDE - sur quel point insistez-vous justement pour mettre en avant les bienfaits de la mondialisation ? Quels sont les deux exemples que vous citez de façon récurrente ?
Christine LAGARDE - Un exemple pour les petits, parce qu'il faut parler avec les mots et les concepts qui les touchent directement, c'est le fait que par exemple la bonne culture et récolte du coton, si elle est organisée de manière convenable, peut permettre à des pays comme le Bénin, le Niger, le Burkina Faso, de sortir un petit peu d'une situation de pauvreté grave. Qu'ensuite, ces produits-là sont acheminés par exemple vers le Maroc, qu'ils peuvent tisser et préparer des tissus qui servent ensuite à fabriquer des vêtements, qui arrivent un jour sur les rayons du supermarché à des prix qui sont tout à fait intéressants pour les consommateurs. Alors, ça me permet surtout de leur expliquer de cette façon-là qu'il est important de réguler la mondialisation et qu'on ne peut pas la laisser faire n'importe comment et qu'en particulier - je prends l'exemple du coton qui est bien connu - il faut limiter les subventions que donnent par exemple les Etats Unis aux producteurs de coton pour permettre aux producteurs de coton du Bénin ou du Burkina Faso de vendre leur production.
Fabrice LUNDY - Oui. Alors ce petit livre, ce Monde de Zoé, vous allez le distribuer aussi à tous ceux qui vont participer à votre groupe de réflexion sur la mondialisation ? Je pense à Christian DE BOISSIEU je pense à José Luis DURAN, le patron de CARREFOUR, Jean-Martin FOLZ pour PSA, Nicole NOTAT pour VIGEO. Ça y est, ils ont déjà Le Monde de Zoé sur leur table de nuit ?
Christine LAGARDE - Alors, ça fera partie de leur lecture j'espère pour Noël, bien sûr, puisque nous allons leur - enfin, on va travailler ensemble avec ce groupe de réflexion sur la mondialisation sur deux axes principaux. D'une part, comment mieux communiquer sur la mondialisation pour ne pas le brandir comme un étendard systématique des offres dont bien souvent nous sommes nous-mêmes non pas fautifs, mais en tous cas les auteurs. Et puis deuxième axe, pour mieux anticiper la mondialisation parce que c'est vrai que c'est un facteur de modification profonde de nos économies avec des transitions vers des économies parfois plus intelligentes, plus versées vers les services et des pans entiers de vieilles industries qui deviendront beaucoup plus significatives dans des pays comme la Chine par exemple. Pour cela, il faut s'y préparer plutôt que de le subir et il faut donc en être des acteurs conscients et, par conséquent, anticipant.
Fabrice LUNDY - Oui. Christine LAGARDE, je précise ce soir qu'on vous a appelé un petit peu tard. Je dis "tard" parce que vous êtes à Shanghai avec le décalage horaire. On est en pleine nuit en ce moment, Christine LAGARDE. Vous y êtes pour deux jours. Vous avez inauguré aujourd'hui, justement, les Français qui ont aussi des raisons de s'installer en Chine, de gagner des parts de marché en Chine. Vous avez inauguré aujourd'hui un centre de recherche et de développement à l'initiative d'une PME, la société AVANTEC, qui fabrique de la brousse à abraser - je dis bien mousse à abraser, Christine LAGARDE, pas mousse à raser.
Christine LAGARDE - Tout à fait. C'est une société un petit peu exemplaire parce qu'ils sont venus avec moi il y a un an et demi lors du forum des PME organisé sous l'égide de mon ministère par UBIFRANCE. Ils ont exploré un petit peu le marché et décidé qu'il était opportun pour eux de s'implanter ici à Shanghai, tout simplement parce que leurs clients sont ici. Ils travaillent beaucoup pour l'industrie automobile et ils travaillent pour l'industrie aéronautique également.
Fabrice LUNDY - Oui, notamment leur mousse à abraser sert à nettoyer les pièces métalliques qu'ils fournissent et les Airbus.
Christine LAGARDE - Exactement, exactement. Et ils sont aussi actuellement en recherche et développement avec l'université de Shanghai et en partenariat avec une université suédoise à Göteborg pour travailler sur les soudures sans plomb. Et dans ce partenariat-là, ils viennent d'ouvrir leur centre de recherche et développement à Shanghai qui leur permettra de générer également de l'activité en France dans leur centre de fabrication en France. C'est vraiment une formule intelligente qui leur permet de conquérir des parts de marché disponibles ici et en même temps, de générer de l'activité dans leur centre français.
Fabrice LUNDY - Voilà. Je vous souhaite cette fois une bonne nuit. Allez vous coucher, Christine LAGARDE, la ministre déléguée au commerce extérieur, ce soir l'invitée du Grand Journal sur BFM. Merci à vous.
Source http://www.exporter.gouv.fr, le 28 décembre 2006