Texte intégral
Q- Votre décret antitabac entre en vigueur aujourd'hui même. Vous prônez la fermeté. Combien de temps néanmoins, donnez-vous aux entreprises et aux fumeurs pour une adaptation en souplesse ?
R- Dès aujourd'hui. C'est dès aujourd'hui que ça s'applique et il peut y avoir des contrôles et des sanctions mais vous savez, c'est aussi une vraie victoire des Français pour leur santé. Je sais que ça représente des efforts pour les fumeurs, j'en ai bien conscience, mais je crois que c'est une victoire historique bien sûr mais ça montre que la société française est vraiment en mouvement et qu'il y a eu une évolution des comportements et des mentalités sur ce sujet.
Q- C'est l'occasion d'arrêter de fumer bien sûr. Combien de fumeurs espérez-vous en moins grâce à ce décret ? Combien d'économies pour la Sécurité sociale cela peut-il représenter sachant que vous mettez déjà 60 millions d'euros pour aider les gens à arrêter ?
R- Avant de parler d'économies, je pense aux vies que l'on peut sauver. Et on s'est aperçu très rapidement, notamment en Italie, il y avait des gains pour la santé, spectaculaires. En Italie, en quelques mois, 11 % de maladies cardio-vasculaires en moins. Et nous sommes aussi intimement convaincus que l'on peut doubler le nombre de fumeurs qui réussissent à arrêter de fumer. Je sais que c'est difficile d'arrêter de fumer, je suis aussi passé par-là. Nous avons 700.000 personnes qui, chaque année, arrêtent de fumer, qui réussissent à arrêter. On pense pouvoir passer à un million et demi de Français qui arrêtent de fumer parce que ce qu'il y a dans la politique française de lutte contre le tabagisme, c'est deux piliers l'interdiction de fumer mais aussi l'aide à l'arrêt et nous mettons en tout 100 millions d'euros ; 60 millions d'euros pour prendre en charge une partie des patchs ou des gommes mais aussi 40 millions d'euros pour augmenter, pour doubler le nombre de consultations de tabacologie parce que parfois, on a besoin de sur-mesure, d'accompagnement personnalisé pour arrêter.
Q- 175.000 agents, inspecteurs du travail, vont faire respecter ce décret. Ils ont déjà du mal à remplir leur mission habituelle, ils ne veulent pas être une police des fumeurs. Est-ce qu'il va pas y avoir un relâchement au bout de quelques semaines, quelques mois ?
R- Non il ne s'agit pas de mettre en place une police des fumeurs parce que je crois beaucoup à la fois à la compréhension des fumeurs, à la motivation des responsables d'établissements, des chefs d'entreprises et puis aussi à la mobilisation des non-fumeurs. Donc sur ce sujet-là, nous savons qu'il peut y avoir des contrôles, des sanctions qui ne sont pas des sanctions sur le papier ou des sanctions de papier. Elles existent concrètement. Mais je suis persuadé que les choses vont se passer même mieux qu'en Italie. On a eu un scénario à l'italienne. On nous avait dit que c'était impossible de réaliser cette interdiction là-bas, ça c'est très bien passé. En France, on voit quand même que les esprits ont profondément évolué. Je suis vraiment confiant sur la façon dont ça va se passer mais s'il y avait des récalcitrants qui oublieraient la santé des non-fumeurs, parce qu'on parle bien aussi du tabagisme passif, dans ces cas-là nous serions très fermes.
Q- Faut-il déduire la pause cigarette du temps de travail ? Est-ce que les patrons ont le droit de faire ça ?
R- Si on en est aujourd'hui à se poser cette question, ça veut donc dire que l'enjeu de santé publique, lui, est bien intégré par les uns et les autres. Pourquoi en plus, cette interdiction de fumer dans les lieux publics ? Il y a bien sûr la protection des non-fumeurs mais il y a aussi un autre point que j'assume tout à fait. C'est qu'en amenant les fumeurs à sortir de l'entreprise pour fumer, ils vont moins fumer. Ils vont justement réduire leur consommation de cigarettes, ils vont être tentés, je l'ai vu cette semaine en me rendant dans une grande entreprise française, ils vont aussi profiter de ce déclic pour arrêter de fumer.
Q- Ils vont moins travailler aussi. Est-ce qu'on doit les pénaliser pour ça ? Pour le patron, c'est un manque à gagner.
R- Il ne s'agit pas de les pénaliser. Je pense aussi là qu'il faut faire confiance au bon sens des uns et des autres. Mais une chose est certaine, quand on en est aujourd'hui à se poser cette question, ça montre donc que l'interdiction est rentrée dans les esprits.
Q- N. Sarkozy propose une franchise annuelle pour l'ensemble des actes médicaux. Alors c'est-à-dire que pendant toute une série de dépenses, on touchera pas un centime de remboursement, puis après seulement une certaine somme, que vous allez peut-être nous donner, on commencera à être remboursé ?
R- C'est surtout qu'on veut mieux protéger les Français par rapport à leurs dépenses de santé. Aujourd'hui, on ne le dit pas trop, ça ne se sait pas trop et pourtant il y a beaucoup de sommes qui restent à la charge des Français. Vous prenez notamment en dentaire, en optique. Sur les prothèses auditives, il y a des sommes qui peuvent être inimaginables qui restent à la charge des Français. Nous voulons faire en sorte qu'au delà d'une certaine somme, le montant de cette franchise, qui ne sera pas une nouvelle franchise, que nous puissions protéger les Français et qu'ils soient mieux remboursés, notamment dans ces trois domaines-là. Aujourd'hui vous avez le "un euro", vous avez le "forfait journalier" et vous avez le "18 euros". Il faut redonner de la lisibilité et garantir les Français qu'au-delà d'une certaine somme, le montant maximum de cette franchise, ils ne seront plus de leur poche, comme on dit. C'est donc une avancée, c'est un peu un bouclier santé pour pouvoir les protéger par rapport aux dépenses de santé.
Q- C'est quoi cette somme ? Quelle sera cette somme ?
R- Le montant n'est pas arrêté parce que ce que nous devons faire, c'est de voir exactement aujourd'hui, au-delà du "un euro", combien de fois les Français sont concernés par le forfait hospitalier. Le "18 euros" en soi, intervient très peu au cours d'une vie mais seulement il faut savoir la réalité des choses, de façon à pouvoir les protéger et leur permettre enfin d'être mieux remboursés sur des soins importants : le dentaire, les lunettes ou même les prothèses auditives.
Q- Avez-vous fait travailler votre administration au ministère de la Santé au service du programme du candidat UMP comme vous en accuse le PS ?
R- Non pas du tout. Ce qu'il faut savoir, c'est que des notes sur la franchise, il y en a eu au moins trois ou quatre à ma connaissance. En 2004 - je n'étais pas dans mes fonctions de porte-parole -, en 2006 l'an dernier et aussi cette année comme il y a régulièrement de la part de mon ministère des propositions. Mon ministère m'avait, par exemple, proposé de taxer les boissons sucrées, j'ai refusé. Les services avaient aussi proposé à différents moments, par exemple, de mettre une taxe par boîte de médicaments. Je trouve cette idée inimaginable. Je ne veux pas justement de cette proposition. Donc il y a régulièrement de la part du ministère, en fonction de l'actualité, des propositions, des notes mais en tout état de cause c'est après la responsabilité du politique que de suivre ou ne pas suivre. Et en l'occurrence, ce ne sont que des éléments par rapport à l'actualité.
Q- Est-il normal que les Renseignements généraux enquêtent sur les riverains du QG de campagne de N. Sarkozy ?
R- Sur ce sujet, je crois qu'il faut mettre un terme à toutes les polémiques. Je serais tenté de dire que ça suffit les polémiques. On a eu pendant longtemps la gaffe du jour, maintenant on a la polémique du jour. Moi, je ne vais pas passer mon temps, en tant que porte-parole de N. Sarkozy, à répondre aux accusations bidons des socialistes et à répondre également aux accusations des socialistes. On avait dit au début de cette campagne qu'il fallait élever le débat. Pourquoi ? Tout simplement pour réconcilier les Français avec la politique. On a quand même eu le 21 avril, on a quand même eu aussi le référendum perdu et tout le monde s'accordait à dire "il faut faire un débat d'idée". Or pour le débat d'idée, il faut au moins être deux et nous sommes seuls aujourd'hui pour ce débat d'idées. Alors je dis aux socialistes qu'ils se ressaisissent. Nous, nous voulons justement être sur le projet de société et même si nous sommes les seuls à être sur le projet de société, nous continuerons. Moi
j'ai envie de vous parler, C. Barbier, de ce qu'on va faire concrètement pour augmenter le pouvoir d'achat. Et j'ai envie de vous expliquer comment on va aider les jeunes à s'insérer dans la vie active, comment on va aider les femmes à pouvoir avoir la garantie qu'elles sauront faire garder leurs enfants. Voilà ce qui intéresse les Français.
Q- Pour développer mieux ces thèmes de campagne, N. Sarkozy devrait peut-être quitter le ministère de l'intérieur. Il parle du 9 avril puis du 20 mars. Quelle est la bonne date pour partir ? Quelle est la bonne occasion ?
R- Aujourd'hui, c'est lui le mieux placé pour garantir, pour assurer la sécurité des Français. Et les Français savent bien qu'en tant que ministre de l'intérieur, il a en permanence conscience qu'il est en charge de leur sécurité et que sur ce sujet-là, il a dit les choses clairement en s'appliquant à lui-même ce qu'on a jamais demandé aux uns et aux autres. La question que vous me posez, on ne l'a jamais posée à monsieur Jospin quand il était Premier ministre. C'est une question qu'on n'a pas non plus posée en Europe. Monsieur Aznar à l'époque, monsieur Schröder, monsieur Blair, jamais on leur a posé la question : est-ce que vous pouvez être Premier ministre et candidat aux législatives ? On pose cette question à N. Sarkozy, il a répondu lui-même par avance en disant qu'il serait parti au moment où s'ouvrira la campagne officielle. Donc vous voyez, les choses sont très claires et Nicolas a voulu justement être dans cette exigence de clarté.
Q- Et vous-même, pour le ministère de la Santé, quelle date limite vous donnez ?
R- Je serais tenté de vous dire aussi très clairement que je suis au travail aujourd'hui et que la question qui intéresse les Français, c'est de savoir si moi-même en tant que ministre de la Santé, je suis bien en charge de leur problématique. On le voit cette semaine j'ai présenté le plan sommeil, on a le décret justement de lutte contre le tabagisme. J'ai aussi été auditionné par la mission parlementaire sur la grippe aviaire, je suis au travail.
Q- Fin février, votre travail est terminé ?
R- Non, fin février nous avons la fin du temps parlementaire. J'ai encore des textes qui passent mais vous savez, on est aussi, au ministère de la Santé, dans un ministère qui n'est pas forcément épargné par les crises sanitaires. Il faut aussi savoir être sur le pont.
Q- Si J. Bové qui est candidat à la présidentielle, et condamné définitivement après le refus de son pourvoi en cassation, le 7 février, est-ce que la justice doit l'incarcérer ou est-ce qu'il faut lui
laisser faire sa campagne et repousser l'incarcération ?
R- Ce ne sont pas des sujets sur lesquels, moi, j'ai à me prononcer. Non seulement parler des autres candidats ne m'intéresse guère et là, la question qui se pose est une question qui ne relève pas de la campagne présidentielle, de la campagne politique. C'est justement à la justice de faire son travail et c'est aussi à lui, ensuite, de décider comment il veut faire. La candidature Bové, c'est vraiment un problème pour la gauche, ce n'est pas une question pour nous.Source:premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 5 février 2007