Déclaration de M. Dominique de Villepin, Premier ministre, sur les mesures en faveur du sport de haut niveau, Paris le 6 février 2007.

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Circonstance : Cclôture du Carrefour de la performance, à Paris le 6 février 2007

Texte intégral

Messieurs les ministres de la Fonction publique et des Sports
du gouvernement de la communauté française de Belgique
Messieurs les ministres,
Cher Jean-François, cher Renaud,
Messieurs les parlementaires,
Monsieur le président du comité national olympique et sportif français, cher Henri,
Mesdames, Messieurs les présidents,
Mesdames, Messieurs les directeurs techniques et entraîneurs nationaux,
Mesdames, Messieurs et chers amis,
Je me réjouis d'être aujourd'hui parmi vous, entouré de tant de grands sportifs, les médaillés olympiques, mais aussi tous les futurs champions qui s'entraînent ici, à l'Institut national du sport et de l'éducation physique (Insep).
Avant toute chose, permettez-moi de vous dire toute l'importance que représente pour moi le sport dans notre vie nationale.
Le sport, ce n'est pas seulement un facteur d'épanouissement personnel, un facteur de dépassement et d'accomplissement de soi.
Le sport, c'est aussi un puissant facteur d'intégration sociale. Pratiquer un sport, c'est un véritable apprentissage de la vie en commun, un apprentissage qui passe par le respect de règles, d'attention à l'autre, une aventure qui donne sa chance à chacun, selon ses efforts et selon son talent.
Le sport, c'est aussi un puissant exemple dans notre société. Vous imaginez facilement, pour les jeunes qui nous regardent, et les moins jeunes, voir de grands champions, voir ceux qui à force de courage, à force de ténacité, parfois partant de situations très difficiles, qui arrivent à dominer, dominer des situations difficiles, se dominer soi-même, dominer son corps, pour arriver à battre les plus grands records. Oui, c'est un exemple. C'est un exemple pour le sport ; c'est aussi un exemple pour la vie tout court. Et puis, ne l'oublions pas, le sport, c'est aussi un atout majeur pour le rayonnement de notre pays. A chaque fois que l'un de nos champions remporte une victoire dans une compétition internationale, c'est une formidable image que nous offrons au monde, c'est notre nation toute entière qui est récompensée et rassemblée derrière nos sportifs.
Aujourd'hui, beaucoup de ces champions sont présents parmi nous. Permettez-moi de saluer Malia Metela, Sébastien Flute, Richard Dacoury, mais aussi Emmanuelle Assmann, Stéphane Diagana et David Douillet qui ont pris part à vos travaux.
Je tiens à saluer également les nombreux chefs d'entreprises qui ont accepté de participer à ce premier Carrefour des performances. A travers leur engagement, ils apportent une contribution décisive à l'action du gouvernement en faveur des sportifs de haut niveau. Nous débutons quelque chose avec ce carrefour des performances, mais je suis vraiment convaincu que ce n'est que le point de départ de quelque chose qui va prendre beaucoup d'ampleur dans les prochaines années. En effet, quand on a la chance d'être face à des jeunes qui ont su montrer à travers des parcours personnels exemplaires, qui ont su montrer l'importance des valeurs qui étaient les leurs, l'importance de leur détermination, l'importance de leur courage, leur capacité à faire des efforts, je n'ai aucun doute dans le fait que nos entreprises qui commencent à voir tout ce qu'elles peuvent tirer de ces sportifs, tout ce qu'elles peuvent imaginer faire avec les sportifs, tout ce que les sportifs peuvent leur apporter dans la vie professionnelle comme élan, comme élément d'enthousiasme, comme élément de mobilisation à l'intérieur d'une entreprise, je n'ai aucun doute que, peu à peu, nos chefs d'entreprises, de plus en plus nombreux, auront à coeur de participer à cette grande aventure qui est celle de la reconnaissance des talents dans notre société, la reconnaissance des personnalités, la reconnaissance de ceux qui sont capables de faire reculer les frontières du possible. Or, qui mieux que les sportifs sont aujourd'hui capables de nous faire vivre tant d'aventures dans le monde moderne.
Merci enfin à Jean-François Lamour. Cher Jean-François, je voudrais profiter de cette occasion pour rendre hommage au travail remarquable que tu as accompli depuis 2002. Jamais au cours d'une législature, et les parlementaires ici présents peuvent en témoigner, autant de chantiers n'auront été conduits avec autant de succès. Qu'il s'agisse d'encourager l'accès de tous à la pratique sportive, de renforcer la lutte contre le dopage ou de mieux accompagner les sportifs de haut niveau, le bilan de ton "quinquennat" en faveur du sport français est un bilan impressionnant. Et aujourd'hui, dans ce domaine essentiel qui est celui de l'insertion professionnelle des sportifs, tu fais office de pionnier. Nous avions tous les deux à coeur d'ouvrir une voie. Il n'était pas normal de voir que, à la force du poignet, certains sportifs arrivaient à se tailler un chemin remarquable dans la vie, et que d'autres, non moins méritants, mais bénéficiant de moins de chances, de moins d'opportunités, de moins de connaissances, n'arrivaient pas ou se heurtaient à de graves difficultés. Oui, j'estime que ceux qui ont réussi par le sport, eh bien, nous leur devons quelque chose, pour le bonheur qu'ils nous font partager, pour la leçon qu'ils nous ont donnée, pour l'image qu'ils apportent à notre jeunesse, pour le rayonnement qu'ils donnent à notre pays. Ce n'est donc qu'un juste retour qu'une société comme la nôtre se mobilise à travers l'excellence, à travers le sport.
1. Si je suis parmi vous aujourd'hui, c'est pour compléter l'action qui a été engagée et franchir une nouvelle étape dans notre soutien aux sportifs de haut niveau.
Aujourd'hui, les sportifs français sont parmi les meilleurs au monde. Leur talent, leur enthousiasme, leur sens de l'effort et du dépassement de soi leur permettent de faire la course en tête dans les plus grandes compétitions internationales. Mais dans le même temps, nous le savons, les performances sportives de nos plus grands champions ne sont pas suffisamment reconnues. A l'exception de quelques-uns qui parviennent à tirer leur épingle du jeu grâce à leur notoriété, la plupart des sportifs rencontrent des difficultés, trop de difficultés à la fin de leur carrière sportive. Ils se retrouvent trop souvent seuls au moment d'engager leur reconversion.
Nous devons donc les aider à mieux préparer ce moment essentiel de leur vie professionnelle. C'était un engagement pris par le Gouvernement en 2002 lors des états généraux du sport. Je sais qu'il répond à une attente très forte de l'ensemble du monde sportif. Grâce aux travaux conduits par les fédérations sportives et le comité national olympique, grâce aussi aux travaux que vous avez menés aujourd'hui, avec Jean-François Lamour, nous avons élaboré un plan de soutien aux sportifs de haut niveau et qui ne part pas seulement du moment où un sportif arrête le sport pour rentrer dans la vie professionnelle, mais qui veut prendre les choses beaucoup plus tôt, en amont, dès l'apprentissage même d'un sport de haut niveau.
2. Notre objectif, c'est de permettre à ces sportifs de se consacrer pleinement à la compétition et d'envisager plus sereinement leur avenir professionnel. Nous avons décidé de mettre en oeuvre cinq mesures fortes.
La première, c'est d'adapter les parcours scolaires et universitaires à la pratique de sports de haut niveau.
Depuis l'été dernier, il est désormais possible de prendre une ou deux années supplémentaires pour obtenir un diplôme. Il est également possible d'aménager les dates d'examen pour qu'elles n'interfèrent pas avec les grandes compétitions sportives.
Je souhaite que ces mesures soient systématiquement adoptées. Aucun sportif de haut niveau ne doit être contraint d'abandonner ses études pour pouvoir se consacrer pleinement à la pratique de sa discipline.
La deuxième mesure, c'est d'aider les entreprises à accueillir des sportifs de haut niveau.
Pour cela, un dispositif existe déjà. La convention d'insertion professionnelle permet à l'entreprise de bénéficier d'une subvention de l'Etat pour compenser l'absence du sportif pendant les périodes d'entraînement ou de compétition. Je souhaite que dès 2007, 150 conventions supplémentaires soient signées avec des entreprises. Cela représente un effort budgétaire de un million d'euros.
Dans cette démarche, les PME ont tout leur rôle à jouer. Je sais que Renaud Dutreil se mobilise en permanence pour les encourager à recruter des sportifs de haut niveau. Il m'a d'ailleurs présenté des propositions intéressantes que je souhaite mettre en oeuvre le plus rapidement possible.
D'abord, la création du label "partenariat citoyen pour la performance". Ce label sera attribué à toutes les entreprises de moins de 250 salariés qui embauchent au moins un sportif de haut niveau. Il leur donnera davantage de visibilité et sera une incitation forte à soutenir le sport français.
Par ailleurs, les conventions d'insertion professionnelle pourront prévoir des subventions plus importantes pour les PME. En effet, il est difficile de gérer les périodes d'absence dans une petite entreprise, plus difficile que dans une grande. Les compensations doivent donc être calculées en conséquence.
Enfin, nous mettrons en place un groupe de travail afin de voir si des dispositions fiscales complémentaires sont nécessaires, qu'il s'agisse de renforcer les dispositions concernant le mécénat ou d'instaurer un crédit d'impôt spécifique. Je pense qu'il faut aller plus loin dans ce sens pour véritablement que ces petites et moyennes entreprises aient à coeur, non seulement de faire un geste, mais qu'elles puissent, à partir de cela, trouver une juste réponse à leurs besoins.
La troisième mesure, c'est d'aider les sportifs à épargner pour préparer leur projet professionnel, pour mieux préparer leur projet professionnel.
A la demande des représentants des sportifs, nous avons décidé d'ouvrir dès 2007 les dispositifs d'intéressement et du plan d'épargne pour la retraite collective (Perco), aux sportifs salariés. Cette ouverture a déjà été prise en compte par le Parlement lors du vote de la loi "participation et actionnariat salarié" en novembre dernier. Un décret sera publié dans les prochaines semaines pour préciser les modalités pratiques de mise en oeuvre.
L'objectif, c'est de permettre aux sportifs de mettre une partie de leur rémunération de côté en franchise d'impôt et de charges sociales, afin de se constituer un capital. A l'issue de la carrière sportive, ce capital pourra servir à financer des études ou un projet de création d'entreprise.
La quatrième mesure, c'est de renforcer la protection sociale des sportifs, et notamment l'ouverture des droits à la retraite.
Aujourd'hui, près de 2 000 sportifs de haut niveau ne perçoivent pas une rémunération suffisante pour cotiser pour la retraite. Certains sont même obligés de mettre terme prématurément à leur carrière sportive pour entrer dans la vie active et cotiser pour leur retraite. Cette situation est inacceptable. Non seulement, elle prive la France de belles médailles. Mais surtout, elle pénalise de grands champions qui contribuent au rayonnement de notre pays dans le monde.
Je propose donc que l'Etat prenne en charge, dès 18 ans, les cotisations retraites des sportifs sans ressources suffisantes. Un projet de loi préparé par Jean-François Lamour devra être adopté en Conseil des ministres avant la fin du mois d'avril et déposé au Sénat en vue d'une adoption sous la prochaine législature.
Enfin, la dernière mesure, c'est de mieux accompagner les sportifs de haut niveau dans leur double projet.
Je demande à Jean-François Lamour de renforcer au sein de la direction des sports la cellule chargée du suivi de ces sportifs. Des experts qualifiés seront recrutés pour les aider à définir un projet professionnel et trouver une entreprise d'accueil. Ces experts travailleront en partenariat avec l'Agence nationale pour l'emploi et l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (Afpa).
Je demande à Jean-François Lamour de constituer un groupe de travail chargé de définir les modalités précises des partenariats nécessaires.
Chers amis,
Vous le voyez, ce que nous voulons, c'est vous permettre de vous consacrer pleinement à votre pratique sportive. C'est vous permettre d'atteindre l'objectif fixé par Jean-François Lamour : quarante médailles aux Jeux Olympiques de Pékin, cinquante aux Jeux Olympiques de Londres.
Aujourd'hui, avec la réforme de la "préparation olympique et paralympique" conduite par Fabien Canu, avec la rénovation de l'Insep, avec les nouveaux moyens accordés aux fédérations sportives, avec le plan de soutien aux sportifs de haut niveau que je viens de vous présenter, vous avez toutes les cartes en main pour relever le défi. Quand je vois votre dynamisme, quand je vois votre sens de l'effort, votre talent, votre enthousiasme, je suis convaincu que nous irons même au-delà. Je suis convaincu que vous saurez écrire les plus belles pages du sport français.
Je vous remercie.Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 7 février 2007