Texte intégral
Mes chers amis,Je suis venu jusqu'à vous parce que j'aime la dignité et la fierté de la Réunion. Cette terre de volcan, c'est la terre de France, aussi sûrement que le sont la terre de Normandie et la terre blonde de Provence.
J'aime cette île dont les noms ont suivi le cours de l'Histoire : Ile Bourbon, Ile Bonaparte, Ile de La Réunion, île de conquête, de forbans, de bâtisseurs, mais aussi île d'esclaves et du code noir, ce code que la république déchira le jour où elle se décida enfin à comprendre que ce qui est moralement insoutenable ne peut jamais être politiquement acceptable.
Ici, je ressens l'intensité de l'énergie nationale. Cette énergie qui vous conduit ce soir à être si nombreux, si chaleureux et si exigeants pour notre patrie. Votre présence me touche profondément.
Ici, je sens cette communion qui unit chacun d'entre-nous au sein d'une République fraternelle. Lorsque l'un d'entre-vous se bat, avance, réussit, il en entraîne un, deux, trois, dix dans son sillage.
Lorsque l'un d'entre vous échoue, souffre, tombe, il en affecte le coeur et l'espoir de ses amis et ses proches. Nous sommes les membres de la même chaîne humaine, de la même famille.
Nous sommes Français.
Français de toujours.
Français de toutes races.
Français de toutes couleurs.
Français de toutes confessions.
Français, dit-on, querelleurs, frondeurs, divisés mais indivisibles.
Français liés par des siècles d'histoire mêlée, ensanglantée, lacérée, partagée.
Français éclairés par les arts et révoltés pour la liberté, comme le fut le poète Leconte de Lisle, l'un des vôtres, qui repose au cimetière marin de Saint Paul.
Français dans l'épreuve, capables de flancher et de se relever, de se déchirer et de se rassembler.
Français, capables de renoncer au possible et d'atteindre pourtant l'impossible.
Français, voilà tout ! Unis par le même passé. Unis pour le même avenir. Unis sous la même bannière tricolore.
Pour moi, la France est un pays à nul autre pareil. C'est le pays qui a fait la synthèse entre l'Ancien Régime et la Révolution, entre l'Etat capétien et l'Etat républicain, entre le patriotisme et l'universalisme. C'est le pays qui a inventé la laïcité pour faire vivre ensemble ceux qui croient au Ciel et ceux qui n'y croient pas. A promu, contre toutes les servitudes, les droits imprescriptibles de l'homme.
Cette synthèse nationale à laquelle je crois, me conduit naturellement à me tourner vers tous les Français sans exception.
Je n'exclus pas mes concitoyens qui se sont perdus dans des votes extrêmes auxquels j'estime avoir le devoir de tendre la main pour les convaincre qu'une autre voie est possible.
Cette main, je la tends aussi à tous ces travailleurs, toutes ces familles, qui ont cru à la gauche d'autrefois. Cette gauche qui affirmait alors qu'on ne peut avoir l'Ecole gratuite, la santé pour tous, les retraites à 60 ans, la protection sociale, des services publics, sans produire davantage, sans se retrousser les manches.
La dignité des ouvriers et des employés qui partent tôt au travail, qui se serrent la ceinture pour qu'un jour leurs enfants n'aient pas à la serrer, je la comprends, je la respecte sans doute plus que ceux qui prétendent défendre la justice sociale en vantant constamment les mérites du temps libre et des loisirs. Je la respecte plus que ceux qui trouvent toutes les excuses aux délinquants qui gâchent la vie de ceux qui vivent du fruit de leur travail. Je la respecte plus que ceux qui ont prétendu que le professeur devait se comporter comme l'égal de l'élève. La gauche a tourné le dos aux valeurs des classes populaires. Rien, n'y personne, ne m'empêchera de me présenter à elles pour leur rendre justice.
Je tends enfin la main à tous ceux qui ne croient plus à la politique, à tous ceux qui rejettent les manichéismes partisans. Je leur dis : changeons la politique ensemble, faisons en sorte que les différences s'enrichissent mais ne s'affrontent pas de façon stérile, imaginons une nouvelle façon de gouverner, ouverte à des personnalités de tous horizons, qui réfléchissent et travaillent en commun au service de l'intérêt général.
Sur les dossiers vitaux de notre pays, il y a des espaces de dialogue et de compromis. Il ne s'agit pas de gouverner au centre, car le centre n'est pas une politique ! Il s'agit de gouverner dans l'écoute et la convergence des convictions. A la Réunion, vous savez que l'on peut construire des projets communs en dépassant les étiquettes partisanes. C'est tout le sens des grands chantiers que nous engageons en ce moment dans l'île.
Pour moi, le Président de la République n'est pas l'homme d'un parti. Il est le visage de la France. Il est celui qui prend en charge les complexités de son peuple. Et qui s'efforce de dégager les lignes de l'intérêt général.
L'"intérêt général", c'est un principe et une discipline qu'avaient Michel Debré et Raymond Barre, deux des vôtres, à qui je rends hommage. L'intérêt général, c'est un équilibre entre les convictions qui habitent le Chef de l'Etat et les contradictions qui traversent la société française. Ces contradictions qu'il faut respecter, sentir, synthétiser. Le Président n'est pas un souverain enfermé dans ses palais, mais un républicain. Il est le premier des citoyens parmi ses concitoyens.
Je suis pour une présidence engagée dans l'action quotidienne. Pour un président qui agit, assume et écoute les appels qui lui sont lancés, les avertissements qui lui sont parfois adressés. C'est cela ma conception du pouvoir et de la politique. J'ai des convictions. Je sais ce que je veux et ce que dois faire. Mais je ne prétends pas avoir la science infuse... D'instinct, je me méfie des idées toutes faites. Je n'ai jamais considéré qu'un adversaire politique devait être méprisé. Et encore moins un de mes concitoyens qui m'interpelle. Tous deux participent, à leur façon, au cheminement de mes pensées et de mes émotions.
Lorsqu'à Charleville Mezière, un ouvrier me dit avec pudeur mais avec une colère rentrée : "Monsieur Sarkozy, j'ai trente ans de boite et je gagne à peine 1200 euros !", je mesure que certains de mes objectifs économiques doivent être enrichis par ce témoignage.
Lorsque jeudi dernier je me suis rendu à l'association "Coeur de femmes" qui accueille des femmes qui ont été battues, jetées à la rue, déchiquetées par la vie, et qu'une jeune maman marocaine me raconte de façon poignante qu'elle est divorcée d'un Français (ce qui l'empêche d'obtenir ses papiers) et que son fils de trois ans est dans le coma depuis quatre mois à l'hôpital Robert Debré à la suite d'un traumatisme crânien, eh bien, mes jugements s'approfondissent.
Lorsque j'ai rencontré, il y a deux semaines, ces deux institutrices de Chalons sur Champagne - ces deux fonctionnaires dévouées qui aiment leur métier et leurs élèves - tabassées pour avoir "osé" faire respecter leur autorité, je me dis que leur récit en dit davantage sur le quotidien de l'Ecole que toutes les grandes politiques éducatives dont je me fais l'interprète.
La France, c'est cela ! Elle est faite de chair et de sang. Aucun Français ne ressemble à un autre. Aucune idéologie ne peut résumer la société. Aucune réponse n'est absolue, définitive, indiscutable, implacable. Voilà pourquoi, je n'ai pas peur de la discussion et de la confrontation intellectuelle. Voilà pourquoi, je ne crains pas d'imaginer des ouvertures politiques vers tous ceux qui, par leur intelligence et leur pragmatisme, peuvent servir l'intérêt général.
Mes amis,
Je crois que le XXIème siècle sera fructueux pour les nations unies et courageuses, mais qu'il sera implacable pour les nations faibles et divisées.
Plus que jamais, les 60 millions de Français doivent faire bloc pour répondre aux défis que leur lancent les 6 milliards d'êtres humains que compte notre planète, dont beaucoup courent après un développement dont ils ont été, jusqu'à ce jour, privés par l'Histoire. 60 millions de français engagés dans un monde de 6 milliards d'habitants : voilà la bataille qui est devant nous. Et la Réunion qui est située entre l'Afrique, l'Inde et l'Asie est bien placée pour en mesurer l'ampleur.
Ceux qui stigmatisent la mondialisation pour esquiver leurs responsabilités, ceux qui continuent de prétendre que c'est le monde qui a tort de changer et que c'est la France qui a raison de ne rien changer, ceux qui restent les bras ballants devant les délocalisations en versant des larmes de crocodiles au lieu d'agir, ceux qui vont expliquer aux salariés qu'il faut travailler moins et qui s'étonnent après coup que nos concurrents nous raflent des marchés, ceux qui taxent les richesses aveuglément et qui s'étonnent qu'elles partent ailleurs, ceux qui cherchent toujours à opposer une France à une autre, ceux qui cultivent la bonne conscience sans jamais éprouver de cas de conscience, ceux qui donnent aux autres des leçons de morale qu'ils ne s'appliquent jamais à eux-mêmes, sont les complices de notre déclin.
L'histoire nous enseigne que le sort des nations est versatile. Certaines nations grandissent, d'autres s'abaissent, certaines s'enrichissent, d'autres s'appauvrissent, certaines se rassemblent, d'autres se disloquent.
Aucune génération ne peut se croire déliée de ses responsabilités vis à vis de son héritage national. Ce que nous choisissons ou non de faire a des conséquences.
Libre à nous de penser que la mondialisation n'est qu'un épiphénomène et non un basculement historique. Libre à nous de ne pas voir que notre pays a chuté, en 25 ans, de onze places dans le classement des richesses nationales. Libre à nous de rester prisonniers des 35 heures alors que le monde entier appuie sur l'accélérateur. Libre à nous de nous surendetter pour vivre lâchement à crédit plutôt que de nous réformer. Libre à nous de choisir entre le statu quo ou le progrès réformiste. Oui, nous sommes libres de choisir. Choisir d'entrer dans la XXIe siècle à genoux ou debout !
Ensemble, nous avons décidé d'être debout !
Pour cela, il faut ne pas avoir peur de parler de notre identité nationale car je ne vois pas pourquoi la France serait la seule nation du monde à ne pas dire à haute voix ce qu'elle est et ce qu'elle veut. Je ne vois pas pourquoi les pages sombres de notre passé masqueraient les plus lumineuses. Depuis trop longtemps nous mettons notre drapeau dans la poche. Depuis trop longtemps nous accusons notre Histoire pour nous excuser d'en avoir une. Depuis trop longtemps nous craignons de dire : "je suis français et j'en suis fier !".
Moi, dont les origines sont mêlées comme la plupart d'entre-vous, je vous dis que l'amour de la France doit guider nos pas et nos choix.
La France a une identité. Pas une identité naturelle, car notre nation n'a jamais cessé de se construire, de s'élargir, de s'unifier, fédérant des provinces aux patois distincts, embrassant des religions aux cultes différents, accueillant des immigrants aux cultures étrangères. Par la force de l'Etat, par la communion de la langue, par la marque du droit, par le prix du sang et l'emprise de la mémoire et des mythes, l'identité française s'est ainsi faite.
C'est cette longue trajectoire avec nous-mêmes qui s'est interrompue. Pendant des décennies, il fut en effet de bon ton de railler la France, de moquer ses coutumes, de siffler son hymne, d'accuser ses rêves de grandeur.
A tort, on a trop souvent cru que le drapeau tricolore n'était ni assez beau, ni assez large, pour rassembler et respecter chacun dans ses différences. Eh bien moi, je dis que ce drapeau est suffisamment beau et large pour être hissé aux yeux de tous ceux qui, de toutes origines, de toutes races et de toutes confessions, sont la France de demain !
La France une et diverse, unitaire et mélangée : c'est d'ailleurs la France que nous construisons depuis des siècles ! Et ici les Français viennent aussi d'Afrique, de Chine, d'Inde et ils sont musulmans, hindouistes catholiques, protestants, juifs. Tout cela fait la France. Tout ceci est la France!
Et à ceux qui en douteraient, je veux dire que lorsque le 2ème régiment de zouaves chargea à Magenta en ce matin du 4 juin 1859, nul ne s'interrogea sur la couleur de peau de ces braves parmi les braves. Aux 100.000 morts et disparus de l'Armée d'Afrique dans les plaines glacées de la Marne et de Verdun, nul n'osa s'interroger sur les origines de leur sang. Aux 653 réunionnais morts pour leur patrie en 14/18, il ne vint à l'esprit de personne de regarder d'où venaient leurs ancêtres.
Français mélangés et unifiés, par volonté, par adhésion, par conviction. Français par ses devoirs et non pas seulement par ses droits. Voilà la France de tous et pour tous que je veux !
A ce titre, la Réunion est pour moi un exemple. Lorsque votre île adopta, en avril 1794, ce nom de "réunion" en symbole, dit-on, de la jonction des révolutionnaires marseillais et des gardes nationaux chargés de la garde des Tullieries, imaginait-on combien ce nom était prédestiné ?
Sur cette terre, les origines, les religions et les cultures n'ont jamais cessé de se marier. Je la vois ici, la France vivante et charnelle que j'appelle de mes voeux. "Créole", métissé ou blanc, "malbar", "z'arab","chinois, "caf" : je l'ai sous les yeux la République ouverte et chatoyante où convergent et s'unissent les diversités. La métropole doit s'en inspirer car il n'y a pas d'avenir pour les sociétés fermées et intolérantes.
C'est parce que je crois en cette France plurielle, que je veux que l'immigration soit fermement maîtrisée. Je souhaite qu'on ne puisse pas vivre en France sans connaître sa langue, sans estimer sa culture et ses valeurs. Nous sommes un vieux pays de traditions et de liberté qui demande qu'on le respecte et qui respecte ceux qui l'aiment.
C'est parce que je crois à la France plurielle, cette France où aucune discrimination sociale ou raciale ne peut être acceptée, que je défends la république du mérite et du travail. Parce que le mérite n'est le privilège d'aucune race, ni d'aucune classe. Parce que le travail est le seul moyen de libérer sa famille et soi-même de sa situation sociale. Parce que dans le travail chacun est jugé sur ce qu'il fait et non sur ce qu'il est. Parce que là où le travail est dévalorisé, ce sont alors les privilèges de la naissance qui commandent. Parce que le travail donne de la dignité. Et à cet égard, je ne crains pas de dire que la réduction obligatoire et uniforme du temps de travail n'est rien d'autre qu'un rationnement de la dignité et donc une dégradation de la condition humaine.
Je veux la République qui reconnaît les êtres à leurs seuls talents. A leur seul courage. A leur seule détermination. Voilà pourquoi je suis contre le nivellement économique, car ce nivellement abaisse ceux qui partent de rien et qui veulent monter au sommet. Contre le nivellement social, parce qu'il condamne ceux qui n'ont rien à demeurer les mains vides. Contre le nivellement culturel, car il tire vers le bas ceux qui devraient être, au contraire, hissés vers le haut.
Je suis, en définitive, contre le nivellement qui fait le jeu des situations acquises et des aristocraties en place aux dépens de tous ceux qui n'ont pour seul bagage que leur volonté.
Parce que je veux être le candidat de la France où les destins ne sont jamais figés, je suis le candidat de l'action.
La situation française vous la connaissez : 20 ans de chômage de masse (atteignant ici jusqu'à 30 % de la population, dont trop de jeunes !), 15 ans de croissance médiocre, 10 ans de pouvoir d'achat poussif. Face à ces piteux résultats, c'est toute notre société qui perd pied. Pendant des années, on a dit que c'était passager. Pendant des années on a attendu qu'un soupçon de croissance internationale vienne redonner à la France un peu de tonus. Dès lors, pendant des années on a conduit des politiques globalement identiques et on a délivré les mêmes discours. Tout écart éventuel étant considéré comme tabou ou trop risqué...
Mais voilà, ce qui devait être "conjoncturel" est devenu structurel. La France est tombée en panne.
La gauche a une immense responsabilité. Elle qui n'a cessé de flatter les illusions et les conservatismes. Elle qui démontra l'art de renoncer à tout ce qui marche pour privilégier tout ce qui échoue. "En politique - disait, Bonaparte - une absurdité n'est pas un obstacle !" La gauche a franchi toutes les haies de l'illogisme, et nous suggère maintenant de faire la même course en arrière. Elle propose de refaire le film, le même film qu'hier : 35 heures, impôts, emplois publics. Tout ce qui a échoué mérite, à ses yeux, d'être réessayé. En 1981, les socialistes promettaient de "changer la société"... Je constate que durant les quinze années où ils furent au pouvoir, ils ne l'ont pas fait, mais ce qu'il y a de plus grave c'est que la société ne les a pas changés !
Il faut être honnête. La droite, elle aussi, a une part de responsabilité dans la situation du pays. En disant la moitié de ce qu'il fallait dire pour ne pas déplaire, et en faisant la moitié de ce qu'il fallait faire pour ne pas brusquer, elle a trop souvent laissé le pays au milieu du gué.
Je veux donner à notre pays le rang qu'il mérite, construire la prospérité à laquelle il aspire, instiller dans le coeur de chacun le sentiment que tout est possible.
Possible de partir en bas de l'échelle pour se hisser au sommet.
Possible de s'appeler Khaled, Hadiya ou Romain et d'être jugé sur ses seules vertus.
Possible de travailler plus pour gagner plus. Possible de faire fortune, mais possible aussi d'être fortuné et de repartir à zéro.
Possible de connaître l'échec sans pour autant basculer dans l'assistanat car nul n'est condamné à dépendre éternellement des autres.
Possible de s'acheter son logement.
Possible de compter sur la protection d'un Etat efficace et juste.
Possible de transmettre à ses enfants les fruits d'une vie de labeur.
Je rêve d'une France plus ouverte, plus mobile, plus sensible aux volontés qui animent chaque individu. Face à la société anonyme et uniforme, je veux opposer la société des citoyens éclairés. Tout mon combat est là !
C'est un combat pour des valeurs que j'engage.
Il faut que chaque citoyen sente qu'il doit donner à la France autant qu'il reçoit d'elle ! Il faut que celui qui se lève tôt pour aller travailler soit mieux récompensé que celui qui a décidé de ne plus se lever ! Il faut que celui qui prend des risques soit mieux considéré que celui qui n'en prend aucun ! Il faut que le jeune qui "bosse" dur pour s'acheter sa voiture ne soit pas ridiculisé par le dealer du coin qui gagne en un jour ce que certains gagnent en un mois ! Il faut que la solidarité de tous à l'égard de chacun soit réelle mais il convient que chacun n'abuse pas de tous ! Il faut que la situation de nos déficits sociaux conduise chacun à plus de vigilance car l'Etat c'est nous ! Il faut que l'enseignant qui affirme son autorité soit mieux épaulé que ceux qui, dans la classe, prétendent qu'ils n'ont pas d'ordres à recevoir !
Pour tout dire, il faut mettre un terme à la confusion des principes qui nous a amené à mélanger liberté et permissivité, égalité et égalitarisme, fraternité et assistanat. D'une certaine manière, je réclame la République pleine et entière.
Je vous l'ai dit : je crois au mérite.
Voilà pourquoi, tous ceux, salariés ou fonctionnaires, qui voudront travailler plus pour gagner plus le pourront. Toute heure supplémentaire et toute RTT convertie en temps de travail seront exonérées de charges sociales et d'impôt sur le revenu. C'est en réhabilitant le travail que l'on créera du travail et du pouvoir d'achat et non en le rationnant, en le taxant, en le méprisant.
Le plein emploi est notre objectif et je propose une stratégie offensive pour l'atteindre. A travers un service public de l'emploi qui, par la fusion de l'ANPE et l'UNEDIC, sera plus percutant. Car il est normal et efficace que le service qui verse et contrôle les allocations soit le même qui recherche et propose les offres d'emplois. Par la création d'un contrat unique de travail plus souple pour les entreprises et plus sécurisant pour les salariés, je veux réconcilier les entrepreneurs qui ont besoin de flexibilité et les salariés qui ont besoin de protection. Par l'instauration du système de "l'assurance salaire et retour à l'emploi", je veux permettre au chômeur de conserver l'essentiel de sa rémunération sous la condition de respecter des exigences de formation et les offres d'emploi correspondantes qui ne pourront pas s'élever à plus de deux.
Se retrouver au chômage cela peut arriver à n'importe qui et c'est pourquoi, la solidarité nationale doit jouer. Mais le demeurer sans faire d'effort pour s'en sortir, sans contrepartie, c'est nier ses responsabilités, c'est abuser de la solidarité. Cela, je ne l'accepte pas !
Je sais parfaitement qu'ici, à la Réunion, la solidarité doit être plus forte qu'ailleurs puisque votre taux de chômage est trois fois supérieur à celui de la métropole. Mais je sais aussi qu'aucun Réunionnais ne se complaît dans une situation qu'il n'a pas choisie. Vous voulez pouvoir vivre de votre travail dans la dignité.
Je crois aussi à la valeur de la justice, la vraie justice, c'est à dire celle qui tire les individus vers le haut et non celle qui achète leur résignation, celle qui donne plus à ceux qui partent de plus loin et non celle qui distribue des "miettes" à tout le monde.
Au nom de cette justice à laquelle je crois, le nombre d'élèves dans les établissements scolaires les plus sensibles doit être réduit et les meilleurs élèves de chaque établissement doivent pouvoir être spécifiquement épaulés pour aller vers les grandes écoles. Je prends aussi l'engagement si je suis élu de développer des internats d'excellence pour permettre aux élèves issus des milieux défavorisés de bénéficier des conditions de travail optimales. Je veux aussi créer des écoles de la deuxième chance dans tous les départements.
Au nom de cette justice, je souhaite que les intérêts des emprunts pour acheter son logement soient déductibles en totalité du revenu imposable, que le crédit hypothécaire soit réformé, que l'accès à la propriété pour les locataires de logements sociaux soit facilité. Je veux que tous les Français qui travaillent puissent devenir propriétaires. Parce que la propriété c'est la protection, c'est l'indépendance, c'est la liberté.
Je crois aussi à la responsabilité.
Responsabilité d'abord des pouvoirs. Si je suis élu, je ne me réfugierai pas sur les sommets de l'Olympe, je gouvernerai, je m'expliquerai, j'assumerai, je respecterai le Parlement et j'assurerai la transparence des principales nominations qui relèvent de la sphère publique car je veux garantir la compétence des personnalités nommées et non m'assurer de leur subordination.
Responsabilité vis à vis des prochaines générations dont le sort ne doit pas être compromis par notre inconscience environnementale. J'engagerai un plan national en faveur du développement durable qui devra assurer, en deux générations, la résolution des principaux problèmes environnementaux auxquels la France doit faire face. Ici, à la Réunion, vous devez faire de votre île un exemple de développement durable. Un exemple où le respect de la nature se conjugue avec un tourisme de qualité.
Responsabilité des Français qui doivent, sur leur lieu de travail et dans leur vie, pouvoir agir, choisir et, a fortiori, assumer leurs décisions. Cela passe par une démocratie sociale rénovée et mieux décentralisée au niveau de l'entreprise, car la France a besoin d'un syndicalisme plus influent et surtout plus constructif. A la Réunion, comme ailleurs, l'apprentissage du dialogue social est une condition du développement.
Je crois aussi, mes chers amis, à la valeur du respect.
Celui qui respecte la société se respecte lui-même et celui qui se respecte lui-même est respecté par la société.
La France des violences, des injures, des trafics et des petits caïds, n'est pas la nôtre. Nous courons après des décennies de laxisme dont les premières victimes furent les plus faibles et les moins fortunés. Je n'accepte pas qu'un travailleur qui a économisé pendant trois ans pour s'acheter sa voiture, la voie partir en fumée sous sa fenêtre. Je n'accepte pas qu'une retraitée soit dévalisée par des malfrats qui en sont déjà à leurs dixièmes condamnations.
Entre 1997 et 2001 la délinquance avait augmenté dans notre pays de 15 %. Depuis elle a chuté de 10 %. A la Réunion, comme ailleurs en France, mon objectif est de lutter sans états d'âme contre la violence sous toutes ses formes. C'est pourquoi je mettrai en place des peines planchers pour les multirécidivistes et je réformerai l'ordonnance de 1945 sur les mineurs.
Je crois enfin dans la valeur de la confiance. Au sein de la jeunesse et des familles, je veux créer un climat pour construire ensemble et voir l'avenir avec plus d'assurance.
Dans cet esprit, je veux donner à notre jeunesse les moyens de son autonomie. Je veux créer une allocation formation qui permettra, à chaque jeune qui suit une formation, de construire son indépendance financière. Je veux permettre à tout jeune de moins de 25 ans qui a un projet ambitieux de bénéficier d'un prêt à taux zéro garanti par l'Etat pour se lancer. Quant aux parents, je leur propose de mettre en place un encadrement scolaire pour leurs enfants en fin de journée, afin que nul ne soit contraint de choisir entre sa vie familiale et sa vie professionnelle, afin qu'aucun enfant ne soit livré à lui même, afin que chacun d'entre eux puisse rentrer à la maison les devoirs faits.
Je veux enfin que toute famille, au seuil de la vie, soit en mesure de transmettre à ses enfants ou ses proches les fruits de son travail sans être taxé. Les choses sont claires : je supprimerai les droits de donation et de succession pour tous les patrimoines petits et moyens.
Vous l'aurez compris, mes chers amis, l'enjeu de cette élection est un enjeu de valeurs. Je veux la France plurielle et rassemblée. La France qui croit au travail, au respect, à la justice. La France audacieuse et ouverte sur le grand large.
Dans cet esprit, j'invite tous mes concitoyens de métropole à mesurer la chance que nous avons de pouvoir compter sur La Réunion. La Réunion, lointaine, mais plus que jamais Française ! Plus que jamais républicaine !
Si je suis venu ici, c'est parce que je suis convaincu que nous sommes arrivés à un tournant de son développement grâce, notamment, au lancement d'une nouvelle génération d'investissements majeurs.
La stratégie économique qu'il faut engager repose sur trois piliers, tous trois essentiels à l'avenir de l'île : le développement durable, l'économie de la connaissance et l'insertion dans les flux d'échange régionaux et mondiaux.
Le développement durable, c'est anticiper la Réunion de l'an 2030 : une île d'un million d'habitants, avec un niveau de vie, je l'espère, bien supérieur à ce qu'il est aujourd'hui, dans un monde où le pétrole sera cher, où le changement climatique risque de produire des effets majeurs, et où tous les pays voisins seront plus riches et plus peuplés.
Le premier besoin de développement durable, ce sont des infrastructures. Je n'en citerai que trois, que vous avez à l'esprit : le tram-train, la mise en place d'une route du littoral définitivement protégée et le transfert des eaux, qui assurera le développement équilibré des deux versants de la Réunion.
La deuxième piste pour la Réunion, c'est l'économie de la connaissance. C'est un horizon incontournable pour la métropole mais aussi et surtout pour vous. Car vous êtes directement à proximité de pays à très bas salaires. Cela n'aurait aucun sens de jouer sur leur terrain, alors que l'avenir de la Réunion et de vos voisins malgaches, mauriciens ou plus éloignés, sera de jouer la complémentarité. La complémentarité, c'est tirer parti des spécificités réunionnaises : un haut niveau de formation, une capacité de recherche, des équipements de communication et de recherche performants.
Le troisième grand axe d'investissement, c'est l'insertion de la Réunion dans les flux d'échanges régionaux et mondiaux. La modernisation du port, l'extension de l'aéroport, les crédits d'investissement pour les câbles de communication sous-marins relèvent de cette nécessité absolue.
La continuité territoriale, la continuité par les transports mais aussi la continuité par les communications : c'est mon combat pour l'outre-mer ! Lors de ma venue à Saint Pierre, le 30 septembre 2005, je m'étais fixé un objectif en forme d'engagement à votre égard : amener le tarif de l'Internet à haut débit au même prix en Outre-mer qu'en métropole. L'engagement a été tenu !
Au 1er janvier, France Télécom a abaissé de 20 % le tarif du trafic de masse vers l'Outre-mer et effectuera une seconde baisse de 20 % au 1er janvier 2008. J'ai signé, il y a quelques heures, avec le président Vergès une convention de subvention qui permettra aux Réunionnais de bénéficier d'une amplification du haut-débit au même prix, et d'une baisse de 30 % sur le prix du haut débit illimité. Ce sont des avancées précises. J'ai fait ce que j'avais promis !
L'autre aspect de la continuité territoriale, ce sont les liaisons aériennes. Je vous avais, là aussi, promis d'aborder ce dossier avec résolution. Après des années de débats et des centaines de rapports, j'annonce des avancées concrètes.
Les règles qui restreignent la concurrence sur le marché aérien des DOM ont été modifiées comme je m'y étais engagé en novembre dernier devant les maires de l'outre-mer. Ces règles modifiées ont été notifiées à la commission européenne la semaine dernière. Désormais, des compagnies charters pourront vendre des vols sur l'Outre-mer, sans offre d'hébergement associée, ce qui leur était interdit jusqu'à présent. C'est une première étape vers l'amélioration de la continuité territoriale.
Ce que je veux, à travers ces initiatives, c'est donner aux Réunionnais les outils de leur propre développement. Car la Réunion ne quémande pas des faveurs. Des privilèges. Des passe-droits. De la charité à grande échelle.
Non, elle souhaite que son développement soit suffisamment affirmé pour lui permettre de tenir son rang. C'est pour cette raison que je préconise la création de « zones franches globales d'activités » dans les DOM. Depuis que j'ai lancé cette idée, en mars dernier, les acteurs économiques des quatre DOM ont répondu à mon appel et m'ont fait part de leurs attentes en la matière. Il y a, aujourd'hui, un consensus sur l'idée de créer des zones franches globales sur le plan géographique mais ciblées sur certains secteurs d'activités.
L'action menée ici, traduit ma conception de l'avenir de l'ensemble de l'outre-mer. Je crois à une politique moins faite de transferts et de subventions et plus tournée vers la correction des handicaps structurels qui sont les vôtres : éloignement, isolement, risques spécifiques...
Ces handicaps justifient un engagement particulier de l'Etat à vos côtés. Aider plus et aider mieux les territoires qui en ont le plus besoin : c'est cela ma conception de l'égalité des chances.
La Réunion, elle est, pour moi, un exemple pour l'Outre-mer.
C'est parce que je ne conçois pas qu'il y ait, d'un côté, la France métropolitaine et, de l'autre, la France d'outre-mer que j'ai souhaité que notre projet pour l'Outre-mer soit une pièce maîtresse du projet pour la France de demain. Non pas simplement pour des raisons symboliques mais parce qu'il ne peut y avoir « deux France » : on est dans la République ou on est en dehors, mais pas à moitié.
Je veux que tous les Français comprennent que l'Outre-mer c'est la France de plein-pied dans la mondialisation ! La Réunion, dans l'Océan indien, est aux portes de l'Afrique et aux confins de la péninsule indienne. La Guadeloupe et la Martinique relient, dans l'Arc antillais, les deux Amériques. La Guyane est en Amazonie alors que les îles de Saint-Pierre et Miquelon sont tournées vers le Canada ; la Nouvelle-Calédonie, Wallis et Futuna et la Polynésie française, dans l'Océan Pacifique, sont à proximité de l'Asie et de l'Australie.
De fait, la France des trois océans est partout présente dans le monde. Je ne veux plus qu'à Paris, certains continuent à considérer que l'outre-mer est un « problème », un « dossier », une « charge budgétaire ». L'Outre-mer est un atout, une fenêtre ouverte sur le monde, un tremplin pour notre avenir commun.
Pour autant, tout ne va pas bien en Outre-mer.
Il ne faut pas faire dans l'angélisme et se raconter d'histoires. Malgré les efforts fournis par vous-mêmes et le Gouvernement, la situation sur le plan économique et social ne peut être qualifiée de satisfaisante.
Cette situation nécessite des réponses concrètes et ciblées sur les préoccupations réelles de nos concitoyens. Ce qu'il faut éviter, c'est très précisément ce qu'a fait le Parti socialiste : c'est à dire proposer une litanie de mesures ! Le temps du saupoudrage, des annonces démagogiques et des promesses qui se limitent à préconiser le quadruplement de tel ou tel fonds est révolu...
Ce n'est pas de cela que l'Outre-mer a besoin ! Il faut être sérieux, pragmatiques, précis. Il faut afficher des idées simples et surtout s'y tenir.
Pour moi, les axes de notre programme sont clairs :
- il faut garantir la sécurité car c'est la condition première de l'exercice des libertés, y compris celle d'entreprendre. C'est la raison pour laquelle, j'ai proposé le renforcement des moyens de détection et d'intervention en matière de lutte contre l'immigration clandestine, le renforcement de la coopération civile et militaire en outremer, ou encore l'amélioration de la capacité et de la qualité des centres pénitentiaires ;
- il faut créer les conditions d'un véritable développement local et d'un emploi durable qui donne de véritables perspectives à la jeunesse d'Outre-mer. Voilà pourquoi j'ai proposé, au delà du maintien de la défiscalisation, la création de zones franches, mais aussi le développement des partenariats économiques et régionaux et la création des pôles d'excellence ;
- il faut développer une solidarité qui ne se confonde pas avec de l'assistanat, une solidarité qui soit au service de l'égalité des chances. Cela signifie qu'il faut se concentrer sur les domaines qui permettent à chacun de s'épanouir, de travailler, d'agir. A cet égard, le rattrapage en matière d'offre de soins et d'éducation est une priorité. Ici plus qu'ailleurs, je crois au projet de l'école de la deuxième chance où chacun peut approfondir sa formation et se relancer dans la vie. Je crois à une forte articulation entre la formation et l'emploi, notamment autour de l'université de l'Océan Indien dont on connaît le rayonnement;
- il faut, enfin, conforter les identités et les cultures diverses dans le cadre d'une République unie car l'outremer continue d'être mal connu et insuffisamment représenté. C'est pour cela que je veux promouvoir des ultra-marins aux postes d'autorité et que j'aimerais qu'ils soient plus présents dans notre paysage médiatique.
Ma vision de l'outremer, c'est, en définitive, le mariage d'une double exigence : celle du respect de la diversité et celle de l'équité au service de l'unité républicaine. Ma vision de l'outremer, ce sont des acteurs locaux, économiques, sociaux, scientifiques, politiques qui prennent leur avenir en mains et non qui sont pris en mains par d'autres qu'eux-mêmes. Ma vision de l'outremer, c'est celle des choix courageux, celle des priorités. Je ne crois pas dans le saupoudrage des aides et dans l'assistanat, longtemps cultivé pour acheter une soit-disant "paix-sociale".
Pour tout dire, je vois l'outremer, et en particulier la Réunion, comme une terre de travail, d'innovation et d'excellence.
On n'achète pas la fierté d'un peuple. On la respecte, on la valorise, on lui offre des objectifs !
Mes chers amis,
Votre présence exceptionnellement nombreuse ce soir, démontre que vous aspirez à une nouvelle espérance.
L'espérance est toujours une rupture avec quelque chose. Un sursaut. Une conviction que la politique est là pour gouverner le destin et pas pour en être la proie. L'espérance est le contraire de la fatalité. Elle est la fille de la liberté. La liberté de vouloir aller au-delà de nous-mêmes. La liberté de dire "non" à tout ce qui abaisse nos responsabilités. La liberté de pouvoir dire aux pouvoirs : "faites ce que vous avez à faire, et je ferai mon devoir ".
L'espérance est toujours une façon d'élargir la vie au-delà même de nos propres vies. Elle ouvre les chemins qu'emprunteront un jour ceux qui nous suivront car nous n'héritons pas seulement de la France de nos anciens, "nous l'empruntons à nos enfants", selon la belle formule de Senghor.
Mes chers compatriotes,
Ce ne sont pas les idées qui manquent, c'est le courage pour les concrétiser qui fait défaut. Ce ne sont pas les énergies qui manquent, c'est la volonté de les libérer qui est absente.
Je vous fais ce soir la promesse d'aller au bout de ce que je crois.
La promesse de tout faire pour réconcilier les Français avec la France.
De tout faire pour réconcilier les citoyens avec la politique.
De tout faire pour réhabiliter le travail.
De tout faire pour relancer le progrès social.
De tout faire pour donner à la justice la réalité qu'elle exige.
Il y a deux heures, vous êtes entrés dans cette salle en simples citoyens. En spectateurs exigeants de notre démocratie. Dans quelques instants, vous en sortirez comme des acteurs de la victoire.
La victoire pour nos idées.
La victoire pour notre pays.
Ce pays qui nous rassemble. Ce pays qui nous élève. Ce pays qui traversera le XXIème siècle non pas à genoux, mais debout. Debout comme vous l'êtes depuis toujours. Oui depuis toujours et à chaque fois pour la même cause : celle de la France.Source http://www.u-m-p.org, le 19 février 2007