Déclaration de M. Jean-François Lamour, ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative, sur la pratique du football en France, ses dérives et le rôle de la Fédération française de football, à Paris le 11 janvier 2007.

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Circonstance : Inauguration du nouveau siège de la Fédération française de football (FFF) à Paris le 11 janvier 2007

Texte intégral

Messieurs les Présidents,
Mesdames et Messieurs,
C'est avec beaucoup de plaisir que je salue la présence des Présidents Blatter et Johansson et que je m'adresse, ce soir, non seulement à vous qui êtes réunis dans cette salle, mais également aux millions de pratiquants, de passionnés de football, et aux centaines de milliers de bénévoles sans lesquels le football n'existerait pas.
Vous ne me démentirez pas, cher Président, de considérer que ce nouveau siège est aussi le leur. Un nouvel écrin pour un sport qui est devenu, ces dernières années, un fait social majeur.
Un fait social qui anime notre vie publique quotidienne :
. Plus de 2 millions de licenciés, dont la moitié a moins de 18 ans ;
. 50 000 matchs organisés, sous l'égide de la fédération, animent chaque week-end, sans compter les innombrables parties improvisées dans nos parcs, cours d'école ou terrains improbables.
Un fait social qui captive régulièrement notre vie publique, comme l'été dernier, grâce au formidable parcours de l'Equipe de France. Seul le football, peut permettre à quelques 22 millions de compatriotes et quelques milliards de téléspectateurs, de communier ainsi et de fêter le sport (et c'est un olympien qui vous parle, M. le Président).
Mais aussi un fait social qui anime malheureusement certaines chroniques.
L'année 2006 a ainsi été marquée par un certain nombre de dérives, dans plusieurs pays, qui ne doivent pas avoir leur place dans l'univers sportif : je pense à certaines affaires financières, aux agressions, physiques ou verbales subies par les joueurs et par les arbitres, aux actes violents et racistes, constatés autour de certaines rencontres, notamment en France.
Ces dérives menacent la notion même d'activité sportive, et doivent être jugulées avec la plus grande fermeté, car c'est le respect de la règle et de l'autorité, le respect de l'autre, adversaire ou arbitre, la primauté de l'esprit du jeu sur l'enjeu, qui constituent le fondement de la pratique sportive.
C'est pour cette raison que l'action gouvernementale, en partenariat avec la Fédération, a constamment cherché à préserver la règle citoyenne, en assurant la sécurité dans les stades, en instaurant les interdictions administratives de stade et, plus récemment encore, en instituant la possibilité de dissoudre les associations de supporters violents.
C'est aussi, dans cet esprit, que j'ai fait voter, en 2006, une loi qui renforce la protection des arbitres, en reconnaissant leur activité comme une mission de service public.
L'action publique ne peut être efficace que si elle est accompagnée. La sauvegarde des valeurs du sport relève d'une chaîne de responsabilités dans laquelle chaque maillon est essentiel.
Aussi, je ne peux que saluer les multiples initiatives qui sont prises par les acteurs du football, bien sûr au niveau fédéral, avec la signature de la convention avec la LICRA et mon ministère, pour lutter contre le racisme et les discriminations, mais aussi par la Ligue de football professionnel ou, tout simplement, par les associations.
Je ne peux malheureusement toutes les citer, même si elles le mériteraient, telles que ce « Permis de conduire une équipe », instauré par la Ligue de Méditerranée, un permis à points lié au comportement du banc de touche, ou le remarquable travail mené par Béatrice Clavel à Venissieux, cette jeune femme qui s'appuie sur le football pour redonner des repères sociaux aux jeunes dans le quartier des Minguettes.
Ainsi, le football et tout particulièrement le football professionnel, du fait de son impact médiatique et économique, ne doit pas être exemplaire, il doit être l'exemple, comme il l'a été pour ses réussites dans les compétitions.
Le football français a obtenu ces quinze dernières années des résultats sans équivalent dans son histoire : Champion du monde en 1998, finaliste, Cher Raymond DOMENECH, l'an passé, Champion d'Europe en 2000, deux Coupes d'Europe remportées par nos clubs, le football français est, en ce début du siècle, incontestablement un des tous meilleurs au monde.
Ces succès, nous les devons, bien entendu, à l'exceptionnelle qualité du système de formation français et à la compétence de nos éducateurs.
Je tiens à saluer, à l'heure où il quitte la DTN, Aimé Jacquet, entraîneur charismatique, associé à la France qui gagne, mais aussi éducateur exigeant, attaché à la progression de l'individu et à l'esprit collectif tout autant qu'au résultat. Il n'a eu de cesse de nous rappeler que le football est avant tout un jeu, et doit faire l'objet d'une passion maîtrisée.
Aussi, c'est l'ensemble des cadres techniques mis à la disposition de la fédération par le ministère, et dorénavant conduits par Jean-Pierre Morlans, que je remercie, pour la qualité de leur travail.
L'excellence de l'encadrement français doit être soutenue et encouragée, notamment par le développement de la formation des cadres fédéraux, en complément des formations spécifiques assurées par le ministère pour les cadres techniques, ou encore en continuant à faire de Clairefontaine un lieu de rayonnement national et international en matière de formation.
Nous devons, aussi, l'excellence dans la compétition, aux efforts de structuration accomplis par les clubs professionnels, efforts appuyés par les pouvoirs publics depuis 2002. Les dispositions législatives, relatives notamment au régime juridique de l'exploitation des droits audiovisuels et aux modifications fiscales et sociales, ont permis aux clubs professionnels d'être plus en phase avec la réalité économique de leur environnement.
Le football professionnel français est, cependant, à la croisée des chemins.
Nous sortons d'un modèle où les clubs dépendaient beaucoup des aides publiques. Aujourd'hui, ils doivent diversifier leurs recettes et consolider leurs actifs. Mais, parce que le spectacle sportif n'est pas une simple activité économique, j'ai souhaité que l'ouverture à l'appel public à l'épargne aux sociétés sportives professionnelles, imposée par la Commission européenne, soit encadrée et liée à un vrai projet d'acquisition d'actifs sur les équipements sportifs, permettant de lisser les aléas des résultats sportifs.
Cette nouvelle stratégie de développement doit être étroitement liée à la préservation des principes d'unité au sein des fédérations et de solidarité avec le sport amateur.
Si le football professionnel obtient de bons résultats, c'est le fruit du remarquable travail de détection et de formation effectué par les éducateurs, au niveau amateur. Si le football amateur enregistre une forte hausse des licenciés à la rentrée 2006, c'est bien évidemment grâce aux exploits des Bleus quelques semaines plus tôt.
Cette solidarité entre professionnels et amateurs, j'ai veillé à la préserver à mon arrivée au ministère alors qu'elle était menacée. Elle trouve tout son sens avec la convention qui lie la Ligue à la Fédération, qui permet notamment de financer des postes de conseiller en foot-animation, offrant ainsi un encadrement de qualité pour les plus jeunes.
Le football est également à un tournant de son évolution au niveau international.
Cette évolution, façonnée par son potentiel économique et commercial, conjuguée aux développements du marché intérieur européen, ne doit pas l'entraîner dans un développement effréné. Il doit, dans son mode de régulation et sa gouvernance, servir d'exemple.
C'est à ce titre que j'ai collaboré à la réunion de travail, que vous aviez organisée M. le Président Blatter, à Zürich en 2005, sur les relations entre gouvernements et autorités fédérales du football. Ce type de réunion doit pouvoir utilement contribuer à ce débat sur notre continent, et je suis rassuré qu'à l'initiative de la FIFA et de l'UEFA, aient notamment pu être abordé des questions aussi concrètes que celles des agents, des modes de financement du football, de la violence et du racisme dans les stades, sujets évoqués notamment à travers le rapport Arnaut.
Ces divers éléments révèlent la nécessité de maintenir et développer un partenariat efficace et sincère entre institutions du football et autorités gouvernementales.
Dans ce cadre, le mouvement sportif international a fait preuve d'originalité et de créativité au cours de ces dernières années. Je pense, en particulier, au partenariat existant entre gouvernements et mouvement sportif au sein de l'Agence Mondiale antidopage. Sans aller jusqu'à la création d'une entité spécifique analogue, un partenariat utile pour l'avenir du football doit être capable de répondre aux défis à venir.
Nous sommes dans le temps des voeux. Je forme celui que ce lieu contribue à amplifier le développement d'une discipline dont l'excellence rayonne et anime l'univers du sport français. Que les temps prochains apportent d'autres belles victoires et moments d'allégresse à toutes celles et tous ceux qui sont engagés dans la compétition.
Je vous remercie.
Source http://www.jeunesse-sports.gouv.fr, le 15 janvier 2007