Texte intégral
Arlette Chabot
Bonsoir à tous, merci de nous rejoindre pour notre dernier grand rendez-vous, ce n'est pas le dernier, dernier mais en tout cas très long rendez-vous avec un candidat à l'élection présidentielle, en l'occurrence une candidate puisqu'il s'agit ce soir de Ségolène Royal. Nous sommes à cinq semaines, vous le savez du premier tour de l'élection présidentielle et nous lui demanderons ce soir quel est son programme, quelles sont ses ambitions pour la France et de nous détailler son projet en répondant à des questions de Français qui sont là dans ce studio ce soir avec nous en plateau. Et puis vous savez, c'est très important, que vous pouvez interroger Ségolène Royal en direct pendant l'émission soit par téléphone, soit par Web cam via le site France2.fr et je vous signale d'ailleurs que l'émission est diffusée en direct sur ce site France 2 donc vous pouvez la suivre intégralement si vous êtes un peu loin. Donc ce soir à cinq semaines encore une fois du premier tour, Ségolène Royal. Bonsoir madame Royal.
Ségolène Royal
Bonsoir.
Arlette Chabot
J'ai d'abord envie de vous demander, est-ce que vous aviez bien mesuré la difficulté d'une campagne présidentielle ?
Ségolène Royal
C'est une campagne difficile bien évidemment, très difficile même parce que c'est un poids immense qui pèse sur mes épaules. C'est en même temps un moment exaltant parce que j'ai conscience qu'une page de l'histoire de France est en train de s'écrire, que je représente l'espoir de millions et de millions d'électeurs qui ont envie que ça change. Et que ça change vraiment et que je veux incarner ce changement pour que la France reprenne la main.
Arlette Chabot
Parce que vous vous étiez peut-être dit, après tout le plus dur c'était de gagner la primaire parti Socialiste, la compétition a été dure et puis après ayant gagnée cette compétition interne, vous pouviez vous dire, voilà je vais être portée par un élan et ça va être facile et on s'aperçoit quand même qu'effectivement la bataille est rude.
Ségolène Royal
Oui c'est très rude. C'est très rude, mais en même temps cette rudesse est à la hauteur de l'enjeu je crois. Les Français nous observent, je veux que cette élection serve à quelque chose, c'est-à-dire qu'ils aient un choix, un vrai choix. Et donc c'est en même temps quelque chose d'essentiel, je crois que la France est dans une crise très profonde et le choix qui sera fait par les Français dans quelques semaines va définir notre avenir commun, pas seulement pour cinq ans, j'en ai la conviction profonde, mais sans doute pour toute une génération et donc il ne faut pas se tromper.
Arlette Chabot
Alors il y a des gens qui disent, on ne la reconnaît pas bien Ségolène Royal depuis quelque temps, parce qu'on la voyait libre, elle disait des choses qui pouvaient paraître extrêmement audacieuses pendant justement cette campagne au parti Socialiste, et puis depuis quelques semaines on dirait que vous êtes un peu plus cadenassée. Alors est-ce que c'est le poids du parti Socialiste, est-ce que c'est la peur du dérapage, est-ce que vous êtes, allez je ne vais pas dire, non pas sous contrôle, je ne me permettrais pas mais un peu coincée, beaucoup plus et vous avez perdu cette liberté ?
Ségolène Royal
C'est un peu vrai, je crois que j'ai eu beaucoup de libertés dans le débat interne du parti Socialiste, j'ai été désignée par 60 % des militants, notamment par tous les nouveaux adhérents qui m'ont porté, par l'opinion publique aussi qui m'a porté et puis j'ai eu cette phase d'écoute, parce que je veux répondre à la crise démocratique et je crois qu'aujourd'hui on ne peut plus faire de la politique comme avant. La France a changé, le monde a changé, la politique donc doit changer, les citoyens sont devenus exigeants, ils se sont souvent détournés des urnes et ce cri, cette attente, ces colères j'ai voulu les entendre avant de proposer ce pacte présidentiel.
Arlette Chabot
Mais vous êtes moins libre maintenant ou pas alors ?
Ségolène Royal
J'ai été moins libre c'est vrai parce que je crois que je suis appuyée par une organisation politique...
Arlette Chabot
Ce n'est pas un poids quand même, ça vous aide quand même aussi.
Ségolène Royal
C'est une chance, c'est une chance parce que ça prépare aussi la stabilité du pouvoir pour après dans le cadre d'une majorité parlementaire, mais en même temps il a fallu que je compose dans cette phase mais aujourd'hui, je suis dans la dernière ligne droite et je reprends Arlette Chabot, je reprends toute ma liberté.
Arlette Chabot
Alors vous dites ce matin dans une interview à notre confrère les Echos, justement que la ligne, c'est vous qui la définissez donc je cite, c'est moi qui la trace, je regarde la réalité de la France, telle qu'elle est et je propose des solutions efficaces sans être prisonnière d'aucun dogme. Donc ça c'est la liberté de Ségolène Royal qui s'affranchit à nouveau de tout ?
Ségolène Royal
Oui parce que je crois que c'est ce que les Français veulent, une élection présidentielle par nature est un lien direct entre une personne et le peuple français, ce n'est pas l'élection d'un parti politique, ce n'est pas une élection législative. Le parti Socialiste et les autres partis de gauche, les Radicaux, le Mouvement des Citoyens, mais bien au-delà puisque pour rassembler une majorité dans le pays, il faut rassembler bien au-delà des partis politiques, ceux qui se retrouvent sur les valeurs que je défends. Et en particulier l'idée que l'on peut et que l'on doit avoir à la fois la solidarité et l'efficacité économique et que l'un ne va pas sans l'autre, que l'efficacité économique ne va pas sans le progrès social et sans le progrès environnemental. Tout se tient, ce sont ces trois piliers qui se tiennent. On y reviendra sans doute tout à l'heure.
Arlette Chabot
Oui sûrement.
Ségolène Royal
Donc c'est pour cela que par définition, c'est la nature même de l'élection présidentielle, il m'appartient d'être libre et d'être en cohérence avec mon histoire et avec ce que je propose pour les cinq ans qui viennent et je l'ai dit tout à l'heure, même au-delà.
Arlette Chabot
Oui, mais quand même quand vous expliquez ce que vous devez incarner, la nouveauté, la révolution parce que vous êtes une femme, on en parlera tout à l'heure, et puis maintenant on se dit tiens, l'homme nouveau c'est François Bayrou, c'est lui qui dérange le candidat anti système, la nouveauté c'est lui. Comment vous appréciez cette émergence de François Bayrou ?
Ségolène Royal
Je crois que les Français cherchent, ils regardent, ils observent, ils écoutent, ils ne veulent pas se laisser avoir une nouvelle fois. Il y a eu en politique tant de promesses faites et non tenues. Et puis les gens ont parfaitement compris, je l'ai vu dans les débats participatifs, ils ont parfaitement compris que la situation de la France était difficile, que la France était gravement endettée, que la machine économique était bloquée, qu'il y avait des turbulences dans le monde, qu'il y avait une montée des insécurités, des précarités, des nationalismes, des terrorismes et donc par rapport à ces turbulences du monde, ils veulent comprendre qu'elle est encore la place de la politique.
Arlette Chabot
Donc François Bayrou, ça peut être une meilleure solution que Ségolène Royal ?
Ségolène Royal
Je ne le crois pas, mais ce sera la confrontation des projets qui le montrera. Il y a un projet à droite, celui de Nicolas Sarkozy, il y a le mien, je l'ai présenté sous forme de pacte...
Arlette Chabot
Et celui de François Bayrou.
Ségolène Royal
Parce que je considère je crois que c'est important que ce n'est pas seulement un programme unilatéral que je propose, mais je l'ai construit avec les Français, c'est-à-dire je m'engage avec eux, ils s'engagent avec moi et c'est parce que chacun sera à sa place avec une capacité d'avancer que la France à nouveau avancera. Et puis il y a François Bayrou qui pour l'instant n'a pas de programme puisqu'il l'a dit...
Arlette Chabot
Enfin ça marche en tout cas dans l'opinion, je ne sais pas s'il n'a pas de programme mais en tout cas...
Ségolène Royal
Oui mais il y a une attente, à un moment il va y avoir l'heure de vérité. Donc il a dit lui même qu'il n'avait pas de programme pour l'instant donc j'attends son programme, nous en débattrons et les Français choisiront et je suis confiante.
Arlette Chabot
Il n'y a pas de panique au PS parce qu'il y a un syndrome 21 avril et il y en a qui disent oh là là, au secours peut-être qu'il n'y aura pas de candidat de gauche au second tour encore une fois en 2007.
Ségolène Royal
Vous savez les Français vont choisir.
Arlette Chabot
Ca peut arriver ça ?
Ségolène Royal
Je ne crois pas. Je ne crois pas parce que les Français ont besoin, et ont envie d'un changement profond, donc ils ont le choix entre la continuité de ce qui existe, un candidat qui prolonge ce qui vient de se faire pendant cinq ans et on a vu avec quel résultat. Ils ont ensuite un autre candidat qui est le candidat de l'UDF, dont on attend le programme. Il y a bien sûr d'autres candidats, ailleurs et puis il y a la candidature que je représente. Et moi je pense pouvoir incarner ce changement profond tout simplement parce que je porte sur le monde un regard neuf, que la France a besoin de ce regard neuf, de solutions nouvelles et en même temps de solutions bien encrées sur ce qui fait notre unité nationale.
Arlette Chabot
C'est impossible que vous ne soyez pas au second tour de l'élection présidentielle ?
Ségolène Royal
Ce sont les Français qui choisiront, mais ce débat là il est un combat essentiel parce que je veux que les Français aient un vrai choix, qu'ils ne soient pas comme en 2002 privés de ce choix projet contre projet, valeur contre valeur. Et le choc des projets il doit avoir lieu pour que les Français choisissent. Ils choisissent entre la précarité ou au contraire la revendication de sécurité pour tous et moi je considère contrairement au programme de la droite qui estime qu'avec la précarité on fait de l'efficacité économique, moi je crois que tout le contraire, que c'est en sécurisant les citoyens qu'on les mobilisera dans le travail et que les entreprises seront plus efficaces.
Arlette Chabot
Donc il n'y aura pas de droite droite au second tour cette fois selon vous, il n'y a pas de risque. Il n'y a pas de risque sauf si les Français...
Ségolène Royal
Mais tout dépend de moi. Tout dépend de moi et c'est pourquoi ce combat il est absolument crucial, et c'est pourquoi je suis déterminée à me faire comprendre des Français, d'abord parce que ce pacte présidentiel, ils l'ont construit avec moi, j'ai pris le temps de les écouter. Je connais la France qu'ils ne veulent pas et la France qu'ils veulent. Je sais à quoi ils sont attachés. Et en même temps j'ai compris aussi leurs doutes, leurs souffrances, leurs incertitudes, le sentiment de ne compter pour rien, une attente désespérée de quelque chose qui ne vient pas et en même temps aussi leur talent, leur espoir, leur potentiel, et que la France mérite mieux que ce qu'elle a.
Arlette Chabot
Alors on va en parler tout à l'heure de votre programme, je voudrais petit retour en arrière, vous dites effectivement un candidat, une candidate, c'est une histoire, un passé, une vie, des choix. Retour en arrière, on feuillette un album un peu bizarre parce qu'on est à la télévision. On regarde des photos, on se penche vers le passé. Alors très en arrière, voilà Ségolène Royal, des nattes, les cheveux ont toujours été un petit peu long. La petite fille, il y a un film qui va arriver de ce côté, voilà les bonnets rouges, il y a 8 enfants chez les Royal. Vous êtes la quatrième, je ne me trompe pas, je parle pour vous. Vous vous souvenez de cette photo, ou de ces images, vous êtes quelque part là dedans.
Ségolène Royal
Non, vous avez beaucoup de talent, où vous avez retrouvé ça ?
Arlette Chabot
Sur les bonnets rouges.
Ségolène Royal
Oui c'était ma mère qui avait 8 enfants, donc qui cousait beaucoup et qui tricotait beaucoup pour faire des économies. Quand on a 8 enfants, vous avez tricoté à tous des bonnets rouges pour l'hiver.
Arlette Chabot
La famille au bonnet rouge.
Ségolène Royal
La famille au bonnet rouge et quand on se perdait dans notre village des Vosges.
Arlette Chabot
On vous retrouvait comme ça.
Ségolène Royal
On nous retrouvait comme ça voilà.
Arlette Chabot
Quand on est dans une famille de 8 enfants, qu'est-ce que ça apprend, la solidarité ou la volonté de s'en sortir parce qu'après tout on est 8 et il faut sortir la tête pour être mieux que les autres, réussir mieux que les autres ?
Ségolène Royal
Je crois que ça apprend le partage surtout, le partage, la solidarité. Ca apprend aussi de la part des parents, que plus on a d'enfants, plus on aime, l'amour ne se partage pas. Plus on a de personnes à aimer finalement, plus l'amour grandit. Et ça apprend aussi que finalement les solidarités familiales de base sont ce qui vous porte ensuite je crois toute la vie. C'est peut-être pour ça aussi que j'ai voulu moi aussi avoir une famille nombreuse parce que...
Arlette Chabot
Une famille, quatre enfants.
Ségolène Royal
...parce que je crois que les solidarités entre enfants sont irremplaçables.
Arlette Chabot
Alors on avance un tout petit peu, vous êtes à l'école, on va vous voir sur cette photo qu'on a déjà vu, vous êtes à ce moment là à Epinal, on vous appelle Marie Ségolène, à quel moment vous avez renoncé à Marie ?
Ségolène Royal
Je ne sais plus très bien, je pense, je ne sais plus, en arrivant à l'université je crois.
Arlette Chabot
Il reste quelque chose de cette éducation un peu catholique ou pas chez vous. Vous êtes croyante ou vous avez abandonné la religion ?
Ségolène Royal
Il reste toujours quelque chose d'une éducation de l'enfance, ça structure toujours surtout quand on est...
Arlette Chabot
Même la religion.
Ségolène Royal
Bien sûr même la religion. Il y a dans les religions aussi des morales universelles lorsque l'on apprend le respect des autres, la lutte contre la pauvreté, l'attention à porter, bien sûr que ça structure mais en même temps ça permet aussi de s'en affranchir. Et je crois que les enfants les plus en souffrance sont ceux à qui on ne transmet aucune règle, parce que si on n'a aucune règle, on ne peut plus choisir ses libertés et donc je suis favorable moi à l'autorité parentale par exemple.
Arlette Chabot
On en parlera tout à l'heure parce que c'est vrai que...
Ségolène Royal
Parce que je crois que c'est l'autorité qui permet de grandir, parce que ça permet la transgression et dans la religion c'est pareil je crois, c'est-à-dire on garde à la fois des racines d'une identité culturelle et en même temps on a la possibilité de s'en affranchir et de les transgresser pour en choisir d'autres.
Arlette Chabot
Alors on va regarder parce que cette enfance a quand même été difficile. On a retrouvé ce que vous disiez à notre ami Henry Chapier, sur le divan, c'était en 1994.
Ségolène Royal
Moi-même j'ai eu une enfance et une adolescence extrêmement pénible, violente, ces épreuves que j'ai connu, c'est aussi ce qui fait ma force. Toute mon enfance et toute mon adolescence, j'ai entendu mon père dire, vous les filles, vous êtes faite pour le mariage et vous ne ferez pas d'études. Donc mes soeurs qui étaient les aînées ont été sacrifiées à cette logique là et moi qui ait eu plus de chance, puisqu'étant au milieu de la fratrie, je suis arrivée à un moment où j'ai pu me révolter. Et puis j'avais trop souffert des valeurs de la droite traditionnelle dans ma vie d'adolescente que c'est quelque chose aussi avec laquelle j'ai été en rupture.
Arlette Chabot
Les mots sont forts, vous disiez pénible, vous parliez de violence, c'est fort quand même, ce n'est pas une enfance heureuse ?
Ségolène Royal
Mais ce n'était pas une violence, ce n'était pas une violence, je n'ai pas été maltraitée si vous voulez.
Arlette Chabot
Non j'ai bien compris, mais c'est fort quand même.
Ségolène Royal
Oui mais je vais vous dire, je ne sais pas de quand datent ces images.
Arlette Chabot
94.
Ségolène Royal
94 oui, je pense aussi qu'avec l'âge, on fait le tri des choses et on garde les côtés positifs de la vie. Et moi le regard que je porte maintenant sur mon passé est positif parce que je sais ce qui m'a été transmis et qui me rend solide aujourd'hui et j'ai eu la chance d'avoir à me battre pour échapper au destin qui m'était tracé. Et je crois que c'est ce qui a forgé aussi ma volonté de socialiste, c'est-à-dire avoir une révolte bien intacte et se dire que si je suis un jour présidente de la République, je veux pour tous les enfants de France dont le destin est tracé d'avance qu'ils puissent se dire, que non, que la République va leur donner les moyens de s'échapper à ce destin tracé d'avance pour qu'ils puissent choisir le leur. Je crois que c'est ça le socialisme moderne du 21ème siècle.
Arlette Chabot
Votre volonté c'était de montrer à votre père que vous pouviez mieux réussir que vos frères ?
Ségolène Royal
Sûrement pas.
Arlette Chabot
Non.
Ségolène Royal
On n'était pas en compétition entre frères et soeurs.
Arlette Chabot
Non mais vous c'est une fille, non mais c'est une fille par rapport au garçon, c'était de mieux réussir.
Ségolène Royal
C'était de m'affranchir, c'était de conquérir ma liberté et c'était de ne pas subir le destin des femmes de ma famille qui ne travaillaient pas, qui n'avaient aucune autonomie financière. Je pense que l'autonomie financière donne aussi de la liberté. Et puis j'adorais l'école et mes enseignants m'ont toujours poussé à avancer. Et en même temps je suis sans rancune puisque si mes parents, si mon père était comme ça, c'est que lui, il pensait faire pour mon bien. Il avait lui même reçu ces principes là de la génération précédente. Donc moi j'ai pu bâtir ma vie, j'ai pu construire ma vie, j'ai pu la choisir. J'ai pu échapper à ce destin tout tracé, je me suis battue et je crois que c'est une force intérieure.
Arlette Chabot
Et vous avez la même force aujourd'hui ?
Ségolène Royal
Oui parce que je comprends aussi tous ceux qui subissent aussi des discriminations ou qui se disent je ne peux pas choisir mon destin, je n'y arriverais pas. Et moi je veux dire à tous, si tout le monde peut y arriver grâce à l'école et c'est pourquoi aussi dans ce pacte présidentiel l'école prend tellement tant d'importance, peut-être parce que je suis le pur produit de cette réussite scolaire de la République et c'est ça qui m'a permis d'avancer.
Arlette Chabot
Alors on avance nous aussi dans l'histoire. Deux modèles peut-être, vous allez voir, il faut regarder sur les deux images. Jeanne D'ARC, ça on se disait, c'est une héroïne que vous avez côtoyé ou découverte quand vous étiez en Lorraine. Jeanne D'ARC, c'est un symbole pour vous ?
Ségolène Royal
Bien sûr c'est une vie extraordinaire.
Arlette Chabot
Courte.
Ségolène Royal
Courte, elle n'a pas eu 20 ans, elle a transgressé les interdits en remettant un habit d'homme. Elle a essayé de sauver la France, bien sûr c'est une femme extraordinaire et il n'y a aucune raison d'en laisser le monopole à je ne sais qui.
Arlette Chabot
A Jean-Marie Le Pen par exemple ?
Ségolène Royal
Par exemple.
Arlette Chabot
De l'autre côté François Mitterand, c'est la campagne 1988, la France unie, est-ce que quand vous faites votre campagne aujourd'hui vous pensez à celle de François Mitterand, notamment à celle là que vous avez suivi de près ?
Ségolène Royal
Quand je reçois des attaques oui, ou des coups très rudes, je me dis que ce n'est presque rien par rapport à ce qu'il a subi et donc ça me permet de les surmonter. Et puis je garde toujours intacte l'une de ses leçons qui consiste à penser toujours que c'est parce que je défends des idées qui sont plus grandes que moi, que j'avance. Et puis une autre leçon je crois pour la place de la France dans le monde, c'est que quand la France rencontre une grande idée, cette grande idée fait le tour du monde. Et donc quand je pense aux épreuves, quand je pense à l'identité de la France et quand je pense à la place de la France dans le monde alors je tiens debout et je me dis que j'ai un devoir de victoire.
Arlette Chabot
Et vous pensez à François Mitterand. Alors on revient à l'actualité, il y a deux photos, il faut bien les regarder ensemble, vous allez découvrir, on va revenir à effectivement ce qui se passe aujourd'hui un petit peu à la campagne présidentielle. Voilà alors vous avez fait partie des, de ce qu'on appelait à l'époque des trans-courants, c'est-à-dire que vous étiez proche de Jacques Delors, on vous voit là à côté de Jacques Delors. Et alors vous regardez de l'autre côté et vous voyez Jacques Delors avec François Bayrou. On revient à François Bayrou parce que quand il dit qu'il voudrait comme Premier ministre un Jacques Delors jeune, franchement ça ne peut pas être quelqu'un de méchant ou de mauvais François Bayrou ?
Ségolène Royal
Ce n'est pas très aimable pour Jacques Delors vous l'avouerez.
Arlette Chabot
Je ne sais pas moi, pourquoi, Premier ministre de François Bayrou, ce n'est pas honorable, ou un Jacques Delors jeune.
Ségolène Royal
Moi je ne fais pas de sélection par l'âge surtout pour Jacques Delors qui a gardé une vitalité exceptionnelle et qui aurait beaucoup à en revendre et en particulier à François Bayrou.
Arlette Chabot
Sérieusement quand on voit ça, est-ce que ça veut dire quand même que vous n'êtes pas aussi éloignés les uns des autres ? C'est-à-dire François Bayrou dit, il y a des vrais clivages avec Nicolas Sarkozy mais en revanche avec Ségo c'est un peu plus compliqué, avec la gauche, c'est un peu différent, il y a des différences, mais pas de divergence. Alors quand on voit ça on se dit, c'est vrai que finalement vous n'êtes peut-être pas aussi éloignés les uns des autres ?
Ségolène Royal
Ca tombe bien de clarifier les choses, ce matin Jacques Delors a pris très clairement position dans le Nouvel Observateur. Il m'a apporté un soutien très clair, il a dit d'ailleurs quelque chose d'exceptionnel qui m'a beaucoup touché, il a dit qu'il avait trouvé des trésors dans ma campagne. Trésors de la démocratie participative, le trésor de l'écoute et puis le fait d'avoir construit mon projet avec les Français. Et enfin il a dit que je défendais des valeurs auxquelles il tenait beaucoup, la famille et l'école. Et c'est vrai que je pense que si l'on veut remettre debout la maison France alors il faut que les familles fonctionnent bien. Si on veut prévenir la délinquance, il faut aider les parents à éduquer leurs enfants et que école, famille, travail, valeur travail, tout se tient.
Arlette Chabot
Mais si je comprends bien, on ne fait pas du genre puisque Ségolène était proche de Jacques Delors et que François Bayrou dit qu'il aime beaucoup Jacques Delors, François Bayrou et Ségolène Royal ne vont pas travailler ensemble, il ne faut pas en déduire ça, ou ils vont travailler ensemble. Ce n'est pas possible, pour que les choses soient claires.
Ségolène Royal
Mais les règles sont très claires.
Arlette Chabot
Ce n'est pas possible ça, vous ne pouvez pas être ensemble, travailler ensemble, vous retrouvez pour un second tour de l'élection présidentielle ?
Ségolène Royal
Ecoutez pour l'instant François Bayrou, je l'ai dit tout à l'heure n'a pas de programme, on verra ce qu'est son programme. Ensuite il a toujours fait des alliances au sein de la droite et avec la droite.
Arlette Chabot
Et s'il disait, s'il s'alliait, s'il vous faisait des propositions un jour pour un second tour, vous diriez non, non pas du tout ou discutons ?
Ségolène Royal
Mais moi je ne suis pas dans des négociations d'appareil et de personne, moi je suis pour défendre le pacte présidentiel que j'ai construit avec les Français et pour les convaincre. Pour les convaincre que la France peut à nouveau se relever.
Arlette Chabot
Donc pas de négociation avec qui que ce soit.
Ségolène Royal
Il n'y aura aucune négociation. Je n'en ai même pas eu au sein du parti Socialiste, des négociations, alors vous imaginez que je ne vais pas en avoir avec des personnes qui cherchent un peu où est la meilleure sortie. Non, non, moi je suis pour la clarté, la clarté des valeurs, la clarté des objectifs, la clarté des programmes, la clarté du débat politique et donc pour que cette campagne et cette élection présidentielle servent à la France.
Arlette Chabot
Petite question justement, précision, vous avez reproché, je ne vais pas dire aux éléphants, ça les vexe, mais je vais dire à certaines personnalités importantes du parti Socialiste de ne pas avoir fait bloc tout de suite autour de vous, mais en même temps, vous dites je suis seule, je décide de tout, franchement vous soutenir, ils ont peut-être du mal, il faut les comprendre.
Ségolène Royal
Je n'ai rien reproché.
Arlette Chabot
Vous avez dit, ils ont mis du temps à faire bloc autour de moi.
Ségolène Royal
J'ai répondu à une question. Vous savez moi je réponds très clairement aux questions qui me sont posées.
Arlette Chabot
Bon alors moi je vous la pose, donc...
Ségolène Royal
C'est vrai ils ont eu un peu de mal, ce que je comprends d'ailleurs.
Arlette Chabot
Mais vous en aviez vraiment envie qu'ils fassent bloc ou ça faisait un peu rétro...
Ségolène Royal
Ce n'est jamais désagréable quand même que tout le monde fasse bloc.
Arlette Chabot
Ca fait rétro, les anciens reviennent, ce n'est pas terrible pour l'image de Ségolène Royal, il y en a qui disaient ça aussi.
Ségolène Royal
Oui, mais je comprends qu'ils aient mis du temps sur le plan humain, parce que je crois que, c'était imprévu, quand même ma désignation, ce n'était pas dans les logiques du parti Socialiste. Il y a eu un débat interne assez vif, il y a eu tous ces nouveaux adhérents, pourquoi est-ce que j'ai été désignée, parce que les nouveaux adhérents sont à l'image des Français et ils ont une soif de changement. Ils veulent le socialisme du réel. Ils veulent aussi que l'on regarde au delà du parti socialiste et qu'on se tourne vers les Français et ceux qui m'ont désigné ont compris cela, donc c'est difficile, c'est une mutation aussi du parti Socialiste que j'entraîne, un changement profond sur la façon de faire de la politique et en plus je suis une femme. Donc ça fait beaucoup à la fois. Mais maintenant je me tourne vers l'avenir et je crois qu'aujourd'hui tout le monde est à son poste, c'est-à-dire ...
Arlette Chabot
Et tout le monde vous soutient et fait bloc autour de vous, derrière vous.
Ségolène Royal
Tout le monde est sur le terrain en train de valoriser les propositions et ça je crois que c'est très important.
Arlette Chabot
Petite question, les parrainages, on a entendu Olivier Besancenot dans le journal de 20 heures, dire qu'il avait effectivement ses signatures, les 500 qui lui permettent d'être candidat, vous n'avez pas un peu trop verrouillé, enfin le parti Socialiste n'a pas un peu trop verrouillé, ça va être dur après ce qui s'est passé pour empêcher qu'il y ait trop de candidats à l'extrême gauche, José Bové qui par exemple ne pourra pas concourir, c'est normal, ou c'est trop peut-être ce verrouillage ?
Ségolène Royal
Vous savez si la loi avait pu être changée, elle aurait du être faite avant. Quand j'entends le ministre de l'Intérieur souhaiter qu'il y ait davantage de candidats...
Arlette Chabot
Finalement c'est lui qui dit, il faut des parrainages pour Besancenot...
Ségolène Royal
Ce que je pense, d'abord c'est l'affaire du parti Socialiste, ce n'est pas la mienne. Premier point.
Arlette Chabot
Ce n'est pas la votre, chacun chez soi.
Ségolène Royal
Mais si je suis en responsabilité puisque je ferais une réforme institutionnelle profonde, la question de savoir si des mouvements de pensées qui ont obtenu lors d'une élection des suffrages suffisamment, en nombre suffisamment important pour représenter quelque chose dans la République française, doivent pouvoir concourir au scrutin suivant, je pense que cette question se pose. Donc il faut que les électeurs puissent se reconnaître et que le combat politique au sens noble du terme puisse avoir lieu clairement.
Arlette Chabot
Et ça par exemple ça passera par une proportionnelle évidemment que vous instaurez si vous êtes élue. Question, sur le gouvernement que vous pourriez former si vous êtes élue, parité, j'imagine, gouvernement resserré, peu de ministres.
Ségolène Royal
D'abord le gouvernement que je formerais aura pour mandat d'appliquer le pacte présidentiel que les Français auront choisi. Il aura cette feuille de route. Et en particulier il devra aller vite, ça c'est le premier critère de nomination du gouvernement.
Arlette Chabot
15 ministres ouverture, ou 20 ministres...
Ségolène Royal
Je pense qu'il faut que l'Etat se réforme en profondeur. Je crois que lorsque des compétences ministérielles ont changé 8 ou 9 fois en une dizaine d'années, ça met une forme de désordre au niveau de l'Etat. Donc moi je veux un Etat sobre, un Etat modeste parce que je crois qu'on peut concilier la modestie dans l'exercice du pouvoir et la grandeur de la France. Ce n'est pas incompatible, c'est d'ailleurs le Général de Gaulle qui le disait, il avait raison, il avait parfaitement incarné cela et en même temps, je crois qu'il faut dans une mutation et dans une réforme profonde des institutions, décentraliser l'Etat, non pas pour l'affaiblir mais au contraire pour le rendre plus fort. Il y aura aussi des règles d'éthique sur la diminution du train de vie de l'Etat. Je crois que ça c'est très important, les Français observent cela. Ils observent comment vivent leurs responsables politiques et je crois qu'il faudra en rabattre un peu sur le caractère un peu monarchique de l'exercice du pouvoir.
Arlette Chabot
Généralement c'est toujours ce que l'on dit pendant les campagnes et puis après ça ne suit pas.
Ségolène Royal
Eh bien je crois avoir prouvé que ça suivait parce que quand je suis arrivée à la tête de la région Poitou Charente, j'ai considérablement diminué le train de vie de cette région. J'ai supprimé les grosses voitures, j'ai supprimé les réceptions de toute sorte, les invitations gratuites qui partaient aux notables et qui partent désormais aux citoyens tirés au sort au hasard des choses. Et donc je crois que cette réduction du train de vie de l'Etat, elle est parfaitement possible. Je crois qu'il faut se rapprocher des démocraties nordiques qui font preuve d'une grande éthique dans l'utilisation des fonds publics et en particulier aucun ministre ne pourra vivre avec sa famille au sein des ministères en étant logé, nourri, blanchi au frais de la République.
Arlette Chabot
Il y aura des personnalités nouvelles, ce sera très rajeunie l'équipe Ségolène Royal ? Les anciens s'en vont, les anciens ministres non, il y a place à une nouvelle génération, c'est ça que vous souhaitez autour de vous dans une équipe ministérielle ?
Ségolène Royal
Je veux l'équipe la plus efficace possible.
Arlette Chabot
Mais alors ça, il va y avoir ambiguïté...
Ségolène Royal
Celle qui travaillera le plus rapidement possible, celle qui sera capable d'appliquer le plus vite possible et de ne pas décevoir les Français, parce que les Français ont un doute, vous avez vu, il y a encore plus de deux Français sur trois qui ne savent pas...
Arlette Chabot
61 % en plus disent qu'ils ne croient ni en la droite ni en la gauche pour gouverner...
Ségolène Royal
Mais qu'est-ce que ça veut dire ça, arrêtons-nous un instant. Ca ne veut pas dire que les clivages ont disparu, je crois bien au contraire, nous avons la responsabilité de faire en sorte qu'il y ait des choix très clairs avec des valeurs qui s'opposent et qui ne s'appuient pas sur les mêmes ressorts. Je l'ai esquissé tout à l'heure, on pourra peut-être y revenir. Je pense en particulier que la sécurisation, la lutte contre la précarité est un élément de l'efficacité économique, la droite pense le contraire. Je pense que l'efficacité des services publics est un élément de l'efficacité économique. La droite, l'UMP, le projet de l'UMP, c'est le contraire puisqu'ils proposent de supprimer un fonctionnaire sur deux. Je pense que la justice sociale est un élément de l'efficacité économique. Je crois aussi qu'il est possible de protéger l'Europe contre les délocalisations en faisant en sorte que les Etats assument leurs responsabilités. La droite croit davantage au marché. C'est un débat noble, ce n'est pas une mise en cause des personnes, ce sont des choix fondamentaux entre lesquels les Français doivent choisir. Mais quand ils disent, si je peux juste prolonger là dessus qu'ils ne croient plus dans la droite et dans la gauche...
Arlette Chabot
Parce qu'elles ne tiennent pas leurs promesses.
Ségolène Royal
Non, je crois que c'est plus grave que cela, c'est qu'ils ne veulent pas être instrumentalisés dans un vote. Eh bien moi ce soir je dis aux Français qui m'écoutent, votre vote je ne l'instrumentaliserais pas, c'est-à-dire que si vous m'apportez votre voix, je ne dirais pas que c'est le parti Socialiste qui a gagné l'élection présidentielle et qu'on va tout refaire comme avant. Et c'est de cela dont les Français ont peur, ils ont peur qu'il y ait, vous voyez une mauvaise interprétation de leur vote. Et moi je leur dis que votre vote, je sais que je l'aurais mérité, que ce n'est pas facile de faire confiance une nouvelle fois à des responsables politiques qui donnent le sentiment d'avoir les réponses aux problèmes avant l'élection et puis on attend après l'élection que cette efficacité se mette en place. Et moi comme je pense et que je crois que ce pacte m'engage et qu'il a été fait avec les Français, je suis tenue par la parole que j'ai donné, j'ai écouté pour agir juste, alors demain j'ai la responsabilité de tenir ma parole parce que c'est peut-être la dernière fois que les Français feront confiance à un vote et à un vote politique.
Arlette Chabot
Mais alors après c'est quoi si vous dites c'est la dernière fois, sinon après ce sera quoi à votre avis ?
Ségolène Royal
Sinon après ils ne viendront plus voter, ils s'échapperont vers les extrêmes. Ils feront des votes de protestation, et ils viennent déjà de se comporter comme cela lors des précédents scrutins et donc il faut écouter cette crise démocratique et ne pas instrumentaliser les votes. Je suis socialiste, fidèle à mon histoire, je veux rassembler la gauche, mais au-delà je veux m'adresser au plus grand nombre possible de Français et je leur dis très clairement votre vote ne sera pas instrumentalisé. C'est-à-dire les socialistes ne pourront pas dire, vous voyez on a pris notre revanche. Ce n'est pas un vote de revanche, c'est un vote de projet pour l'avenir.
Arlette Chabot
Alors trois petites questions et réponses courtes. Vous avez déjà choisi votre Premier ministre, parenthèse. Vous l'avez déjà en tête, vous y avez pensé ?
Ségolène Royal
J'y réfléchis.
Arlette Chabot
Et vous avez un nom dans votre tête déjà.
Ségolène Royal
Bien sûr, j'en ai plusieurs. Vous ne serez pas déçue Arlette Chabot.
Arlette Chabot
Ah bon, je croyais que vous alliez me dire, je ne vais pas le dire ce soir, j'étais sûre que vous ne le diriez pas ce soir, mais vous avez un choix.
Ségolène Royal
Oui, j'ai plusieurs hypothèses.
Arlette Chabot
Il y a plusieurs hypothèses en fonction de l'élection, des difficultés de l'élection, des personnalités, de la personne qui sera plus sympa avec vous, qui aura fait vraiment campagne pour vous.
Ségolène Royal
Je vous dirais tout cela le moment venu.
Arlette Chabot
Il y en a qui disent Dominique Strauss-Kahn, si je dis ça vous allez répondre...
Ségolène Royal
Ne jouez pas au jeu des devinettes.
Arlette Chabot
Je ne joue pas. Question d'actualité, certains disent que Jacques Chirac pourra être entendu dans l'affaire des emplois fictifs du RPR après le délai légal, c'est-à-dire un mois après son départ de l'Elysée, est-ce que vous souhaitez que la justice, vous allez me dire, fasse son travail, ou est-ce que vous pensez que c'est souhaitable que le président réponde des actes commis avant, ou est-ce que vous pensez qu'il faut laisser partir tranquillement un président qui a accompli son mandat, ses mandats ?
Ségolène Royal
Ecoutez moi je suis favorable, vous le savez à l'indépendance de la justice et d'ailleurs dans la réforme des institutions que je propose, dans cette réforme démocratique profonde que les Français attendent, la présidente de la République ne sera plus présidente du conseil supérieur de la magistrature. Et celui-ci sera donc totalement indépendant. Et dans tous les organismes indépendants, y compris le conseil constitutionnel, les membres seront désignés à une majorité des trois cinquièmes de l'Assemblée nationale, ce qui fait que majorité et opposition auront leur mot à dire sur la constitution des organismes indépendants qui font fonctionner la République.
Arlette Chabot
Et Jacques Chirac ?
Ségolène Royal
Donc indépendance de la justice et en même temps moi vous savez je pense que je ne suis pas quelqu'un par nature qui ait envie de s'acharner. Je pense que le respect aussi pour la fonction présidentielle aura peut-être méritée un certain délai. Je suis étonnée que cette information sorte tout de suite, alors que la campagne présidentielle est en cours et je crois qu'il faut à la fois que la justice fasse son travail et en même temps respecter les institutions.
Arlette Chabot
Alors la campagne est dure, violente. Votre ancien conseiller économique, Eric Besson, va publier un livre dans quelques jours. On a déjà des extraits dans le site du Figaro. Il dit " je ne souhaite pas pour mon pays et je redoute pour mes enfants une élection de Ségolène Royal ". C'est un mauvais coup ?
Ségolène Royal
Vous me l'apprenez parce que je ne suis pas...
Arlette Chabot
Voilà c'est en ligne sur le site du Figaro de ce soir, c'est pour ça que je vous pose la question. Voilà ce qu'il dit.
Ségolène Royal
Vous m'interrogiez tout à l'heure sur la dureté de campagne pour l'élection présidentielle, voilà ces péripéties en font partie. Mais vous savez, je suis une femme solide au clair avec elle-même et essentiellement tournée vers les Français. Ce n'est pas de moi qu'il s'agit, c'est de l'avenir du pays. Et donc c'est de cela dont il aurait du parler parce qu'il a du talent Eric Besson. Il aurait du nous parler de la France. Ca aurait été beaucoup plus intéressant.
Arlette Chabot
Question rapide avant que vous ne répondiez aux autres questions posées par les Français qui sont là et ceux qui vous interrogent, encore une fois, par le téléphone puis répondre aux questions de Nicolas Hulot qui viendra vous demander si vous vous souvenez bien de son pacte, que vous avez signé, de notre confrère Eric Le Boucher. Je vais vous poser deux questions. Vous aviez dit sur les 35 heures qu'elles avaient été adoptées de façon un peu technocratique et qu'elles avaient eu des effets négatifs sur des personnes un peu fragiles. Qu'est-ce que vous faites sur les 35 heures alors que le Parti socialiste dit qu'il faut généraliser ces 35 heures ? Quelle est votre position aujourd'hui ?
Ségolène Royal
Je pense qu'au niveau auquel je me situe dans cette candidature à l'élection présidentielle, ce qui est important c'est l'approche globale de la façon dont je vais aider les entreprises à redémarrer. La question du temps de travail en fait partie mais elle ne peut pas être isolée des autres problèmes.
Arlette Chabot
Alors vous allez parler des autres problèmes mais je voudrais juste que vous répondiez à ça. Est-ce que vous avez une position ou pas ?
Ségolène Royal
J'ai une position sur la relance de la machine économique. Et je veux m'appuyer sur les petites et moyennes entreprises qui aujourd'hui créent de l'emploi, qui ont des difficultés, qui sont en panne, qui ont besoin d'être aidées pour garder un coup d'avance dans l'innovation et dans la recherche, pour conquérir des marchés étrangers. Et donc je veux leur donner de l'agilité et de la souplesse.
Arlette Chabot
Donc c'est pas en leur imposant les 35 heures ?
Ségolène Royal
Donc c'est pas en leur imposant unilatéralement les 35 heures mais cette question fera partie de la nouvelle donne sociale. Parce que je veux aussi faire la démocratie sociale, je pense que c'est un des nouveaux ressorts de l'efficacité économique. Un dialogue social achevé avec des syndicats responsables et forts qui seront donc capables comme dans les pays du Nord de l'Europe de faire des compromis sociaux dans l'intérêt des ...attendez c'est très important parce que cette vision-la des choses m'oppose au projet de la droite. Je considère que c'est dans un dialogue social approfondi et j'ai rencontré les organisations syndicales et j'ai rencontré les jeunes dirigeants d'entreprise.
Arlette Chabot
Ce soir vous allez en parler avec les dirigeants d'entreprises.
Ségolène Royal
Juste d'un mot, qui ont tous envie de sortir rapidement de la logique de la confrontation pour aller vers une culture de la négociation, de l'anticipation qui donne à la fois de la sécurité aux salariés et de l'agilité, de la souplesse, de la flexibilité aux entreprises. Mais pas la flexibilité que pour les salariés.
Arlette Chabot
Quand Michel Sapin dit que ce serait un objectif, les 35 heures, la généralisation, un objectif on l'atteint ou on l'atteint pas. Il faut vraiment l'atteindre. Vous avez dit que c'était quand même, ça avait constitué l'application des 35 heures pour une minorité, une régression sociale. Franchement...
Ségolène Royal
Mais c'est pas incompatible.
Arlette Chabot
Non mais je veux dire, l'objectif, vous mettez du temps, c'est pas un truc que vous allez appliquer immédiatement.
Ségolène Royal
Pas du tout. De toute façon, ça fera de toute façon l'objet comme tout ce qui concerne...
Arlette Chabot
D'une négociation par branche ? Par branche, par entreprise ?
Ségolène Royal
Il y aura d'abord dès l'élection présidentielle l'ouverture de la négociation globale sur la croissance et sur les revenus de la conférence sur la croissance et sur les revenus et tous les sujets seront mis sur la table. Donc c'est un débat à trois avec une nouvelle donne.
Arlette Chabot
Donc les 35 heures seront dedans avec les PME par exemple ?
Ségolène Royal
Les salariés, les entreprises et les pouvoirs publics. Et les 35 heures seront mises sur la table à ce moment-la. Et les entreprises ne sont pas toutes dans la même situation. Et par ailleurs que vaut t-il mieux ? Des salariés bien formés, bien payés, bien motivés, bien productifs pendant 35 heures mais vraiment des 35 heures qui ont aussi amélioré leur condition de vie ? Ou des salariés qui travaillent 40 heures mais qui sont mal payés, mal considérés, mal formés ? Donc je veux dire par-là que la qualité horaire du travail est aussi importante que la durée du travail. Et j'invite le Medef à sortir des dogmes et à laisser penser que tout va mal à cause des 35 heures. Les 35 heures ont été mal appliquées dans certaines entreprises.
Arlette Chabot
Mais c'est fini les mesures qu'il faut imposer comme ça, à votre avis ? Vous vous dites, on fera pas comme avant. Donc si vous êtes élue avec un gouvernement socialiste, vous n'appliquerez plus, vous ne déciderez plus comme ça de façon autoritaire ou technocratique comme vous l'avez dit, de mesures comme les 35 heures ?
Ségolène Royal
Je déciderais mais pas de façon technocratique ? J'exercerais mon autorité, une autorité juste. C'est à dire que je laisserais faire d'abord le dialogue social, la négociation sociale.
Arlette Chabot
Et ensuite avec du terme. Vous dites, c'est pas deux ans, un an. Il faut laisser du temps.
Ségolène Royal
La négociation sociale est l'association des citoyens aux décisions qui les concerne dans tous les domaines parce que, vous le savez je pense, je crois beaucoup dans l'intelligence collective et je pense que l'une des valeurs nouvelles à faire monter en France, c'est faire en sorte que les intérêts des uns convergent avec les intérêts des autres.
Arlette Chabot
Que vous appelez le gagnant gagnant ?
Ségolène Royal
C'est ce que j'appelle le gagnant gagnant. C'est ce que j'appelle aussi les cercles vertueux. C'est un peu plus complexe mais ça veut dire qu'au lieu de s'affronter, de se détruire, quand il y a une grève très dure dans une entreprise tout le monde y perd alors que si il y a un dialogue social par anticipation et si les salariés ont le sentiment que l'entreprise se comporte bien. Et si les employeurs peuvent compter sur une certaine souplesse parce que les pouvoirs publics et l'Etat sera garant du juste équilibre du dialogue social...
Arlette Chabot
Et vous déciderez quand il faudra ?
Ségolène Royal
Et l'Etat, les pouvoirs publics, le Parlement décidera de généraliser ce que les partenaires sociaux auront réussi à négocier. Et donc les choses seront beaucoup plus solides. Et l'engagement aussi que je prends parce que je crois que c'est très important pour qu'un pays se redresse, c'est que les règles restent stables. Les gens en ont assez.
Arlette Chabot
Oui mais ça, c'est les alternances gouvernementales aussi.
Ségolène Royal
Mais écoutez c'est plus possible. Moi je ne viendrais pas ici détruire, par principe, tout ce qui a été fait avant.
Arlette Chabot
Mais vous vous souvenez tout ce que le Parti socialiste a dit, on annule, on annule, on annule ?
Ségolène Royal
Le Parti socialiste a dit cela et moi j'ai dis un certain nombre de choses. J'annule ce qu'il faut annuler, je remets des contrats à durée indéterminée. Par exemple comme le contrat...
Arlette Chabot
Le contrat nouvelle embauche par exemple ?
Ségolène Royal
Comme le contrat de référence sera le contrat à durée indéterminée. Je mets fin au désordre et je remets de l'ordre juste partout où la droite a semé du désordre.
Arlette Chabot
Mais c'est pas un retour automatique à ce qu'il y avait en 2002 ?
Ségolène Royal
Mais c'est pas un retour. Ce qui fonctionne bien, ce qui marche bien, il n'y aura aucune raison de le remettre en cause. Et bien souvent d'ailleurs, ce sont les gens qui font bien marcher les choses sur l'ensemble du territoire. En revanche ce qui me paraît très important, c'est que les règles soient stables. C'est à dire que pendant cinq ans, les gens connaissent quelles sont les règles sociales, les règles fiscales, les règles environnementales et qu'elles puissent et que chacun puisse construire sur la stabilité des règles.
Arlette Chabot
On va en parler.
Ségolène Royal
Et ces règles seront mises en place avant la fin de l'année. Et ensuite elles, non pas elles ne bougeront plus parce que...
Arlette Chabot
Donc des négociations fin d'année 2007, si vous êtes élue.
Ségolène Royal
Les règles seront claires. Il n'y aura plus de modification fiscale, sociale tous les ans ou environnementales. Les règles sont fixées. Ensuite elles seront bien évidemment adaptées au fur et à mesure puisque l'art de gouverner, c'est aussi d'avoir la capacité d'observer comment une règle définie à un moment donné s'applique. Il y a des interactions, le corps social, le corps humain, la nature humaine réagit à ces règles. Donc il y a un besoin d'adaptation permanent mais les règles ne seront pas changées en cours de route et donc les entreprises sauront sur quelles règles elles peuvent compter.
Arlette Chabot
On parlera avec des chefs d'entreprise dans un instant. Petite question, grande question, la dette. On a le compteur, 1221 milliards d'euros. On fait tourner. C'est à dire qu'à la fin de l'émission, on sera à 121 milliards 773. On en prend 13, 14 millions d'euros pendant les émissions. La dette, vous avez dit c'est épouvantable, en commençant votre discours de Villepinte. Vous avez une décision à prendre pour arrêter de creuser la dette ? Comment au moins arrêter de creuser la dette avant de la réduire. Qu'est-ce que vous faites ?
Ségolène Royal
C'est de faire redémarrer le pays. Pourquoi est-ce qu'il y a une dette ? Parce que quand il y a du chômage...
Arlette Chabot
Il y a trop de dépenses de l'Etat.
Ségolène Royal
Il y a trop de dépenses donc il faut faire des économies sur les dépenses de l'Etat. On en a parlé tout à l'heure. Il faut remettre de l'ordre dans la répartition des compétences. Aujourd'hui il y a des chevauchements entre les compétences de l'Etat, celles des Régions, celles des départements.
Arlette Chabot
Ca c'est la réforme de l'Etat. Et ça suffit pour arrêter les dépenses ?
Ségolène Royal
Je pense que c'est très important de remettre au clair les compétences parce que ça évite tous les doublons.
Arlette Chabot
Mais ça suffit pour réduire la dette ou arrêter le déficit budgétaire ?
Ségolène Royal
Et le troisième volet, c'est la relance économique. Si il y a moins de chômage, les cotisations reviennent dans les caisses, les recettes fiscales reviennent dans les caisses. Donc on ne peut pas déconnecter la question de la dette de la question du déblocage de la machine économique. Et le déblocage de la machine économique, c'est d'abord une question de confiance. Et si la France croit à nouveau en son avenir, si elle a à nouveau l'audace, le goût du risque, le goût d'entreprendre, le goût d'avancer...
Arlette Chabot
La croissance repartira ?
Ségolène Royal
Mais bien sûr.
Arlette Chabot
Et c'est vrai vous dites, si je suis élue ça fait 3% de croissance en France ?
Ségolène Royal
C'est pas moi qui l'ai dit, c'est l'ambassadeur des Etats Unis. IL m'a fait un beau compliment d'ailleurs.
Arlette Chabot
Alors vous êtes soutenue par l'ambassadeur des Etats Unis.
Ségolène Royal
Oui parce qu'il a dit...
Arlette Chabot
Alors ça, ça va étonner tout le monde.
Ségolène Royal
Les patrons américains ont dit, mais quand même si la France a l'audace de voter pour elle, c'est un signe de telle confiance dans l'avenir en disant, allez maintenant il faut que ça change, il faut qu'on avance, il faut regarder les choses autrement.
Arlette Chabot
Ca fera 3% de croissance ?
Ségolène Royal
Je ne sais pas mais en tous cas, le compliment je le prends parce que je crois en effet que c'est d'abord un lien de confiance mais c'est ensuite, bien évidemment, un euro dépensé, un euro utile. Et donc mettre fin au gaspillage. Et surtout penser le monde autrement. Et la question majeure, c'est celle des délocalisations.
Arlette Chabot
On va en parler dans un instant.
Ségolène Royal
Et la question de la dette. Vous savez, juste un point, les Français ils en ont parlé de la dette dans les débats participatifs.
Arlette Chabot
Oui c'est sûr parce qu'on leur répète tout le temps donc ils ont compris que ça coûtait très cher. Et qu'ils sont endettés chacun. Ils endettent leurs enfants.
Ségolène Royal
Ils sont endettés chacun et ils sont même sur endettés. Sur cette question-la on y reviendra aussi peut-être parce que les banques qui viennent de...tout le monde n'est pas endetté vous avez remarqué Arlette Chabot. Les entreprises du CAC 40 qui viennent de publier leurs bénéfices, plus de 100 milliards d'euros et qui en ont distribué 40 milliards aux actionnaires, c'est à dire deux fois plus que l'augmentation de leurs bénéfices. Ce n'est pas normal, c'est du désordre. Il faut remettre de l'ordre juste. Il faut que cet argent soit réinvesti dans l'innovation, dans la recherche et dans la création d'emploi. Lorsque les Français sont sur endettés parce que les banques...
Arlette Chabot
Donc c'est un impôt, il faut les taxer un peu plus comme on a dit pour certaines compagnies pétrolières ?
Ségolène Royal
Je suis très claire là dessus. Le Premier ministre que je nommerais, sa première feuille de route sera celle ci. Je veux qu'en France, une bonne fois pour toutes, le travail soit moins taxé que le capital. Vous vous débrouillez comme vous voulez, vous regardez partout...
Arlette Chabot
Je sais pas il y a des volontaires mais c'est dur.
Ségolène Royal
Vous regardez partout où ça se fait et j'ai dis dans mon projet d'ailleurs que je suis prête à baisser l'impôt sur les sociétés pour les bénéfices réinvestis dans l'entreprise. Et donc l'outil fiscal, l'outil social, les aides publiques de l'Etat doivent être supprimées là où elles sont inutiles, là où elles engraissent des lieux ou des entreprises qui n'en ont pas besoin parce qu'elles font déjà des bénéfices et qu'elles suppriment des emplois et qui, pourtant, reçoivent des aides publiques. Et je l'ai dis, je le fais dans ma région et je le ferais à l'échelle nationale, les entreprises qui délocalisent alors qu'elles font des bénéfices, qui licencient alors qu'elles font des bénéfices, rembourseront les aides publiques payées par les Français et par les contribuables français. Et je mettrais le paquet sur les autres, les PME, celles qui ne sont pas possédées par les fonds de pension.
Arlette Chabot
Ca va faire plaisir aux patrons de PME qui sont là.
Ségolène Royal
Oui parce que c'est sur eux qu'il faut s'appuyer pour avancer.
Arlette Chabot
Alors vous allez répondre donc aux questions. En attendant, on voit bien, Ségolène Royal en campagne c'est Ségolène Royal va vers les jeunes et Ségolène Royal va en banlieue. Jeff Wittenberg vous a suivie.
Ségolène Royal
Vous n'êtes pas un problème, vous êtes une grande partie de la solution. Les quartiers populaires ne doivent plus être considérés comme un problème mais comme une partie de la solution.
Jeff Wittenberg
Ma France à moi, chante Diam's. Ma campagne à moi pourrait dire Ségolène Royal,c 'est la banlieue. Vaulx en Velin, Clichy sous Bois, Bondy, on dirait les dates d'un Segolene tour des quartiers. Beaucoup lui reconnaisse une vraie capacité à s'adresser aux jeunes. Car elle sait aussi le parler, le jeune. Quand elle était à l'ENA, elle avait appris le droit, l'économie. En campagne, elle s'est mise au hip hop.
Intervenant
Qu'elle veuille déjà découvrir le hip hop alors qu'elle ne le connaît pas, c'est très très bien. C'est déjà une première bonne approche. Bravo félicitation. En espérant que vous soyez présidente.
Jeff Wittenberg
Parfois elle troque quand même la platine du Dj pour la main ferme de la maîtresse d'école. Oublié le look hip hop, chignon et manches retroussées, ce jour-la il était question d'encadrement militaire des jeunes délinquants.
Ségolène Royal
Il y a les incivilités où là on remet au carré les familles. Je connais des collèges où il y a entre 8 et 10 élèves qui, à eux seuls, pourrissent la vie de l'ensemble de l'établissement. Alors maintenant je crois que ça suffit.
Jeff Wittenberg
Bref sympa et décontractée à ses heures mais intraitable sur les principes. C'est peut-être l'ordre juste version mère de famille. Quatre enfants. Pour rester dans le coup, ça vous forge une crédibilité. Thomas l'aîné est passé du scooter à la bécane, Internet c'est lui entre autre qui a branché sa mère. On lui doit le site et le mouvement Ségosphere. A 22 ans le voilà en pleine lumière et il parle déjà comme un homme politique.
Thomas Hollande
Tous les jeunes peuvent venir, qu'ils soient déjà pour Segolene, qu'ils soient pas pour Segolene. En 2002 au niveau des suffrages exprimés, les jeunes ont voté en majorité pour Jean Marie Le Pen.
Jeff Wittenberg
Et en 2007 pour qui vont t-ils voter les jeunes ? Quand Ségolène Royal parle de ceux des banlieues, elle en a gros sur l'estomac.
Ségolène Royal
Je l'ai là chevillé au corps parce que je sais au fond de moi en tant que mère, que je veux pour tous les enfants qui naissent et qui grandissent en France, ce que j'ai voulu pour mes propres enfants.
Jeff Wittenberg
La culture jeune influence toute la campagne. D'abord les jeunes, il faut que ça fasse du bruit. Dans les meetings pas de carré VIP mais un carré jeunes toujours au premier rang. Et en fond sonore de la techno quand apparaissent ses guest stars sur l'écran. La même musique pour tous les invités. A la tribune les références.
Ségolène Royal
Diam's, dans ma France à moi. Comme l'a dit si joliment Arthur H, ma France a moi leur tiendra tête jusqu'à ce qu'ils nous respectent.
Jeff Wittenberg
Yves Duteil prenait un enfant par la main. Elle c'est le chanteur Cali. Jeunes et banlieue, Ségolène Royal a trouvé celui qui les réunit. Un soir elle s'est mêlé à son public.
Jamel Debbouze
Moi, je parle en mon nom. Je compte sur vous.
Jeff Wittenberg
Elle a même fait plus sur un plateau de télé. Pour l'Elysée Ségolène Royal est décidément prête à se bouger.
Arlette Chabot
Alors ça c'est le côté, j'allais dire, sympa. On a vu aussi sévère. C'est aussi ce qui fait dire aux Français que vous faites preuve d'humanité, que vous êtes proche des gens. En revanche c'est vrai qu'il y a une critique, c'est qu'on vous trouve moins compétente que Nicolas Sarkozy. Qu'est-ce que vous répondez à ça ? Pourquoi on vous trouve moins compétente ?
Ségolène Royal
Je ne sais pas. Si c'est l'âge, je ne vois pas d'explication. Kennedy a été président des Etats Unis à 43 ans, j'en ai 10 de plus donc ce ne doit pas être ce critère. Si c'est le fait d'être une femme, c'est vrai que ça mérite sans doute un petit effort d'imagination puisque ce serait la première fois qu'une femme serait élue au suffrage universel direct. Angela Merkel...
Arlette Chabot
Ce que vous dites, c'est que donc les Français vous imaginent avec une stature présidentielle, c'est ça ?
Ségolène Royal
Je ne sais pas, je pense qu'ils... je ne sais pas d'où vient cette idée parce que mon itinéraire politique il est là. Ma cohérence politique aussi. Le projet que j'ai fais avec les Français, il est là. Je pense que c'est un changement profond. IL y a à la fois l'identité féminine qui doit poser question et je comprends que cette question se pose, c'est une telle révolution. Et en même temps, je crois que c'est un atout aussi pour la France et que le temps des femmes est venu. Parce que je crois, non pas parce que je suis une femme et qu'il faut voter pour moi parce que je suis une femme mais parce que je porte un regard différent sur la société française.
Arlette Chabot
Mais c'est parce que vous êtes une femme que vous portez un regard différent ou c'est parce que vous êtes Ségolène Royal ?
Ségolène Royal
Peut-être parce que les valeurs que l'on disait traditionnellement féminines, regardez comme elles reviennent au devant de tout. L'éducation, les questions d'accès à la santé, la question de la transmission des valeurs et même la question des jeunes. Et en même temps je revendique aussi une compétence économique parce qu'aujourd'hui tout se tient. Et donc c'est dans cette approche globalisante qui est peut-être une approche féminine des choses, je crois que la France a besoin de cela aujourd'hui, de ce nouveau regard, de cette nouvelle façon de faire les choses. Et pour en revenir aux cités et aux banlieues, ce n'est pas incompatible.
Arlette Chabot
Vous êtes sévère quand même, vous retirez pas sur l'encadrement militaire même si il est humanitaire etc ou vous dites chaque délit ou chaque premier délit doit être sanctionné ?
Ségolène Royal
Bien sûr mais je crois que les jeunes attendent de la sévérité.
Arlette Chabot
Qu'est-ce que ça peut être par exemple la sanction pour un premier délit selon vous ?
Ségolène Royal
Un travail d'intérêt général. Mais aujourd'hui il n'y a rien. Un jeune qui vole...
Arlette Chabot
IL y en a quand même.
Ségolène Royal
Non. Un jeune qui fait un petit vol...
Arlette Chabot
Un rappel à l'ordre au moins dans le bureau du magistrat. C'est pas assez ?
Ségolène Royal
Il peut y avoir un rappel à l'ordre, ce qui est déjà pas mal mais il faut une réparation. Il faut toujours une réparation c'est comme ça que l'on aura le moins de récidive. Et c'est parce que je rétablirais la police de quartier aussi que les policiers pourront à la fois avoir une responsabilité de maintien de l'ordre et aussi devenir des adultes référents dans les quartiers, qui apprennent la loi. Et vous savez réussir dans les quartiers, c'est notre nouvelle frontière. Il y en a plusieurs comme ça des défis à relever et je les mets au même niveau. C'est le défi du réchauffement planétaire. Ca va vous paraître étrange ce rapprochement.
Arlette Chabot
Non on en parlera avec Nicolas Hulot mais c'est vrai.
Ségolène Royal
Et le défi de la réussite dans les quartiers parce que c'est notre avenir qui est là et aujourd'hui rien n'est réglé et je pense que si la droite repasse et je veux le dire sans détour, je crois que si la droite repasse les banlieues que nous avons, les émeutes que nous avons connues dans les banlieues ne sont rien par rapport à celles que nous connaîtront. Parce que là aussi il y a une très forte attente et là aussi je crois...
Arlette Chabot
Vous pensez que la droite n'est pas capable de répondre à cette attente ?
Ségolène Royal
Non la droite n'est pas capable de répondre à cette attente puisqu'elle a démantelé les services publics dans les quartiers, elle a retiré des moyens aux écoles. Elle a cassé la police de proximité. Elle a tenu des propos provocateurs à l'égard des jeunes et je le redis, si les jeunes ne sont pas un problème, ils sont une partie de la solution. Et la France qui a réussi dans les années 50 à faire accéder à la réussite scolaire les générations d'enfants issus du milieu rural dont les parents ne parlaient pas français, qui parlaient les langues régionales. Cet effort nous devons aujourd'hui le réussir à l'égard des jeunes français parfois qu'on appelle encore Français de 2ème, de 3ème, de 4ème génération alors qu'ils sont français. Et moi je refuse qu'on continue à les appeler de 1ère, de 2ème, de 3ème génération comme si il y avait des Français de souche et d'autres de feuillage et de branchage. On leur doit le respect à ces jeunes. Et c'est parce qu'on leur doit le respect qu'on peut attendre beaucoup d'eux et ce qu'ils attendent, c'est l'autorité et moi je leur donnerais de l'autorité et juste parce que je leur donnerais les moyens de réussir à l'école.
Arlette Chabot
Alors on va faire jeu questions réponses courtes parce que sinon ceux qui sont là seront déçus de pas pouvoir vous interroger. Je me tourne vers Stéphanie Vieuxble. Stéphanie est là. Bonsoir Stéphanie, vous avez 23 ans, vous avez fait les Beaux Arts. Vous avez une formation d'infographiste et puis pas de boulot, des CDD, de l'intérim et voilà. Posez votre question à Ségolène Royal.
Stéphanie Vieuxble
Je tenais à préciser quand même que j'ai eu une première expérience d'infographiste. Donc la question que je voulais vous poser, c'est une question qui est très générale mais qu'est-ce que vous allez faire pour l'emploi des jeunes ? Qu'est-ce que vous allez faire pour que les employeurs aient confiance envers les jeunes, tout comme la campagne de communication qu'on voit pour que les employeurs fassent confiance aux seniors. Est-ce que vous allez aller dans ce sens mais pour les jeunes ?
Ségolène Royal
C'est une question très importante parce que 25%, le taux de chômage des jeunes en France est le plus élevé d'Europe. Et moi je veux un nouveau pacte avec les jeunes et avec les entreprises qui demandent aux jeunes à la fois d'avoir une expérience professionnelle mais qui leur refusent de leur donner leur première chance. Et aujourd'hui les inégalités se sont creusées entre les jeunes à diplôme égal, entre ceux qui ont des relations, qui peuvent se faire recommander et ceux qui n'ont pas ces relations qui ne peuvent pas se faire recommander et qui ne trouvent pas d'entreprises pour leur faire confiance. Alors je créerais ce que j'appelle les emplois tremplins. Qu'est-ce que c'est qu'un emploi tremplin ?
Arlette Chabot
C'est un emploi jeune version 2007 ou pas ? La gauche 20025 a faut les emplois jeunes et vous, vous faites les emplois tremplin, c'est pas pareil ?
Ségolène Royal
Ce sera une partie des emplois jeunes qui devront être ré installés parce qu'ils ont été très utiles ces emplois jeunes.
Arlette Chabot
Dans les services publics ?
Ségolène Royal
Dans les services publics, dans les associations. Ca a permis ensuite à beaucoup de jeunes d'acquérir une formation professionnelle complémentaire, de prendre confiance en eux et ensuite de trouver des emplois sur le marché du travail. Ces emplois tremplins qui sont d'ailleurs déjà créés dans beaucoup de régions...
Arlette Chabot
Dans des entreprises aussi.
Ségolène Royal
J'en ai créés 3000 dans ma région. Sans dépense supplémentaire en redéployant les fonds de la formation professionnelle qui étaient trop gaspillés. 30 000 jeunes. Et j'en mets à disposition des entreprises. Ca veut dire qu'une entreprise qui hésite à recruter un jeune ou une jeune diplômée parce qu'elle ne sait pas si son chiffre d'affaire va se déployer, elle ne sait pas si elle ne peut pas garder le jeune, qu'il ne fait pas l'affaire, comment elle va faire pour licencier etc. Il y a un souci de la part des petites entreprises, elles sont frileuses, elles n'osent pas recruter les jeunes. Et moi je veux que les entreprises osent recruter les jeunes parce que c'est l'emploi de demain et je pense que l'emploi appelle l'emploi.
Arlette Chabot
Donc l'emploi tremplin qu'est-ce que ça veut dire ? Vous donnez quoi à l'entreprise ?
Ségolène Royal
L'emploi tremplin ça veut dire que les régions parce que je vais déléguer cette responsabilité aux régions qui sont au plus près des entreprises, vont payer pendant six mois la totalité salaire, charges du jeune qualifié ou diplômé à l'entreprise. Petite et moyenne entreprise. Et l'entreprise donc recrute ce jeune sans que ça ne lui coûte rien. Et le jeune, il a sa chance. Il a sa chance de faire ses preuves, de créer sa réalité dans l'entreprise, de prouver qu'il est utile. L'entreprise peut utiliser ce jeune pour mettre à jour un nouveau produit, les emplois dormants, ce qu'on appelle les emplois dormants.
Arlette Chabot
Et si ça marche pas.
Ségolène Royal
Soit ça marche pas et à ce moment-la on se rend compte que le jeune a besoin d'une formation professionnelle complémentaire, donc on l'accompagne individuellement parce que je crois qu'il y a beaucoup d'argent dépensé dans la formation professionnelle, qu'on peut utiliser cet argent autrement et qu'il vaut mieux payer un jeune à travailler que payer un jeune au chômage qui va déprimer, qui va être malade, qui aussi déprime sa famille. Et aujourd'hui dans les débats participatifs, vous savez la principale angoisse des parents et des grands parents, c'est la question du chômage des jeunes. Donc il y aura d'un côté ces emplois tremplins qui vont inciter les entreprises à recruter.
Arlette Chabot
Vous dites 500 000, c'est ça, en cinq ans ?
Ségolène Royal
Parce que je fais du gagnant gagnant, du donnant donnant. Les jeunes sont payés. En contrepartie ils doivent faire leurs preuves dans l'entreprise. L'entreprise, je lui paye le jeune. En contrepartie elle doit faire un effort pour garder ce jeune et ensuite lui faire un contrat à durée indéterminé si le jeune réussit dans l'entreprise et non pas s'en débarrasser pour prendre un autre jeune qui sera gratuit pendant six mois...
Arlette Chabot
Et ça c'est un risque. Et vous faites vous même les critiques de votre mesure.
Ségolène Royal
Oui mais je suis bien consciente et c'est pour ça que je vous dis gagnant gagnant et donnant donnant parce que l'entreprise, elle fera une évaluation. Le jeune sera accompagné par un tutorat de l'ANPE qui sera réformé en profondeur pour faire du sur mesure pour les jeunes et l'autre mesure très importante, c'est que désormais les universités et tous les centres de formation, seront responsables de l'accompagnement des jeunes. Et en contrepartie, les universités, je sais pas quelle formation vous avez fait, dans quel...
Stéphanie
Beaux Arts.
Ségolène Royal
Les Beaux Arts. Aujourd'hui les universités, elles forment les jeunes. Les jeunes ont des diplômes, débrouillez-vous. Est-ce que l'université vous a accompagné pour trouver un emploi ?
Stéphanie
Il y a un petit problème déjà au niveau des Beaux Arts c'est que les Beaux Arts, c'est le ministère de la Culture et l'université c'est le ministère de l'Education nationale.
Arlette Chabot
On parlera de l'université, il y a un président d'université qui est là.
Ségolène Royal
Je veux dire par là que c'est à la direction des Beaux Arts comme de toute université ou de toute école d'accompagner les jeunes vers l'emploi...
Stéphanie
Oui mais je vais m'embarquer dans un autre discours mais je veux dire, il y a déjà aussi une réforme à faire au niveau de ce système-la des Beaux Arts qui sont mis complètement à part par rapport à l'Education nationale.
Arlette Chabot
On vous promet, on reparlera des Beaux Arts.
Ségolène Royal
La question est importante. Il faut de la cohérence aussi dans les structures de formation par rapport aux jeunes qui sont reçus. Il faut de la cohérence et il faut de la responsabilité. Aujourd'hui il y a un système d'irresponsabilité généralisé quand les jeunes sont formés. Personne ne s'en occupe. Les entreprises disent, nous on a peur de les recruter. Les organismes de formation disent, c'est plus notre problème. Moi je veux une société de la responsabilité et donc l'Etat assumera ses responsabilités en mettant le pied à l'étrier aux jeunes, en aidant les entreprises dans un premier temps, en contrôlant l'utilisation des fonds. Et les organismes de formation auront la responsabilité de suivre les jeunes qu'elle forme.
Arlette Chabot
Est-ce que vous êtes favorable à ce que certains évoquaient à gauche, une espèce de RMI jeune ?
Ségolène Royal
Je suis pour qu'aucun jeune ne soit en situation de précarité.
Arlette Chabot
Oui mais le RMI ou une allocation en échange de quelque chose ?
Ségolène Royal
Non pas le RMI jeune. Je me suis engagé sur une allocation jeune adulte en contrepartie. C'est à dire au fond en soit, c'est un système de bourse amélioré parce qu'il y a 40% d'échec, 40% de jeunes qui sortent des deux premières années d'université sans diplôme.
Arlette Chabot
L'université on y reviendra tout à l'heure.
Ségolène Royal
Ecoutez c'est un gâchis effroyable, c'est une dépense d'abord publique qui ne conduit sur rien. Et c'est un gâchis pour les jeunes effroyable. Donc l'allocation jeune à condition qu'il y ait aussi une réforme de l'orientation, c'est à dire que l'on oriente les jeunes vraiment vers les besoins des entreprises, que l'on renforce le lien entre les entreprises et les universités et même au niveau du lycée et du collège. Je veux que l'on renforce le lien entre les entreprises et l'éducation pour que l'on apprenne très tôt l'esprit du risque et l'esprit d'entreprendre.
Arlette Chabot
Alors on va aller directement au lycée si j'ose dire Paul Bert, madame Khayat qui est proviseur du lycée donc Paul Bert dans le 14ème arrondissement. Madame Khayat allez-y.
Monique Khayat
Bonsoir. Vous avez été ministre déléguée à l'enseignement scolaire et vous avez approché de près les enseignants. Vous connaissez donc leur situation et leur préoccupation, selon vous quel est l'horaire hebdomadaire qu'in enseignant doit fournir dans son établissement ?
Ségolène Royal
Je vois à quoi vous faites allusion.
Arlette Chabot
Pour ceux qui n'auraient pas compris, c'est le jour où on vous avait surpris...
Ségolène Royal
Sur les 35 heures.
Arlette Chabot
Sur les 35 heures voilà.
Ségolène Royal Je crois que c'est une bonne référence les 35 heures et ce que je veux dire par là et au delà de la polémique qui m'a été faite, c'est que bien des enseignants font déjà les 35 heures. Et parfois bien au delà. Quand j'ai parlé des 35 heures, qu'est-ce que je voulais dire ? Je voulais dire qu'il y a non seulement les heures de cours, qu'il y a aussi le travail que vous faites en liaison avec les parents. Qu'il y a les conseils de classe, qu'il y a la préparation des cours, la correction des cours et ce que j'ai voulu dire et ce que je redis très clairement, franchement, devant vous, c'est que je souhaite que les enseignants puissent avoir des conditions de travail bien, correctes, dans les collèges.
Arlette Chabot
Pour qu'ils passent 35 heures dans les collèges et les lycées.
Ségolène Royal
Non, ce n'est pas ce que j'ai dit.
Arlette Chabot
Moi je vous pose la question.
Monique Khayat
Qu'incluez-vous dans les 35 heures ?
Ségolène Royal
Tout, je calcule tout dans les 35 heures.
Monique Khayat
C'est-à-dire le soutien scolaire, le travail qu'ils auront à fournir auprès de leurs élèves. Vous dites que vous souhaitez que les élèves bénéficient d'un soutien scolaire gratuit, donc les enseignants devront également rester dans l'établissement pour dispenser ce soutien scolaire ?
Ségolène Royal
Non madame ce n'est pas ce que j'ai dit. Vous savez moi je ne veux pas polémiquer sur la question de la durée du travail. On a déformé mes propos dans le cadre d'une campagne interne et je pense que la question du travail et de la qualité du travail des enseignants est une question majeure, ils souhaitent d'ailleurs eux-mêmes que cette question soit abordée. Les élèves souhaitent avoir davantage de contacts avec leurs enseignants et quand je dis soutien scolaire individuel gratuit, c'est gratuit pour les élèves. Et j'ai dit que les enseignants qui souhaitaient faire ce soutien scolaire pourront le faire en étant rémunérés, s'il n'y a pas suffisamment d'enseignants disponibles ou volontaires pour faire ce soutien scolaire gratuit, individualisé qui commencera à la rentrée prochaine, parce que moi je ne tolère plus les inégalités entre les enfants qui peuvent être aidés par leurs parents et qui ont un endroit où travailler tranquillement chez eux et ce qui reviennent le matin, la peur au ventre parce qu'ils n'ont pas pu faire leur travail, ni étudier leur leçon parce que les parents sont démunis sur le plan scolaire pour les aider...
Arlette Chabot
Soutien scolaire gratuit.
Ségolène Royal
Et qu'il y a des parents qui peuvent payer pour aider leurs enfants, je vois sur l'arrière des autobus, en ce moment, cette semaine, il y a une grande publicité pour un organisme de soutien scolaire coté en bourse. Vous trouvez ça normal dans l'école de la République ?
Arlette Chabot
Vous aviez dit que c'était les enseignements du public qui donnent les profs... qui donnent ces cours...
Ségolène Royal
Oui, si les enseignants veulent faire le soutien scolaire gratuit, je préfère qu'ils soient payés dans l'école de la République pour le faire, plutôt que payés à l'extérieur parce que je considère aussi que le pouvoir d'achat des salaires des enseignants a beaucoup baissé et donc il y a un sentiment de dévalorisation du métier d'enseignants et je veux que demain l'Etat soit garant de la reconnaissance du métier d'enseignant. Et en particulier madame, vous aurez une liberté pédagogique et d'expérimentation dans les établissements scolaires sans subir des contrôles tatillons parce que je pense que les enseignants et les chefs d'établissement qui sont en première ligne au contact des élèves savent souvent mieux que les chefs de bureaux et du ministère de l'Education nationale qui pondent des circulaires toutes les semaines, et ensuite il faut inventer des contrôleurs pour voir comment les circulaires sont appliquées. Eh bien moi je vais libérer l'expérimentation et donner des dotations horaires aux établissements qui feront du travail collectif, du travail d'équipe.
Monique Khayat
Vous dites madame avoir entendu les demandes de restauration d'image des enseignants, vous dites que vous souhaitez travailler à leur reconnaissance. Est-ce que vous considérez que seule la valorisation ou l'amélioration de leur pouvoir d'achat suffira à restaurer l'image des enseignants ?
Ségolène Royal
Je pense qu'il y a plusieurs choses pour restaurer l'image des enseignants, c'est d'abord une posture d'un chef d'Etat qui rappelle à la Nation le rôle fondateur de l'école. on l'a vu tout à l'heure dans les quartiers. C'est à l'école que tout commence et c'est là que tout fini. Et quand l'école fonctionne bien, quand la famille fonctionne bien, quand l'école fonctionne bien et qu'elle a les moyens de fonctionner, lorsqu'elle garantit à tous les parents que les enfants auront à égalité des chances pour réussir, alors à ce moment là la République se met debout et moi, en tant que chef d'Etat, je dirais cela aux Français. Et en même temps si je donne des moyens supplémentaires à l'école, je demanderais aussi à l'école de réussir davantage contre l'échec scolaire, là aussi on sera dans le gagnant, gagnant avec les familles, avec les enseignants, avec les pouvoirs publics parce qu'aujourd'hui les collectivités locales investissent beaucoup matériellement dans les établissements scolaires, je le fais à la tête de ma région, où j'ai notamment par exemple dans les établissements scolaires mis des animateurs culturels partout et donc les élèves aussi ont soif de culture.
Arlette Chabot
On termine là dessus si ça ne vous ennuie pas...
Ségolène Royal
Je voudrais juste terminer si vous le permettez, au cours des cinq années du gouvernement de la droite qui s'achève, il y a eu 125 000 suppressions d'emplois dans l'éducation nationale.
Arlette Chabot
Vous les rétablissez ?
Ségolène Royal
Oui je les rétablis.
Arlette Chabot
Les 125 000, vous dites 125 000 suppressions d'emplois, je ne sais pas si c'est vrai mais on vous croit, ça veut dire que vous rétablissez 125 000 postes dans l'Education nationale ?
Ségolène Royal
Je fais comme je l'ai dit des états généraux de l'Education nationale.
Monique Khayat
Vous créez donc des postes à l'Education nationale, vous vous engagez à créer des postes ?
Ségolène Royal
Oui madame dès la rentrée prochaine, pas 125 000 à la rentrée prochaine...
Arlette Chabot
Non mais progressivement. Vous dites en cinq ans, vous les rétablissez en cinq ans.
Ségolène Royal
Je suis sérieuse, les 5 000 qui ont été supprimés là dernièrement je les remets dans l'école et je regarde où est ce qu'il y a eu des destructions les plus profondes parce qu'entre les suppressions d'infirmières scolaires, du conseil d'orientation...
Arlette Chabot
Je vous demande de faire plus court...
Ségolène Royal
Non mais juste dire, il y a aussi tous les métiers qui vous aident à accomplir...
Arlette Chabot
Je suis d'accord mais ils sont là et ils ont envie de poser des questions...
Ségolène Royal
... qui sont aujourd'hui à l'os comme on dit. A l'os, il n'y a plus personne, il n'y a plus rien dans les établissements scolaires. Donc on remettra à nouveau, mais gagnant gagnant, c'est-à-dire que je demanderais aussi à l'école de réussir davantage sur la lutte contre l'échec scolaire et donc je libérerais les initiatives pédagogiques.
Arlette Chabot
Réponse courte, encore une fois parce que sinon ils vont tous être déçus de ne pas pouvoir parler. Sur la carte scolaire vous ne changez pas d'envie, il faut la bouger un petit peu, modifier un petit peu ?
Ségolène Royal
C'est un élément qui fait partie d'un tout, d'une discussion globale...
Arlette Chabot
Non mais c'est un souhait, vous dites les parents doivent avoir du choix entre trois établissements, c'est ça ?
Ségolène Royal
Je pense que la fuite vers l'école privée est un problème pour l'école de la République. Et donc il faut regarder ce problème en face. Moi je suis pour la politique du réel et lorsque les familles par milliers écrivent en disant finalement il y a une sélection par l'habitat, ce n'est pas l'école qui fait la ségrégation, c'est la politique urbaine et donc l'un ne va pas sans l'autre, c'est aussi par les politiques urbaines de mixité et par le libre choix pour les familles. Et comme ça on verra quels sont les collèges qui sont abandonnés ou les écoles qui sont abandonnées et dans celles-là on y mettra le paquet. On y mettra le paquet comment ? Des sections sports-études, des sections européennes, de la culture etc, et donc on pourra rattraper, donner plus à ceux qui ont le moins, à ce moment là. Mais on ne fera pas peser doublement sur les familles la double discrimination, la discrimination du logement et la discrimination de l'école. Moi je suis pour défendre l'école de la République et pour lui donner tous les moyens pour qu'elle fonctionne bien.
Arlette Chabot
Alors vous jouez le jeu, question courte, réponse courte. Marie-Hélène Bourlard, vous êtes là, Marie-Hélène est là, elle est déléguée CGT, elle vient de Valenciennes dans une entreprise qui travaillait pour LVMH, fabriquer, confection etc qui est en train de fermer. Je veux dire Marie-Hélène vous allez peut-être être licenciée, il y a un problème de délocalisation. Voilà posez votre question comme vous le souhaitez à madame Royal.
Marie-Hélène Bourlard
Bonjour madame.
Ségolène Royal
Bonjour.
Marie-Hélène Bourlard
Concrètement, qu'est ce que vous allez faire pour les délocalisations ? Est-ce que vous allez mettre aussi des règles européennes, puisque c'est l'Europe, on délocalise dans les pays de l'Est ? Moi demain je vais perdre mon travail comme les 147 salariés de CCE, ils vont perdre leur travail cette année, donc s'il n'y a pas de règle européenne, c'est délocalisé dans les pays de l'Est, concrètement qu'est-ce que vous allez faire ?
Ségolène Royal
Est-ce que je peux vous demander où votre entreprise est délocalisée ?
Marie-Hélène Bourlard
En Roumanie, Pologne, Hongrie. Donc c'est l'Europe.
Ségolène Royal
D'abord est-ce que l'entreprise fait des bénéfices ?
Marie-Hélène Bourlard
Oui.
Ségolène Royal
Eh bien déjà il y aura une première règle, une entreprise qui fait des bénéfices, elle devra rendre des comptes sur les raisons pour lesquelles elle délocalise et comme il y aura un dialogue social de qualité, c'est-à-dire vous qui êtes déléguée syndicale, désormais vous serez présente au conseil d'administration des entreprises, comme c'est le cas dans beaucoup de pays d'Europe qui ont déjà modernisé depuis longtemps leur dialogue social. Vous pourrez tirer la sonnette d'alarme beaucoup plus tôt et comme toute entreprise en France bénéficie de fonds publics sous forme d'exonérations, de formations professionnelles, d'équipements alentours en service public, d'aides régionales, les entreprises seront priées de rendre des comptes, celles qui font des bénéfices, sur les raisons pour lesquelles elles délocalisent. Et donc nous serons en capacité d'anticiper un certain nombre de choses et de remettre les entreprises devant leurs responsabilités. La seconde chose, c'est que je me battrais d'abord pour que l'Europe se protège contre les délocalisations à l'extérieur de l'Europe, mais aussi les délocalisations...
Arlette Chabot
Ca c'est à l'intérieur de l'Europe.
Ségolène Royal
... au sein de l'Europe.
Marie-Hélène Bourlard
Avec quelles règles aussi ?
Ségolène Royal
Avec les règles sociales et environnementales qui devront progressivement s'aligner. Alors il y a une phase transitoire qui va être un peu difficile...
Arlette Chabot
Parce que nos partenaires, nos mais Hongrois ou Polonais, ils n'ont peut-être pas envie de vos règles ?
Ségolène Royal
Si parce qu'ils sont entrés dans l'Europe donc par définition ils vont être conduits et on va les y inciter fortement...
Arlette Chabot
Vous voulez dire augmenter les salaires...
Ségolène Royal
Ca va être l'enjeu aussi de la renégociation sur le traité européen pour qu'il y ait un pacte social dans ce traité européen pour que petit à petit...
Marie-Hélène Bourlard
Il faudrait peut-être instaurer un SMIC européen.
Ségolène Royal
Il faudrait instaurer un SMIC européen, salaire minimum européen.
Marie-Hélène Bourlard
Et pourquoi vous ne le faites pas maintenant ?
Ségolène Royal
Parce qu'il y a aujourd'hui des pays qui ne sont pas au niveau du développement qui leur permet tout de suite de rattraper le SMIC français et donc nous devons aménager une phase transitoire. Et moi je suis favorable à une phase transitoire qui donne à ces pays des aides européennes comme cela a été fait pour le Portugal ou pour l'Espagne. Une sorte de plan Marshall pour les pays de l'Est de l'Europe pour que très rapidement ils rattrapent notre niveau de développement mais qu'en attendant on n'accepte pas les délocalisations au sein de l'Europe de la part des entreprises qui font des bénéfices.
Arlette Chabot
Alors Marie-Hélène ?
Marie-Hélène Bourlard
Oui mais concrètement, demain on va être licencié, les 147 personnes de mon entreprise vont être licenciées, qu'est ce que vous faites aujourd'hui pour les 147 salariés ?
Ségolène Royal
Je fais la sécurité sociale professionnelle tout de suite.
Marie-Hélène Bourlard
Oui mais il sera trop tard on ne sera plus là.
Ségolène Royal
Si parce que vous aurez au moins 90 % du salaire premièrement. Deuxièmement...
Arlette Chabot
C'est-à-dire quand on est licencié, selon votre système... il faut que tout le monde comprenne, excusez-moi.
Ségolène Royal
Tout le monde va comprendre.
Arlette Chabot
On est licencié, la sécurité professionnelle, c'est 90 % du salaire.
Ségolène Royal
Attention pas quand ce sont des entreprises voyous ou qui délocalisent, je ne sais pas si c'est le cas, ou qui délocalisent alors qu'elles font des bénéfices ou qui, j'en ai connu, j'en connais dans ma région, j'en vis également tous les jours et je vais vous dire une chose, le jour où il y aura le dialogue social, le jour où les organisations syndicales auront accès aux comptes de l'entreprise, le jour où les entreprises seront obligées de tenir compte de l'intérêt général et où les pouvoirs publics, notamment les pouvoirs régionaux en proximité seront alertés suffisamment tôt, il y a des choses que l'on pourra empêcher parce que les entreprises ne pourront plus se permettre un certain nombre de comportements comme je le vois moi dans Ma région où j'ai une entreprise de textile qui ressemble à la votre, qui délocalise en Tunisie, alors qu'elle fait des bénéfices et qui au passage fait une opération immobilière en vendant son siège social. Demain ça ne sera plus possible parce qu'on demandera des comptes à l'entreprise et on lui supprimera l'ensemble de ses aides publiques.
Marie-Hélène Bourlard
On est la dernière entreprise française, notre savoir-faire va disparaître, ça n'existera plus. Vous avez beau nous dire demain on va avoir 90 % de notre salaire, mais en quoi ?
Ségolène Royal
D'abord premièrement le savoir-faire ne doit pas disparaître.
Marie-Hélène Bourlard
Mais il va disparaître.
Ségolène Royal
Eh bien le savoir-faire ne doit pas disparaître et j'encouragerais comme on a réussi à le faire les salariés à reprendre leur entreprise en coopérative ouvrière de production quand c'est possible parce que vous avez raison quand il y a des productions qui ont encore de la valeur ajoutée, quand il y a des savoir-faire, quand il n'y a aucune raison de délocaliser, quand les entreprises font des bénéfices, eh bien vous aurez des facilités comme je l'ai vu réussir à plusieurs reprises pour reprendre l'entreprise en société coopérative ouvrière de production et ça, je vous y aiderais. Parce que je n'accepte pas non plus que la France soit vidée de sa substance comme c'est le cas aujourd'hui alors qu'il n'y a pas de fatalité. En revanche il y a certaines entreprises qui vont délocaliser parce que malgré leurs efforts...
Arlette Chabot
Vous ne voulez pas en parler avec un chef d'entreprise par exemple Ségolène Royal ?
Ségolène Royal
Allons-y, discutons avec un chef d'entreprise.
Arlette Chabot
Monsieur Roux de Bezieux, qui effectivement est à la fois un chef d'entreprise et un des responsables de Croissance plus, voilà, comme ça vous pouvez prolonger la conversation et poser des questions sur ce que vous attendez, voilà de madame Royal.
Geoffroy Roux de Bezieux
Bonsoir madame Chabot, bonsoir madame Royal.
Ségolène Royal
Bonsoir.
Geoffroy Roux de Bezieux
Moi, je suis créateur d'entreprise récidiviste en France je précise, et je garde mes emplois en France quelquefois avec difficulté, à peu près 3 000 emplois avec trois entreprises. Juste un mot vous avez beaucoup évoqué, réconcilier les Français avec l'entreprise et il n'y a pas un chef d'entreprise en France qui ne peut pas être d'accord avec ça, moi ça évoque un peu, j'étais en Angleterre à l'époque Tony Blair, je ne sais pas si la comparaison est positive ou pas, mais c'est vrai qu'il a réussi à réconcilier les Anglais avec l'entreprise. Il a aussi réconcilié les Anglais avec l'argent, avec la réussite matérielle et je pense que c'est un point important. On ne peut pas aimer l'entreprise sans aimer la réussite, sans aimer aussi les gens qui entreprennent, les riches qui créent des emplois dans ce pays et donc je pense qu'il est important de faire aimer les entreprises et de faire aimer aussi ceux qui entreprennent. Alors sur votre programme j'ai quelques petites questions, sur la création d'entreprise d'abord, vous avez un paragraphe dans le pacte présidentiel qui dit on va simplifier et aider le parcours du créateur, ce qui est évidement une bonne idée, il y a eu beaucoup de choses qui ont été faites, vous évoquiez, en disant on ne va pas tout détruire ce qui a été fait. Je crois que ce qui a été fait dans les cinq dernières années est plutôt positif. La vraie difficulté qu'on a quand on crée une entreprise en France, c'est les premières années, ce n'est pas la création elle même, c'est les deux, trois premières années, quand vous êtes tout seul ou avec quelques employés et que vous avez les mêmes règles administratives, fiscales, droits du travail que tout le monde. Mon point n'est pas de dire, il faut supprimer les droits du travail évidemment, mais ce n'est pas la même chose quand on est L'Oréal, ou Aventis ou une grande entreprise de faire face à 2 000, je ne sais plus combien de pages du code du travail et quand on est tout seul ou avec quelques employés. Donc première question simple, est-ce que vous êtes prête sans tabou, sans dogme comme vous l'évoquiez tout à l'heure à regarder une simplification pour les PME ? Deuxième question sur les contrats, vous allez...
Arlette Chabot
Alors on va peut-être répondre à la première déjà avant d'aller à la deuxième.
Ségolène Royal
Alors quel type de simplifications ?
Geoffroy Roux de Bezieux
Rendre la vie plus facile pour un chef d'entreprise pour qu'il se consacre à la croissance, aux chiffres d'affaire...
Arlette Chabot
Qu'est-ce que c'est rendre plus facile, c'est quoi ?
Ségolène Royal
Parce que vous avez raison, c'est très facile aujourd'hui de créer une entreprise...
Geoffroy Roux de Bezieux
C'est plus facile.
Ségolène Royal
C'est plus facile de créer une entreprise et les difficultés viennent la deuxième, la troisième, la quatrième année effectivement sur l'effort. Qu'est-ce que je propose ? D'abord je propose de m'appuyer, je ne sais pas combien vous avez de salariés.
Geoffroy Roux de Bezieux
La deuxième entreprise a 100, je viens de passer les 100 salariés.
Ségolène Royal
Vous êtes dans les PME. Parce que vous savez dans le discours globalisant ; on va aider les entreprises, c'est un discours assez nocif, parce que dans les entreprises, il y a les grosses entreprises du CAC 40 qui gagnent beaucoup d'argent et puis toutes leurs sous-traitances qui elles perdent beaucoup d'argent et sont en grande difficulté. Et votre exemple, madame, en est un exemple flagrant. Donc ça, ça suffit maintenant il faut que les profits soient équitablement répartis sur la chaîne de production, ça c'est la traçabilité entre le sous-traitant qui est pressuré par l'entreprise, la maison mère, qui souvent d'ailleurs s'est installé à l'étranger ou qui est possédé par les fonds de pension et donc je veux m'appuyer sur les PME. J'ai plusieurs propositions concrètes, d'abord je veux que dans les marchés publics, il y ait une part des marchés publics qui soit systématiquement réservée aux PME.
Geoffroy Roux de Bezieux
Ce qui est une bonne idée, mais ça ne répond pas à mon problème.
Ségolène Royal
Oui mais quand même vous aurez du chiffre d'affaires.
Geoffroy Roux de Bezieux
Moi je vends avec des consommateurs, donc en l'occurrence ce n'est pas tout à fait ça, mais...
Ségolène Royal
Deuxièmement je propose que le chef d'entreprise ne soit plus responsable, enfin n'ait plus sa caution personnelle, qu'il y ait une garantie des pouvoirs publics, des banques obligatoires, obligatoirement par les banques parce que les banques je vais y revenir, elles ne remplissent pas aujourd'hui en France le métier qui est le leur et je crois que l'ordre juste, c'est chacun son métier et les PME ont du mal à accéder aux crédits bancaires qui viennent d'ailleurs de publier des résultats florissants, de même que les compagnies d'assurances. Donc soit elles font payer trop cher, soit elles ne font pas leur boulot. Moi je veux que les banques fassent leur travail et prêtent aux PME. Et donc on regarde, elles auront un quota obligatoire...
Geoffroy Roux de Bezieux
Là c'est un vrai problème les banques, on est d'accord mais ça ne répond pas à ma question, est-ce que vous êtes prête à nous simplifier la vie pendant les deux ou trois premières années ? Est-ce que vous êtes prêtes à faire, excusez-moi du mot, je sais qu'il est... de la discrimination positive pour les jeunes entrepreneurs dans la période zéro à trois ans ?
Ségolène Royal
Mais bien sûr.
Geoffroy Roux de Bezieux
Et même sur le code du travail ?
Arlette Chabot
Qu'est-ce que vous voulez sous-entendre pour que les choses soient claires, parce que, attendez, le code du travail ça veut dire quoi ?
Geoffroy Roux de Bezieux
Eh bien prenons les contrats de travail par exemple, vous avez je crois une mesure qui dit, on va pénaliser les entreprises en CDD, et récompenser, enfin je ne sais pas si c'est les mots qui sont exactement ceux que vous employez, les entreprises en CDI. Quand vous êtes une jeune entreprise, vous ne connaissez pas votre chiffre d'affaires. Moi, c'est dans les télécoms, je ne sais pas combien de clients j'aurais dans six mois. Donc je suis obligé aujourd'hui de prendre entre guillemets un risque, et ce risque je le prends, j'embauche en CDI essentiellement, mais je ne sais pas si dans six mois j'aurais assez de chiffre d'affaires, assez de clients en fait, assez de chiffre d'affaires pour pouvoir payer toujours les gens.
Ségolène Royal
Vous aurez déjà les emplois tremplins.
Geoffroy Roux de Bezieux
Mais les emplois tremplins, je n'ai pas compris comment, si jamais le chiffre d'affaires...
Arlette Chabot
On ne va pas revenir dessus.
Ségolène Royal
Vous avez besoin d'exporter, vous avez besoin de mettre au point un produit ou un service, vous avez besoin d'un jeune très diplômé, vous ne savez pas si vous allez pouvoir le garder en fonction du développement de l'entreprise, ce jeune va être payé six mois et être mis à disposition de l'entreprise.
Geoffroy Roux de Bezieux
Et si ça ne marche pas qu'est-ce qui se passe ?
Ségolène Royal
C'est ce que je fais déjà dans ma région. Si ça ne marche pas, vous pouvez ensuite, le jeune il ne reste pas dans l'entreprise.
Geoffroy Roux de Bezieux
Je peux le licencier pour dire un gros mot.
Ségolène Royal
Il n'y a pas de licenciement, il n'y a pas de licenciement pendant six mois...
Geoffroy Roux de Bezieux
S'il n'y a plus de business, comment est-ce qu'on fait ?
Ségolène Royal
Pendant six mois le jeune est payé comme un complément de formation professionnelle. C'est de la réinjection intelligente des fonds de la formation professionnelle. Donc soit le jeune est utile pour le développement de l'entreprise, à ce moment là vous le gardez.
Geoffroy Roux de Bezieux
C'est quand même le scénario qu'on aime tous mais si ça ne marche pas... et même si le jeune est bon mais que le business n'est pas là, que le chiffre d'affaires n'est pas là, qu'est-ce qu'on fait ?
Ségolène Royal
Ca, vous ne le gardez pas non plus, mais le business doit être là, il faut partir quand même du principe, qu'il n'y a pas de licenciement.
Geoffroy Roux de Bezieux
Attendez si on recrute un chef d'entreprise, ce n'est pas pour licencier derrière, mais ça arrive.
Ségolène Royal
Vous n'aurez pas le souci parce que je sais que pour les entreprises qui se battent pour avoir des marchés qui se comportent correctement avec leurs salariés, qui créent des emplois, qui sont responsables envers leur territoire, je sais que ces entreprises lorsqu'elles sont confrontées, elles ont peur de recruter parce qu'elles ont peur de licencier et que c'est un drame social, parce qu'elles souffrent avec leurs salariés, c'est des procédures, c'est des prud'hommes, ça n'en finit pas etc. moi je veux que les entreprises n'aient plus peur de recruter, comment ? Par les emplois tremplins d'abord et parce que nous faisons face à un fléau qui est celui du chômage, des jeunes qualifiés et des jeunes diplômés. Et là je dirais aux entreprises, c'est votre responsabilité de donner leur chance aux jeunes.
Geoffroy Roux de Bezieux
24 ans de moyenne d'âge dans mon entreprise, donc je fais des efforts.
Ségolène Royal
Donc des emplois tremplins, vous pourrez développer et laisser une chance aux jeunes, il va peut-être vous aider à développer vos marchés ce jeune là.
Geoffroy Roux de Bezieux
Je suis d'accord avec vous, je n'ai pas compris comment ça se terminait mais je suis d'accord avec vous. Je suis désolé.
Ségolène Royal
Deuxièmement les exonérations de cotisations seront en effet liées à l'effort fait pour l'emploi. pourquoi ? Parce qu'aujourd'hui vous avez plein d'argent gaspillé, donné à des entreprises sans contrepartie, qui de toute façon auraient recruté les salariés et qui bénéficient des allégements de charges, alors que ce sont de grosses entreprises qui n'ont pas besoin de ça, moi je veux recibler les aides sur les PME et nous allons en discuter avec vous. Et troisièmement je suis prête, je l'ai dit tout à l'heure à baisser l'impôt sur les bénéfices s'ils sont réinjectés dans l'entreprise. Alors je ne peux pas vous dire mieux, c'est quand même pas mal.
Geoffroy Roux de Bezieux
Une dernière petite question.
Arlette Chabot
Très courte, très courte surtout la réponse parce que sinon, on ne va pas y arriver du tout là.
Geoffroy Roux de Bezieux
Vous avez parlé de sous-traitance et c'est vrai que c'est un vrai sujet en France, vous savez que les sous-traitants sont très souvent obligés de prendre des CDD de manière importante, pourquoi, parce que eux non plus n'ont pas la visibilité, donc vous allez pénaliser des entreprises qui n'ont pas le choix, structurellement de prendre des CDD alors qu'en réalité ce n'est pas un choix, ce n'est pas un patron voyou, c'est tout simplement le fait qu'ils ne savent pas quelle commande ils auront dans quelques mois.
Ségolène Royal
Vous avez raison au sens où si on arrive à responsabiliser les entreprises, si on met du dialogue social dans l'entreprise, vous aurez la possibilité de faire un dialogue avec les organisations syndicales et les organisations syndicales que j'ai rencontré CGT et CFDT sont prêtes à nouer des compromis sociaux, je pense qu'il faut que la France sorte de la culture de l'affrontement, de l'opposition de tous contre tous, des uns contre les autres, pour construire ensemble des valeurs ajoutées et je crois que la force d'un pays et en tout cas c'est parce que je pense vraiment que c'est la condition de l'efficacité économique, qu'on ne peut plus distinguer le social de l'économique et si on sécurise bien les salariés, ils seront productifs dans l'entreprise et vous aurez moins de soucis. Donc dans le dialogue social, on pourra discuter des allégements par branche professionnelle, par entreprise, dès lors que le dialogue social va se nouer dans l'entreprise, vous pourrez expérimenter un certain nombre de choses en fonction du seuil de l'entreprise au moment où elle grandit, l'entreprise a besoin de souplesse et d'agilité, mais les syndicats y sont prêts, si les salariés sont respectés. Et les pouvoirs publics joueront tout leur rôle pour récupérer les salariés.
Arlette Chabot
Vous allez vous revoir après.
Ségolène Royal
Juste un mot parce que ça n'a pas été compris sur la sécurité sociale professionnelle, madame a posé la question, au lieu d'avoir le souci du licenciement et au lieu que le salarié ait l'humiliation du chômage avec tout ce que cela comporte, il garde le contrat avec l'entreprise, c'est-à-dire sa dignité du statut de salarié et en contrepartie on lui donne 90 % du salaire avec les fonds des ASSEDIC et les fonds de la formation professionnelle, c'est du recyclage intelligent des fonds publics et ça permet aux salariés soit de chercher un autre emploi, soit de se former pour un autre métier et je vois beaucoup de femmes madame dans les métiers du textile qui sont en effet en train de perdre leur emploi et au lieu de tomber dans le trou du chômage avec la déstructuration familiale, elle garde 90 % de leur salaire et on les accompagne individuellement pour trouver un nouveau métier et notamment dans tous les métiers du lien social dont on a tellement besoin. Moi je reforme dans ma région des femmes licenciées du secteur textile et qui retrouvent de la dignité parce que dans les métiers auprès des personnes âgées, les métiers auprès des enfants, les métiers du lien social...
Arlette Chabot
Alors un effort de concision, ça ne vous ennuie pas.
Ségolène Royal
On peut leur redonner, les remettre debout.
Arlette Chabot
Alors petit effort de concision, il y a un mot que vous n'aimez pas beaucoup maintenant, c'est assistanat, c'est-à-dire qu'aucun revenu de l'assistance avez-vous dit, de soutien, ne pourra être donné sans contrepartie. Ca c'est vrai que ça peut être...
Ségolène Royal
Je suis contre l'assistanat. Je suis contre l'assistanat, aucun soutien ne peut être donné sans contrepartie. Et par exemple les bénéficiaires du RMI doivent être incités à retrouver du travail à condition que lorsqu'ils retrouvent du travail ou une activité d'intérêt général...
Arlette Chabot
Vous parlez comme Nicolas Sarkozy diraient certains, non ?
Ségolène Royal
Pas du tout, pas du tout parce que qu'est-ce qu'il dit lui ? Il dit que le meilleur gagne, que les gens...
Arlette Chabot
Mais il dit aussi aucun revenu de l'assistance, ce point précis ne peut être sans contrepartie.
Ségolène Royal
Ce n'est pas pareil puisqu'il détruit les solidarités de base. Moi, je dis qu'il faut construire des solidarités de base pour que chaque être humain ait accès à la dignité de son logement, de son activité, de sa formation professionnelle mais qu'en échange, il fait un effort, ou il donne une prestation. Par exemple les jeunes qui vont recevoir l'allocation autonomiste, c'est-à-dire une bourse par exemple pour les étudiants pour leur permettre de n'être pas dans la précarité et donc de réussir leurs études, devront en contrepartie donner des heures de soutien scolaire gratuit, ou d'activité auprès des associations caritatives etc, ils donneront quelque chose en échange à la société qui leur donne quelque chose et qui leur fait confiance. Ca s'appelle une société de la responsabilité.
Arlette Chabot
Alors vraiment on va faire un effort, avant qu'Eric Le Boucher nous rejoigne, petite question web cam, Mohamed.
Mohamed, artisan
5 ans en France sans papier, sans droit de travailler, quel est votre plan pour les sans papier et que dois-je faire pour en bénéficier sachant qu'il y a pénurie de main d'oeuvre dans mon secteur, entre parenthèse le bâtiment ? Merci.
Arlette Chabot
Alors les sans papier, régularisation ?
Ségolène Royal
Dans le bâtiment effectivement il y a pénurie de main d'oeuvre donc ça correspond à la loi, il y a un problème, peut-être d'employeur. La loi autorise de toute façon le travail dans les secteurs où il y a pénurie de main d'oeuvre. mais il y a aussi beaucoup de travail au noir de la part des employeurs qui ne sont pas respectueux de la loi française et donc dans ce cadre là, il faudra des régularisations, c'est-à-dire des autorisations de travail et des employeurs qui régularisent...
Arlette Chabot
C'est ce que vous appelez des régularisations au cas par cas par exemple ?
Ségolène Royal
... leurs salariés. Il y a deux choses. Il y a les salariés qui travaillent au noir dans des secteurs où il y a pénurie de main d'oeuvre et c'est tout à fait anormal parce qu'ils sont exploités, pressurés, c'est absolument indigne.
Arlette Chabot
Donc ceux là doivent être déclarés, régularisés s'ils ont un contrat de travail.
Ségolène Royal
Et c'est l'employeur qui est en fraude. C'est le travail clandestin. Il y a beaucoup à faire pour lutter contre le travail clandestin, donc ça on peut imaginer un certain délai, c'est-à-dire dès mon élection je dirais aux entreprises, écoutez vous avez trois ou quatre mois pour régulariser vos salariés, après c'est les procédures pénales. Donc on va remettre les compteurs à zéro, vous allez sortir du travail au noir, régulariser les salariés qui doivent l'être et donc ça fera entrer au passage des cotisations dans les caisses de sécurité sociale, ce qui a été fait dans d'autres pays. En revanche pour les autres, pour les personnes qui n'ont pas de travail et qui sont sans papier je ferais de la régularisation au cas par cas.
Arlette Chabot
Et pas de régularisation comme d'autres partis le demandent, généralisation ...
Ségolène Royal
Non, ce n'est pas possible. Ce n'est pas possible, en revanche ce qui devra impérativement être fait parallèlement à cela c'est une réforme en profondeur de l'aide au développement.
Arlette Chabot
Voilà on va s'arrêter, on va vite, un mot là dessus parce que sinon on ne va pas s'en sortir.
Ségolène Royal
Un mot écoutez...
Arlette Chabot
Non parce qu'il y a d'autres questions c'est pour cela.
Ségolène Royal
La maîtrise d'émigration de la misère ne peut se régler que par l'émergence des pays pauvres vers le développement et moi je crois que c'est une utopie réalisable. Vous savez je connais bien le Sénégal, je suis allée voir dans le village de pêcheurs d'où les jeunes partent en pirogue, un sur deux se noie, et les mères sont là en train de pleurer leurs enfants et si elles avaient des micro crédits, elles auraient pu développer des activités sur la pêche, sur l'agriculture. Si elles avaient l'énergie solaire, les villages seraient éclairés, les jeunes pourraient apprendre à lire et à écrire. Donc je crois qu'il va falloir revoir en profondeur l'aide publique au développement pour que vraiment ça arrive directement aux populations concernées et que les gens puissent vivre dans des conditions dignes et dans des villes magnifiques qui ne demandent qu'à être développées.
Arlette Chabot
Bertrand est au téléphone, Bertrand,
Bertrand
Oui.
Arlette Chabot
Vous nous entendez bonsoir Bertrand. Voilà madame Ségolène Royal vous écoute.
Bertrand
Bonsoir madame le ou la présidente ?
Arlette Chabot
Le ou la présidente.
Ségolène Royal
Comme vous voulez.
Arlette Chabot
Elle n'a pas répondu parce qu'elle anticipe trop là. La question ?
Bertrand
Juste une question, donc Bertrand de Tours, je voulais uniquement savoir si vous étiez favorable ou si vous souhaitiez le service civil d'une part et vous le souhaitiez obligatoire ou non ? Sachant que vous venez d'expliquer il y a quelques instants que le projet social ...
Arlette Chabot
Est important pour tout le monde, Bertrand on a compris pour tout le monde, Bertrand on a compris la question, réponse courte, pardonnez-moi mais on est très en retard. Alors service civil obligatoire, oui, non et combien de temps ?
Ségolène Royal
Oui bien sûr.
Arlette Chabot
Oui pour tout le monde, garçon, fille ?
Ségolène Royal
Bien sûr le service civil sera obligatoire.
Arlette Chabot
Ca coûte cher non ?
Ségolène Royal
J'ai d'ailleurs un rapport de Bernard Kouchner, qui vient de mettre remis, ce n'est pas forcément six mois d'affilés. Il peut être échelonné sur deux, trois ans, pendant la période des congés etc. Et puis il peut avoir une dimension militaire. Il pourra avoir une dimension militaire de façon facultative. Et on apprendra aussi la défense du territoire, ce que c'est que la Nation, la République, les valeurs fondamentales, et puis bien évidemment on apprendra à être utile aux autres.
Arlette Chabot
Alors on prend une autre petite question, Nicolas Hulot attend, on va le rejoindre aussi tout à l'heure mais Nicolas est avec nous en direct, Mikael web cam d'abord, question. Voilà je vois Nicolas Hulot...
Mikael, étudiant
Ma question est la suivante, êtes-vous favorable au mariage et à l'adoption pour des couples homosexuels ? Je vous remercie.
Arlette Chabot
Voilà alors question qui revient.
Ségolène Royal
C'est dans le projet, effectivement je crois que mettre fin aux discriminations, le moment est venu de le faire, l'Espagne l'a fait donc la France, je crois, peut le faire dans le respect des choix et pour lutter contre toutes les formes de discriminations.
Arlette Chabot
Il y a une question qui était posée d'actualité ce soir, avec un procès qui vient de se terminer effectivement en Dordogne, Périgueux, fin de vie, euthanasie avec l'infirmière qu a été acquittée, et le médecin qui a été condamné à une peine symbolique, ce qui fait qu'on voit bien que quand on met un terme effectivement à la vie de personnes qui sont vraiment dans des souffrances terribles, l'euthanasie, il va falloir légiférer. Vous pensez qu'il faut effectivement le faire, c'est votre conviction ?
Ségolène Royal
Ecoutez pour avoir assistée à une fin de vie atroce d'un de mes proches et avoir connu ce sentiment d'abandon et de n'avoir rien pu faire, je crois que la question se pose. En même temps il faut éviter toutes les dérives et donc je crois qu'il va falloir rouvrir ce débat et que la bonne solution, c'est une décision collégiale au sein de l'hôpital, au sein du comité d'éthique de l'hôpital et des médecins, c'est une décision collégiale et d'abord médicale et d'abord éthique. Peut-être que souvent les familles sont les moins bien placées pour évaluer cela, il faudra trouver de quelle façon on peut associer les familles, mais je crois que ce qui est très important, c'est la notion de décision collégiale au sein de l'établissement hospitalier où il y a maintenant vous le savez des comités d'éthique qui sont déjà en place.
Arlette Chabot
Vraiment réponse courte, vous savez qu'on est tenu à des temps de parole. Ce serait dommage de pas répondre aux questions. On va recevoir notre ami Eric Le Boucher qui est éditorialiste au Monde, qui va venir vous interroger. Et donc là vraiment, encore une fois, on va jouer ce jeu de questions réponses courtes puisque ensuite, il faut parler avec Nicolas Hulot. Bonsoir Eric. Voilà questions réponses précises sur des points précis.
Eric Le Boucher
Madame Ségolène Royal, bonsoir.
Ségolène Royal
Bonsoir.
Eric Le Boucher
Je voudrais revenir sur la dette si vous voulez bien parce que c'est le point prioritaire de votre discours de Villepinte. J'ai mal compris. La dette vous voulez la plafonner ou la réduire ?
Ségolène Royal
L'idéal serait de la réduire bien évidemment mais déjà si on arrive, ce sera un effort très difficile et de longue haleine, déjà si on pouvait en décélérer le rythme d'augmentation, c'est déjà très important. Si on peut ensuite la stabiliser, c'est un autre succès et si ensuite on peut la réduire, c'est enfin un objectif à rechercher. Et en même temps, il y a dette et dette. Je crois qu'il faut aussi investir pour préparer l'avenir. Quand j'entends certains dire qu'il ne faut plus rien bouger pour éviter de creuser la dette, je crois qu'il y a une bonne dette et une mauvaise dette. Il y a la bonne dette, c'est celle qui permet d'investir dans ce qui va rapporter. C'est à dire dans la formation professionnelle, dans la recherche et dans l'innovation.
Eric Le Boucher
Pour l'instant, donc simplement ralentir la progression de la dette dans l'objectif premier, dans les premières années ?
Ségolène Royal
La stabiliser.
Eric Le Boucher
Puis la stabiliser. J'imagine que c'est pareil pour le déficit budgétaire. Donc vous voulez le réduire le déficit budgétaire ou bien si il repart un peu vers le haut, dans les premières années...
Ségolène Royal
Mais c'est la même réponse. Je crois que ce qu'il faut d'abord, c'est stabiliser et ensuite décélérer. Et je pense que c'est possible. Il faut aussi voir la totalité des dettes. C'est à dire aussi les budgets des collectivités territoriales.
Eric Le Boucher
Je parle de la totalité. Les impôts si vous voulez bien. Alors vous avez dit qu'on augmente pas l'enveloppe globale des impôts et des charges que supporte l'ensemble des Français, ce qu'on appelle les prélèvements obligatoires. Maintenant vous avez dit aussi qu'à l'intérieur, ça peut bouger. Que certains vont payer peut-être un peu plus, les hautes tranches vous avez dit et puis d'autres sans doute un peu moins. Alors les hautes tranches, est-ce que, François Hollande a dit qu'à 4000 euros par mois pour un célibataire, on était riche. Donc est-ce que c'est à partir de ce moment-la que les gens vont voir leurs impôts augmenter ?
Ségolène Royal
Vous savez, je suis candidate à l'élection présidentielle. Et donc j'aurais un gouvernement qui règlera ces problèmes selon les instructions que je vais lui donner. Les instructions que je donnerais à mon gouvernement sont les suivantes : d'abord l'impôt doit être juste, ensuite l'impôt doit être accepté par les citoyens mais pour que l'impôt soit accepté par les citoyens il faut qu'ils comprennent le sens des dépenses publiques. Et donc la garantie que je donnerais aux Français, c'est qu'un euro dépensé est un euro utile. Et que nous mènerons la guerre contre toutes les formes de gaspillage. Et que les Français seront associés dans le cadre d'un budget participatif à la décision d'une partie des dépenses publiques. On verra dans quel domaine.
Arlette Chabot
Qu'est-ce que ça veut dire ça ?
Ségolène Royal
Ca veut dire que je crois que l'on peut faire au niveau national, on verra de quelle façon ça peut être fait, que les Français puissent à un moment intervenir dans les choix budgétaires qui sont faits. Ca peut être dans des secteurs comme l'environnement, tenez, par exemple. Les Français pourraient très bien être associés dans le cadre du budget du ministère de l'Environnement, à dire comment ils voient les choses par rapport aux grands objectifs d'un ministère comme celui-ci. Je crois que le domaine du débat démocratique, de la démocratie participative pourrait très bien mais je veux dire que c'est par des signes comme ceux-la, c'est à dire une modification profonde du fonctionnement de l'Etat et des institutions que l'on pourra aussi redonner confiance aux Français dans la dépense publique.
Eric Le Boucher
Vous m'avez pas dit si à 4000 euros, on était riche ou pas.
Ségolène Royal
Ecoutez, je vous ai dis que l'outil fiscal doit être mis...
Eric Le Boucher
Etre juste.
Ségolène Royal
Il doit être juste, il doit être accepté et enfin c'est un outil au service du développement économique. Et ce n'est pas une fin en soi. Et donc toutes les réformes fiscales devront être regardées au regard de cette question. Est-ce que oui ou non, cette réforme fiscale permet ou pas de créer des activités, des emplois et de résorber la dette ?
Arlette Chabot
Mais la question qu'on se pose c'est que vous revenez sur les baisses d'impôt qui ont été faites par la droite pendant cinq ans ou pas ?
Ségolène Royal
Je viens de vous répondre. Je ne vais pas ici vous détailler impôt par impôt.
Arlette Chabot
Non mais je ne dis pas impôt par impôt, les baisses d'impôt sur le revenu qui ont été faites par ce gouvernement, est-ce que vous revenez dessus ou pas ?
Ségolène Royal
Dans le cadre d'une recherche, d'une répartition juste de l'impôt, nous pourrons en effet remettre à plat un certain nombre de choses.
Arlette Chabot
C'est à dire pour les plus hautes tranches, quoi. Les réductions seraient annulées ?
Ségolène Royal
Par définition ceux qui paient le plus d'impôts, la droite a baissé les impôts de ceux qui sont les plus riches. Donc elle a avantagé la rente par rapport au travail. Donc aussi dans l'ensemble de sa réforme fiscale. La droite a avantagé la rente par rapport au travail. Moi je veux restaurer la valeur travail. Et donc je veux que le travail soit moins taxé que le capital. Sous toutes ses formes. Ce sera la feuille de route de mon gouvernement.
Eric Le Boucher
D'accord. Sur les retraites, vous avez dit que vous vouliez augmenter très vite de 5% les petites retraites. C'est combien une petite retraite ?
Ségolène Royal
C'est une retraite inférieure au Smic. Et il y en a beaucoup.
Eric Le Boucher
Oui il y en a beaucoup mais vous savez aussi que...
Ségolène Royal
Et surtout des femmes je vais vous dire. Il y a plusieurs millions de femmes qui touchent des petites retraites inférieures au Smic parce qu'elles ont eu des durées de vie incomplètes pour élever leurs enfants.
Eric Le Boucher
Enfin des carrières incomplètes.
Ségolène Royal
Des carrières incomplètes. Des durées de vie professionnelles courtes. Et la réforme Raffarin a été scandaleuse de ce point de vue parce qu'en allongeant la durée des cotisations sans tenir compte des raisons pour lesquelles les femmes avaient été soit au chômage partiel, soit avaient volontairement arrêté leur vie professionnelle pour élever leurs enfants, a accru considérablement les inégalités au regard de cette question des retraites. Et moi je vais vous dire dans les débats participatifs, je n'ai jamais vu autant de femmes seules m'écrire, de femmes aux petites retraites qui ne font plus qu'un repas par jour. Moi je me dis que la France a quand même les moyens de payer des petites retraites qui permettent aux gens de manger deux fois par jour, de payer leur loyer, de se faire soigner parce qu'en plus il y a un recul du service public de la santé et maintenant, les gens ont peur. Ils ont peur de savoir comment ils vont finir leur fin de vie. Et les parents se demandent comment ils vont aider les grands-parents et les grands-parents qui avant aidaient leurs petits enfants, aujourd'hui c'est le contraire. Ce sont les petits enfants qui se disent comment je vais faire...
Eric Le Boucher
Est-ce que je peux vous demander comment vous allez financer madame ?
Ségolène Royal
Attendez parce que ça, on est au coeur du sujet, des inquiétudes des Français. On a à al fois des jeunes qui pour la première fois, ça ne se faisait pas dans la génération précédente, pensent à leur retraite. Vous vous rendez compte ? Aujourd'hui il y a des jeunes de 25 ans qui se demandent qui va payer leur...
Eric Le Boucher
C'est vrai. Si vous voulez les rassurer dans le long terme, il faut pouvoir les financer. Alors comment vous allez les financer ?
Ségolène Royal
Je les finance parce que je pense qu'en donnant du pouvoir d'achat aux petites retraites, je relance aussi d'une certaine façon la croissance économique. Et donc on n'est pas dans des schémas arithmétiques où quand on donne aux uns, on retire forcément aux autres. Il faut sortir de cette logique.
Eric Le Boucher
Une CSG retraite ?
Ségolène Royal
Je vous ai dis que je ne répondrais pas à des questions techniques qui relèvent d'un secrétariat d'Etat au budget et d'un ministre de l'Economie et des Finances. Moi je trace les grandes orientations. Je vous l'ai donné et j'ai la conviction chevillée au corps que la France peut reprendre la main et peut redémarrer en faisant de la justice sociale.
Arlette Chabot
Est-ce que vous remettez en cause la réforme des retraites qui a été faite par Jean Pierre Raffarin sous le gouvernement de Jean Pierre Raffarin ou pas ? Parce que c'était dans le programme ça. Le président doit dire, je sais pas, la retraite à 60 ans vous la garantissez ou la garantissez pas par exemple ?
Ségolène Royal
La question de la réforme des retraites sera à l'ordre du jour de la conférence que j'ai évoquée tout à l'heure qui sera immédiatement convoquée dès l'élection, entre patronat, organisations syndicales.
Arlette Chabot
Ce que vous dites c'est que vous remettez tout sur la table ?
Ségolène Royal
On y associera aussi un certain nombre de corps intermédiaires représentatifs et les associations de retraités seront aussi associées à la réflexion. Les consommateurs également parce que je veux que la société...
Arlette Chabot
Mais vous n'annulez pas comme ça avait été annoncé la réforme des retraites ?
Ségolène Royal
Si je remets à plat les inégalités les plus criantes qui ont été réalisées par cette réforme des retraites. Je viens de vous en citer une. Nous intégrerons également et je le souhaite...
Arlette Chabot
Mais la retraite à 60 ans est maintenue ou pas ?
Ségolène Royal
Attendez, l'autre réforme très importante ce sera l'intégration de la pénibilité. C'est la durée de cotisation, c'est pas l'âge. C'est la durée de cotisation.
Eric Le Boucher
On va vers les 40 ans, est-ce que vous maintenez cette barre des 40 ans ?
Ségolène Royal
Non monsieur, le critère essentiel ce n'est pas celui-la, le critère essentiel c'est de calculer la durée de cotisation en fonction de la pénibilité des tâches et donc de l'espérance de vie. Et lorsque entre une ouvrière et une profession libérale, il y a dix ans d'écart d'espérance de vie non seulement en durée mais aussi en qualité, en santé, en vie quotidienne. Je me dis que c'est très injuste. Et donc cette question de la durée de cotisation, nous la regarderons au vu de la vie réelle des gens, de la vie concrète des gens et non pas des critères arithmétiques.
Arlette Chabot
Une dernière question parce que sinon on va jamais y arriver.
Eric Le Boucher
Ca va très vite. Nous avons un Etat beaucoup trop lourd vous avez dit à Villepinte. Alors est-ce qu'il faut alléger le poids de l'administration ? Ca veut dire quoi concrètement, que vous allez supprimer un certain nombre de postes de fonctionnaires pris globalement aux régions, plus l'Etat central, plus tout le monde ?
Ségolène Royal
D'abord je voudrais vous dire que le discours qui consiste à dire arithmétiquement comme le fait la droite, nous allons supprimer un fonctionnaire sur deux qui part à la retraite, je trouve que ce discours est injurieux pour les fonctionnaires parce que ça veut dire qu'ils pensent qu'un fonctionnaire sur deux est inutile. Moi je pense le contraire. Il y a des endroits où on manque de services publics et il y a des endroits où il y a trop d'argent public. Et d'ailleurs ils le disent eux-mêmes. Ils préfèrent avoir des tâches intéressantes que d'être noyés dans de multiples réunions, j'en ai vécues des multiples réunions inter ministérielles où vous avez 60 personnes autour de la table, avec un temps perdu. Donc je décentralise, qu'il y ait pas de malentendu, je maintiens. Je veux un Etat fort qui assume ses responsabilités mais pas un Etat étouffé par la bureaucratie ou par des tâches qui ne relèvent pas de l'Etat central. Il y a donc des tâches qui seront transférées aux régions et aux départements en leur interdisant les doublons parce que là il y aussi beaucoup de gaspillage.
Arlette Chabot
On peut faire court parce que ça va être une catastrophe totale.
Ségolène Royal
C'est à dire sans augmentation des impôts locaux. Parfois, juste une chose, l'Etat a transféré dans la dernière période, des responsabilités. J'en sais quelque chose en tant que présidente de région.
Eric Le Boucher
Ce que veut savoir Arlette c'est qu'est-ce que vous voulez décentraliser ? Qu'est-ce que vous envoyez aux régions ?
Ségolène Royal
J'envoie aux régions premièrement la remise à niveau des universités. Je n'accepte plus que dans un pays comme la France les universités, certaines universités soient dans un état aussi lamentable. Ce sera la responsabilité des régions avec une autonomie donnée aux universités pour créer de l'émulation et nous remettrons à niveau les universités. Deuxièmement je donne aux régions la responsabilité des aides économiques aux entreprises avec un cadrage de l'Etat à chaque fois. Il y a un cadrage sur les universités, un cadre global et ce sont les régions qui engagent les dépenses publiques parce que ça fera beaucoup d'économie. Même chose pour les aides économiques aux entreprises. Ce seront les régions qui piloteront les aides économiques aux entreprises...
Arlette Chabot
Mais il y a des fonctionnaires qui vont quitter le statut de Fonction publique ?
Ségolène Royal
Mais pourquoi pas. Vous savez qu'il y a beaucoup d'agents publics qui, vous avez vu les mouvements démographiques à l'échelle de la France, bien sûr il y a beaucoup d'agents publics qui ne demandent qu'à avoir des métiers plus intéressants en étant au plus près des décisions qui sont prises. Bien évidemment nous offrirons la possibilité aux agents publics de se redéployer sur les territoires pour qu'il n'y ait pas double emploi et à nouveau une fuite en avant vers les dépenses publiques. Donc il faudra de la clarté chacun dans sa compétence. Ce sera de l'ordre territorial juste.
Arlette Chabot
Voilà merci Eric. Petite question webcam avant de retrouver Nicolas Hulot.
Cyril, Etudiant Villars de Lans
J'aimerais savoir quelle est votre vision de l'Europe alors qu'on parle d'une Europe à 30 voire à 35 et si vous êtes favorable à un nouveau référendum au sujet de la constitution européenne ?
Arlette Chabot
Ca en une minute, si je puis me permettre.
Ségolène Royal
D'abord je veux que la France revienne à la table de l'Europe et je veux que l'Europe se relève parce que nous avons besoin de cette Europe pour être plus forts tus ensemble face à l'émergence des autres continents comme l'Inde ou comme la Chine. Et que nous devons faire l'Europe par la preuve. La recherche, on l'a vu avec Airbus, il faut sauver nos filières industrielles, il faut une vraie politique industrielle, européenne, il faut donc développer l'Europe de la recherche, l'Europe de l'environnement. Nous devons préparer ensemble l'après pétrole et les énergies renouvelables. Nous devons créer l'Europe des transports. Il y a du potentiel d'emploi et d'activité dans ces domaines.
Arlette Chabot
Et le référendum ? La consultation des Français ?
Ségolène Royal
Bien sûr mais les institutions sont au service des projets et pas l'inverse.
Arlette Chabot
Mais il faut faire fonctionner l'Europe. Pour l'instant ça marche pas parce qu'on n'a pas les règles de fonctionnement.
Ségolène Royal
Il faut que l'Europe fonctionne et notamment il faut que l'Europe réussisse à lutter contre le chômage. Qu'est-ce qu'ils attendent les Français ? Ils veulent la preuve que l'Europe protège contre les délocalisations.
Arlette Chabot
Donc vous organiserez un référendum ?
Ségolène Royal
Je pense que si l'Europe parvient à se protéger, là très rapidement ce sera l'objectif de la présidence française au 1er juillet 2008 à laquelle je réfléchis déjà. Et si l'Europe arrive à adopter des règles qui la protègent contre les délocalisations, qui intègrent les normes sociales et les normes environnementales, les règles sociales, les mêmes petit à petit pour tout le monde et qui réussissent à faire baisser le chômage, alors les gens auront confiance et ils donneront à l'Europe les institutions pour fonctionner et non pas l'inverse.
Arlette Chabot
Donc vous organiserez un référendum. Vous savez à peu près à quelle date ? Quel délai ?
Ségolène Royal
Oui j'organiserais un référendum. Au plus tard au moment des élections européennes de 2009.
Arlette Chabot
Petite question sur la Turquie. Vous avez dit effectivement, " mon opinion est celle du peuple français ". On se souvient qu'à propos du référendum, vous aviez eu des positions très claires. Vous avez dit, je vote oui par conviction etc. Pourquoi sur la Turquie vous avez dit...vous n'avez pas de conviction personnelle ? " Mon opinion sera celle des Français ".
Ségolène Royal
Mais c'est très simple, c'est parce qu'il est prévu désormais que tout nouveau pays entrant, cette entrée sera soumise à référendum.
Arlette Chabot
Oui mais un président de la République...
Ségolène Royal
Moi président de la République je vais dire, non mais attendez...
Arlette Chabot
Vous devez avoir un avis quand même.
Ségolène Royal
J'aurais un avis le moment venu.
Arlette Chabot
Et vous donnerez votre avis aux Français ?
Ségolène Royal
Mais bien sûr.
Arlette Chabot
Vous pouvez pas le dire maintenant ?
Ségolène Royal
Non parce que je ne sais pas si la Turquie va à ce moment-la respecter les conditions, remplir les conditions qui lui sont posées.
Arlette Chabot
Mais sur le principe vous n'avez pas d'avis sur l'intérêt ou non de la Turquie à l'intérieur de l'Union européenne ?
Ségolène Royal
Il n'y a pas de principe, il n'y a que des faits. Soit la Turquie remplit les conditions qui ont été posées et je pense qu'aujourd'hui de toute façon elle ne les remplit pas et qu'il faut une pause pour que l'Europe déjà fonctionne bien. Et en même temps je pense que ce serait une erreur de rejeter la Turquie parce que c'est la Turquie. Et que nous avons intérêt à arrimer aux valeurs de l'Europe le plus grand nombre possible de pays, si l'on croit aux valeurs que nous défendons. Et les valeurs humanistes de l'Europe et la Turquie est un grand pays laïc, je le rappelle quand même, les valeurs humanistes de l'Europe qui sont celles de la Révolution française, rappelons-le toujours, nous avons toujours la fierté quand même de rappeler cela, la liberté, l'égalité, la fraternité, nous avons toujours intérêt à ce que des pays s'arriment à ces valeurs-la, y compris dans le cadre d'associations privilégiées donc je pense que l'on peut trouver...
Arlette Chabot
Donc vous ferez connaître votre position au moment du choix, c'est ça ? La présidente Ségolène Royal dira aux Français, moi je pense qu'il faut dire oui ou qu'il faut dire non ?
Ségolène Royal
Bien sûr au moment du choix, je ferais connaître ma position.
Arlette Chabot
Alors avant, non même maintenant on va retrouver tout de suite Nicolas Hulot. Merci Nicolas d'être avec nous ce soir en duplex de Rennes. On va être assez rapide et pardonnez-moi. Nicolas Hulot était là la semaine dernière. Il vient rappeler aux candidats qu'ils ont signé un pacte, son pacte, ses propositions. On va vous revoir Segolene Royal, vous avez signé le pacte de Nicolas Hulot. C'était il y a quelques semaines. Lui qui va organiser dans quelques semaines, on va en reparler, un grand rassemblement le 1er avril à Paris au Trocadéro. Nicolas, voilà, rappelez Ségolène Royal peut-être à ses engagements.
Nicolas Hulot
Oui enfin d'abord, juste une petite remarque très brève c'est que je vois bien que dans la campagne, que les mots écologie, changement climatique, biodiversité, font pas partie du vocabulaire familier de la campagne et je peux le comprendre parce qu'il y a pas une passion spontanée pour ces enjeux et que ça apparaît pour beaucoup comme une menace un peu diffuse et abstraite alors que je pense que vous et moi, bonsoir Ségolène Royal, nous avons conscience que ce n'est pas un enjeu parmi d'autres et que c'est bien un enjeu vital, universel qui va conditionner tout projet de société. Alors moi je voudrais simplement savoir à quel niveau, quelle est votre vision sur ces enjeux et comment pensez-vous réaliser cette synthèse entre économie, écologie, social politique quand on sait que si tous les citoyens du monde consommaient, produisaient et polluaient comme les Français et je dis ça sans aucune critique, il faudrait trois planètes. Donc simplement pour dire, on est en train de basculer de l'ère de l'abondance à l'ère de la rareté. Comment va t-on faire pour organiser cette synthèse et concrètement dans les 100 premiers jours de votre présidence si vous êtes élue, qu'est-ce que vous allez faire sur les enjeux climatiques et de biodiversité ?
Arlette Chabot
Voilà en 100 jours, qu'est-ce que vous faites ?
Ségolène Royal
En 100 jours, qu'est-ce que je fais ? D'abord je fais prendre conscience, je nomme un vice Premier ministre chargé du développement durable. Premièrement.
Arlette Chabot
Ca c'est vrai. Vous avez aussi le nom en tête pour le vice Premier ministre, vous avez dit tout à l'heure que vous aviez plusieurs noms pour le Premier ministre, pour le vice Premier ministre aussi ? Vous avez déjà réfléchi ?
Ségolène Royal
J'ai déjà réfléchi, parfaitement, mais vous n'aurez pas la réponse ce soir.
Arlette Chabot
J'ai bien compris ça mais juste la question pour la forme.
Ségolène Royal
Vous ne serez pas déçue.
Arlette Chabot
Non plus ?
Ségolène Royal
Je prononce immédiatement le moratoire sur les OGM en plein champ, parce que je crois le développement écologique a besoin de transparence et de démocratie. J'engage immédiatement le débat national sur l'avenir énergétique de la France. vous savez qu'il y a des sujets difficiles, il y a des points de vue variés, notamment sur l'énergie nucléaire. Et je considère que ce débat-là gagnerait à être mis sur la table et à être débattu avec l'ensemble des échanges, y compris des confrontations. Je pense que la démocratie a besoin de confrontation d'idées pour faIre émerger l'intérêt général.
Arlette Chabot
Il y a beaucoup de questions là-dessus...
Ségolène Royal
Ensuite...
Arlette Chabot
... Du téléspectateur, pardonnez-moi, je vous interromps parce qu'il y a beaucoup de questions qu'on n'aura pas l'occasion de vous poser directement, et je les pose, vous aviez dit, il y a un moment, 50%, réduire la part du nucléaire dans la production française, 50%, ce n'est pas tenable, disent certains, parce que ça fait beaucoup de centrales qui devraient disparaître très vite. Donc qu'est-ce que vous prenez comme engagement sur le nucléaire, vous ?
Ségolène Royal
Attendez, il ne faut pas raisonner aujourd'hui sans tenir compte des progrès technologiques et des progrès sur les énergies renouvelables qui vont avoir lieu dans les années qui viennent. Donc il faut se fixer... il vaut mieux se fixer des objectifs extrêmement ambitieux...
Arlette Chabot
Alors, vous faites combien sur le nucléaire par exemple ?
Ségolène Royal
Sans parler...
Arlette Chabot
Réduire le nucléaire...
Ségolène Royal
D'abord, j'économise l'énergie. On ne peut pas parler de la question énergétique et de la part des énergies renouvelables sans parler de la question des économies d'énergie. C'est d'abord par les économies d'énergie, et en particulier dans les cent premiers jours, qu'est-ce que je fais ? D'abord, plus aucun permis de construire ne sera délivré, et je le dis tout de suite aux entreprises du bâtiment, je leur ai dit, si les permis de construire n'intègrent pas dans le permis de construire l'installation en énergie renouvelable, le bois, le solaire, l'éolien, le photovoltaïque, ça doit être intégré dès le départ. Deuxièmement, je lance un programme d'isolation des bâtiments déjà construits, 100.000 emplois à la clef, avec des incitations fiscales, budgétaires, ça va démarrer, ce ne sera pas en une seule fois, mais dans ce domaine-là, où tous les autres pays européens viennent de faire cela, et que la France a encore résisté lors du dernier Conseil européen, et s'est opposée à la proposition allemande de mettre 20% d'énergies renouvelables dans le bouquet énergétique...
Arlette Chabot
Il y a un accord...
Ségolène Royal
C'est scandaleux...
Arlette Chabot
Il y a un accord quand même...
Ségolène Royal
C'est scandaleux que la France, qui tient des discours sur l'environnement, lors du Conseil européen de la semaine dernière, Angela Merkel...
Arlette Chabot
Mais il y a un accord européen finalement, au bout du compte.
Ségolène Royal
Enfin, un accord, la France a quand même...
Arlette Chabot
Elle a fini par accepter...
Ségolène Royal
Oui, mais enfin...
Arlette Chabot
Il faut maintenant de l'énergie renouvelable, alors...
Ségolène Royal
Oui, mais vous avez vu avec quelles réserves...
Arlette Chabot
... le nucléaire...
Ségolène Royal
Quelles hésitations on saute d'un pied sur un autre, résultat, qu'est-ce qui se passe ? Et je l'ai vu lorsque j'étais ministre de l'Environnement, et Nicolas Hulot admettra, avec moi, que j'ai fait beaucoup de choses en tant que ministre de l'Environnement, je ne suis pas restée inerte. Chaque fois que l'on prend du retard sur les questions environnementales, on perd sur le plan économique et on perd sur le plan de l'emploi. Et pour répondre à Nicolas Hulot très directement, ma conception de la nouvelle croissance, c'est une conception sur trois piliers, d'égale importance, la valeur ajoutée économique, on en a parlé un peu, la valeur ajoutée sociale, on en a parlé également, qui sont indissociables, et qui participent à la compétitivité de l'économie, et la valeur ajoutée environnementale, c'est le troisième pilier, c'est un levier très important pour le développement des activités et pour la lutte contre le chômage. Et le dernier point, c'est que je pense, je l'ai dit tout à l'heure, c'est une nouvelle frontière, la question du réchauffement planétaire, parce que les prochains conflits et les prochaines guerres à l'échelle de la planète viendront de ce problème, il y a aujourd'hui dans les régions les plus pauvres, celles qui souffrent le plus du réchauffement planétaire, des déplacements massifs de populations qui vont créer des conflits très graves, le conflit pour la maîtrise de l'eau potable va créer des guerres à l'échelle de la planète. Et donc notre survie à nous, pays, riches, qui avons imposé aux pays pauvres des modes de développement scandaleux, et je le disais tout à l'heure, l'Afrique n'est même pas équipée en énergie solaire, alors qu'elle a l'énergie gratuite, donc c'est ça qu'il va falloir repenser, de fond en comble, parce que nous ne nous sauverons pas tous seuls, nous avons réchauffé la planète à cause de nos modes de développement, c'est à nous qu'incombe la responsabilité d'y mettre fin et de maîtriser ce processus parce que c'est de là aussi que naîtra la réduction des écarts entre les pays pauvres, qui ont l'énergie solaire gratuite et qui ne l'utilisent pas à cause de nous, parce qu'on ne leur a pas transféré les technologies, et les pays les plus riches.
Arlette Chabot
Alors Nicolas, il y aura un vice-Premier ministre, c'est essentiel, je rappelle donc, en vous remerciant, que vous êtes... le 1er avril, vous faites un rassemblement au Trocadéro, à Paris, de toutes les organisations environnementales, c'est ça, sur le thème : votez...
Nicolas Hulot
Votez pour la planète...
Arlette Chabot
Pour la planète. Voilà. Donc il n'y a pas de consigne de vote, mais c'est : Votez pour la planète, pour rappeler un peu à tout le monde qu'il faut effectivement se mobiliser et ne pas faire oublier...
Nicolas Hulot
Chacun fera son choix, simplement, pour maintenir cette vigilance, cette exigence et cette mobilisation, parce que la mutation écologique aura besoin de la participation de chaque citoyen et de chaque acteur, on ne peut pas simplement s'en affranchir sur le dos des politiques, et réciproquement.
Ségolène Royal
Mais d'ailleurs, je compte sur toutes les associations, sur Nicolas Hulot, qui a fait un travail extraordinaire, parce que c'est vrai qu'il a fait quand même bouger la prise de conscience...
Arlette Chabot
Et c'est la société civile, quand elle bouge, c'est toujours efficace...
Ségolène Royal
C'est un citoyen engagé, et je pense que le comité de vigilance qu'il a mis en place sera très utile, et dans le cadre de la démocratie participative, vous serez associé à l'évaluation des politiques publiques, et le président de la République, si je suis celle-là, rendra compte tous les ans de l'application du pacte présidentiel. Tous les ans, je viendrai rendre compte aux françaises et aux français...
Arlette Chabot
Vous recevrez tous les ans Nicolas Hulot...
Ségolène Royal
De ce qui a été fait et de ce qu'il reste à faire.
Arlette Chabot
Merci Nicolas. Pardonnez-nous, il y a juste un temps de parole.
Nicolas Hulot
Merci.
Arlette Chabot
Merci infiniment d'avoir patienté. Si vous me promettez que vous répondez en 45 secondes, même si les questions sont un peu longues, on va essayer de tenir...
Ségolène Royal
... Elles sont passionnantes, donc c'est pour ça que c'est difficile de répondre...
Arlette Chabot
Elles sont passionnantes, mais on a juste un temps de parole et des contraintes extrêmement fermes. Voilà, on va parler très vite de l'université. Louis Vogel, qui est président de Paris 2, on a évoqué tout à l'heure, enfin, Ségolène, on a déjà parlé de l'université. Question courte, réponse courte. Pardonnez-moi.
Louis Vogel, président de l'université Panthéon-Assas (Paris II)
Bonsoir Madame.
Ségolène Royal
Bonsoir.
Louis Vogel
Ce qui frappe dans l'université aujourd'hui, c'est le décalage entre l'immensité de l'énergie qui y est concentrée, des professeurs dévoués, des étudiants qui veulent étudier, des personnels administratifs qui sont prêts à s'engager, et la faiblesse des résultats que nous atteignons. On ne peut pas continuer comme ça, et un certain nombre de propositions ont été faites pour essayer de remédier à la situation. Alors, 1°) : c'est rendre - vous l'avez dit tout à l'heure - les universités plus autonomes, en les rendant plus réactives, plus responsables. 2°) : c'est augmenter les moyens de l'université, notamment en accroissant les ressources publiques, mais aussi, et certains l'ont proposé, en augmentant les droits d'inscription. Et en faisant cette augmentation de droits d'inscription, un facteur de justice sociale, puisqu'ils ont prévu la progressivité. 3°) : en mettant fin à la sélection par l'échec. Beaucoup d'étudiants - tout le monde le sait - français sortent de l'université sans avoir de diplôme, ils perdent deux ou trois ans de leur vie, c'est un coût énorme, pas seulement économique, mais aussi social, et ils proposent d'y mettre fin en introduisant des mécanismes sélectifs dans certaines filières. Alors, ma question est triple finalement, 1°) : l'autonomie des universités, jusqu'où ? 2°) : l'augmentation des moyens des universités, mais comment allez-vous les financer ? Et 3°) : la sélection, est-ce que ce mot est tabou pour vous ?
Ségolène Royal
D'abord, j'ai rencontré la conférence des présidents d'université, et j'ai senti vraiment une attente très, très forte, que vous venez très bien d'exprimer d'ailleurs, une attente très forte par rapport à la façon dont on peut régler le décalage que vous venez d'évoquer entre la densité intellectuelle des universités françaises qui, heureusement, gardent un rayonnement international, que je veux saluer ici, et la réalité des conditions de vie au quotidien dans ces universités. Ils m'ont demandé l'autonomie des universités, je vous la donnerai, les universités auront l'autonomie, je vais vous dire jusqu'où, parce que je suis pour une société de la responsabilité. Et je pense que les universités ont des idées, vous venez d'en évoquer un certain nombre, et vous devrez avoir la liberté, mais vous serez évalué en contrepartie sur les résultats. On est dans le gagnant/gagnant ou dans le donnant/donnant. En revanche, ce qui restera de niveau national, c'est la validation des diplômes, vous savez que les Français sont quand même très attachés à ce que, sur la totalité du territoire national, l'égalité soit maintenue, les solidarités soient confortées, et donc il faudra maintenir la dimension nationale des diplômes. En revanche, sur tous les autres sujets, je ne pense pas que l'augmentation, c'est un sujet très polémique...
Arlette Chabot
Les droits d'inscription...
Ségolène Royal
L'augmentation des droits d'inscription soit une solution pour trouver des recettes, mais, tout sera mis sur la table. Je n'ai pas de tabou, surtout, si, en contrepartie, je fais pour les jeunes l'allocation d'autonomie et si je revalorise les bourses, à ce moment-là, on peut voir comment trouver de nouvelles ressources pour les universités. J'ai un doute vraiment que ce soit par l'augmentation, mais comme je ne veux pas fermer les portes à la discussion, puisque j'ouvre la discussion autour de l'idée d'autonomie des universités, tout est ouvert, dans le cadre des principes que l'Etat, le parlement va arrêter une sorte de loi cadre, qui permettra aux universités d'assumer leur autonomie. Et en échange de cette autonomie, je vous demanderai de lutter contre l'échec, donc de trouver des solutions, de réfléchir à l'orientation des élèves, de vous rapprocher des entreprises, et beaucoup d'universités le font déjà, notamment dans le cadre des pôles de compétitivité, je souhaite que, comme dans les autres grands pays industrialisés, il y ait des alliances beaucoup plus étroites entre les laboratoires de recherche, l'université et les entreprises au sein des mêmes pôles de compétitivité, qu'il y ait des alliances entre régions, et qu'il y ait des alliances de région à région européenne, d'un pays européen à un autre, pour que, là aussi, il y ait des synergies, et non pas des doublons, et qu'en particulier, quand on recherche dans tous les pays la même chose, par exemple pour lutter contre tel ou tel cancer, je me dis que c'est quand même très dommage, et qu'on pourrait répartir autrement les fonds de la recherche et les fonds de l'université, en créant des synergies et des alliances dans les cohérences industrielles, je le répète, au niveau régional, mais au niveau inter-régional d'un pays européen vers un autre. Voilà la nouvelle université que j'appelle de mes voeux. Quant à la remise à niveau matérielle, parce qu'il y a eu des inspections dans les universités françaises, il y a même eu des élèves qui ont été rapatriés parce que tellement les chambres universitaires étaient lamentables, ce sont les régions qui auront la responsabilité de construire les logements étudiants qui seront d'ailleurs communs à des logements étudiants pour les étudiants et pour les jeunes travailleurs, et qui auront la responsabilité de remettre à niveau le matériel et les bâtiments des universités. Et pourquoi ça sera possible ? Parce que les régions arrivent à la fin de la rénovation des lycées. Elles ont mené ce travail à bien, eh bien maintenant, elles vont se tourner vers la rénovation des universités. Et nous aurons en France des universités dignes de ce nom, et qui, je l'espère même, attireront des étudiants des autres pays européens, et déboucheront sur des diplômes et des emplois.
Arlette Chabot
Il y avait le mot sélection je crois qui...
Louis Vogel
Il y avait le mot sélection oui justement, est-ce que vous nous permettrait d'ouvrir des filières sélectives ?
Ségolène Royal
Mais je pense qu'il faut faire faire attention aux choix des mots et je préfère parler d'orientation, vous aurez oui le pouvoir d'orienter... qu'est-ce qui est important pour un élève qui rentre à l'université, c'est de trouver, d'abord qu'il y ait une égalité sociale à l'entrée de l'université, qu'il n'y ait pas de sélection par l'argent et qu'il n'y ait pas de sélection par l'origine sociale. Ca je ne veux pas que l'université sous prétexte de sélectionner, sélectionne par l'argent ou sélectionne par l'origine sociale. Donc il va falloir faire des choix. Mais deuxièmement pour déboucher et que pour l'investissement public ait un sens, il faut qu'à la sortie de l'université les jeunes trouvent du travail. Et donc bien évidement il faut adapter la formation des jeunes au développement de l'économie, et donc vous aurez cette possibilité là bien évidement, mais attention, à ne pas, et ça la loi fixera les règles sans revenir sur cette idée d'autonomie qu'il n'y ait pas de compétition injuste d'une université à l'autre et que uniquement la sélection se fasse, la compétition se fasse uniquement par la sélection. Mais je suis convaincue que nous y arriverons et que nous trouverons un juste équilibre.
Arlette Chabot
Claire Delallau, Claire que j'ai perdu, je ne sais plus où elle est Claire. Voilà excusez-moi, voilà université toujours, court, question courte, réponse courte, pardonnez-moi Claire.
Claire Dellalau
Madame Royal, bonsoir, comment comptez-vous tout d'abord mettre en place un partenariat beaucoup plus étroit entre les entreprises et l'université, faire que les jeunes aient déjà un pied dans l'entreprise pour faire en sorte que leurs diplômes soient revalorisés et qu'ils veuillent vraiment dire quelque chose, que ce soit concret ? Concrètement quelles mesures souhaitez-vous prendre...
Arlette Chabot
Il faut expliquer que vous avez passé un Deug d'Anglais et que finalement vous avez repris vos études et que maintenant vous êtes ?
Claire Delallau
En brevet professionnel de fleuriste.
Arlette Chabot
De fleuriste parce que ça ne débouchait sur rien, voilà un beau gâchis, c'est-à-dire une belle formation, un deug d'Anglais...
Ségolène ROYAL
Non, si c'est dans une zone d'une formation.
Arlette Chabot
Non mais je veux dire c'est une formation...
Ségolène Royal
Vous allez vous servir de votre Anglais.
Arlette Chabot
Ce n'était pas ce que vous souhaitiez faire à l'origine, c'est ça.
Claire Delallau
Non surtout que je ne suis vraiment pas la seule dans ce cas là quand je me suis retrouvée en formation de CAP, donc une formation professionnelle pour adulte, je n'étais vraiment pas la seule dans mon cas et c'est quand même dommage de devoir repasser par des filières comme ça.
Ségolène Royal
Quel métier auriez-vous souhaité faire, quel est votre rêve ?
Claire Delallau
Professeur d'Anglais, c'était à la base ce métier là.
Ségolène Royal
Ou interprète...
Claire Delallau
Mais la réalité de l'université n'était pas du tout celle, l'idée que je m'en faisais, ni l'orientation qu'on m'avait donné à ce niveau là et c'était vraiment une autre planète, pas du tout concret.
Arlette Chabot
Alors réponse courte sur l'entreprise université, ça c'est un truc qui était tabou quand même, un peu...
Ségolène Royal
C'était tabou.
Arlette Chabot
C'est un truc qui ne marche pas très fort ça.
Ségolène Royal
Oui c'était tabou, mais heureusement les choses ont beaucoup changé.
Arlette Chabot
Ah bon il n'y a pas longtemps que ça a changé...
Ségolène Royal
...dans les faits, l'université se rapproche des universités.
Arlette Chabot
Non mais c'est vous qui dites ça parce que c'est effectivement tabou à gauche.
Ségolène Royal
C'était un peu tabou, c'est-à-dire on considérait mais ce n'était pas totalement malvenu, on considérait qu'il devait y avoir une formation générale qui n'était pas à être mise tout de suite au service à court terme de l'économie. Cette exigence là, elle doit être maintenue, c'est la raison pour laquelle d'ailleurs je ne suis pas favorable à l'apprentissage dès l'âge de 14 ans parce que je considère qu'un jeune peut être en formation jusqu'à 16 ans pour acquérir un bagage général pour l'armée dans la vie y compris pour avoir la possibilité de changer de métier.
Arlette Chabot
Mais université entreprise alors ?
Ségolène Royal
En revanche je suis favorable aux liens avec l'entreprise dès le collège, je ne peux pas vous dire mieux, dès le collège, là il y a un vague stage de 8 jours, ce n'est pas suffisant. Le collège, le lycée, l'enseignement supérieur, il faut des échanges beaucoup plus étroits entre les jeunes, et l'entreprise parce qu'ils seront ensuite mieux à même de choisir leur orientation.
Claire Delallau
Mais concrètement quels liens étroits, est-ce que c'est des stages, est-ce que c'est de l'apprentissage ?
Ségolène Royal
Des stages obligatoires qui sont encadrés par l'université, qui sont validés par l'université parce qu'il ne faut pas non plus que les entreprises trouvent une main d'oeuvre corvéable et gratuite parmi les stagiaires, donc il faut que les règles soient bien définies. Mais sous prétexte d'avoir peur des règles il n'y a plus de stage, donc il faut retrouver un juste équilibre. Et je pense qu'en effet tous les étudiants, tous les jeunes doivent pouvoir faire un passage dans plusieurs entreprises d'ailleurs, parce que cela est indispensable si on veut débloquer l'esprit, le goût du risque, l'esprit d'entreprendre, la connaissance du milieu professionnel, c'est absolument indispensable car on s'enrichit les uns, les autres, l'entreprise va s'enrichir de ces stagiaires parce que peut-être qu'elle va les garder aussi et inversement, l'université va s'enrichir de ces échanges. Donc je crois que c'est très important.
Arlette Chabot
Alors on fait court, professeur Patrice Valleur qui est chef du service de chirurgie viscérale à l'hôpital Lariboisière à Paris, on n'aura pas le temps de poser tous les problèmes de santé, mais question courte, réponse courte.
Patrice Valleur
Bonsoir mesdames, comme vous le savez l'application des 35 heures à hôpital public a aggravé considérablement la pénurie du personnel, qu'est-ce que vous comptez faire pour arrêter une hémorragie qui rend de plus en plus difficile l'exécution des missions qui nous sont confiées ?
Ségolène Royal
C'est vrai ce que vous dites, c'est un problème très lourd. C'est vrai que les 35 heures dans les métiers de l'Humain où il n'y a pas de gain de productivité possible, là où les 35 heures ont bien marché c'est quand il y a eu des gains de productivité, qui ont été possible par une meilleure organisation, une meilleure formation etc... dans les métiers de l'humain les 35 heures qui n'ont pas été accompagnées de créations d'emplois suffisantes, c'est vrai monsieur, ont dégradé le service dans les hôpitaux. Mais ce qui l'a encore davantage dégradé récemment, c'est la continuité sur la suppression des emplois, vous êtes d'accord avec moi, que ce n'était pas le moment de serrer la visse des hôpitaux et de continuer à supprimer des emplois. Donc il va y avoir une remise à niveau à faire et puis il va falloir aussi faire évoluer les structures médicales et de faire de la médecine préventive aussi. Donc je crois qu'on fera des économies dans le système de soins, si on investit dans la prévention. Je suis convaincue de cela. Ca coûte beaucoup moins cher d'investir dans la prévention et c'est pour cela que je propose dans le pacte présidentiel avec les Français la gratuité des soins pour les élèves, pour les enfants de moins de 16 ans parce que ça permet aussi de lutter contre l'échec scolaire...
Arlette Chabot
Vous maintenez même si on dit que ça coûte très très cher...
Ségolène Royal
Mais non ça ne coûte pas très cher, la plupart des enfants qui sont couverts déjà par des mutuelles, donc c'est tous ceux qui n'ont pas de mutuelle, ils seront couverts et c'est surtout une réflexion sur une médecine préventive à l'école parce que je crois que c'est cela qui aboutira ensuite, non seulement à lutter contre des formes d'échecs scolaires, les difficultés des jeunes, il y a des jeunes qui échouent parce qu'ils ne voient pas clair ou qui entendent mal et que ces problèmes ne sont pas détectés, les problèmes dentaires...
Arlette Chabot
Alors à hôpital vous remettez des infirmières, vous remettez, voilà on va former du personnel.
Ségolène Royal
hôpital, il va falloir une remise à niveau mais ça veut dire aussi parce qu'on va me le demander, on remet à niveau dans les universités, on remet à niveau dans hôpital, il va falloir payer tout cela dans un contexte de dettes que l'on connaît, donc il va falloir rationaliser la dépense publique et je crois que là aussi dans les hôpitaux, il y a souvent des propositions qui sont faites et qui pourraient permettre l'amélioration de l'organisation des services, donc je suis également favorable à ce que par exemple on puisse avoir accès à des technologies beaucoup plus pointues, et qui ne sont actuellement pas accessibles par les hôpitaux publics parce qu'ils ne sont pas encore sur la nomenclature, alors qu'ils peuvent conduire à faire des économies.
Arlette Chabot
Donc rationalisation...
Ségolène Royal
Donc il va falloir aussi je crois donner un peu plus d'autonomie aux établissements hospitaliers pour qu'ils nous disent comment mieux s'organiser pour mieux gérer la dépense publique. Et enfin je pense que les petits hôpitaux de proximité doivent être maintenus pour faire de la médecine de proximité, et notamment je suis favorable à la création de dispensaires de proximité pour que l'état sanitaire de la population...
Arlette Chabot
Qui permet le respect à la désertification médicale...
Ségolène Royal
Oui, et puis surtout là aussi de faire de la prévention, si les gens sont mieux soignés en amont, la médecine coûtera peut-être moins cher en aval.
Arlette Chabot
Voilà pardonnez-moi, alors monsieur Richard aurait plein de choses à nous dire, juste poser un problème du logement qu'on n'aura pas le temps de traiter totalement mais voilà pardonnez-nous, on fait court.
Richard
Oui bonsoir mesdames, bonsoir madame Royal, je vais faire très vite, j'ai été licencié en 2006, j'ai retrouvé un travail en 2007, j'ai déménagé et j'ai fait 700 km pour reprendre ce travail et parallèlement au travail repris, j'ai eu les plus grosses difficultés à trouver un logement puisque étant en CDI avec période d'essai aucune agence immobilière ne me louait un appartement même avec le système Loca-Pass parce que c'est un système pour que les assurances ne prennent pas au niveau des loyers et parallèlement à ça, on reprend une activité et j'ai perdu 30 % par rapport à mes annuités Assedic. Je voulais savoir ce que vous comptez faire après l'élection, si vous êtes élue par rapport à ces soucis là.
Arlette Chabot
Très court pour avoir le temps de terminer tranquillement l'émission, pardonnez-moi.
Ségolène Royal
C'est un problème extrêmement aigu, même dramatique parce que l'accès au logement, c'est ce qui conditionne tout le reste, c'est ce qui conditionne le droit d'avoir une vie de famille, une vie digne, et donc la situation s'est beaucoup dégradée en France, donc il faut reprendre et respecter le programme des 20 % de logements sociaux, je ne sais pas si vous relevez du logement social mais le problème c'est que ça crée une telle tension, comme il n'y a pas de logement social, il y a une tension supplémentaire sur le marché du locatif. Deuxièmement ce que je souhaite faire, c'est mettre en place un service public de la caution puisque vous avez déménagé et vous avez déboursé j'imagine trois mois de loyers en plus.
Richard
Qui ne fonctionnera pas dans l'état actuel puisque les assurances qui garantissent les loyers impayés ne fonctionnent pas avec la caution de l'Etat ou de Loca-Pass, il faut qu'une...
Ségolène Royal
Non c'est un dispositif nouveau que nous allons mettre en place avec...
Richard
Donc avec une caution physique...
Ségolène Royal
Avec une caution physique, il y aura un service public de la caution pour que les locataires n'aient plus à débourser trois mois de loyer avant d'entrer dans les lieux entre la caution, les frais d'agence, plus l'assurance sur les impayés de loyer en cas de difficultés d'emploi. Et enfin je ferais et j'en es la ferme volonté, je vais autoriser les communes à faire des réquisitions acquisitions des logements vacants, parce que s'il y a une pression sur le marché du locatif c'est parce qu'il y a dans certaines grandes villes 20 %, vous m'entendez, 20 % de logements spéculatifs vacants. Eh bien avec moi les communes pourront réquisitionner ces logements et pourront les remettre sur le marché du locatif et enfin les loyers seront réglementés. Nous allons suivre les choses par rapport à l'évolution du coût de la vie...
Arlette Chabot
On dit un bouclier logement c'est ça, un bouclier.
Ségolène Royal
C'est ça.
Arlette Chabot
C'est-à-dire ?
Ségolène Royal
C'est-à-dire que l'objectif c'est de faire en sorte que pas plus de 20 à 25 % du revenu soit consacré au loyer.
Richard
Excusez-moi juste très rapidement, j'entends bien que vous nous dites mais par rapport aux soucis qu'il y a entre les indemnités Assedic et la reprise de travail comme je vous l'ai dit, indemniser, si j'étais resté au chômage pendant 22 mois, j'aurais pu très bien le faire si je n'avais pas été citoyen, le fait de reprendre une activité salarié, les Assedic ne font pas de compensation entre mon nouveau salaire, donc je prends un salaire 30 % moins cher que les Assedic sans aucune aide de l'Assedic, rien, ni pour ça, ni pour un déménagement payé dans le cadre des Assedic.
Ségolène Royal
Cette question est énormément remontée dans les débats participatifs, et là aussi au niveau de la présidence de la République, le principe que je pose et que j'ai écrit, dans ce pacte que je veux nouer avec les Français, c'est que personne ne perde de l'argent lorsqu'il se remet à travailler, lorsqu'il passe d'un revenu de substitution de soutien au revenu du travail qu'il n'y ait pas de perte, de rémunération, autrement dit que l'on puisse glisser les choses, cumuler les choses dans un certain délai bien évidement pour qu'il y ait une incitation à reprendre le travail. Donc cette question là fera partie aussi de la conférence sur les revenus et la croissance et sera mise sur la table puisqu'il y a aussi le problème des érémistes, les gens qui sont au RMI, qui retrouvent un travail, qui perdent tous les avantages et donc qui sont découragés pour retravailler puisqu'ils gagnent moins en travaillant que quand ils sont au RMI, ça c'est l'assistanat et je n'en veux plus.
Arlette Chabot
C'est très fréquent, donc il y a une possibilité de cumuler au moins pendant une période, ou dans une certaine proportion.
Ségolène Royal
C'est ce qui sera fait pour que les gens aient intérêt à retrouver un travail parce que je ne veux pas d'une société d'assistanat. Je veux au contraire inciter chacun à maîtriser sa vie, à retrouver sa dignité, à revaloriser le travail et dans votre cas bien évidement il est absolument anormal qu'en retrouvant une activité professionnelle, on perde une partie de sa rémunération.
Arlette Chabot
En vous demandent une petite réponse de trente secondes, je ne résiste pas quand même à la tentation de vous demander, le travail c'est une valeur de droite ou de gauche, parce Nicolas SARKOZY met la valeur travail au centre de son projet, donc vous avez la même valeur, est-ce que c'est normal, une valeur de droite et de gauche ?
Ségolène Royal
Ca dépend comment on la conçoit vous savez...
Arlette Chabot
Mais c'est une valeur de droite et de gauche sans rentrer dans le détail, droite ou gauche ? J'aurais pas du la poser la question...
Ségolène Royal
C'est une valeur mais la différence entre ce que je dis et ce que fait Nicolas Sarkozy, c'est que je pense que la précarité a détruit la valeur travail. Je pense que ce sont les bas salaires qui détruisent la valeur travail.
Arlette Chabot
C'est une valeur de gauche le travail.
Ségolène Royal
Non, non parce que quand comme lui on défend la précarité et qu'on veut généraliser le contrat nouvelle embauche qui est finalement une autre forme du CPE, je pense que l'on détruit la valeur travail. Ce qui détruit la valeur travail, c'est le chômage et c'est pour cela que ce sera mon combat principal.
Arlette Chabot
Toutefois vous vous êtes fait piquer le truc quand même, la gauche s'est fait piquer la valeur travail ?
Ségolène Royal
La gauche doit défendre la valeur travail et c'est une de ses valeurs fondamentales, c'est une valeur de gauche fondamentale. Pourquoi c'est une valeur de gauche fondamentale ? pas au sens de la polémique politicienne, mais parce que...
Arlette Chabot
Non, non ... valeur, c'est pour ça que je posais la question.
Ségolène Royal
Mais parce que ce qui est au coeur du combat de la gauche, c'est la dignité de l'être humain, c'est que toute décision politique doit être vue au travers d'une seule question, est-ce que la décision que je prends améliore oui ou non le progrès social pour chacun et le respect pour tous ? Est-ce que oui ou non la décision politique que je prends en tant que chef de l'Etat fait avancer la France dans ce sens là et est-ce que oui ou non, je réconcilie la solidarité et l'efficacité économique ? Si c'est oui, alors je prends cette décision. Si c'est non, alors je ne prends pas cette décision.
Arlette Chabot
Dernière question web cam avant de se quitter, voilà.
Djamel, commerçant
Nicolas Sarkozy est favorable au financement de la construction des mosquées par l'Etat, si vous étiez élue demain présidente de la République y seriez-vous, vous aussi favorable ?
Ségolène Royal
Non, je pense qu'il ne faut pas modifier la loi de 1905. Je pense en revanche qu'il faut que chaque personne puisse pratiquer son culte dans des conditions dignes, et qu'aujourd'hui c'est vrai que l'exercice du culte musulman dans des caves n'est pas digne pour certaines personnes et je pense que ce problème là doit être réglé, mais il y a d'autres façons de le faire, qu'en modifiant la loi de 1905.
Arlette Chabot
Donc pas de financement public des mosquées comme...
Ségolène Royal
Je pense que ce n'est pas une bonne solution.
Arlette Chabot
Même parce qu'on dit financement étranger, ce n'est pas souhaitable.
Ségolène Royal
Mais il y a d'autres façons de le faire et d'ailleurs vous aurez observé que de nombreuses municipalités aident à la construction d'édifices en donnant des terrains, en subventionnant les associations culturelles qui accompagnent etc et je pense aussi qu'il faudra regarder la question des carrés musulmans dans les cimetières parce que cette question là aussi doit être réglée avec dignité.
Arlette Chabot
Je vous remercie, dernière étape, vous allez signer les engagements que vous prenez ce soir devant les Français, c'est-à-dire qu'on vous les reproduira trop souvent si vous êtes élue, et on vérifiera si vous les tenez. Si vous le voulez bien...
Ségolène Royal
D'ailleurs vous avez vu que dans la démocratie participative que je vais mettre en place dans le cadre de la réforme des institutions, je rendrais des comptes et donc les citoyens pourront vérifier que ma parole sera tenue.
Arlette Chabot
Alors il y aura une trace écrite ce soir, attention en allant rejoindre le pupitre, voilà on y va. Vous avez inscrit, je vous explique comment on signe, c'est un peu compliqué. Voilà on va lire ensemble les sept engagements que vous prenez ce soir devant les Français, donc il y a soutien scolaire individuel gratuit dès la rentrée de septembre, je crois qu'on l'a bien compris dans tous les collèges, les lycées. Le gagnant gagnant, pacte avec les entreprises contre le chômage...
Ségolène Royal
On l'a expliqué aussi tout à l'heure.
Arlette Chabot
On l'a expliqué. Un euro dépensé doit être un euro utile.
Ségolène Royal
Ca c'est la lutte contre les gaspillages.
Arlette Chabot
Gaspillage, c'est un mot qui est très important pour vous ça.
Ségolène Royal
Oui parce que je pense que les Français attendent cela, ils ont le sentiment que s'il y a de la dette c'est parce qu'il y a des gaspillages, il n'y a pas que cela, bien évidement donc je pense qu'il faut faire très attention à la dépense publique.
Arlette Chabot
Alors négociations, donc on a dit immédiate pour protéger l'Europe contre les délocalisations, ça, ça veut dire que vous allez faire pression sur vos partenaires européens.
Ségolène Royal
Bien sûr et je crois que grâce aussi à l'appui sur les organisations de salariés, qui ont pris conscience de ces préoccupations là, je pense que les gouvernements d'Europe commencent à bouger parce qu'ils n'acceptent plus le déménagement des territoires, uniquement parce que dans les règles du commerce mondial, il y a les règles sociales et les règles environnementales qui ne sont pas suffisamment fermes. Donc ça c'est une vraie bataille politique.
Arlette Chabot
Alors arrêt immédiat des OGM en plein champ, il faut peut-être continuer quand même l'expérimentation en labo parce que ça peut être utile.
Ségolène Royal
Bien sûr, mais ça c'est un signal c'est parce que derrière il y a l'ensemble des décisions environnementales, écologiques que j'ai évoqué tout à l'heure. Donc c'est un signe.
Arlette Chabot
Alors la VIème République, ça c'est pour faire plaisir à Arnaud Montebourg.
Ségolène Royal
Non, parce que...
Arlette Chabot
Non, c'est pour faire plaisir aux Français, c'est pour faire des citoyens... D'un mot, c'est vrai que vous organisez un référendum si vous êtes élue à l'automne sur ces problèmes de réformes institutionnelles.
Ségolène Royal
Mais c'est cela je crois que les Français attendent d'une réforme institutionnelle en profondeur. Vous savez la France a changé, le monde a changé, la politique doit changer. Elle doit se rapprocher des citoyens, partir du réel, remettre de l'ordre juste dans le fonctionnement des institutions, donc il y a le nom cumul des mandats, il y a le pouvoir renforcé de contrôle par la Parlement, il y a la démocratie participative, il y a la démocratie sociale que j'ai évoqué tout à l'heure, bref il y a les trois piliers, la démocratie parlementaire, la démocratie sociale, je l'ai évoquée avec le dialogue social qui est producteur d'efficacité économique et la démocratie participative avec l'intervention des citoyens dans les décisions qui les concernent. Il y a bien d'autres choses sur la réforme des institutions.
Arlette Chabot
Donc référendum à l'automne si vous êtes élue ?
Ségolène Royal
Oui et je l'ai dit aussi...
Arlette Chabot
Consultation. On revote à l'automne.
Ségolène Royal
Il y aura un référendum sur la réforme des institutions avec la part de régionalisation qu'on a évoqué tout à l'heure pour rendre la dépense publique plus efficace et l'Etat impartial, mais ça nous l'avons évoqué en début d'émission.
Arlette Chabot
En début d'émission. Revalorisation vous avez dit dès juillet des petites retraites. Voilà, alors il n'y a plus qu'à signer, surtout vous n'appuyez pas sur le petit bouton, contrairement à ce que l'on pourrait croire, pardonnez-moi de donner ce problème technique, mais il faut que ça marche, voilà vous signez ces engagements en mettant voilà Ségolène Royal, la date d'aujourd'hui nous sommes donc le 15 mars 2007. Voilà on vous remerciant madame Royal. Pour terminer, je voudrais vous demander, je crois que vous aviez confié à Bernard-Henry Levy quand vous avez dîner avec lui que vous aviez souvent dans la poche un livre, c'est ça ?
Ségolène Royal
Ah non.
Arlette Chabot
Contemplation, Victor Hugo, c'est vrai ou pas ?
Ségolène Royal
C'est possible, vous êtes au courant...
Arlette Chabot
Non, non mais attendez, c'est passé public, ce n'est pas une indiscrétion, ça a été publié dans un journal.
Ségolène Royal
Ce n'est pas le seul livre que je lis bien sûr.
Arlette Chabot
Vous avez des livres de chevet, des livres que vous retrouvez régulièrement ?
Ségolène Royal
D'une façon générale j'aime beaucoup lire la poésie, c'est vrai.
Arlette Chabot
C'est vrai ?
Ségolène Royal
C'est vrai.
Arlette Chabot
Et Victor Hugo ce n'est pas celui que vous détestez le plus. C'est ça.
Ségolène Royal
Voilà exactement pour pleins de raisons.
Arlette Chabot
Pourquoi ? pleins de raisons parce que vous l'avez découvert quand vous étiez très jeune au lycée ?
Ségolène Royal
Oui sur son oeuvre, sur sa vie, sur son engagement, sur sa vision de l'univers, de l'humanité et ça reste très actuel, très profond. Et je crois qu'en politique comme il faut prendre son temps, avoir des pauses, savoir méditer, savoir réfléchir, rien n'est mieux que la poésie, que la lecture de Victor Hugo, mais ça peut être d'autres auteurs.
Arlette Chabot
Merci en tout cas d'avoir accepté notre invitation. On se retrouvera tout au long de cette campagne.
Source http://www.desirsdavenirs.org, le 20 mars 2007
Bonsoir à tous, merci de nous rejoindre pour notre dernier grand rendez-vous, ce n'est pas le dernier, dernier mais en tout cas très long rendez-vous avec un candidat à l'élection présidentielle, en l'occurrence une candidate puisqu'il s'agit ce soir de Ségolène Royal. Nous sommes à cinq semaines, vous le savez du premier tour de l'élection présidentielle et nous lui demanderons ce soir quel est son programme, quelles sont ses ambitions pour la France et de nous détailler son projet en répondant à des questions de Français qui sont là dans ce studio ce soir avec nous en plateau. Et puis vous savez, c'est très important, que vous pouvez interroger Ségolène Royal en direct pendant l'émission soit par téléphone, soit par Web cam via le site France2.fr et je vous signale d'ailleurs que l'émission est diffusée en direct sur ce site France 2 donc vous pouvez la suivre intégralement si vous êtes un peu loin. Donc ce soir à cinq semaines encore une fois du premier tour, Ségolène Royal. Bonsoir madame Royal.
Ségolène Royal
Bonsoir.
Arlette Chabot
J'ai d'abord envie de vous demander, est-ce que vous aviez bien mesuré la difficulté d'une campagne présidentielle ?
Ségolène Royal
C'est une campagne difficile bien évidemment, très difficile même parce que c'est un poids immense qui pèse sur mes épaules. C'est en même temps un moment exaltant parce que j'ai conscience qu'une page de l'histoire de France est en train de s'écrire, que je représente l'espoir de millions et de millions d'électeurs qui ont envie que ça change. Et que ça change vraiment et que je veux incarner ce changement pour que la France reprenne la main.
Arlette Chabot
Parce que vous vous étiez peut-être dit, après tout le plus dur c'était de gagner la primaire parti Socialiste, la compétition a été dure et puis après ayant gagnée cette compétition interne, vous pouviez vous dire, voilà je vais être portée par un élan et ça va être facile et on s'aperçoit quand même qu'effectivement la bataille est rude.
Ségolène Royal
Oui c'est très rude. C'est très rude, mais en même temps cette rudesse est à la hauteur de l'enjeu je crois. Les Français nous observent, je veux que cette élection serve à quelque chose, c'est-à-dire qu'ils aient un choix, un vrai choix. Et donc c'est en même temps quelque chose d'essentiel, je crois que la France est dans une crise très profonde et le choix qui sera fait par les Français dans quelques semaines va définir notre avenir commun, pas seulement pour cinq ans, j'en ai la conviction profonde, mais sans doute pour toute une génération et donc il ne faut pas se tromper.
Arlette Chabot
Alors il y a des gens qui disent, on ne la reconnaît pas bien Ségolène Royal depuis quelque temps, parce qu'on la voyait libre, elle disait des choses qui pouvaient paraître extrêmement audacieuses pendant justement cette campagne au parti Socialiste, et puis depuis quelques semaines on dirait que vous êtes un peu plus cadenassée. Alors est-ce que c'est le poids du parti Socialiste, est-ce que c'est la peur du dérapage, est-ce que vous êtes, allez je ne vais pas dire, non pas sous contrôle, je ne me permettrais pas mais un peu coincée, beaucoup plus et vous avez perdu cette liberté ?
Ségolène Royal
C'est un peu vrai, je crois que j'ai eu beaucoup de libertés dans le débat interne du parti Socialiste, j'ai été désignée par 60 % des militants, notamment par tous les nouveaux adhérents qui m'ont porté, par l'opinion publique aussi qui m'a porté et puis j'ai eu cette phase d'écoute, parce que je veux répondre à la crise démocratique et je crois qu'aujourd'hui on ne peut plus faire de la politique comme avant. La France a changé, le monde a changé, la politique donc doit changer, les citoyens sont devenus exigeants, ils se sont souvent détournés des urnes et ce cri, cette attente, ces colères j'ai voulu les entendre avant de proposer ce pacte présidentiel.
Arlette Chabot
Mais vous êtes moins libre maintenant ou pas alors ?
Ségolène Royal
J'ai été moins libre c'est vrai parce que je crois que je suis appuyée par une organisation politique...
Arlette Chabot
Ce n'est pas un poids quand même, ça vous aide quand même aussi.
Ségolène Royal
C'est une chance, c'est une chance parce que ça prépare aussi la stabilité du pouvoir pour après dans le cadre d'une majorité parlementaire, mais en même temps il a fallu que je compose dans cette phase mais aujourd'hui, je suis dans la dernière ligne droite et je reprends Arlette Chabot, je reprends toute ma liberté.
Arlette Chabot
Alors vous dites ce matin dans une interview à notre confrère les Echos, justement que la ligne, c'est vous qui la définissez donc je cite, c'est moi qui la trace, je regarde la réalité de la France, telle qu'elle est et je propose des solutions efficaces sans être prisonnière d'aucun dogme. Donc ça c'est la liberté de Ségolène Royal qui s'affranchit à nouveau de tout ?
Ségolène Royal
Oui parce que je crois que c'est ce que les Français veulent, une élection présidentielle par nature est un lien direct entre une personne et le peuple français, ce n'est pas l'élection d'un parti politique, ce n'est pas une élection législative. Le parti Socialiste et les autres partis de gauche, les Radicaux, le Mouvement des Citoyens, mais bien au-delà puisque pour rassembler une majorité dans le pays, il faut rassembler bien au-delà des partis politiques, ceux qui se retrouvent sur les valeurs que je défends. Et en particulier l'idée que l'on peut et que l'on doit avoir à la fois la solidarité et l'efficacité économique et que l'un ne va pas sans l'autre, que l'efficacité économique ne va pas sans le progrès social et sans le progrès environnemental. Tout se tient, ce sont ces trois piliers qui se tiennent. On y reviendra sans doute tout à l'heure.
Arlette Chabot
Oui sûrement.
Ségolène Royal
Donc c'est pour cela que par définition, c'est la nature même de l'élection présidentielle, il m'appartient d'être libre et d'être en cohérence avec mon histoire et avec ce que je propose pour les cinq ans qui viennent et je l'ai dit tout à l'heure, même au-delà.
Arlette Chabot
Oui, mais quand même quand vous expliquez ce que vous devez incarner, la nouveauté, la révolution parce que vous êtes une femme, on en parlera tout à l'heure, et puis maintenant on se dit tiens, l'homme nouveau c'est François Bayrou, c'est lui qui dérange le candidat anti système, la nouveauté c'est lui. Comment vous appréciez cette émergence de François Bayrou ?
Ségolène Royal
Je crois que les Français cherchent, ils regardent, ils observent, ils écoutent, ils ne veulent pas se laisser avoir une nouvelle fois. Il y a eu en politique tant de promesses faites et non tenues. Et puis les gens ont parfaitement compris, je l'ai vu dans les débats participatifs, ils ont parfaitement compris que la situation de la France était difficile, que la France était gravement endettée, que la machine économique était bloquée, qu'il y avait des turbulences dans le monde, qu'il y avait une montée des insécurités, des précarités, des nationalismes, des terrorismes et donc par rapport à ces turbulences du monde, ils veulent comprendre qu'elle est encore la place de la politique.
Arlette Chabot
Donc François Bayrou, ça peut être une meilleure solution que Ségolène Royal ?
Ségolène Royal
Je ne le crois pas, mais ce sera la confrontation des projets qui le montrera. Il y a un projet à droite, celui de Nicolas Sarkozy, il y a le mien, je l'ai présenté sous forme de pacte...
Arlette Chabot
Et celui de François Bayrou.
Ségolène Royal
Parce que je considère je crois que c'est important que ce n'est pas seulement un programme unilatéral que je propose, mais je l'ai construit avec les Français, c'est-à-dire je m'engage avec eux, ils s'engagent avec moi et c'est parce que chacun sera à sa place avec une capacité d'avancer que la France à nouveau avancera. Et puis il y a François Bayrou qui pour l'instant n'a pas de programme puisqu'il l'a dit...
Arlette Chabot
Enfin ça marche en tout cas dans l'opinion, je ne sais pas s'il n'a pas de programme mais en tout cas...
Ségolène Royal
Oui mais il y a une attente, à un moment il va y avoir l'heure de vérité. Donc il a dit lui même qu'il n'avait pas de programme pour l'instant donc j'attends son programme, nous en débattrons et les Français choisiront et je suis confiante.
Arlette Chabot
Il n'y a pas de panique au PS parce qu'il y a un syndrome 21 avril et il y en a qui disent oh là là, au secours peut-être qu'il n'y aura pas de candidat de gauche au second tour encore une fois en 2007.
Ségolène Royal
Vous savez les Français vont choisir.
Arlette Chabot
Ca peut arriver ça ?
Ségolène Royal
Je ne crois pas. Je ne crois pas parce que les Français ont besoin, et ont envie d'un changement profond, donc ils ont le choix entre la continuité de ce qui existe, un candidat qui prolonge ce qui vient de se faire pendant cinq ans et on a vu avec quel résultat. Ils ont ensuite un autre candidat qui est le candidat de l'UDF, dont on attend le programme. Il y a bien sûr d'autres candidats, ailleurs et puis il y a la candidature que je représente. Et moi je pense pouvoir incarner ce changement profond tout simplement parce que je porte sur le monde un regard neuf, que la France a besoin de ce regard neuf, de solutions nouvelles et en même temps de solutions bien encrées sur ce qui fait notre unité nationale.
Arlette Chabot
C'est impossible que vous ne soyez pas au second tour de l'élection présidentielle ?
Ségolène Royal
Ce sont les Français qui choisiront, mais ce débat là il est un combat essentiel parce que je veux que les Français aient un vrai choix, qu'ils ne soient pas comme en 2002 privés de ce choix projet contre projet, valeur contre valeur. Et le choc des projets il doit avoir lieu pour que les Français choisissent. Ils choisissent entre la précarité ou au contraire la revendication de sécurité pour tous et moi je considère contrairement au programme de la droite qui estime qu'avec la précarité on fait de l'efficacité économique, moi je crois que tout le contraire, que c'est en sécurisant les citoyens qu'on les mobilisera dans le travail et que les entreprises seront plus efficaces.
Arlette Chabot
Donc il n'y aura pas de droite droite au second tour cette fois selon vous, il n'y a pas de risque. Il n'y a pas de risque sauf si les Français...
Ségolène Royal
Mais tout dépend de moi. Tout dépend de moi et c'est pourquoi ce combat il est absolument crucial, et c'est pourquoi je suis déterminée à me faire comprendre des Français, d'abord parce que ce pacte présidentiel, ils l'ont construit avec moi, j'ai pris le temps de les écouter. Je connais la France qu'ils ne veulent pas et la France qu'ils veulent. Je sais à quoi ils sont attachés. Et en même temps j'ai compris aussi leurs doutes, leurs souffrances, leurs incertitudes, le sentiment de ne compter pour rien, une attente désespérée de quelque chose qui ne vient pas et en même temps aussi leur talent, leur espoir, leur potentiel, et que la France mérite mieux que ce qu'elle a.
Arlette Chabot
Alors on va en parler tout à l'heure de votre programme, je voudrais petit retour en arrière, vous dites effectivement un candidat, une candidate, c'est une histoire, un passé, une vie, des choix. Retour en arrière, on feuillette un album un peu bizarre parce qu'on est à la télévision. On regarde des photos, on se penche vers le passé. Alors très en arrière, voilà Ségolène Royal, des nattes, les cheveux ont toujours été un petit peu long. La petite fille, il y a un film qui va arriver de ce côté, voilà les bonnets rouges, il y a 8 enfants chez les Royal. Vous êtes la quatrième, je ne me trompe pas, je parle pour vous. Vous vous souvenez de cette photo, ou de ces images, vous êtes quelque part là dedans.
Ségolène Royal
Non, vous avez beaucoup de talent, où vous avez retrouvé ça ?
Arlette Chabot
Sur les bonnets rouges.
Ségolène Royal
Oui c'était ma mère qui avait 8 enfants, donc qui cousait beaucoup et qui tricotait beaucoup pour faire des économies. Quand on a 8 enfants, vous avez tricoté à tous des bonnets rouges pour l'hiver.
Arlette Chabot
La famille au bonnet rouge.
Ségolène Royal
La famille au bonnet rouge et quand on se perdait dans notre village des Vosges.
Arlette Chabot
On vous retrouvait comme ça.
Ségolène Royal
On nous retrouvait comme ça voilà.
Arlette Chabot
Quand on est dans une famille de 8 enfants, qu'est-ce que ça apprend, la solidarité ou la volonté de s'en sortir parce qu'après tout on est 8 et il faut sortir la tête pour être mieux que les autres, réussir mieux que les autres ?
Ségolène Royal
Je crois que ça apprend le partage surtout, le partage, la solidarité. Ca apprend aussi de la part des parents, que plus on a d'enfants, plus on aime, l'amour ne se partage pas. Plus on a de personnes à aimer finalement, plus l'amour grandit. Et ça apprend aussi que finalement les solidarités familiales de base sont ce qui vous porte ensuite je crois toute la vie. C'est peut-être pour ça aussi que j'ai voulu moi aussi avoir une famille nombreuse parce que...
Arlette Chabot
Une famille, quatre enfants.
Ségolène Royal
...parce que je crois que les solidarités entre enfants sont irremplaçables.
Arlette Chabot
Alors on avance un tout petit peu, vous êtes à l'école, on va vous voir sur cette photo qu'on a déjà vu, vous êtes à ce moment là à Epinal, on vous appelle Marie Ségolène, à quel moment vous avez renoncé à Marie ?
Ségolène Royal
Je ne sais plus très bien, je pense, je ne sais plus, en arrivant à l'université je crois.
Arlette Chabot
Il reste quelque chose de cette éducation un peu catholique ou pas chez vous. Vous êtes croyante ou vous avez abandonné la religion ?
Ségolène Royal
Il reste toujours quelque chose d'une éducation de l'enfance, ça structure toujours surtout quand on est...
Arlette Chabot
Même la religion.
Ségolène Royal
Bien sûr même la religion. Il y a dans les religions aussi des morales universelles lorsque l'on apprend le respect des autres, la lutte contre la pauvreté, l'attention à porter, bien sûr que ça structure mais en même temps ça permet aussi de s'en affranchir. Et je crois que les enfants les plus en souffrance sont ceux à qui on ne transmet aucune règle, parce que si on n'a aucune règle, on ne peut plus choisir ses libertés et donc je suis favorable moi à l'autorité parentale par exemple.
Arlette Chabot
On en parlera tout à l'heure parce que c'est vrai que...
Ségolène Royal
Parce que je crois que c'est l'autorité qui permet de grandir, parce que ça permet la transgression et dans la religion c'est pareil je crois, c'est-à-dire on garde à la fois des racines d'une identité culturelle et en même temps on a la possibilité de s'en affranchir et de les transgresser pour en choisir d'autres.
Arlette Chabot
Alors on va regarder parce que cette enfance a quand même été difficile. On a retrouvé ce que vous disiez à notre ami Henry Chapier, sur le divan, c'était en 1994.
Ségolène Royal
Moi-même j'ai eu une enfance et une adolescence extrêmement pénible, violente, ces épreuves que j'ai connu, c'est aussi ce qui fait ma force. Toute mon enfance et toute mon adolescence, j'ai entendu mon père dire, vous les filles, vous êtes faite pour le mariage et vous ne ferez pas d'études. Donc mes soeurs qui étaient les aînées ont été sacrifiées à cette logique là et moi qui ait eu plus de chance, puisqu'étant au milieu de la fratrie, je suis arrivée à un moment où j'ai pu me révolter. Et puis j'avais trop souffert des valeurs de la droite traditionnelle dans ma vie d'adolescente que c'est quelque chose aussi avec laquelle j'ai été en rupture.
Arlette Chabot
Les mots sont forts, vous disiez pénible, vous parliez de violence, c'est fort quand même, ce n'est pas une enfance heureuse ?
Ségolène Royal
Mais ce n'était pas une violence, ce n'était pas une violence, je n'ai pas été maltraitée si vous voulez.
Arlette Chabot
Non j'ai bien compris, mais c'est fort quand même.
Ségolène Royal
Oui mais je vais vous dire, je ne sais pas de quand datent ces images.
Arlette Chabot
94.
Ségolène Royal
94 oui, je pense aussi qu'avec l'âge, on fait le tri des choses et on garde les côtés positifs de la vie. Et moi le regard que je porte maintenant sur mon passé est positif parce que je sais ce qui m'a été transmis et qui me rend solide aujourd'hui et j'ai eu la chance d'avoir à me battre pour échapper au destin qui m'était tracé. Et je crois que c'est ce qui a forgé aussi ma volonté de socialiste, c'est-à-dire avoir une révolte bien intacte et se dire que si je suis un jour présidente de la République, je veux pour tous les enfants de France dont le destin est tracé d'avance qu'ils puissent se dire, que non, que la République va leur donner les moyens de s'échapper à ce destin tracé d'avance pour qu'ils puissent choisir le leur. Je crois que c'est ça le socialisme moderne du 21ème siècle.
Arlette Chabot
Votre volonté c'était de montrer à votre père que vous pouviez mieux réussir que vos frères ?
Ségolène Royal
Sûrement pas.
Arlette Chabot
Non.
Ségolène Royal
On n'était pas en compétition entre frères et soeurs.
Arlette Chabot
Non mais vous c'est une fille, non mais c'est une fille par rapport au garçon, c'était de mieux réussir.
Ségolène Royal
C'était de m'affranchir, c'était de conquérir ma liberté et c'était de ne pas subir le destin des femmes de ma famille qui ne travaillaient pas, qui n'avaient aucune autonomie financière. Je pense que l'autonomie financière donne aussi de la liberté. Et puis j'adorais l'école et mes enseignants m'ont toujours poussé à avancer. Et en même temps je suis sans rancune puisque si mes parents, si mon père était comme ça, c'est que lui, il pensait faire pour mon bien. Il avait lui même reçu ces principes là de la génération précédente. Donc moi j'ai pu bâtir ma vie, j'ai pu construire ma vie, j'ai pu la choisir. J'ai pu échapper à ce destin tout tracé, je me suis battue et je crois que c'est une force intérieure.
Arlette Chabot
Et vous avez la même force aujourd'hui ?
Ségolène Royal
Oui parce que je comprends aussi tous ceux qui subissent aussi des discriminations ou qui se disent je ne peux pas choisir mon destin, je n'y arriverais pas. Et moi je veux dire à tous, si tout le monde peut y arriver grâce à l'école et c'est pourquoi aussi dans ce pacte présidentiel l'école prend tellement tant d'importance, peut-être parce que je suis le pur produit de cette réussite scolaire de la République et c'est ça qui m'a permis d'avancer.
Arlette Chabot
Alors on avance nous aussi dans l'histoire. Deux modèles peut-être, vous allez voir, il faut regarder sur les deux images. Jeanne D'ARC, ça on se disait, c'est une héroïne que vous avez côtoyé ou découverte quand vous étiez en Lorraine. Jeanne D'ARC, c'est un symbole pour vous ?
Ségolène Royal
Bien sûr c'est une vie extraordinaire.
Arlette Chabot
Courte.
Ségolène Royal
Courte, elle n'a pas eu 20 ans, elle a transgressé les interdits en remettant un habit d'homme. Elle a essayé de sauver la France, bien sûr c'est une femme extraordinaire et il n'y a aucune raison d'en laisser le monopole à je ne sais qui.
Arlette Chabot
A Jean-Marie Le Pen par exemple ?
Ségolène Royal
Par exemple.
Arlette Chabot
De l'autre côté François Mitterand, c'est la campagne 1988, la France unie, est-ce que quand vous faites votre campagne aujourd'hui vous pensez à celle de François Mitterand, notamment à celle là que vous avez suivi de près ?
Ségolène Royal
Quand je reçois des attaques oui, ou des coups très rudes, je me dis que ce n'est presque rien par rapport à ce qu'il a subi et donc ça me permet de les surmonter. Et puis je garde toujours intacte l'une de ses leçons qui consiste à penser toujours que c'est parce que je défends des idées qui sont plus grandes que moi, que j'avance. Et puis une autre leçon je crois pour la place de la France dans le monde, c'est que quand la France rencontre une grande idée, cette grande idée fait le tour du monde. Et donc quand je pense aux épreuves, quand je pense à l'identité de la France et quand je pense à la place de la France dans le monde alors je tiens debout et je me dis que j'ai un devoir de victoire.
Arlette Chabot
Et vous pensez à François Mitterand. Alors on revient à l'actualité, il y a deux photos, il faut bien les regarder ensemble, vous allez découvrir, on va revenir à effectivement ce qui se passe aujourd'hui un petit peu à la campagne présidentielle. Voilà alors vous avez fait partie des, de ce qu'on appelait à l'époque des trans-courants, c'est-à-dire que vous étiez proche de Jacques Delors, on vous voit là à côté de Jacques Delors. Et alors vous regardez de l'autre côté et vous voyez Jacques Delors avec François Bayrou. On revient à François Bayrou parce que quand il dit qu'il voudrait comme Premier ministre un Jacques Delors jeune, franchement ça ne peut pas être quelqu'un de méchant ou de mauvais François Bayrou ?
Ségolène Royal
Ce n'est pas très aimable pour Jacques Delors vous l'avouerez.
Arlette Chabot
Je ne sais pas moi, pourquoi, Premier ministre de François Bayrou, ce n'est pas honorable, ou un Jacques Delors jeune.
Ségolène Royal
Moi je ne fais pas de sélection par l'âge surtout pour Jacques Delors qui a gardé une vitalité exceptionnelle et qui aurait beaucoup à en revendre et en particulier à François Bayrou.
Arlette Chabot
Sérieusement quand on voit ça, est-ce que ça veut dire quand même que vous n'êtes pas aussi éloignés les uns des autres ? C'est-à-dire François Bayrou dit, il y a des vrais clivages avec Nicolas Sarkozy mais en revanche avec Ségo c'est un peu plus compliqué, avec la gauche, c'est un peu différent, il y a des différences, mais pas de divergence. Alors quand on voit ça on se dit, c'est vrai que finalement vous n'êtes peut-être pas aussi éloignés les uns des autres ?
Ségolène Royal
Ca tombe bien de clarifier les choses, ce matin Jacques Delors a pris très clairement position dans le Nouvel Observateur. Il m'a apporté un soutien très clair, il a dit d'ailleurs quelque chose d'exceptionnel qui m'a beaucoup touché, il a dit qu'il avait trouvé des trésors dans ma campagne. Trésors de la démocratie participative, le trésor de l'écoute et puis le fait d'avoir construit mon projet avec les Français. Et enfin il a dit que je défendais des valeurs auxquelles il tenait beaucoup, la famille et l'école. Et c'est vrai que je pense que si l'on veut remettre debout la maison France alors il faut que les familles fonctionnent bien. Si on veut prévenir la délinquance, il faut aider les parents à éduquer leurs enfants et que école, famille, travail, valeur travail, tout se tient.
Arlette Chabot
Mais si je comprends bien, on ne fait pas du genre puisque Ségolène était proche de Jacques Delors et que François Bayrou dit qu'il aime beaucoup Jacques Delors, François Bayrou et Ségolène Royal ne vont pas travailler ensemble, il ne faut pas en déduire ça, ou ils vont travailler ensemble. Ce n'est pas possible, pour que les choses soient claires.
Ségolène Royal
Mais les règles sont très claires.
Arlette Chabot
Ce n'est pas possible ça, vous ne pouvez pas être ensemble, travailler ensemble, vous retrouvez pour un second tour de l'élection présidentielle ?
Ségolène Royal
Ecoutez pour l'instant François Bayrou, je l'ai dit tout à l'heure n'a pas de programme, on verra ce qu'est son programme. Ensuite il a toujours fait des alliances au sein de la droite et avec la droite.
Arlette Chabot
Et s'il disait, s'il s'alliait, s'il vous faisait des propositions un jour pour un second tour, vous diriez non, non pas du tout ou discutons ?
Ségolène Royal
Mais moi je ne suis pas dans des négociations d'appareil et de personne, moi je suis pour défendre le pacte présidentiel que j'ai construit avec les Français et pour les convaincre. Pour les convaincre que la France peut à nouveau se relever.
Arlette Chabot
Donc pas de négociation avec qui que ce soit.
Ségolène Royal
Il n'y aura aucune négociation. Je n'en ai même pas eu au sein du parti Socialiste, des négociations, alors vous imaginez que je ne vais pas en avoir avec des personnes qui cherchent un peu où est la meilleure sortie. Non, non, moi je suis pour la clarté, la clarté des valeurs, la clarté des objectifs, la clarté des programmes, la clarté du débat politique et donc pour que cette campagne et cette élection présidentielle servent à la France.
Arlette Chabot
Petite question justement, précision, vous avez reproché, je ne vais pas dire aux éléphants, ça les vexe, mais je vais dire à certaines personnalités importantes du parti Socialiste de ne pas avoir fait bloc tout de suite autour de vous, mais en même temps, vous dites je suis seule, je décide de tout, franchement vous soutenir, ils ont peut-être du mal, il faut les comprendre.
Ségolène Royal
Je n'ai rien reproché.
Arlette Chabot
Vous avez dit, ils ont mis du temps à faire bloc autour de moi.
Ségolène Royal
J'ai répondu à une question. Vous savez moi je réponds très clairement aux questions qui me sont posées.
Arlette Chabot
Bon alors moi je vous la pose, donc...
Ségolène Royal
C'est vrai ils ont eu un peu de mal, ce que je comprends d'ailleurs.
Arlette Chabot
Mais vous en aviez vraiment envie qu'ils fassent bloc ou ça faisait un peu rétro...
Ségolène Royal
Ce n'est jamais désagréable quand même que tout le monde fasse bloc.
Arlette Chabot
Ca fait rétro, les anciens reviennent, ce n'est pas terrible pour l'image de Ségolène Royal, il y en a qui disaient ça aussi.
Ségolène Royal
Oui, mais je comprends qu'ils aient mis du temps sur le plan humain, parce que je crois que, c'était imprévu, quand même ma désignation, ce n'était pas dans les logiques du parti Socialiste. Il y a eu un débat interne assez vif, il y a eu tous ces nouveaux adhérents, pourquoi est-ce que j'ai été désignée, parce que les nouveaux adhérents sont à l'image des Français et ils ont une soif de changement. Ils veulent le socialisme du réel. Ils veulent aussi que l'on regarde au delà du parti socialiste et qu'on se tourne vers les Français et ceux qui m'ont désigné ont compris cela, donc c'est difficile, c'est une mutation aussi du parti Socialiste que j'entraîne, un changement profond sur la façon de faire de la politique et en plus je suis une femme. Donc ça fait beaucoup à la fois. Mais maintenant je me tourne vers l'avenir et je crois qu'aujourd'hui tout le monde est à son poste, c'est-à-dire ...
Arlette Chabot
Et tout le monde vous soutient et fait bloc autour de vous, derrière vous.
Ségolène Royal
Tout le monde est sur le terrain en train de valoriser les propositions et ça je crois que c'est très important.
Arlette Chabot
Petite question, les parrainages, on a entendu Olivier Besancenot dans le journal de 20 heures, dire qu'il avait effectivement ses signatures, les 500 qui lui permettent d'être candidat, vous n'avez pas un peu trop verrouillé, enfin le parti Socialiste n'a pas un peu trop verrouillé, ça va être dur après ce qui s'est passé pour empêcher qu'il y ait trop de candidats à l'extrême gauche, José Bové qui par exemple ne pourra pas concourir, c'est normal, ou c'est trop peut-être ce verrouillage ?
Ségolène Royal
Vous savez si la loi avait pu être changée, elle aurait du être faite avant. Quand j'entends le ministre de l'Intérieur souhaiter qu'il y ait davantage de candidats...
Arlette Chabot
Finalement c'est lui qui dit, il faut des parrainages pour Besancenot...
Ségolène Royal
Ce que je pense, d'abord c'est l'affaire du parti Socialiste, ce n'est pas la mienne. Premier point.
Arlette Chabot
Ce n'est pas la votre, chacun chez soi.
Ségolène Royal
Mais si je suis en responsabilité puisque je ferais une réforme institutionnelle profonde, la question de savoir si des mouvements de pensées qui ont obtenu lors d'une élection des suffrages suffisamment, en nombre suffisamment important pour représenter quelque chose dans la République française, doivent pouvoir concourir au scrutin suivant, je pense que cette question se pose. Donc il faut que les électeurs puissent se reconnaître et que le combat politique au sens noble du terme puisse avoir lieu clairement.
Arlette Chabot
Et ça par exemple ça passera par une proportionnelle évidemment que vous instaurez si vous êtes élue. Question, sur le gouvernement que vous pourriez former si vous êtes élue, parité, j'imagine, gouvernement resserré, peu de ministres.
Ségolène Royal
D'abord le gouvernement que je formerais aura pour mandat d'appliquer le pacte présidentiel que les Français auront choisi. Il aura cette feuille de route. Et en particulier il devra aller vite, ça c'est le premier critère de nomination du gouvernement.
Arlette Chabot
15 ministres ouverture, ou 20 ministres...
Ségolène Royal
Je pense qu'il faut que l'Etat se réforme en profondeur. Je crois que lorsque des compétences ministérielles ont changé 8 ou 9 fois en une dizaine d'années, ça met une forme de désordre au niveau de l'Etat. Donc moi je veux un Etat sobre, un Etat modeste parce que je crois qu'on peut concilier la modestie dans l'exercice du pouvoir et la grandeur de la France. Ce n'est pas incompatible, c'est d'ailleurs le Général de Gaulle qui le disait, il avait raison, il avait parfaitement incarné cela et en même temps, je crois qu'il faut dans une mutation et dans une réforme profonde des institutions, décentraliser l'Etat, non pas pour l'affaiblir mais au contraire pour le rendre plus fort. Il y aura aussi des règles d'éthique sur la diminution du train de vie de l'Etat. Je crois que ça c'est très important, les Français observent cela. Ils observent comment vivent leurs responsables politiques et je crois qu'il faudra en rabattre un peu sur le caractère un peu monarchique de l'exercice du pouvoir.
Arlette Chabot
Généralement c'est toujours ce que l'on dit pendant les campagnes et puis après ça ne suit pas.
Ségolène Royal
Eh bien je crois avoir prouvé que ça suivait parce que quand je suis arrivée à la tête de la région Poitou Charente, j'ai considérablement diminué le train de vie de cette région. J'ai supprimé les grosses voitures, j'ai supprimé les réceptions de toute sorte, les invitations gratuites qui partaient aux notables et qui partent désormais aux citoyens tirés au sort au hasard des choses. Et donc je crois que cette réduction du train de vie de l'Etat, elle est parfaitement possible. Je crois qu'il faut se rapprocher des démocraties nordiques qui font preuve d'une grande éthique dans l'utilisation des fonds publics et en particulier aucun ministre ne pourra vivre avec sa famille au sein des ministères en étant logé, nourri, blanchi au frais de la République.
Arlette Chabot
Il y aura des personnalités nouvelles, ce sera très rajeunie l'équipe Ségolène Royal ? Les anciens s'en vont, les anciens ministres non, il y a place à une nouvelle génération, c'est ça que vous souhaitez autour de vous dans une équipe ministérielle ?
Ségolène Royal
Je veux l'équipe la plus efficace possible.
Arlette Chabot
Mais alors ça, il va y avoir ambiguïté...
Ségolène Royal
Celle qui travaillera le plus rapidement possible, celle qui sera capable d'appliquer le plus vite possible et de ne pas décevoir les Français, parce que les Français ont un doute, vous avez vu, il y a encore plus de deux Français sur trois qui ne savent pas...
Arlette Chabot
61 % en plus disent qu'ils ne croient ni en la droite ni en la gauche pour gouverner...
Ségolène Royal
Mais qu'est-ce que ça veut dire ça, arrêtons-nous un instant. Ca ne veut pas dire que les clivages ont disparu, je crois bien au contraire, nous avons la responsabilité de faire en sorte qu'il y ait des choix très clairs avec des valeurs qui s'opposent et qui ne s'appuient pas sur les mêmes ressorts. Je l'ai esquissé tout à l'heure, on pourra peut-être y revenir. Je pense en particulier que la sécurisation, la lutte contre la précarité est un élément de l'efficacité économique, la droite pense le contraire. Je pense que l'efficacité des services publics est un élément de l'efficacité économique. La droite, l'UMP, le projet de l'UMP, c'est le contraire puisqu'ils proposent de supprimer un fonctionnaire sur deux. Je pense que la justice sociale est un élément de l'efficacité économique. Je crois aussi qu'il est possible de protéger l'Europe contre les délocalisations en faisant en sorte que les Etats assument leurs responsabilités. La droite croit davantage au marché. C'est un débat noble, ce n'est pas une mise en cause des personnes, ce sont des choix fondamentaux entre lesquels les Français doivent choisir. Mais quand ils disent, si je peux juste prolonger là dessus qu'ils ne croient plus dans la droite et dans la gauche...
Arlette Chabot
Parce qu'elles ne tiennent pas leurs promesses.
Ségolène Royal
Non, je crois que c'est plus grave que cela, c'est qu'ils ne veulent pas être instrumentalisés dans un vote. Eh bien moi ce soir je dis aux Français qui m'écoutent, votre vote je ne l'instrumentaliserais pas, c'est-à-dire que si vous m'apportez votre voix, je ne dirais pas que c'est le parti Socialiste qui a gagné l'élection présidentielle et qu'on va tout refaire comme avant. Et c'est de cela dont les Français ont peur, ils ont peur qu'il y ait, vous voyez une mauvaise interprétation de leur vote. Et moi je leur dis que votre vote, je sais que je l'aurais mérité, que ce n'est pas facile de faire confiance une nouvelle fois à des responsables politiques qui donnent le sentiment d'avoir les réponses aux problèmes avant l'élection et puis on attend après l'élection que cette efficacité se mette en place. Et moi comme je pense et que je crois que ce pacte m'engage et qu'il a été fait avec les Français, je suis tenue par la parole que j'ai donné, j'ai écouté pour agir juste, alors demain j'ai la responsabilité de tenir ma parole parce que c'est peut-être la dernière fois que les Français feront confiance à un vote et à un vote politique.
Arlette Chabot
Mais alors après c'est quoi si vous dites c'est la dernière fois, sinon après ce sera quoi à votre avis ?
Ségolène Royal
Sinon après ils ne viendront plus voter, ils s'échapperont vers les extrêmes. Ils feront des votes de protestation, et ils viennent déjà de se comporter comme cela lors des précédents scrutins et donc il faut écouter cette crise démocratique et ne pas instrumentaliser les votes. Je suis socialiste, fidèle à mon histoire, je veux rassembler la gauche, mais au-delà je veux m'adresser au plus grand nombre possible de Français et je leur dis très clairement votre vote ne sera pas instrumentalisé. C'est-à-dire les socialistes ne pourront pas dire, vous voyez on a pris notre revanche. Ce n'est pas un vote de revanche, c'est un vote de projet pour l'avenir.
Arlette Chabot
Alors trois petites questions et réponses courtes. Vous avez déjà choisi votre Premier ministre, parenthèse. Vous l'avez déjà en tête, vous y avez pensé ?
Ségolène Royal
J'y réfléchis.
Arlette Chabot
Et vous avez un nom dans votre tête déjà.
Ségolène Royal
Bien sûr, j'en ai plusieurs. Vous ne serez pas déçue Arlette Chabot.
Arlette Chabot
Ah bon, je croyais que vous alliez me dire, je ne vais pas le dire ce soir, j'étais sûre que vous ne le diriez pas ce soir, mais vous avez un choix.
Ségolène Royal
Oui, j'ai plusieurs hypothèses.
Arlette Chabot
Il y a plusieurs hypothèses en fonction de l'élection, des difficultés de l'élection, des personnalités, de la personne qui sera plus sympa avec vous, qui aura fait vraiment campagne pour vous.
Ségolène Royal
Je vous dirais tout cela le moment venu.
Arlette Chabot
Il y en a qui disent Dominique Strauss-Kahn, si je dis ça vous allez répondre...
Ségolène Royal
Ne jouez pas au jeu des devinettes.
Arlette Chabot
Je ne joue pas. Question d'actualité, certains disent que Jacques Chirac pourra être entendu dans l'affaire des emplois fictifs du RPR après le délai légal, c'est-à-dire un mois après son départ de l'Elysée, est-ce que vous souhaitez que la justice, vous allez me dire, fasse son travail, ou est-ce que vous pensez que c'est souhaitable que le président réponde des actes commis avant, ou est-ce que vous pensez qu'il faut laisser partir tranquillement un président qui a accompli son mandat, ses mandats ?
Ségolène Royal
Ecoutez moi je suis favorable, vous le savez à l'indépendance de la justice et d'ailleurs dans la réforme des institutions que je propose, dans cette réforme démocratique profonde que les Français attendent, la présidente de la République ne sera plus présidente du conseil supérieur de la magistrature. Et celui-ci sera donc totalement indépendant. Et dans tous les organismes indépendants, y compris le conseil constitutionnel, les membres seront désignés à une majorité des trois cinquièmes de l'Assemblée nationale, ce qui fait que majorité et opposition auront leur mot à dire sur la constitution des organismes indépendants qui font fonctionner la République.
Arlette Chabot
Et Jacques Chirac ?
Ségolène Royal
Donc indépendance de la justice et en même temps moi vous savez je pense que je ne suis pas quelqu'un par nature qui ait envie de s'acharner. Je pense que le respect aussi pour la fonction présidentielle aura peut-être méritée un certain délai. Je suis étonnée que cette information sorte tout de suite, alors que la campagne présidentielle est en cours et je crois qu'il faut à la fois que la justice fasse son travail et en même temps respecter les institutions.
Arlette Chabot
Alors la campagne est dure, violente. Votre ancien conseiller économique, Eric Besson, va publier un livre dans quelques jours. On a déjà des extraits dans le site du Figaro. Il dit " je ne souhaite pas pour mon pays et je redoute pour mes enfants une élection de Ségolène Royal ". C'est un mauvais coup ?
Ségolène Royal
Vous me l'apprenez parce que je ne suis pas...
Arlette Chabot
Voilà c'est en ligne sur le site du Figaro de ce soir, c'est pour ça que je vous pose la question. Voilà ce qu'il dit.
Ségolène Royal
Vous m'interrogiez tout à l'heure sur la dureté de campagne pour l'élection présidentielle, voilà ces péripéties en font partie. Mais vous savez, je suis une femme solide au clair avec elle-même et essentiellement tournée vers les Français. Ce n'est pas de moi qu'il s'agit, c'est de l'avenir du pays. Et donc c'est de cela dont il aurait du parler parce qu'il a du talent Eric Besson. Il aurait du nous parler de la France. Ca aurait été beaucoup plus intéressant.
Arlette Chabot
Question rapide avant que vous ne répondiez aux autres questions posées par les Français qui sont là et ceux qui vous interrogent, encore une fois, par le téléphone puis répondre aux questions de Nicolas Hulot qui viendra vous demander si vous vous souvenez bien de son pacte, que vous avez signé, de notre confrère Eric Le Boucher. Je vais vous poser deux questions. Vous aviez dit sur les 35 heures qu'elles avaient été adoptées de façon un peu technocratique et qu'elles avaient eu des effets négatifs sur des personnes un peu fragiles. Qu'est-ce que vous faites sur les 35 heures alors que le Parti socialiste dit qu'il faut généraliser ces 35 heures ? Quelle est votre position aujourd'hui ?
Ségolène Royal
Je pense qu'au niveau auquel je me situe dans cette candidature à l'élection présidentielle, ce qui est important c'est l'approche globale de la façon dont je vais aider les entreprises à redémarrer. La question du temps de travail en fait partie mais elle ne peut pas être isolée des autres problèmes.
Arlette Chabot
Alors vous allez parler des autres problèmes mais je voudrais juste que vous répondiez à ça. Est-ce que vous avez une position ou pas ?
Ségolène Royal
J'ai une position sur la relance de la machine économique. Et je veux m'appuyer sur les petites et moyennes entreprises qui aujourd'hui créent de l'emploi, qui ont des difficultés, qui sont en panne, qui ont besoin d'être aidées pour garder un coup d'avance dans l'innovation et dans la recherche, pour conquérir des marchés étrangers. Et donc je veux leur donner de l'agilité et de la souplesse.
Arlette Chabot
Donc c'est pas en leur imposant les 35 heures ?
Ségolène Royal
Donc c'est pas en leur imposant unilatéralement les 35 heures mais cette question fera partie de la nouvelle donne sociale. Parce que je veux aussi faire la démocratie sociale, je pense que c'est un des nouveaux ressorts de l'efficacité économique. Un dialogue social achevé avec des syndicats responsables et forts qui seront donc capables comme dans les pays du Nord de l'Europe de faire des compromis sociaux dans l'intérêt des ...attendez c'est très important parce que cette vision-la des choses m'oppose au projet de la droite. Je considère que c'est dans un dialogue social approfondi et j'ai rencontré les organisations syndicales et j'ai rencontré les jeunes dirigeants d'entreprise.
Arlette Chabot
Ce soir vous allez en parler avec les dirigeants d'entreprises.
Ségolène Royal
Juste d'un mot, qui ont tous envie de sortir rapidement de la logique de la confrontation pour aller vers une culture de la négociation, de l'anticipation qui donne à la fois de la sécurité aux salariés et de l'agilité, de la souplesse, de la flexibilité aux entreprises. Mais pas la flexibilité que pour les salariés.
Arlette Chabot
Quand Michel Sapin dit que ce serait un objectif, les 35 heures, la généralisation, un objectif on l'atteint ou on l'atteint pas. Il faut vraiment l'atteindre. Vous avez dit que c'était quand même, ça avait constitué l'application des 35 heures pour une minorité, une régression sociale. Franchement...
Ségolène Royal
Mais c'est pas incompatible.
Arlette Chabot
Non mais je veux dire, l'objectif, vous mettez du temps, c'est pas un truc que vous allez appliquer immédiatement.
Ségolène Royal
Pas du tout. De toute façon, ça fera de toute façon l'objet comme tout ce qui concerne...
Arlette Chabot
D'une négociation par branche ? Par branche, par entreprise ?
Ségolène Royal
Il y aura d'abord dès l'élection présidentielle l'ouverture de la négociation globale sur la croissance et sur les revenus de la conférence sur la croissance et sur les revenus et tous les sujets seront mis sur la table. Donc c'est un débat à trois avec une nouvelle donne.
Arlette Chabot
Donc les 35 heures seront dedans avec les PME par exemple ?
Ségolène Royal
Les salariés, les entreprises et les pouvoirs publics. Et les 35 heures seront mises sur la table à ce moment-la. Et les entreprises ne sont pas toutes dans la même situation. Et par ailleurs que vaut t-il mieux ? Des salariés bien formés, bien payés, bien motivés, bien productifs pendant 35 heures mais vraiment des 35 heures qui ont aussi amélioré leur condition de vie ? Ou des salariés qui travaillent 40 heures mais qui sont mal payés, mal considérés, mal formés ? Donc je veux dire par-là que la qualité horaire du travail est aussi importante que la durée du travail. Et j'invite le Medef à sortir des dogmes et à laisser penser que tout va mal à cause des 35 heures. Les 35 heures ont été mal appliquées dans certaines entreprises.
Arlette Chabot
Mais c'est fini les mesures qu'il faut imposer comme ça, à votre avis ? Vous vous dites, on fera pas comme avant. Donc si vous êtes élue avec un gouvernement socialiste, vous n'appliquerez plus, vous ne déciderez plus comme ça de façon autoritaire ou technocratique comme vous l'avez dit, de mesures comme les 35 heures ?
Ségolène Royal
Je déciderais mais pas de façon technocratique ? J'exercerais mon autorité, une autorité juste. C'est à dire que je laisserais faire d'abord le dialogue social, la négociation sociale.
Arlette Chabot
Et ensuite avec du terme. Vous dites, c'est pas deux ans, un an. Il faut laisser du temps.
Ségolène Royal
La négociation sociale est l'association des citoyens aux décisions qui les concerne dans tous les domaines parce que, vous le savez je pense, je crois beaucoup dans l'intelligence collective et je pense que l'une des valeurs nouvelles à faire monter en France, c'est faire en sorte que les intérêts des uns convergent avec les intérêts des autres.
Arlette Chabot
Que vous appelez le gagnant gagnant ?
Ségolène Royal
C'est ce que j'appelle le gagnant gagnant. C'est ce que j'appelle aussi les cercles vertueux. C'est un peu plus complexe mais ça veut dire qu'au lieu de s'affronter, de se détruire, quand il y a une grève très dure dans une entreprise tout le monde y perd alors que si il y a un dialogue social par anticipation et si les salariés ont le sentiment que l'entreprise se comporte bien. Et si les employeurs peuvent compter sur une certaine souplesse parce que les pouvoirs publics et l'Etat sera garant du juste équilibre du dialogue social...
Arlette Chabot
Et vous déciderez quand il faudra ?
Ségolène Royal
Et l'Etat, les pouvoirs publics, le Parlement décidera de généraliser ce que les partenaires sociaux auront réussi à négocier. Et donc les choses seront beaucoup plus solides. Et l'engagement aussi que je prends parce que je crois que c'est très important pour qu'un pays se redresse, c'est que les règles restent stables. Les gens en ont assez.
Arlette Chabot
Oui mais ça, c'est les alternances gouvernementales aussi.
Ségolène Royal
Mais écoutez c'est plus possible. Moi je ne viendrais pas ici détruire, par principe, tout ce qui a été fait avant.
Arlette Chabot
Mais vous vous souvenez tout ce que le Parti socialiste a dit, on annule, on annule, on annule ?
Ségolène Royal
Le Parti socialiste a dit cela et moi j'ai dis un certain nombre de choses. J'annule ce qu'il faut annuler, je remets des contrats à durée indéterminée. Par exemple comme le contrat...
Arlette Chabot
Le contrat nouvelle embauche par exemple ?
Ségolène Royal
Comme le contrat de référence sera le contrat à durée indéterminée. Je mets fin au désordre et je remets de l'ordre juste partout où la droite a semé du désordre.
Arlette Chabot
Mais c'est pas un retour automatique à ce qu'il y avait en 2002 ?
Ségolène Royal
Mais c'est pas un retour. Ce qui fonctionne bien, ce qui marche bien, il n'y aura aucune raison de le remettre en cause. Et bien souvent d'ailleurs, ce sont les gens qui font bien marcher les choses sur l'ensemble du territoire. En revanche ce qui me paraît très important, c'est que les règles soient stables. C'est à dire que pendant cinq ans, les gens connaissent quelles sont les règles sociales, les règles fiscales, les règles environnementales et qu'elles puissent et que chacun puisse construire sur la stabilité des règles.
Arlette Chabot
On va en parler.
Ségolène Royal
Et ces règles seront mises en place avant la fin de l'année. Et ensuite elles, non pas elles ne bougeront plus parce que...
Arlette Chabot
Donc des négociations fin d'année 2007, si vous êtes élue.
Ségolène Royal
Les règles seront claires. Il n'y aura plus de modification fiscale, sociale tous les ans ou environnementales. Les règles sont fixées. Ensuite elles seront bien évidemment adaptées au fur et à mesure puisque l'art de gouverner, c'est aussi d'avoir la capacité d'observer comment une règle définie à un moment donné s'applique. Il y a des interactions, le corps social, le corps humain, la nature humaine réagit à ces règles. Donc il y a un besoin d'adaptation permanent mais les règles ne seront pas changées en cours de route et donc les entreprises sauront sur quelles règles elles peuvent compter.
Arlette Chabot
On parlera avec des chefs d'entreprise dans un instant. Petite question, grande question, la dette. On a le compteur, 1221 milliards d'euros. On fait tourner. C'est à dire qu'à la fin de l'émission, on sera à 121 milliards 773. On en prend 13, 14 millions d'euros pendant les émissions. La dette, vous avez dit c'est épouvantable, en commençant votre discours de Villepinte. Vous avez une décision à prendre pour arrêter de creuser la dette ? Comment au moins arrêter de creuser la dette avant de la réduire. Qu'est-ce que vous faites ?
Ségolène Royal
C'est de faire redémarrer le pays. Pourquoi est-ce qu'il y a une dette ? Parce que quand il y a du chômage...
Arlette Chabot
Il y a trop de dépenses de l'Etat.
Ségolène Royal
Il y a trop de dépenses donc il faut faire des économies sur les dépenses de l'Etat. On en a parlé tout à l'heure. Il faut remettre de l'ordre dans la répartition des compétences. Aujourd'hui il y a des chevauchements entre les compétences de l'Etat, celles des Régions, celles des départements.
Arlette Chabot
Ca c'est la réforme de l'Etat. Et ça suffit pour arrêter les dépenses ?
Ségolène Royal
Je pense que c'est très important de remettre au clair les compétences parce que ça évite tous les doublons.
Arlette Chabot
Mais ça suffit pour réduire la dette ou arrêter le déficit budgétaire ?
Ségolène Royal
Et le troisième volet, c'est la relance économique. Si il y a moins de chômage, les cotisations reviennent dans les caisses, les recettes fiscales reviennent dans les caisses. Donc on ne peut pas déconnecter la question de la dette de la question du déblocage de la machine économique. Et le déblocage de la machine économique, c'est d'abord une question de confiance. Et si la France croit à nouveau en son avenir, si elle a à nouveau l'audace, le goût du risque, le goût d'entreprendre, le goût d'avancer...
Arlette Chabot
La croissance repartira ?
Ségolène Royal
Mais bien sûr.
Arlette Chabot
Et c'est vrai vous dites, si je suis élue ça fait 3% de croissance en France ?
Ségolène Royal
C'est pas moi qui l'ai dit, c'est l'ambassadeur des Etats Unis. IL m'a fait un beau compliment d'ailleurs.
Arlette Chabot
Alors vous êtes soutenue par l'ambassadeur des Etats Unis.
Ségolène Royal
Oui parce qu'il a dit...
Arlette Chabot
Alors ça, ça va étonner tout le monde.
Ségolène Royal
Les patrons américains ont dit, mais quand même si la France a l'audace de voter pour elle, c'est un signe de telle confiance dans l'avenir en disant, allez maintenant il faut que ça change, il faut qu'on avance, il faut regarder les choses autrement.
Arlette Chabot
Ca fera 3% de croissance ?
Ségolène Royal
Je ne sais pas mais en tous cas, le compliment je le prends parce que je crois en effet que c'est d'abord un lien de confiance mais c'est ensuite, bien évidemment, un euro dépensé, un euro utile. Et donc mettre fin au gaspillage. Et surtout penser le monde autrement. Et la question majeure, c'est celle des délocalisations.
Arlette Chabot
On va en parler dans un instant.
Ségolène Royal
Et la question de la dette. Vous savez, juste un point, les Français ils en ont parlé de la dette dans les débats participatifs.
Arlette Chabot
Oui c'est sûr parce qu'on leur répète tout le temps donc ils ont compris que ça coûtait très cher. Et qu'ils sont endettés chacun. Ils endettent leurs enfants.
Ségolène Royal
Ils sont endettés chacun et ils sont même sur endettés. Sur cette question-la on y reviendra aussi peut-être parce que les banques qui viennent de...tout le monde n'est pas endetté vous avez remarqué Arlette Chabot. Les entreprises du CAC 40 qui viennent de publier leurs bénéfices, plus de 100 milliards d'euros et qui en ont distribué 40 milliards aux actionnaires, c'est à dire deux fois plus que l'augmentation de leurs bénéfices. Ce n'est pas normal, c'est du désordre. Il faut remettre de l'ordre juste. Il faut que cet argent soit réinvesti dans l'innovation, dans la recherche et dans la création d'emploi. Lorsque les Français sont sur endettés parce que les banques...
Arlette Chabot
Donc c'est un impôt, il faut les taxer un peu plus comme on a dit pour certaines compagnies pétrolières ?
Ségolène Royal
Je suis très claire là dessus. Le Premier ministre que je nommerais, sa première feuille de route sera celle ci. Je veux qu'en France, une bonne fois pour toutes, le travail soit moins taxé que le capital. Vous vous débrouillez comme vous voulez, vous regardez partout...
Arlette Chabot
Je sais pas il y a des volontaires mais c'est dur.
Ségolène Royal
Vous regardez partout où ça se fait et j'ai dis dans mon projet d'ailleurs que je suis prête à baisser l'impôt sur les sociétés pour les bénéfices réinvestis dans l'entreprise. Et donc l'outil fiscal, l'outil social, les aides publiques de l'Etat doivent être supprimées là où elles sont inutiles, là où elles engraissent des lieux ou des entreprises qui n'en ont pas besoin parce qu'elles font déjà des bénéfices et qu'elles suppriment des emplois et qui, pourtant, reçoivent des aides publiques. Et je l'ai dis, je le fais dans ma région et je le ferais à l'échelle nationale, les entreprises qui délocalisent alors qu'elles font des bénéfices, qui licencient alors qu'elles font des bénéfices, rembourseront les aides publiques payées par les Français et par les contribuables français. Et je mettrais le paquet sur les autres, les PME, celles qui ne sont pas possédées par les fonds de pension.
Arlette Chabot
Ca va faire plaisir aux patrons de PME qui sont là.
Ségolène Royal
Oui parce que c'est sur eux qu'il faut s'appuyer pour avancer.
Arlette Chabot
Alors vous allez répondre donc aux questions. En attendant, on voit bien, Ségolène Royal en campagne c'est Ségolène Royal va vers les jeunes et Ségolène Royal va en banlieue. Jeff Wittenberg vous a suivie.
Ségolène Royal
Vous n'êtes pas un problème, vous êtes une grande partie de la solution. Les quartiers populaires ne doivent plus être considérés comme un problème mais comme une partie de la solution.
Jeff Wittenberg
Ma France à moi, chante Diam's. Ma campagne à moi pourrait dire Ségolène Royal,c 'est la banlieue. Vaulx en Velin, Clichy sous Bois, Bondy, on dirait les dates d'un Segolene tour des quartiers. Beaucoup lui reconnaisse une vraie capacité à s'adresser aux jeunes. Car elle sait aussi le parler, le jeune. Quand elle était à l'ENA, elle avait appris le droit, l'économie. En campagne, elle s'est mise au hip hop.
Intervenant
Qu'elle veuille déjà découvrir le hip hop alors qu'elle ne le connaît pas, c'est très très bien. C'est déjà une première bonne approche. Bravo félicitation. En espérant que vous soyez présidente.
Jeff Wittenberg
Parfois elle troque quand même la platine du Dj pour la main ferme de la maîtresse d'école. Oublié le look hip hop, chignon et manches retroussées, ce jour-la il était question d'encadrement militaire des jeunes délinquants.
Ségolène Royal
Il y a les incivilités où là on remet au carré les familles. Je connais des collèges où il y a entre 8 et 10 élèves qui, à eux seuls, pourrissent la vie de l'ensemble de l'établissement. Alors maintenant je crois que ça suffit.
Jeff Wittenberg
Bref sympa et décontractée à ses heures mais intraitable sur les principes. C'est peut-être l'ordre juste version mère de famille. Quatre enfants. Pour rester dans le coup, ça vous forge une crédibilité. Thomas l'aîné est passé du scooter à la bécane, Internet c'est lui entre autre qui a branché sa mère. On lui doit le site et le mouvement Ségosphere. A 22 ans le voilà en pleine lumière et il parle déjà comme un homme politique.
Thomas Hollande
Tous les jeunes peuvent venir, qu'ils soient déjà pour Segolene, qu'ils soient pas pour Segolene. En 2002 au niveau des suffrages exprimés, les jeunes ont voté en majorité pour Jean Marie Le Pen.
Jeff Wittenberg
Et en 2007 pour qui vont t-ils voter les jeunes ? Quand Ségolène Royal parle de ceux des banlieues, elle en a gros sur l'estomac.
Ségolène Royal
Je l'ai là chevillé au corps parce que je sais au fond de moi en tant que mère, que je veux pour tous les enfants qui naissent et qui grandissent en France, ce que j'ai voulu pour mes propres enfants.
Jeff Wittenberg
La culture jeune influence toute la campagne. D'abord les jeunes, il faut que ça fasse du bruit. Dans les meetings pas de carré VIP mais un carré jeunes toujours au premier rang. Et en fond sonore de la techno quand apparaissent ses guest stars sur l'écran. La même musique pour tous les invités. A la tribune les références.
Ségolène Royal
Diam's, dans ma France à moi. Comme l'a dit si joliment Arthur H, ma France a moi leur tiendra tête jusqu'à ce qu'ils nous respectent.
Jeff Wittenberg
Yves Duteil prenait un enfant par la main. Elle c'est le chanteur Cali. Jeunes et banlieue, Ségolène Royal a trouvé celui qui les réunit. Un soir elle s'est mêlé à son public.
Jamel Debbouze
Moi, je parle en mon nom. Je compte sur vous.
Jeff Wittenberg
Elle a même fait plus sur un plateau de télé. Pour l'Elysée Ségolène Royal est décidément prête à se bouger.
Arlette Chabot
Alors ça c'est le côté, j'allais dire, sympa. On a vu aussi sévère. C'est aussi ce qui fait dire aux Français que vous faites preuve d'humanité, que vous êtes proche des gens. En revanche c'est vrai qu'il y a une critique, c'est qu'on vous trouve moins compétente que Nicolas Sarkozy. Qu'est-ce que vous répondez à ça ? Pourquoi on vous trouve moins compétente ?
Ségolène Royal
Je ne sais pas. Si c'est l'âge, je ne vois pas d'explication. Kennedy a été président des Etats Unis à 43 ans, j'en ai 10 de plus donc ce ne doit pas être ce critère. Si c'est le fait d'être une femme, c'est vrai que ça mérite sans doute un petit effort d'imagination puisque ce serait la première fois qu'une femme serait élue au suffrage universel direct. Angela Merkel...
Arlette Chabot
Ce que vous dites, c'est que donc les Français vous imaginent avec une stature présidentielle, c'est ça ?
Ségolène Royal
Je ne sais pas, je pense qu'ils... je ne sais pas d'où vient cette idée parce que mon itinéraire politique il est là. Ma cohérence politique aussi. Le projet que j'ai fais avec les Français, il est là. Je pense que c'est un changement profond. IL y a à la fois l'identité féminine qui doit poser question et je comprends que cette question se pose, c'est une telle révolution. Et en même temps, je crois que c'est un atout aussi pour la France et que le temps des femmes est venu. Parce que je crois, non pas parce que je suis une femme et qu'il faut voter pour moi parce que je suis une femme mais parce que je porte un regard différent sur la société française.
Arlette Chabot
Mais c'est parce que vous êtes une femme que vous portez un regard différent ou c'est parce que vous êtes Ségolène Royal ?
Ségolène Royal
Peut-être parce que les valeurs que l'on disait traditionnellement féminines, regardez comme elles reviennent au devant de tout. L'éducation, les questions d'accès à la santé, la question de la transmission des valeurs et même la question des jeunes. Et en même temps je revendique aussi une compétence économique parce qu'aujourd'hui tout se tient. Et donc c'est dans cette approche globalisante qui est peut-être une approche féminine des choses, je crois que la France a besoin de cela aujourd'hui, de ce nouveau regard, de cette nouvelle façon de faire les choses. Et pour en revenir aux cités et aux banlieues, ce n'est pas incompatible.
Arlette Chabot
Vous êtes sévère quand même, vous retirez pas sur l'encadrement militaire même si il est humanitaire etc ou vous dites chaque délit ou chaque premier délit doit être sanctionné ?
Ségolène Royal
Bien sûr mais je crois que les jeunes attendent de la sévérité.
Arlette Chabot
Qu'est-ce que ça peut être par exemple la sanction pour un premier délit selon vous ?
Ségolène Royal
Un travail d'intérêt général. Mais aujourd'hui il n'y a rien. Un jeune qui vole...
Arlette Chabot
IL y en a quand même.
Ségolène Royal
Non. Un jeune qui fait un petit vol...
Arlette Chabot
Un rappel à l'ordre au moins dans le bureau du magistrat. C'est pas assez ?
Ségolène Royal
Il peut y avoir un rappel à l'ordre, ce qui est déjà pas mal mais il faut une réparation. Il faut toujours une réparation c'est comme ça que l'on aura le moins de récidive. Et c'est parce que je rétablirais la police de quartier aussi que les policiers pourront à la fois avoir une responsabilité de maintien de l'ordre et aussi devenir des adultes référents dans les quartiers, qui apprennent la loi. Et vous savez réussir dans les quartiers, c'est notre nouvelle frontière. Il y en a plusieurs comme ça des défis à relever et je les mets au même niveau. C'est le défi du réchauffement planétaire. Ca va vous paraître étrange ce rapprochement.
Arlette Chabot
Non on en parlera avec Nicolas Hulot mais c'est vrai.
Ségolène Royal
Et le défi de la réussite dans les quartiers parce que c'est notre avenir qui est là et aujourd'hui rien n'est réglé et je pense que si la droite repasse et je veux le dire sans détour, je crois que si la droite repasse les banlieues que nous avons, les émeutes que nous avons connues dans les banlieues ne sont rien par rapport à celles que nous connaîtront. Parce que là aussi il y a une très forte attente et là aussi je crois...
Arlette Chabot
Vous pensez que la droite n'est pas capable de répondre à cette attente ?
Ségolène Royal
Non la droite n'est pas capable de répondre à cette attente puisqu'elle a démantelé les services publics dans les quartiers, elle a retiré des moyens aux écoles. Elle a cassé la police de proximité. Elle a tenu des propos provocateurs à l'égard des jeunes et je le redis, si les jeunes ne sont pas un problème, ils sont une partie de la solution. Et la France qui a réussi dans les années 50 à faire accéder à la réussite scolaire les générations d'enfants issus du milieu rural dont les parents ne parlaient pas français, qui parlaient les langues régionales. Cet effort nous devons aujourd'hui le réussir à l'égard des jeunes français parfois qu'on appelle encore Français de 2ème, de 3ème, de 4ème génération alors qu'ils sont français. Et moi je refuse qu'on continue à les appeler de 1ère, de 2ème, de 3ème génération comme si il y avait des Français de souche et d'autres de feuillage et de branchage. On leur doit le respect à ces jeunes. Et c'est parce qu'on leur doit le respect qu'on peut attendre beaucoup d'eux et ce qu'ils attendent, c'est l'autorité et moi je leur donnerais de l'autorité et juste parce que je leur donnerais les moyens de réussir à l'école.
Arlette Chabot
Alors on va faire jeu questions réponses courtes parce que sinon ceux qui sont là seront déçus de pas pouvoir vous interroger. Je me tourne vers Stéphanie Vieuxble. Stéphanie est là. Bonsoir Stéphanie, vous avez 23 ans, vous avez fait les Beaux Arts. Vous avez une formation d'infographiste et puis pas de boulot, des CDD, de l'intérim et voilà. Posez votre question à Ségolène Royal.
Stéphanie Vieuxble
Je tenais à préciser quand même que j'ai eu une première expérience d'infographiste. Donc la question que je voulais vous poser, c'est une question qui est très générale mais qu'est-ce que vous allez faire pour l'emploi des jeunes ? Qu'est-ce que vous allez faire pour que les employeurs aient confiance envers les jeunes, tout comme la campagne de communication qu'on voit pour que les employeurs fassent confiance aux seniors. Est-ce que vous allez aller dans ce sens mais pour les jeunes ?
Ségolène Royal
C'est une question très importante parce que 25%, le taux de chômage des jeunes en France est le plus élevé d'Europe. Et moi je veux un nouveau pacte avec les jeunes et avec les entreprises qui demandent aux jeunes à la fois d'avoir une expérience professionnelle mais qui leur refusent de leur donner leur première chance. Et aujourd'hui les inégalités se sont creusées entre les jeunes à diplôme égal, entre ceux qui ont des relations, qui peuvent se faire recommander et ceux qui n'ont pas ces relations qui ne peuvent pas se faire recommander et qui ne trouvent pas d'entreprises pour leur faire confiance. Alors je créerais ce que j'appelle les emplois tremplins. Qu'est-ce que c'est qu'un emploi tremplin ?
Arlette Chabot
C'est un emploi jeune version 2007 ou pas ? La gauche 20025 a faut les emplois jeunes et vous, vous faites les emplois tremplin, c'est pas pareil ?
Ségolène Royal
Ce sera une partie des emplois jeunes qui devront être ré installés parce qu'ils ont été très utiles ces emplois jeunes.
Arlette Chabot
Dans les services publics ?
Ségolène Royal
Dans les services publics, dans les associations. Ca a permis ensuite à beaucoup de jeunes d'acquérir une formation professionnelle complémentaire, de prendre confiance en eux et ensuite de trouver des emplois sur le marché du travail. Ces emplois tremplins qui sont d'ailleurs déjà créés dans beaucoup de régions...
Arlette Chabot
Dans des entreprises aussi.
Ségolène Royal
J'en ai créés 3000 dans ma région. Sans dépense supplémentaire en redéployant les fonds de la formation professionnelle qui étaient trop gaspillés. 30 000 jeunes. Et j'en mets à disposition des entreprises. Ca veut dire qu'une entreprise qui hésite à recruter un jeune ou une jeune diplômée parce qu'elle ne sait pas si son chiffre d'affaire va se déployer, elle ne sait pas si elle ne peut pas garder le jeune, qu'il ne fait pas l'affaire, comment elle va faire pour licencier etc. Il y a un souci de la part des petites entreprises, elles sont frileuses, elles n'osent pas recruter les jeunes. Et moi je veux que les entreprises osent recruter les jeunes parce que c'est l'emploi de demain et je pense que l'emploi appelle l'emploi.
Arlette Chabot
Donc l'emploi tremplin qu'est-ce que ça veut dire ? Vous donnez quoi à l'entreprise ?
Ségolène Royal
L'emploi tremplin ça veut dire que les régions parce que je vais déléguer cette responsabilité aux régions qui sont au plus près des entreprises, vont payer pendant six mois la totalité salaire, charges du jeune qualifié ou diplômé à l'entreprise. Petite et moyenne entreprise. Et l'entreprise donc recrute ce jeune sans que ça ne lui coûte rien. Et le jeune, il a sa chance. Il a sa chance de faire ses preuves, de créer sa réalité dans l'entreprise, de prouver qu'il est utile. L'entreprise peut utiliser ce jeune pour mettre à jour un nouveau produit, les emplois dormants, ce qu'on appelle les emplois dormants.
Arlette Chabot
Et si ça marche pas.
Ségolène Royal
Soit ça marche pas et à ce moment-la on se rend compte que le jeune a besoin d'une formation professionnelle complémentaire, donc on l'accompagne individuellement parce que je crois qu'il y a beaucoup d'argent dépensé dans la formation professionnelle, qu'on peut utiliser cet argent autrement et qu'il vaut mieux payer un jeune à travailler que payer un jeune au chômage qui va déprimer, qui va être malade, qui aussi déprime sa famille. Et aujourd'hui dans les débats participatifs, vous savez la principale angoisse des parents et des grands parents, c'est la question du chômage des jeunes. Donc il y aura d'un côté ces emplois tremplins qui vont inciter les entreprises à recruter.
Arlette Chabot
Vous dites 500 000, c'est ça, en cinq ans ?
Ségolène Royal
Parce que je fais du gagnant gagnant, du donnant donnant. Les jeunes sont payés. En contrepartie ils doivent faire leurs preuves dans l'entreprise. L'entreprise, je lui paye le jeune. En contrepartie elle doit faire un effort pour garder ce jeune et ensuite lui faire un contrat à durée indéterminé si le jeune réussit dans l'entreprise et non pas s'en débarrasser pour prendre un autre jeune qui sera gratuit pendant six mois...
Arlette Chabot
Et ça c'est un risque. Et vous faites vous même les critiques de votre mesure.
Ségolène Royal
Oui mais je suis bien consciente et c'est pour ça que je vous dis gagnant gagnant et donnant donnant parce que l'entreprise, elle fera une évaluation. Le jeune sera accompagné par un tutorat de l'ANPE qui sera réformé en profondeur pour faire du sur mesure pour les jeunes et l'autre mesure très importante, c'est que désormais les universités et tous les centres de formation, seront responsables de l'accompagnement des jeunes. Et en contrepartie, les universités, je sais pas quelle formation vous avez fait, dans quel...
Stéphanie
Beaux Arts.
Ségolène Royal
Les Beaux Arts. Aujourd'hui les universités, elles forment les jeunes. Les jeunes ont des diplômes, débrouillez-vous. Est-ce que l'université vous a accompagné pour trouver un emploi ?
Stéphanie
Il y a un petit problème déjà au niveau des Beaux Arts c'est que les Beaux Arts, c'est le ministère de la Culture et l'université c'est le ministère de l'Education nationale.
Arlette Chabot
On parlera de l'université, il y a un président d'université qui est là.
Ségolène Royal
Je veux dire par là que c'est à la direction des Beaux Arts comme de toute université ou de toute école d'accompagner les jeunes vers l'emploi...
Stéphanie
Oui mais je vais m'embarquer dans un autre discours mais je veux dire, il y a déjà aussi une réforme à faire au niveau de ce système-la des Beaux Arts qui sont mis complètement à part par rapport à l'Education nationale.
Arlette Chabot
On vous promet, on reparlera des Beaux Arts.
Ségolène Royal
La question est importante. Il faut de la cohérence aussi dans les structures de formation par rapport aux jeunes qui sont reçus. Il faut de la cohérence et il faut de la responsabilité. Aujourd'hui il y a un système d'irresponsabilité généralisé quand les jeunes sont formés. Personne ne s'en occupe. Les entreprises disent, nous on a peur de les recruter. Les organismes de formation disent, c'est plus notre problème. Moi je veux une société de la responsabilité et donc l'Etat assumera ses responsabilités en mettant le pied à l'étrier aux jeunes, en aidant les entreprises dans un premier temps, en contrôlant l'utilisation des fonds. Et les organismes de formation auront la responsabilité de suivre les jeunes qu'elle forme.
Arlette Chabot
Est-ce que vous êtes favorable à ce que certains évoquaient à gauche, une espèce de RMI jeune ?
Ségolène Royal
Je suis pour qu'aucun jeune ne soit en situation de précarité.
Arlette Chabot
Oui mais le RMI ou une allocation en échange de quelque chose ?
Ségolène Royal
Non pas le RMI jeune. Je me suis engagé sur une allocation jeune adulte en contrepartie. C'est à dire au fond en soit, c'est un système de bourse amélioré parce qu'il y a 40% d'échec, 40% de jeunes qui sortent des deux premières années d'université sans diplôme.
Arlette Chabot
L'université on y reviendra tout à l'heure.
Ségolène Royal
Ecoutez c'est un gâchis effroyable, c'est une dépense d'abord publique qui ne conduit sur rien. Et c'est un gâchis pour les jeunes effroyable. Donc l'allocation jeune à condition qu'il y ait aussi une réforme de l'orientation, c'est à dire que l'on oriente les jeunes vraiment vers les besoins des entreprises, que l'on renforce le lien entre les entreprises et les universités et même au niveau du lycée et du collège. Je veux que l'on renforce le lien entre les entreprises et l'éducation pour que l'on apprenne très tôt l'esprit du risque et l'esprit d'entreprendre.
Arlette Chabot
Alors on va aller directement au lycée si j'ose dire Paul Bert, madame Khayat qui est proviseur du lycée donc Paul Bert dans le 14ème arrondissement. Madame Khayat allez-y.
Monique Khayat
Bonsoir. Vous avez été ministre déléguée à l'enseignement scolaire et vous avez approché de près les enseignants. Vous connaissez donc leur situation et leur préoccupation, selon vous quel est l'horaire hebdomadaire qu'in enseignant doit fournir dans son établissement ?
Ségolène Royal
Je vois à quoi vous faites allusion.
Arlette Chabot
Pour ceux qui n'auraient pas compris, c'est le jour où on vous avait surpris...
Ségolène Royal
Sur les 35 heures.
Arlette Chabot
Sur les 35 heures voilà.
Ségolène Royal Je crois que c'est une bonne référence les 35 heures et ce que je veux dire par là et au delà de la polémique qui m'a été faite, c'est que bien des enseignants font déjà les 35 heures. Et parfois bien au delà. Quand j'ai parlé des 35 heures, qu'est-ce que je voulais dire ? Je voulais dire qu'il y a non seulement les heures de cours, qu'il y a aussi le travail que vous faites en liaison avec les parents. Qu'il y a les conseils de classe, qu'il y a la préparation des cours, la correction des cours et ce que j'ai voulu dire et ce que je redis très clairement, franchement, devant vous, c'est que je souhaite que les enseignants puissent avoir des conditions de travail bien, correctes, dans les collèges.
Arlette Chabot
Pour qu'ils passent 35 heures dans les collèges et les lycées.
Ségolène Royal
Non, ce n'est pas ce que j'ai dit.
Arlette Chabot
Moi je vous pose la question.
Monique Khayat
Qu'incluez-vous dans les 35 heures ?
Ségolène Royal
Tout, je calcule tout dans les 35 heures.
Monique Khayat
C'est-à-dire le soutien scolaire, le travail qu'ils auront à fournir auprès de leurs élèves. Vous dites que vous souhaitez que les élèves bénéficient d'un soutien scolaire gratuit, donc les enseignants devront également rester dans l'établissement pour dispenser ce soutien scolaire ?
Ségolène Royal
Non madame ce n'est pas ce que j'ai dit. Vous savez moi je ne veux pas polémiquer sur la question de la durée du travail. On a déformé mes propos dans le cadre d'une campagne interne et je pense que la question du travail et de la qualité du travail des enseignants est une question majeure, ils souhaitent d'ailleurs eux-mêmes que cette question soit abordée. Les élèves souhaitent avoir davantage de contacts avec leurs enseignants et quand je dis soutien scolaire individuel gratuit, c'est gratuit pour les élèves. Et j'ai dit que les enseignants qui souhaitaient faire ce soutien scolaire pourront le faire en étant rémunérés, s'il n'y a pas suffisamment d'enseignants disponibles ou volontaires pour faire ce soutien scolaire gratuit, individualisé qui commencera à la rentrée prochaine, parce que moi je ne tolère plus les inégalités entre les enfants qui peuvent être aidés par leurs parents et qui ont un endroit où travailler tranquillement chez eux et ce qui reviennent le matin, la peur au ventre parce qu'ils n'ont pas pu faire leur travail, ni étudier leur leçon parce que les parents sont démunis sur le plan scolaire pour les aider...
Arlette Chabot
Soutien scolaire gratuit.
Ségolène Royal
Et qu'il y a des parents qui peuvent payer pour aider leurs enfants, je vois sur l'arrière des autobus, en ce moment, cette semaine, il y a une grande publicité pour un organisme de soutien scolaire coté en bourse. Vous trouvez ça normal dans l'école de la République ?
Arlette Chabot
Vous aviez dit que c'était les enseignements du public qui donnent les profs... qui donnent ces cours...
Ségolène Royal
Oui, si les enseignants veulent faire le soutien scolaire gratuit, je préfère qu'ils soient payés dans l'école de la République pour le faire, plutôt que payés à l'extérieur parce que je considère aussi que le pouvoir d'achat des salaires des enseignants a beaucoup baissé et donc il y a un sentiment de dévalorisation du métier d'enseignants et je veux que demain l'Etat soit garant de la reconnaissance du métier d'enseignant. Et en particulier madame, vous aurez une liberté pédagogique et d'expérimentation dans les établissements scolaires sans subir des contrôles tatillons parce que je pense que les enseignants et les chefs d'établissement qui sont en première ligne au contact des élèves savent souvent mieux que les chefs de bureaux et du ministère de l'Education nationale qui pondent des circulaires toutes les semaines, et ensuite il faut inventer des contrôleurs pour voir comment les circulaires sont appliquées. Eh bien moi je vais libérer l'expérimentation et donner des dotations horaires aux établissements qui feront du travail collectif, du travail d'équipe.
Monique Khayat
Vous dites madame avoir entendu les demandes de restauration d'image des enseignants, vous dites que vous souhaitez travailler à leur reconnaissance. Est-ce que vous considérez que seule la valorisation ou l'amélioration de leur pouvoir d'achat suffira à restaurer l'image des enseignants ?
Ségolène Royal
Je pense qu'il y a plusieurs choses pour restaurer l'image des enseignants, c'est d'abord une posture d'un chef d'Etat qui rappelle à la Nation le rôle fondateur de l'école. on l'a vu tout à l'heure dans les quartiers. C'est à l'école que tout commence et c'est là que tout fini. Et quand l'école fonctionne bien, quand la famille fonctionne bien, quand l'école fonctionne bien et qu'elle a les moyens de fonctionner, lorsqu'elle garantit à tous les parents que les enfants auront à égalité des chances pour réussir, alors à ce moment là la République se met debout et moi, en tant que chef d'Etat, je dirais cela aux Français. Et en même temps si je donne des moyens supplémentaires à l'école, je demanderais aussi à l'école de réussir davantage contre l'échec scolaire, là aussi on sera dans le gagnant, gagnant avec les familles, avec les enseignants, avec les pouvoirs publics parce qu'aujourd'hui les collectivités locales investissent beaucoup matériellement dans les établissements scolaires, je le fais à la tête de ma région, où j'ai notamment par exemple dans les établissements scolaires mis des animateurs culturels partout et donc les élèves aussi ont soif de culture.
Arlette Chabot
On termine là dessus si ça ne vous ennuie pas...
Ségolène Royal
Je voudrais juste terminer si vous le permettez, au cours des cinq années du gouvernement de la droite qui s'achève, il y a eu 125 000 suppressions d'emplois dans l'éducation nationale.
Arlette Chabot
Vous les rétablissez ?
Ségolène Royal
Oui je les rétablis.
Arlette Chabot
Les 125 000, vous dites 125 000 suppressions d'emplois, je ne sais pas si c'est vrai mais on vous croit, ça veut dire que vous rétablissez 125 000 postes dans l'Education nationale ?
Ségolène Royal
Je fais comme je l'ai dit des états généraux de l'Education nationale.
Monique Khayat
Vous créez donc des postes à l'Education nationale, vous vous engagez à créer des postes ?
Ségolène Royal
Oui madame dès la rentrée prochaine, pas 125 000 à la rentrée prochaine...
Arlette Chabot
Non mais progressivement. Vous dites en cinq ans, vous les rétablissez en cinq ans.
Ségolène Royal
Je suis sérieuse, les 5 000 qui ont été supprimés là dernièrement je les remets dans l'école et je regarde où est ce qu'il y a eu des destructions les plus profondes parce qu'entre les suppressions d'infirmières scolaires, du conseil d'orientation...
Arlette Chabot
Je vous demande de faire plus court...
Ségolène Royal
Non mais juste dire, il y a aussi tous les métiers qui vous aident à accomplir...
Arlette Chabot
Je suis d'accord mais ils sont là et ils ont envie de poser des questions...
Ségolène Royal
... qui sont aujourd'hui à l'os comme on dit. A l'os, il n'y a plus personne, il n'y a plus rien dans les établissements scolaires. Donc on remettra à nouveau, mais gagnant gagnant, c'est-à-dire que je demanderais aussi à l'école de réussir davantage sur la lutte contre l'échec scolaire et donc je libérerais les initiatives pédagogiques.
Arlette Chabot
Réponse courte, encore une fois parce que sinon ils vont tous être déçus de ne pas pouvoir parler. Sur la carte scolaire vous ne changez pas d'envie, il faut la bouger un petit peu, modifier un petit peu ?
Ségolène Royal
C'est un élément qui fait partie d'un tout, d'une discussion globale...
Arlette Chabot
Non mais c'est un souhait, vous dites les parents doivent avoir du choix entre trois établissements, c'est ça ?
Ségolène Royal
Je pense que la fuite vers l'école privée est un problème pour l'école de la République. Et donc il faut regarder ce problème en face. Moi je suis pour la politique du réel et lorsque les familles par milliers écrivent en disant finalement il y a une sélection par l'habitat, ce n'est pas l'école qui fait la ségrégation, c'est la politique urbaine et donc l'un ne va pas sans l'autre, c'est aussi par les politiques urbaines de mixité et par le libre choix pour les familles. Et comme ça on verra quels sont les collèges qui sont abandonnés ou les écoles qui sont abandonnées et dans celles-là on y mettra le paquet. On y mettra le paquet comment ? Des sections sports-études, des sections européennes, de la culture etc, et donc on pourra rattraper, donner plus à ceux qui ont le moins, à ce moment là. Mais on ne fera pas peser doublement sur les familles la double discrimination, la discrimination du logement et la discrimination de l'école. Moi je suis pour défendre l'école de la République et pour lui donner tous les moyens pour qu'elle fonctionne bien.
Arlette Chabot
Alors vous jouez le jeu, question courte, réponse courte. Marie-Hélène Bourlard, vous êtes là, Marie-Hélène est là, elle est déléguée CGT, elle vient de Valenciennes dans une entreprise qui travaillait pour LVMH, fabriquer, confection etc qui est en train de fermer. Je veux dire Marie-Hélène vous allez peut-être être licenciée, il y a un problème de délocalisation. Voilà posez votre question comme vous le souhaitez à madame Royal.
Marie-Hélène Bourlard
Bonjour madame.
Ségolène Royal
Bonjour.
Marie-Hélène Bourlard
Concrètement, qu'est ce que vous allez faire pour les délocalisations ? Est-ce que vous allez mettre aussi des règles européennes, puisque c'est l'Europe, on délocalise dans les pays de l'Est ? Moi demain je vais perdre mon travail comme les 147 salariés de CCE, ils vont perdre leur travail cette année, donc s'il n'y a pas de règle européenne, c'est délocalisé dans les pays de l'Est, concrètement qu'est-ce que vous allez faire ?
Ségolène Royal
Est-ce que je peux vous demander où votre entreprise est délocalisée ?
Marie-Hélène Bourlard
En Roumanie, Pologne, Hongrie. Donc c'est l'Europe.
Ségolène Royal
D'abord est-ce que l'entreprise fait des bénéfices ?
Marie-Hélène Bourlard
Oui.
Ségolène Royal
Eh bien déjà il y aura une première règle, une entreprise qui fait des bénéfices, elle devra rendre des comptes sur les raisons pour lesquelles elle délocalise et comme il y aura un dialogue social de qualité, c'est-à-dire vous qui êtes déléguée syndicale, désormais vous serez présente au conseil d'administration des entreprises, comme c'est le cas dans beaucoup de pays d'Europe qui ont déjà modernisé depuis longtemps leur dialogue social. Vous pourrez tirer la sonnette d'alarme beaucoup plus tôt et comme toute entreprise en France bénéficie de fonds publics sous forme d'exonérations, de formations professionnelles, d'équipements alentours en service public, d'aides régionales, les entreprises seront priées de rendre des comptes, celles qui font des bénéfices, sur les raisons pour lesquelles elles délocalisent. Et donc nous serons en capacité d'anticiper un certain nombre de choses et de remettre les entreprises devant leurs responsabilités. La seconde chose, c'est que je me battrais d'abord pour que l'Europe se protège contre les délocalisations à l'extérieur de l'Europe, mais aussi les délocalisations...
Arlette Chabot
Ca c'est à l'intérieur de l'Europe.
Ségolène Royal
... au sein de l'Europe.
Marie-Hélène Bourlard
Avec quelles règles aussi ?
Ségolène Royal
Avec les règles sociales et environnementales qui devront progressivement s'aligner. Alors il y a une phase transitoire qui va être un peu difficile...
Arlette Chabot
Parce que nos partenaires, nos mais Hongrois ou Polonais, ils n'ont peut-être pas envie de vos règles ?
Ségolène Royal
Si parce qu'ils sont entrés dans l'Europe donc par définition ils vont être conduits et on va les y inciter fortement...
Arlette Chabot
Vous voulez dire augmenter les salaires...
Ségolène Royal
Ca va être l'enjeu aussi de la renégociation sur le traité européen pour qu'il y ait un pacte social dans ce traité européen pour que petit à petit...
Marie-Hélène Bourlard
Il faudrait peut-être instaurer un SMIC européen.
Ségolène Royal
Il faudrait instaurer un SMIC européen, salaire minimum européen.
Marie-Hélène Bourlard
Et pourquoi vous ne le faites pas maintenant ?
Ségolène Royal
Parce qu'il y a aujourd'hui des pays qui ne sont pas au niveau du développement qui leur permet tout de suite de rattraper le SMIC français et donc nous devons aménager une phase transitoire. Et moi je suis favorable à une phase transitoire qui donne à ces pays des aides européennes comme cela a été fait pour le Portugal ou pour l'Espagne. Une sorte de plan Marshall pour les pays de l'Est de l'Europe pour que très rapidement ils rattrapent notre niveau de développement mais qu'en attendant on n'accepte pas les délocalisations au sein de l'Europe de la part des entreprises qui font des bénéfices.
Arlette Chabot
Alors Marie-Hélène ?
Marie-Hélène Bourlard
Oui mais concrètement, demain on va être licencié, les 147 personnes de mon entreprise vont être licenciées, qu'est ce que vous faites aujourd'hui pour les 147 salariés ?
Ségolène Royal
Je fais la sécurité sociale professionnelle tout de suite.
Marie-Hélène Bourlard
Oui mais il sera trop tard on ne sera plus là.
Ségolène Royal
Si parce que vous aurez au moins 90 % du salaire premièrement. Deuxièmement...
Arlette Chabot
C'est-à-dire quand on est licencié, selon votre système... il faut que tout le monde comprenne, excusez-moi.
Ségolène Royal
Tout le monde va comprendre.
Arlette Chabot
On est licencié, la sécurité professionnelle, c'est 90 % du salaire.
Ségolène Royal
Attention pas quand ce sont des entreprises voyous ou qui délocalisent, je ne sais pas si c'est le cas, ou qui délocalisent alors qu'elles font des bénéfices ou qui, j'en ai connu, j'en connais dans ma région, j'en vis également tous les jours et je vais vous dire une chose, le jour où il y aura le dialogue social, le jour où les organisations syndicales auront accès aux comptes de l'entreprise, le jour où les entreprises seront obligées de tenir compte de l'intérêt général et où les pouvoirs publics, notamment les pouvoirs régionaux en proximité seront alertés suffisamment tôt, il y a des choses que l'on pourra empêcher parce que les entreprises ne pourront plus se permettre un certain nombre de comportements comme je le vois moi dans Ma région où j'ai une entreprise de textile qui ressemble à la votre, qui délocalise en Tunisie, alors qu'elle fait des bénéfices et qui au passage fait une opération immobilière en vendant son siège social. Demain ça ne sera plus possible parce qu'on demandera des comptes à l'entreprise et on lui supprimera l'ensemble de ses aides publiques.
Marie-Hélène Bourlard
On est la dernière entreprise française, notre savoir-faire va disparaître, ça n'existera plus. Vous avez beau nous dire demain on va avoir 90 % de notre salaire, mais en quoi ?
Ségolène Royal
D'abord premièrement le savoir-faire ne doit pas disparaître.
Marie-Hélène Bourlard
Mais il va disparaître.
Ségolène Royal
Eh bien le savoir-faire ne doit pas disparaître et j'encouragerais comme on a réussi à le faire les salariés à reprendre leur entreprise en coopérative ouvrière de production quand c'est possible parce que vous avez raison quand il y a des productions qui ont encore de la valeur ajoutée, quand il y a des savoir-faire, quand il n'y a aucune raison de délocaliser, quand les entreprises font des bénéfices, eh bien vous aurez des facilités comme je l'ai vu réussir à plusieurs reprises pour reprendre l'entreprise en société coopérative ouvrière de production et ça, je vous y aiderais. Parce que je n'accepte pas non plus que la France soit vidée de sa substance comme c'est le cas aujourd'hui alors qu'il n'y a pas de fatalité. En revanche il y a certaines entreprises qui vont délocaliser parce que malgré leurs efforts...
Arlette Chabot
Vous ne voulez pas en parler avec un chef d'entreprise par exemple Ségolène Royal ?
Ségolène Royal
Allons-y, discutons avec un chef d'entreprise.
Arlette Chabot
Monsieur Roux de Bezieux, qui effectivement est à la fois un chef d'entreprise et un des responsables de Croissance plus, voilà, comme ça vous pouvez prolonger la conversation et poser des questions sur ce que vous attendez, voilà de madame Royal.
Geoffroy Roux de Bezieux
Bonsoir madame Chabot, bonsoir madame Royal.
Ségolène Royal
Bonsoir.
Geoffroy Roux de Bezieux
Moi, je suis créateur d'entreprise récidiviste en France je précise, et je garde mes emplois en France quelquefois avec difficulté, à peu près 3 000 emplois avec trois entreprises. Juste un mot vous avez beaucoup évoqué, réconcilier les Français avec l'entreprise et il n'y a pas un chef d'entreprise en France qui ne peut pas être d'accord avec ça, moi ça évoque un peu, j'étais en Angleterre à l'époque Tony Blair, je ne sais pas si la comparaison est positive ou pas, mais c'est vrai qu'il a réussi à réconcilier les Anglais avec l'entreprise. Il a aussi réconcilié les Anglais avec l'argent, avec la réussite matérielle et je pense que c'est un point important. On ne peut pas aimer l'entreprise sans aimer la réussite, sans aimer aussi les gens qui entreprennent, les riches qui créent des emplois dans ce pays et donc je pense qu'il est important de faire aimer les entreprises et de faire aimer aussi ceux qui entreprennent. Alors sur votre programme j'ai quelques petites questions, sur la création d'entreprise d'abord, vous avez un paragraphe dans le pacte présidentiel qui dit on va simplifier et aider le parcours du créateur, ce qui est évidement une bonne idée, il y a eu beaucoup de choses qui ont été faites, vous évoquiez, en disant on ne va pas tout détruire ce qui a été fait. Je crois que ce qui a été fait dans les cinq dernières années est plutôt positif. La vraie difficulté qu'on a quand on crée une entreprise en France, c'est les premières années, ce n'est pas la création elle même, c'est les deux, trois premières années, quand vous êtes tout seul ou avec quelques employés et que vous avez les mêmes règles administratives, fiscales, droits du travail que tout le monde. Mon point n'est pas de dire, il faut supprimer les droits du travail évidemment, mais ce n'est pas la même chose quand on est L'Oréal, ou Aventis ou une grande entreprise de faire face à 2 000, je ne sais plus combien de pages du code du travail et quand on est tout seul ou avec quelques employés. Donc première question simple, est-ce que vous êtes prête sans tabou, sans dogme comme vous l'évoquiez tout à l'heure à regarder une simplification pour les PME ? Deuxième question sur les contrats, vous allez...
Arlette Chabot
Alors on va peut-être répondre à la première déjà avant d'aller à la deuxième.
Ségolène Royal
Alors quel type de simplifications ?
Geoffroy Roux de Bezieux
Rendre la vie plus facile pour un chef d'entreprise pour qu'il se consacre à la croissance, aux chiffres d'affaire...
Arlette Chabot
Qu'est-ce que c'est rendre plus facile, c'est quoi ?
Ségolène Royal
Parce que vous avez raison, c'est très facile aujourd'hui de créer une entreprise...
Geoffroy Roux de Bezieux
C'est plus facile.
Ségolène Royal
C'est plus facile de créer une entreprise et les difficultés viennent la deuxième, la troisième, la quatrième année effectivement sur l'effort. Qu'est-ce que je propose ? D'abord je propose de m'appuyer, je ne sais pas combien vous avez de salariés.
Geoffroy Roux de Bezieux
La deuxième entreprise a 100, je viens de passer les 100 salariés.
Ségolène Royal
Vous êtes dans les PME. Parce que vous savez dans le discours globalisant ; on va aider les entreprises, c'est un discours assez nocif, parce que dans les entreprises, il y a les grosses entreprises du CAC 40 qui gagnent beaucoup d'argent et puis toutes leurs sous-traitances qui elles perdent beaucoup d'argent et sont en grande difficulté. Et votre exemple, madame, en est un exemple flagrant. Donc ça, ça suffit maintenant il faut que les profits soient équitablement répartis sur la chaîne de production, ça c'est la traçabilité entre le sous-traitant qui est pressuré par l'entreprise, la maison mère, qui souvent d'ailleurs s'est installé à l'étranger ou qui est possédé par les fonds de pension et donc je veux m'appuyer sur les PME. J'ai plusieurs propositions concrètes, d'abord je veux que dans les marchés publics, il y ait une part des marchés publics qui soit systématiquement réservée aux PME.
Geoffroy Roux de Bezieux
Ce qui est une bonne idée, mais ça ne répond pas à mon problème.
Ségolène Royal
Oui mais quand même vous aurez du chiffre d'affaires.
Geoffroy Roux de Bezieux
Moi je vends avec des consommateurs, donc en l'occurrence ce n'est pas tout à fait ça, mais...
Ségolène Royal
Deuxièmement je propose que le chef d'entreprise ne soit plus responsable, enfin n'ait plus sa caution personnelle, qu'il y ait une garantie des pouvoirs publics, des banques obligatoires, obligatoirement par les banques parce que les banques je vais y revenir, elles ne remplissent pas aujourd'hui en France le métier qui est le leur et je crois que l'ordre juste, c'est chacun son métier et les PME ont du mal à accéder aux crédits bancaires qui viennent d'ailleurs de publier des résultats florissants, de même que les compagnies d'assurances. Donc soit elles font payer trop cher, soit elles ne font pas leur boulot. Moi je veux que les banques fassent leur travail et prêtent aux PME. Et donc on regarde, elles auront un quota obligatoire...
Geoffroy Roux de Bezieux
Là c'est un vrai problème les banques, on est d'accord mais ça ne répond pas à ma question, est-ce que vous êtes prête à nous simplifier la vie pendant les deux ou trois premières années ? Est-ce que vous êtes prêtes à faire, excusez-moi du mot, je sais qu'il est... de la discrimination positive pour les jeunes entrepreneurs dans la période zéro à trois ans ?
Ségolène Royal
Mais bien sûr.
Geoffroy Roux de Bezieux
Et même sur le code du travail ?
Arlette Chabot
Qu'est-ce que vous voulez sous-entendre pour que les choses soient claires, parce que, attendez, le code du travail ça veut dire quoi ?
Geoffroy Roux de Bezieux
Eh bien prenons les contrats de travail par exemple, vous avez je crois une mesure qui dit, on va pénaliser les entreprises en CDD, et récompenser, enfin je ne sais pas si c'est les mots qui sont exactement ceux que vous employez, les entreprises en CDI. Quand vous êtes une jeune entreprise, vous ne connaissez pas votre chiffre d'affaires. Moi, c'est dans les télécoms, je ne sais pas combien de clients j'aurais dans six mois. Donc je suis obligé aujourd'hui de prendre entre guillemets un risque, et ce risque je le prends, j'embauche en CDI essentiellement, mais je ne sais pas si dans six mois j'aurais assez de chiffre d'affaires, assez de clients en fait, assez de chiffre d'affaires pour pouvoir payer toujours les gens.
Ségolène Royal
Vous aurez déjà les emplois tremplins.
Geoffroy Roux de Bezieux
Mais les emplois tremplins, je n'ai pas compris comment, si jamais le chiffre d'affaires...
Arlette Chabot
On ne va pas revenir dessus.
Ségolène Royal
Vous avez besoin d'exporter, vous avez besoin de mettre au point un produit ou un service, vous avez besoin d'un jeune très diplômé, vous ne savez pas si vous allez pouvoir le garder en fonction du développement de l'entreprise, ce jeune va être payé six mois et être mis à disposition de l'entreprise.
Geoffroy Roux de Bezieux
Et si ça ne marche pas qu'est-ce qui se passe ?
Ségolène Royal
C'est ce que je fais déjà dans ma région. Si ça ne marche pas, vous pouvez ensuite, le jeune il ne reste pas dans l'entreprise.
Geoffroy Roux de Bezieux
Je peux le licencier pour dire un gros mot.
Ségolène Royal
Il n'y a pas de licenciement, il n'y a pas de licenciement pendant six mois...
Geoffroy Roux de Bezieux
S'il n'y a plus de business, comment est-ce qu'on fait ?
Ségolène Royal
Pendant six mois le jeune est payé comme un complément de formation professionnelle. C'est de la réinjection intelligente des fonds de la formation professionnelle. Donc soit le jeune est utile pour le développement de l'entreprise, à ce moment là vous le gardez.
Geoffroy Roux de Bezieux
C'est quand même le scénario qu'on aime tous mais si ça ne marche pas... et même si le jeune est bon mais que le business n'est pas là, que le chiffre d'affaires n'est pas là, qu'est-ce qu'on fait ?
Ségolène Royal
Ca, vous ne le gardez pas non plus, mais le business doit être là, il faut partir quand même du principe, qu'il n'y a pas de licenciement.
Geoffroy Roux de Bezieux
Attendez si on recrute un chef d'entreprise, ce n'est pas pour licencier derrière, mais ça arrive.
Ségolène Royal
Vous n'aurez pas le souci parce que je sais que pour les entreprises qui se battent pour avoir des marchés qui se comportent correctement avec leurs salariés, qui créent des emplois, qui sont responsables envers leur territoire, je sais que ces entreprises lorsqu'elles sont confrontées, elles ont peur de recruter parce qu'elles ont peur de licencier et que c'est un drame social, parce qu'elles souffrent avec leurs salariés, c'est des procédures, c'est des prud'hommes, ça n'en finit pas etc. moi je veux que les entreprises n'aient plus peur de recruter, comment ? Par les emplois tremplins d'abord et parce que nous faisons face à un fléau qui est celui du chômage, des jeunes qualifiés et des jeunes diplômés. Et là je dirais aux entreprises, c'est votre responsabilité de donner leur chance aux jeunes.
Geoffroy Roux de Bezieux
24 ans de moyenne d'âge dans mon entreprise, donc je fais des efforts.
Ségolène Royal
Donc des emplois tremplins, vous pourrez développer et laisser une chance aux jeunes, il va peut-être vous aider à développer vos marchés ce jeune là.
Geoffroy Roux de Bezieux
Je suis d'accord avec vous, je n'ai pas compris comment ça se terminait mais je suis d'accord avec vous. Je suis désolé.
Ségolène Royal
Deuxièmement les exonérations de cotisations seront en effet liées à l'effort fait pour l'emploi. pourquoi ? Parce qu'aujourd'hui vous avez plein d'argent gaspillé, donné à des entreprises sans contrepartie, qui de toute façon auraient recruté les salariés et qui bénéficient des allégements de charges, alors que ce sont de grosses entreprises qui n'ont pas besoin de ça, moi je veux recibler les aides sur les PME et nous allons en discuter avec vous. Et troisièmement je suis prête, je l'ai dit tout à l'heure à baisser l'impôt sur les bénéfices s'ils sont réinjectés dans l'entreprise. Alors je ne peux pas vous dire mieux, c'est quand même pas mal.
Geoffroy Roux de Bezieux
Une dernière petite question.
Arlette Chabot
Très courte, très courte surtout la réponse parce que sinon, on ne va pas y arriver du tout là.
Geoffroy Roux de Bezieux
Vous avez parlé de sous-traitance et c'est vrai que c'est un vrai sujet en France, vous savez que les sous-traitants sont très souvent obligés de prendre des CDD de manière importante, pourquoi, parce que eux non plus n'ont pas la visibilité, donc vous allez pénaliser des entreprises qui n'ont pas le choix, structurellement de prendre des CDD alors qu'en réalité ce n'est pas un choix, ce n'est pas un patron voyou, c'est tout simplement le fait qu'ils ne savent pas quelle commande ils auront dans quelques mois.
Ségolène Royal
Vous avez raison au sens où si on arrive à responsabiliser les entreprises, si on met du dialogue social dans l'entreprise, vous aurez la possibilité de faire un dialogue avec les organisations syndicales et les organisations syndicales que j'ai rencontré CGT et CFDT sont prêtes à nouer des compromis sociaux, je pense qu'il faut que la France sorte de la culture de l'affrontement, de l'opposition de tous contre tous, des uns contre les autres, pour construire ensemble des valeurs ajoutées et je crois que la force d'un pays et en tout cas c'est parce que je pense vraiment que c'est la condition de l'efficacité économique, qu'on ne peut plus distinguer le social de l'économique et si on sécurise bien les salariés, ils seront productifs dans l'entreprise et vous aurez moins de soucis. Donc dans le dialogue social, on pourra discuter des allégements par branche professionnelle, par entreprise, dès lors que le dialogue social va se nouer dans l'entreprise, vous pourrez expérimenter un certain nombre de choses en fonction du seuil de l'entreprise au moment où elle grandit, l'entreprise a besoin de souplesse et d'agilité, mais les syndicats y sont prêts, si les salariés sont respectés. Et les pouvoirs publics joueront tout leur rôle pour récupérer les salariés.
Arlette Chabot
Vous allez vous revoir après.
Ségolène Royal
Juste un mot parce que ça n'a pas été compris sur la sécurité sociale professionnelle, madame a posé la question, au lieu d'avoir le souci du licenciement et au lieu que le salarié ait l'humiliation du chômage avec tout ce que cela comporte, il garde le contrat avec l'entreprise, c'est-à-dire sa dignité du statut de salarié et en contrepartie on lui donne 90 % du salaire avec les fonds des ASSEDIC et les fonds de la formation professionnelle, c'est du recyclage intelligent des fonds publics et ça permet aux salariés soit de chercher un autre emploi, soit de se former pour un autre métier et je vois beaucoup de femmes madame dans les métiers du textile qui sont en effet en train de perdre leur emploi et au lieu de tomber dans le trou du chômage avec la déstructuration familiale, elle garde 90 % de leur salaire et on les accompagne individuellement pour trouver un nouveau métier et notamment dans tous les métiers du lien social dont on a tellement besoin. Moi je reforme dans ma région des femmes licenciées du secteur textile et qui retrouvent de la dignité parce que dans les métiers auprès des personnes âgées, les métiers auprès des enfants, les métiers du lien social...
Arlette Chabot
Alors un effort de concision, ça ne vous ennuie pas.
Ségolène Royal
On peut leur redonner, les remettre debout.
Arlette Chabot
Alors petit effort de concision, il y a un mot que vous n'aimez pas beaucoup maintenant, c'est assistanat, c'est-à-dire qu'aucun revenu de l'assistance avez-vous dit, de soutien, ne pourra être donné sans contrepartie. Ca c'est vrai que ça peut être...
Ségolène Royal
Je suis contre l'assistanat. Je suis contre l'assistanat, aucun soutien ne peut être donné sans contrepartie. Et par exemple les bénéficiaires du RMI doivent être incités à retrouver du travail à condition que lorsqu'ils retrouvent du travail ou une activité d'intérêt général...
Arlette Chabot
Vous parlez comme Nicolas Sarkozy diraient certains, non ?
Ségolène Royal
Pas du tout, pas du tout parce que qu'est-ce qu'il dit lui ? Il dit que le meilleur gagne, que les gens...
Arlette Chabot
Mais il dit aussi aucun revenu de l'assistance, ce point précis ne peut être sans contrepartie.
Ségolène Royal
Ce n'est pas pareil puisqu'il détruit les solidarités de base. Moi, je dis qu'il faut construire des solidarités de base pour que chaque être humain ait accès à la dignité de son logement, de son activité, de sa formation professionnelle mais qu'en échange, il fait un effort, ou il donne une prestation. Par exemple les jeunes qui vont recevoir l'allocation autonomiste, c'est-à-dire une bourse par exemple pour les étudiants pour leur permettre de n'être pas dans la précarité et donc de réussir leurs études, devront en contrepartie donner des heures de soutien scolaire gratuit, ou d'activité auprès des associations caritatives etc, ils donneront quelque chose en échange à la société qui leur donne quelque chose et qui leur fait confiance. Ca s'appelle une société de la responsabilité.
Arlette Chabot
Alors vraiment on va faire un effort, avant qu'Eric Le Boucher nous rejoigne, petite question web cam, Mohamed.
Mohamed, artisan
5 ans en France sans papier, sans droit de travailler, quel est votre plan pour les sans papier et que dois-je faire pour en bénéficier sachant qu'il y a pénurie de main d'oeuvre dans mon secteur, entre parenthèse le bâtiment ? Merci.
Arlette Chabot
Alors les sans papier, régularisation ?
Ségolène Royal
Dans le bâtiment effectivement il y a pénurie de main d'oeuvre donc ça correspond à la loi, il y a un problème, peut-être d'employeur. La loi autorise de toute façon le travail dans les secteurs où il y a pénurie de main d'oeuvre. mais il y a aussi beaucoup de travail au noir de la part des employeurs qui ne sont pas respectueux de la loi française et donc dans ce cadre là, il faudra des régularisations, c'est-à-dire des autorisations de travail et des employeurs qui régularisent...
Arlette Chabot
C'est ce que vous appelez des régularisations au cas par cas par exemple ?
Ségolène Royal
... leurs salariés. Il y a deux choses. Il y a les salariés qui travaillent au noir dans des secteurs où il y a pénurie de main d'oeuvre et c'est tout à fait anormal parce qu'ils sont exploités, pressurés, c'est absolument indigne.
Arlette Chabot
Donc ceux là doivent être déclarés, régularisés s'ils ont un contrat de travail.
Ségolène Royal
Et c'est l'employeur qui est en fraude. C'est le travail clandestin. Il y a beaucoup à faire pour lutter contre le travail clandestin, donc ça on peut imaginer un certain délai, c'est-à-dire dès mon élection je dirais aux entreprises, écoutez vous avez trois ou quatre mois pour régulariser vos salariés, après c'est les procédures pénales. Donc on va remettre les compteurs à zéro, vous allez sortir du travail au noir, régulariser les salariés qui doivent l'être et donc ça fera entrer au passage des cotisations dans les caisses de sécurité sociale, ce qui a été fait dans d'autres pays. En revanche pour les autres, pour les personnes qui n'ont pas de travail et qui sont sans papier je ferais de la régularisation au cas par cas.
Arlette Chabot
Et pas de régularisation comme d'autres partis le demandent, généralisation ...
Ségolène Royal
Non, ce n'est pas possible. Ce n'est pas possible, en revanche ce qui devra impérativement être fait parallèlement à cela c'est une réforme en profondeur de l'aide au développement.
Arlette Chabot
Voilà on va s'arrêter, on va vite, un mot là dessus parce que sinon on ne va pas s'en sortir.
Ségolène Royal
Un mot écoutez...
Arlette Chabot
Non parce qu'il y a d'autres questions c'est pour cela.
Ségolène Royal
La maîtrise d'émigration de la misère ne peut se régler que par l'émergence des pays pauvres vers le développement et moi je crois que c'est une utopie réalisable. Vous savez je connais bien le Sénégal, je suis allée voir dans le village de pêcheurs d'où les jeunes partent en pirogue, un sur deux se noie, et les mères sont là en train de pleurer leurs enfants et si elles avaient des micro crédits, elles auraient pu développer des activités sur la pêche, sur l'agriculture. Si elles avaient l'énergie solaire, les villages seraient éclairés, les jeunes pourraient apprendre à lire et à écrire. Donc je crois qu'il va falloir revoir en profondeur l'aide publique au développement pour que vraiment ça arrive directement aux populations concernées et que les gens puissent vivre dans des conditions dignes et dans des villes magnifiques qui ne demandent qu'à être développées.
Arlette Chabot
Bertrand est au téléphone, Bertrand,
Bertrand
Oui.
Arlette Chabot
Vous nous entendez bonsoir Bertrand. Voilà madame Ségolène Royal vous écoute.
Bertrand
Bonsoir madame le ou la présidente ?
Arlette Chabot
Le ou la présidente.
Ségolène Royal
Comme vous voulez.
Arlette Chabot
Elle n'a pas répondu parce qu'elle anticipe trop là. La question ?
Bertrand
Juste une question, donc Bertrand de Tours, je voulais uniquement savoir si vous étiez favorable ou si vous souhaitiez le service civil d'une part et vous le souhaitiez obligatoire ou non ? Sachant que vous venez d'expliquer il y a quelques instants que le projet social ...
Arlette Chabot
Est important pour tout le monde, Bertrand on a compris pour tout le monde, Bertrand on a compris la question, réponse courte, pardonnez-moi mais on est très en retard. Alors service civil obligatoire, oui, non et combien de temps ?
Ségolène Royal
Oui bien sûr.
Arlette Chabot
Oui pour tout le monde, garçon, fille ?
Ségolène Royal
Bien sûr le service civil sera obligatoire.
Arlette Chabot
Ca coûte cher non ?
Ségolène Royal
J'ai d'ailleurs un rapport de Bernard Kouchner, qui vient de mettre remis, ce n'est pas forcément six mois d'affilés. Il peut être échelonné sur deux, trois ans, pendant la période des congés etc. Et puis il peut avoir une dimension militaire. Il pourra avoir une dimension militaire de façon facultative. Et on apprendra aussi la défense du territoire, ce que c'est que la Nation, la République, les valeurs fondamentales, et puis bien évidemment on apprendra à être utile aux autres.
Arlette Chabot
Alors on prend une autre petite question, Nicolas Hulot attend, on va le rejoindre aussi tout à l'heure mais Nicolas est avec nous en direct, Mikael web cam d'abord, question. Voilà je vois Nicolas Hulot...
Mikael, étudiant
Ma question est la suivante, êtes-vous favorable au mariage et à l'adoption pour des couples homosexuels ? Je vous remercie.
Arlette Chabot
Voilà alors question qui revient.
Ségolène Royal
C'est dans le projet, effectivement je crois que mettre fin aux discriminations, le moment est venu de le faire, l'Espagne l'a fait donc la France, je crois, peut le faire dans le respect des choix et pour lutter contre toutes les formes de discriminations.
Arlette Chabot
Il y a une question qui était posée d'actualité ce soir, avec un procès qui vient de se terminer effectivement en Dordogne, Périgueux, fin de vie, euthanasie avec l'infirmière qu a été acquittée, et le médecin qui a été condamné à une peine symbolique, ce qui fait qu'on voit bien que quand on met un terme effectivement à la vie de personnes qui sont vraiment dans des souffrances terribles, l'euthanasie, il va falloir légiférer. Vous pensez qu'il faut effectivement le faire, c'est votre conviction ?
Ségolène Royal
Ecoutez pour avoir assistée à une fin de vie atroce d'un de mes proches et avoir connu ce sentiment d'abandon et de n'avoir rien pu faire, je crois que la question se pose. En même temps il faut éviter toutes les dérives et donc je crois qu'il va falloir rouvrir ce débat et que la bonne solution, c'est une décision collégiale au sein de l'hôpital, au sein du comité d'éthique de l'hôpital et des médecins, c'est une décision collégiale et d'abord médicale et d'abord éthique. Peut-être que souvent les familles sont les moins bien placées pour évaluer cela, il faudra trouver de quelle façon on peut associer les familles, mais je crois que ce qui est très important, c'est la notion de décision collégiale au sein de l'établissement hospitalier où il y a maintenant vous le savez des comités d'éthique qui sont déjà en place.
Arlette Chabot
Vraiment réponse courte, vous savez qu'on est tenu à des temps de parole. Ce serait dommage de pas répondre aux questions. On va recevoir notre ami Eric Le Boucher qui est éditorialiste au Monde, qui va venir vous interroger. Et donc là vraiment, encore une fois, on va jouer ce jeu de questions réponses courtes puisque ensuite, il faut parler avec Nicolas Hulot. Bonsoir Eric. Voilà questions réponses précises sur des points précis.
Eric Le Boucher
Madame Ségolène Royal, bonsoir.
Ségolène Royal
Bonsoir.
Eric Le Boucher
Je voudrais revenir sur la dette si vous voulez bien parce que c'est le point prioritaire de votre discours de Villepinte. J'ai mal compris. La dette vous voulez la plafonner ou la réduire ?
Ségolène Royal
L'idéal serait de la réduire bien évidemment mais déjà si on arrive, ce sera un effort très difficile et de longue haleine, déjà si on pouvait en décélérer le rythme d'augmentation, c'est déjà très important. Si on peut ensuite la stabiliser, c'est un autre succès et si ensuite on peut la réduire, c'est enfin un objectif à rechercher. Et en même temps, il y a dette et dette. Je crois qu'il faut aussi investir pour préparer l'avenir. Quand j'entends certains dire qu'il ne faut plus rien bouger pour éviter de creuser la dette, je crois qu'il y a une bonne dette et une mauvaise dette. Il y a la bonne dette, c'est celle qui permet d'investir dans ce qui va rapporter. C'est à dire dans la formation professionnelle, dans la recherche et dans l'innovation.
Eric Le Boucher
Pour l'instant, donc simplement ralentir la progression de la dette dans l'objectif premier, dans les premières années ?
Ségolène Royal
La stabiliser.
Eric Le Boucher
Puis la stabiliser. J'imagine que c'est pareil pour le déficit budgétaire. Donc vous voulez le réduire le déficit budgétaire ou bien si il repart un peu vers le haut, dans les premières années...
Ségolène Royal
Mais c'est la même réponse. Je crois que ce qu'il faut d'abord, c'est stabiliser et ensuite décélérer. Et je pense que c'est possible. Il faut aussi voir la totalité des dettes. C'est à dire aussi les budgets des collectivités territoriales.
Eric Le Boucher
Je parle de la totalité. Les impôts si vous voulez bien. Alors vous avez dit qu'on augmente pas l'enveloppe globale des impôts et des charges que supporte l'ensemble des Français, ce qu'on appelle les prélèvements obligatoires. Maintenant vous avez dit aussi qu'à l'intérieur, ça peut bouger. Que certains vont payer peut-être un peu plus, les hautes tranches vous avez dit et puis d'autres sans doute un peu moins. Alors les hautes tranches, est-ce que, François Hollande a dit qu'à 4000 euros par mois pour un célibataire, on était riche. Donc est-ce que c'est à partir de ce moment-la que les gens vont voir leurs impôts augmenter ?
Ségolène Royal
Vous savez, je suis candidate à l'élection présidentielle. Et donc j'aurais un gouvernement qui règlera ces problèmes selon les instructions que je vais lui donner. Les instructions que je donnerais à mon gouvernement sont les suivantes : d'abord l'impôt doit être juste, ensuite l'impôt doit être accepté par les citoyens mais pour que l'impôt soit accepté par les citoyens il faut qu'ils comprennent le sens des dépenses publiques. Et donc la garantie que je donnerais aux Français, c'est qu'un euro dépensé est un euro utile. Et que nous mènerons la guerre contre toutes les formes de gaspillage. Et que les Français seront associés dans le cadre d'un budget participatif à la décision d'une partie des dépenses publiques. On verra dans quel domaine.
Arlette Chabot
Qu'est-ce que ça veut dire ça ?
Ségolène Royal
Ca veut dire que je crois que l'on peut faire au niveau national, on verra de quelle façon ça peut être fait, que les Français puissent à un moment intervenir dans les choix budgétaires qui sont faits. Ca peut être dans des secteurs comme l'environnement, tenez, par exemple. Les Français pourraient très bien être associés dans le cadre du budget du ministère de l'Environnement, à dire comment ils voient les choses par rapport aux grands objectifs d'un ministère comme celui-ci. Je crois que le domaine du débat démocratique, de la démocratie participative pourrait très bien mais je veux dire que c'est par des signes comme ceux-la, c'est à dire une modification profonde du fonctionnement de l'Etat et des institutions que l'on pourra aussi redonner confiance aux Français dans la dépense publique.
Eric Le Boucher
Vous m'avez pas dit si à 4000 euros, on était riche ou pas.
Ségolène Royal
Ecoutez, je vous ai dis que l'outil fiscal doit être mis...
Eric Le Boucher
Etre juste.
Ségolène Royal
Il doit être juste, il doit être accepté et enfin c'est un outil au service du développement économique. Et ce n'est pas une fin en soi. Et donc toutes les réformes fiscales devront être regardées au regard de cette question. Est-ce que oui ou non, cette réforme fiscale permet ou pas de créer des activités, des emplois et de résorber la dette ?
Arlette Chabot
Mais la question qu'on se pose c'est que vous revenez sur les baisses d'impôt qui ont été faites par la droite pendant cinq ans ou pas ?
Ségolène Royal
Je viens de vous répondre. Je ne vais pas ici vous détailler impôt par impôt.
Arlette Chabot
Non mais je ne dis pas impôt par impôt, les baisses d'impôt sur le revenu qui ont été faites par ce gouvernement, est-ce que vous revenez dessus ou pas ?
Ségolène Royal
Dans le cadre d'une recherche, d'une répartition juste de l'impôt, nous pourrons en effet remettre à plat un certain nombre de choses.
Arlette Chabot
C'est à dire pour les plus hautes tranches, quoi. Les réductions seraient annulées ?
Ségolène Royal
Par définition ceux qui paient le plus d'impôts, la droite a baissé les impôts de ceux qui sont les plus riches. Donc elle a avantagé la rente par rapport au travail. Donc aussi dans l'ensemble de sa réforme fiscale. La droite a avantagé la rente par rapport au travail. Moi je veux restaurer la valeur travail. Et donc je veux que le travail soit moins taxé que le capital. Sous toutes ses formes. Ce sera la feuille de route de mon gouvernement.
Eric Le Boucher
D'accord. Sur les retraites, vous avez dit que vous vouliez augmenter très vite de 5% les petites retraites. C'est combien une petite retraite ?
Ségolène Royal
C'est une retraite inférieure au Smic. Et il y en a beaucoup.
Eric Le Boucher
Oui il y en a beaucoup mais vous savez aussi que...
Ségolène Royal
Et surtout des femmes je vais vous dire. Il y a plusieurs millions de femmes qui touchent des petites retraites inférieures au Smic parce qu'elles ont eu des durées de vie incomplètes pour élever leurs enfants.
Eric Le Boucher
Enfin des carrières incomplètes.
Ségolène Royal
Des carrières incomplètes. Des durées de vie professionnelles courtes. Et la réforme Raffarin a été scandaleuse de ce point de vue parce qu'en allongeant la durée des cotisations sans tenir compte des raisons pour lesquelles les femmes avaient été soit au chômage partiel, soit avaient volontairement arrêté leur vie professionnelle pour élever leurs enfants, a accru considérablement les inégalités au regard de cette question des retraites. Et moi je vais vous dire dans les débats participatifs, je n'ai jamais vu autant de femmes seules m'écrire, de femmes aux petites retraites qui ne font plus qu'un repas par jour. Moi je me dis que la France a quand même les moyens de payer des petites retraites qui permettent aux gens de manger deux fois par jour, de payer leur loyer, de se faire soigner parce qu'en plus il y a un recul du service public de la santé et maintenant, les gens ont peur. Ils ont peur de savoir comment ils vont finir leur fin de vie. Et les parents se demandent comment ils vont aider les grands-parents et les grands-parents qui avant aidaient leurs petits enfants, aujourd'hui c'est le contraire. Ce sont les petits enfants qui se disent comment je vais faire...
Eric Le Boucher
Est-ce que je peux vous demander comment vous allez financer madame ?
Ségolène Royal
Attendez parce que ça, on est au coeur du sujet, des inquiétudes des Français. On a à al fois des jeunes qui pour la première fois, ça ne se faisait pas dans la génération précédente, pensent à leur retraite. Vous vous rendez compte ? Aujourd'hui il y a des jeunes de 25 ans qui se demandent qui va payer leur...
Eric Le Boucher
C'est vrai. Si vous voulez les rassurer dans le long terme, il faut pouvoir les financer. Alors comment vous allez les financer ?
Ségolène Royal
Je les finance parce que je pense qu'en donnant du pouvoir d'achat aux petites retraites, je relance aussi d'une certaine façon la croissance économique. Et donc on n'est pas dans des schémas arithmétiques où quand on donne aux uns, on retire forcément aux autres. Il faut sortir de cette logique.
Eric Le Boucher
Une CSG retraite ?
Ségolène Royal
Je vous ai dis que je ne répondrais pas à des questions techniques qui relèvent d'un secrétariat d'Etat au budget et d'un ministre de l'Economie et des Finances. Moi je trace les grandes orientations. Je vous l'ai donné et j'ai la conviction chevillée au corps que la France peut reprendre la main et peut redémarrer en faisant de la justice sociale.
Arlette Chabot
Est-ce que vous remettez en cause la réforme des retraites qui a été faite par Jean Pierre Raffarin sous le gouvernement de Jean Pierre Raffarin ou pas ? Parce que c'était dans le programme ça. Le président doit dire, je sais pas, la retraite à 60 ans vous la garantissez ou la garantissez pas par exemple ?
Ségolène Royal
La question de la réforme des retraites sera à l'ordre du jour de la conférence que j'ai évoquée tout à l'heure qui sera immédiatement convoquée dès l'élection, entre patronat, organisations syndicales.
Arlette Chabot
Ce que vous dites c'est que vous remettez tout sur la table ?
Ségolène Royal
On y associera aussi un certain nombre de corps intermédiaires représentatifs et les associations de retraités seront aussi associées à la réflexion. Les consommateurs également parce que je veux que la société...
Arlette Chabot
Mais vous n'annulez pas comme ça avait été annoncé la réforme des retraites ?
Ségolène Royal
Si je remets à plat les inégalités les plus criantes qui ont été réalisées par cette réforme des retraites. Je viens de vous en citer une. Nous intégrerons également et je le souhaite...
Arlette Chabot
Mais la retraite à 60 ans est maintenue ou pas ?
Ségolène Royal
Attendez, l'autre réforme très importante ce sera l'intégration de la pénibilité. C'est la durée de cotisation, c'est pas l'âge. C'est la durée de cotisation.
Eric Le Boucher
On va vers les 40 ans, est-ce que vous maintenez cette barre des 40 ans ?
Ségolène Royal
Non monsieur, le critère essentiel ce n'est pas celui-la, le critère essentiel c'est de calculer la durée de cotisation en fonction de la pénibilité des tâches et donc de l'espérance de vie. Et lorsque entre une ouvrière et une profession libérale, il y a dix ans d'écart d'espérance de vie non seulement en durée mais aussi en qualité, en santé, en vie quotidienne. Je me dis que c'est très injuste. Et donc cette question de la durée de cotisation, nous la regarderons au vu de la vie réelle des gens, de la vie concrète des gens et non pas des critères arithmétiques.
Arlette Chabot
Une dernière question parce que sinon on va jamais y arriver.
Eric Le Boucher
Ca va très vite. Nous avons un Etat beaucoup trop lourd vous avez dit à Villepinte. Alors est-ce qu'il faut alléger le poids de l'administration ? Ca veut dire quoi concrètement, que vous allez supprimer un certain nombre de postes de fonctionnaires pris globalement aux régions, plus l'Etat central, plus tout le monde ?
Ségolène Royal
D'abord je voudrais vous dire que le discours qui consiste à dire arithmétiquement comme le fait la droite, nous allons supprimer un fonctionnaire sur deux qui part à la retraite, je trouve que ce discours est injurieux pour les fonctionnaires parce que ça veut dire qu'ils pensent qu'un fonctionnaire sur deux est inutile. Moi je pense le contraire. Il y a des endroits où on manque de services publics et il y a des endroits où il y a trop d'argent public. Et d'ailleurs ils le disent eux-mêmes. Ils préfèrent avoir des tâches intéressantes que d'être noyés dans de multiples réunions, j'en ai vécues des multiples réunions inter ministérielles où vous avez 60 personnes autour de la table, avec un temps perdu. Donc je décentralise, qu'il y ait pas de malentendu, je maintiens. Je veux un Etat fort qui assume ses responsabilités mais pas un Etat étouffé par la bureaucratie ou par des tâches qui ne relèvent pas de l'Etat central. Il y a donc des tâches qui seront transférées aux régions et aux départements en leur interdisant les doublons parce que là il y aussi beaucoup de gaspillage.
Arlette Chabot
On peut faire court parce que ça va être une catastrophe totale.
Ségolène Royal
C'est à dire sans augmentation des impôts locaux. Parfois, juste une chose, l'Etat a transféré dans la dernière période, des responsabilités. J'en sais quelque chose en tant que présidente de région.
Eric Le Boucher
Ce que veut savoir Arlette c'est qu'est-ce que vous voulez décentraliser ? Qu'est-ce que vous envoyez aux régions ?
Ségolène Royal
J'envoie aux régions premièrement la remise à niveau des universités. Je n'accepte plus que dans un pays comme la France les universités, certaines universités soient dans un état aussi lamentable. Ce sera la responsabilité des régions avec une autonomie donnée aux universités pour créer de l'émulation et nous remettrons à niveau les universités. Deuxièmement je donne aux régions la responsabilité des aides économiques aux entreprises avec un cadrage de l'Etat à chaque fois. Il y a un cadrage sur les universités, un cadre global et ce sont les régions qui engagent les dépenses publiques parce que ça fera beaucoup d'économie. Même chose pour les aides économiques aux entreprises. Ce seront les régions qui piloteront les aides économiques aux entreprises...
Arlette Chabot
Mais il y a des fonctionnaires qui vont quitter le statut de Fonction publique ?
Ségolène Royal
Mais pourquoi pas. Vous savez qu'il y a beaucoup d'agents publics qui, vous avez vu les mouvements démographiques à l'échelle de la France, bien sûr il y a beaucoup d'agents publics qui ne demandent qu'à avoir des métiers plus intéressants en étant au plus près des décisions qui sont prises. Bien évidemment nous offrirons la possibilité aux agents publics de se redéployer sur les territoires pour qu'il n'y ait pas double emploi et à nouveau une fuite en avant vers les dépenses publiques. Donc il faudra de la clarté chacun dans sa compétence. Ce sera de l'ordre territorial juste.
Arlette Chabot
Voilà merci Eric. Petite question webcam avant de retrouver Nicolas Hulot.
Cyril, Etudiant Villars de Lans
J'aimerais savoir quelle est votre vision de l'Europe alors qu'on parle d'une Europe à 30 voire à 35 et si vous êtes favorable à un nouveau référendum au sujet de la constitution européenne ?
Arlette Chabot
Ca en une minute, si je puis me permettre.
Ségolène Royal
D'abord je veux que la France revienne à la table de l'Europe et je veux que l'Europe se relève parce que nous avons besoin de cette Europe pour être plus forts tus ensemble face à l'émergence des autres continents comme l'Inde ou comme la Chine. Et que nous devons faire l'Europe par la preuve. La recherche, on l'a vu avec Airbus, il faut sauver nos filières industrielles, il faut une vraie politique industrielle, européenne, il faut donc développer l'Europe de la recherche, l'Europe de l'environnement. Nous devons préparer ensemble l'après pétrole et les énergies renouvelables. Nous devons créer l'Europe des transports. Il y a du potentiel d'emploi et d'activité dans ces domaines.
Arlette Chabot
Et le référendum ? La consultation des Français ?
Ségolène Royal
Bien sûr mais les institutions sont au service des projets et pas l'inverse.
Arlette Chabot
Mais il faut faire fonctionner l'Europe. Pour l'instant ça marche pas parce qu'on n'a pas les règles de fonctionnement.
Ségolène Royal
Il faut que l'Europe fonctionne et notamment il faut que l'Europe réussisse à lutter contre le chômage. Qu'est-ce qu'ils attendent les Français ? Ils veulent la preuve que l'Europe protège contre les délocalisations.
Arlette Chabot
Donc vous organiserez un référendum ?
Ségolène Royal
Je pense que si l'Europe parvient à se protéger, là très rapidement ce sera l'objectif de la présidence française au 1er juillet 2008 à laquelle je réfléchis déjà. Et si l'Europe arrive à adopter des règles qui la protègent contre les délocalisations, qui intègrent les normes sociales et les normes environnementales, les règles sociales, les mêmes petit à petit pour tout le monde et qui réussissent à faire baisser le chômage, alors les gens auront confiance et ils donneront à l'Europe les institutions pour fonctionner et non pas l'inverse.
Arlette Chabot
Donc vous organiserez un référendum. Vous savez à peu près à quelle date ? Quel délai ?
Ségolène Royal
Oui j'organiserais un référendum. Au plus tard au moment des élections européennes de 2009.
Arlette Chabot
Petite question sur la Turquie. Vous avez dit effectivement, " mon opinion est celle du peuple français ". On se souvient qu'à propos du référendum, vous aviez eu des positions très claires. Vous avez dit, je vote oui par conviction etc. Pourquoi sur la Turquie vous avez dit...vous n'avez pas de conviction personnelle ? " Mon opinion sera celle des Français ".
Ségolène Royal
Mais c'est très simple, c'est parce qu'il est prévu désormais que tout nouveau pays entrant, cette entrée sera soumise à référendum.
Arlette Chabot
Oui mais un président de la République...
Ségolène Royal
Moi président de la République je vais dire, non mais attendez...
Arlette Chabot
Vous devez avoir un avis quand même.
Ségolène Royal
J'aurais un avis le moment venu.
Arlette Chabot
Et vous donnerez votre avis aux Français ?
Ségolène Royal
Mais bien sûr.
Arlette Chabot
Vous pouvez pas le dire maintenant ?
Ségolène Royal
Non parce que je ne sais pas si la Turquie va à ce moment-la respecter les conditions, remplir les conditions qui lui sont posées.
Arlette Chabot
Mais sur le principe vous n'avez pas d'avis sur l'intérêt ou non de la Turquie à l'intérieur de l'Union européenne ?
Ségolène Royal
Il n'y a pas de principe, il n'y a que des faits. Soit la Turquie remplit les conditions qui ont été posées et je pense qu'aujourd'hui de toute façon elle ne les remplit pas et qu'il faut une pause pour que l'Europe déjà fonctionne bien. Et en même temps je pense que ce serait une erreur de rejeter la Turquie parce que c'est la Turquie. Et que nous avons intérêt à arrimer aux valeurs de l'Europe le plus grand nombre possible de pays, si l'on croit aux valeurs que nous défendons. Et les valeurs humanistes de l'Europe et la Turquie est un grand pays laïc, je le rappelle quand même, les valeurs humanistes de l'Europe qui sont celles de la Révolution française, rappelons-le toujours, nous avons toujours la fierté quand même de rappeler cela, la liberté, l'égalité, la fraternité, nous avons toujours intérêt à ce que des pays s'arriment à ces valeurs-la, y compris dans le cadre d'associations privilégiées donc je pense que l'on peut trouver...
Arlette Chabot
Donc vous ferez connaître votre position au moment du choix, c'est ça ? La présidente Ségolène Royal dira aux Français, moi je pense qu'il faut dire oui ou qu'il faut dire non ?
Ségolène Royal
Bien sûr au moment du choix, je ferais connaître ma position.
Arlette Chabot
Alors avant, non même maintenant on va retrouver tout de suite Nicolas Hulot. Merci Nicolas d'être avec nous ce soir en duplex de Rennes. On va être assez rapide et pardonnez-moi. Nicolas Hulot était là la semaine dernière. Il vient rappeler aux candidats qu'ils ont signé un pacte, son pacte, ses propositions. On va vous revoir Segolene Royal, vous avez signé le pacte de Nicolas Hulot. C'était il y a quelques semaines. Lui qui va organiser dans quelques semaines, on va en reparler, un grand rassemblement le 1er avril à Paris au Trocadéro. Nicolas, voilà, rappelez Ségolène Royal peut-être à ses engagements.
Nicolas Hulot
Oui enfin d'abord, juste une petite remarque très brève c'est que je vois bien que dans la campagne, que les mots écologie, changement climatique, biodiversité, font pas partie du vocabulaire familier de la campagne et je peux le comprendre parce qu'il y a pas une passion spontanée pour ces enjeux et que ça apparaît pour beaucoup comme une menace un peu diffuse et abstraite alors que je pense que vous et moi, bonsoir Ségolène Royal, nous avons conscience que ce n'est pas un enjeu parmi d'autres et que c'est bien un enjeu vital, universel qui va conditionner tout projet de société. Alors moi je voudrais simplement savoir à quel niveau, quelle est votre vision sur ces enjeux et comment pensez-vous réaliser cette synthèse entre économie, écologie, social politique quand on sait que si tous les citoyens du monde consommaient, produisaient et polluaient comme les Français et je dis ça sans aucune critique, il faudrait trois planètes. Donc simplement pour dire, on est en train de basculer de l'ère de l'abondance à l'ère de la rareté. Comment va t-on faire pour organiser cette synthèse et concrètement dans les 100 premiers jours de votre présidence si vous êtes élue, qu'est-ce que vous allez faire sur les enjeux climatiques et de biodiversité ?
Arlette Chabot
Voilà en 100 jours, qu'est-ce que vous faites ?
Ségolène Royal
En 100 jours, qu'est-ce que je fais ? D'abord je fais prendre conscience, je nomme un vice Premier ministre chargé du développement durable. Premièrement.
Arlette Chabot
Ca c'est vrai. Vous avez aussi le nom en tête pour le vice Premier ministre, vous avez dit tout à l'heure que vous aviez plusieurs noms pour le Premier ministre, pour le vice Premier ministre aussi ? Vous avez déjà réfléchi ?
Ségolène Royal
J'ai déjà réfléchi, parfaitement, mais vous n'aurez pas la réponse ce soir.
Arlette Chabot
J'ai bien compris ça mais juste la question pour la forme.
Ségolène Royal
Vous ne serez pas déçue.
Arlette Chabot
Non plus ?
Ségolène Royal
Je prononce immédiatement le moratoire sur les OGM en plein champ, parce que je crois le développement écologique a besoin de transparence et de démocratie. J'engage immédiatement le débat national sur l'avenir énergétique de la France. vous savez qu'il y a des sujets difficiles, il y a des points de vue variés, notamment sur l'énergie nucléaire. Et je considère que ce débat-là gagnerait à être mis sur la table et à être débattu avec l'ensemble des échanges, y compris des confrontations. Je pense que la démocratie a besoin de confrontation d'idées pour faIre émerger l'intérêt général.
Arlette Chabot
Il y a beaucoup de questions là-dessus...
Ségolène Royal
Ensuite...
Arlette Chabot
... Du téléspectateur, pardonnez-moi, je vous interromps parce qu'il y a beaucoup de questions qu'on n'aura pas l'occasion de vous poser directement, et je les pose, vous aviez dit, il y a un moment, 50%, réduire la part du nucléaire dans la production française, 50%, ce n'est pas tenable, disent certains, parce que ça fait beaucoup de centrales qui devraient disparaître très vite. Donc qu'est-ce que vous prenez comme engagement sur le nucléaire, vous ?
Ségolène Royal
Attendez, il ne faut pas raisonner aujourd'hui sans tenir compte des progrès technologiques et des progrès sur les énergies renouvelables qui vont avoir lieu dans les années qui viennent. Donc il faut se fixer... il vaut mieux se fixer des objectifs extrêmement ambitieux...
Arlette Chabot
Alors, vous faites combien sur le nucléaire par exemple ?
Ségolène Royal
Sans parler...
Arlette Chabot
Réduire le nucléaire...
Ségolène Royal
D'abord, j'économise l'énergie. On ne peut pas parler de la question énergétique et de la part des énergies renouvelables sans parler de la question des économies d'énergie. C'est d'abord par les économies d'énergie, et en particulier dans les cent premiers jours, qu'est-ce que je fais ? D'abord, plus aucun permis de construire ne sera délivré, et je le dis tout de suite aux entreprises du bâtiment, je leur ai dit, si les permis de construire n'intègrent pas dans le permis de construire l'installation en énergie renouvelable, le bois, le solaire, l'éolien, le photovoltaïque, ça doit être intégré dès le départ. Deuxièmement, je lance un programme d'isolation des bâtiments déjà construits, 100.000 emplois à la clef, avec des incitations fiscales, budgétaires, ça va démarrer, ce ne sera pas en une seule fois, mais dans ce domaine-là, où tous les autres pays européens viennent de faire cela, et que la France a encore résisté lors du dernier Conseil européen, et s'est opposée à la proposition allemande de mettre 20% d'énergies renouvelables dans le bouquet énergétique...
Arlette Chabot
Il y a un accord...
Ségolène Royal
C'est scandaleux...
Arlette Chabot
Il y a un accord quand même...
Ségolène Royal
C'est scandaleux que la France, qui tient des discours sur l'environnement, lors du Conseil européen de la semaine dernière, Angela Merkel...
Arlette Chabot
Mais il y a un accord européen finalement, au bout du compte.
Ségolène Royal
Enfin, un accord, la France a quand même...
Arlette Chabot
Elle a fini par accepter...
Ségolène Royal
Oui, mais enfin...
Arlette Chabot
Il faut maintenant de l'énergie renouvelable, alors...
Ségolène Royal
Oui, mais vous avez vu avec quelles réserves...
Arlette Chabot
... le nucléaire...
Ségolène Royal
Quelles hésitations on saute d'un pied sur un autre, résultat, qu'est-ce qui se passe ? Et je l'ai vu lorsque j'étais ministre de l'Environnement, et Nicolas Hulot admettra, avec moi, que j'ai fait beaucoup de choses en tant que ministre de l'Environnement, je ne suis pas restée inerte. Chaque fois que l'on prend du retard sur les questions environnementales, on perd sur le plan économique et on perd sur le plan de l'emploi. Et pour répondre à Nicolas Hulot très directement, ma conception de la nouvelle croissance, c'est une conception sur trois piliers, d'égale importance, la valeur ajoutée économique, on en a parlé un peu, la valeur ajoutée sociale, on en a parlé également, qui sont indissociables, et qui participent à la compétitivité de l'économie, et la valeur ajoutée environnementale, c'est le troisième pilier, c'est un levier très important pour le développement des activités et pour la lutte contre le chômage. Et le dernier point, c'est que je pense, je l'ai dit tout à l'heure, c'est une nouvelle frontière, la question du réchauffement planétaire, parce que les prochains conflits et les prochaines guerres à l'échelle de la planète viendront de ce problème, il y a aujourd'hui dans les régions les plus pauvres, celles qui souffrent le plus du réchauffement planétaire, des déplacements massifs de populations qui vont créer des conflits très graves, le conflit pour la maîtrise de l'eau potable va créer des guerres à l'échelle de la planète. Et donc notre survie à nous, pays, riches, qui avons imposé aux pays pauvres des modes de développement scandaleux, et je le disais tout à l'heure, l'Afrique n'est même pas équipée en énergie solaire, alors qu'elle a l'énergie gratuite, donc c'est ça qu'il va falloir repenser, de fond en comble, parce que nous ne nous sauverons pas tous seuls, nous avons réchauffé la planète à cause de nos modes de développement, c'est à nous qu'incombe la responsabilité d'y mettre fin et de maîtriser ce processus parce que c'est de là aussi que naîtra la réduction des écarts entre les pays pauvres, qui ont l'énergie solaire gratuite et qui ne l'utilisent pas à cause de nous, parce qu'on ne leur a pas transféré les technologies, et les pays les plus riches.
Arlette Chabot
Alors Nicolas, il y aura un vice-Premier ministre, c'est essentiel, je rappelle donc, en vous remerciant, que vous êtes... le 1er avril, vous faites un rassemblement au Trocadéro, à Paris, de toutes les organisations environnementales, c'est ça, sur le thème : votez...
Nicolas Hulot
Votez pour la planète...
Arlette Chabot
Pour la planète. Voilà. Donc il n'y a pas de consigne de vote, mais c'est : Votez pour la planète, pour rappeler un peu à tout le monde qu'il faut effectivement se mobiliser et ne pas faire oublier...
Nicolas Hulot
Chacun fera son choix, simplement, pour maintenir cette vigilance, cette exigence et cette mobilisation, parce que la mutation écologique aura besoin de la participation de chaque citoyen et de chaque acteur, on ne peut pas simplement s'en affranchir sur le dos des politiques, et réciproquement.
Ségolène Royal
Mais d'ailleurs, je compte sur toutes les associations, sur Nicolas Hulot, qui a fait un travail extraordinaire, parce que c'est vrai qu'il a fait quand même bouger la prise de conscience...
Arlette Chabot
Et c'est la société civile, quand elle bouge, c'est toujours efficace...
Ségolène Royal
C'est un citoyen engagé, et je pense que le comité de vigilance qu'il a mis en place sera très utile, et dans le cadre de la démocratie participative, vous serez associé à l'évaluation des politiques publiques, et le président de la République, si je suis celle-là, rendra compte tous les ans de l'application du pacte présidentiel. Tous les ans, je viendrai rendre compte aux françaises et aux français...
Arlette Chabot
Vous recevrez tous les ans Nicolas Hulot...
Ségolène Royal
De ce qui a été fait et de ce qu'il reste à faire.
Arlette Chabot
Merci Nicolas. Pardonnez-nous, il y a juste un temps de parole.
Nicolas Hulot
Merci.
Arlette Chabot
Merci infiniment d'avoir patienté. Si vous me promettez que vous répondez en 45 secondes, même si les questions sont un peu longues, on va essayer de tenir...
Ségolène Royal
... Elles sont passionnantes, donc c'est pour ça que c'est difficile de répondre...
Arlette Chabot
Elles sont passionnantes, mais on a juste un temps de parole et des contraintes extrêmement fermes. Voilà, on va parler très vite de l'université. Louis Vogel, qui est président de Paris 2, on a évoqué tout à l'heure, enfin, Ségolène, on a déjà parlé de l'université. Question courte, réponse courte. Pardonnez-moi.
Louis Vogel, président de l'université Panthéon-Assas (Paris II)
Bonsoir Madame.
Ségolène Royal
Bonsoir.
Louis Vogel
Ce qui frappe dans l'université aujourd'hui, c'est le décalage entre l'immensité de l'énergie qui y est concentrée, des professeurs dévoués, des étudiants qui veulent étudier, des personnels administratifs qui sont prêts à s'engager, et la faiblesse des résultats que nous atteignons. On ne peut pas continuer comme ça, et un certain nombre de propositions ont été faites pour essayer de remédier à la situation. Alors, 1°) : c'est rendre - vous l'avez dit tout à l'heure - les universités plus autonomes, en les rendant plus réactives, plus responsables. 2°) : c'est augmenter les moyens de l'université, notamment en accroissant les ressources publiques, mais aussi, et certains l'ont proposé, en augmentant les droits d'inscription. Et en faisant cette augmentation de droits d'inscription, un facteur de justice sociale, puisqu'ils ont prévu la progressivité. 3°) : en mettant fin à la sélection par l'échec. Beaucoup d'étudiants - tout le monde le sait - français sortent de l'université sans avoir de diplôme, ils perdent deux ou trois ans de leur vie, c'est un coût énorme, pas seulement économique, mais aussi social, et ils proposent d'y mettre fin en introduisant des mécanismes sélectifs dans certaines filières. Alors, ma question est triple finalement, 1°) : l'autonomie des universités, jusqu'où ? 2°) : l'augmentation des moyens des universités, mais comment allez-vous les financer ? Et 3°) : la sélection, est-ce que ce mot est tabou pour vous ?
Ségolène Royal
D'abord, j'ai rencontré la conférence des présidents d'université, et j'ai senti vraiment une attente très, très forte, que vous venez très bien d'exprimer d'ailleurs, une attente très forte par rapport à la façon dont on peut régler le décalage que vous venez d'évoquer entre la densité intellectuelle des universités françaises qui, heureusement, gardent un rayonnement international, que je veux saluer ici, et la réalité des conditions de vie au quotidien dans ces universités. Ils m'ont demandé l'autonomie des universités, je vous la donnerai, les universités auront l'autonomie, je vais vous dire jusqu'où, parce que je suis pour une société de la responsabilité. Et je pense que les universités ont des idées, vous venez d'en évoquer un certain nombre, et vous devrez avoir la liberté, mais vous serez évalué en contrepartie sur les résultats. On est dans le gagnant/gagnant ou dans le donnant/donnant. En revanche, ce qui restera de niveau national, c'est la validation des diplômes, vous savez que les Français sont quand même très attachés à ce que, sur la totalité du territoire national, l'égalité soit maintenue, les solidarités soient confortées, et donc il faudra maintenir la dimension nationale des diplômes. En revanche, sur tous les autres sujets, je ne pense pas que l'augmentation, c'est un sujet très polémique...
Arlette Chabot
Les droits d'inscription...
Ségolène Royal
L'augmentation des droits d'inscription soit une solution pour trouver des recettes, mais, tout sera mis sur la table. Je n'ai pas de tabou, surtout, si, en contrepartie, je fais pour les jeunes l'allocation d'autonomie et si je revalorise les bourses, à ce moment-là, on peut voir comment trouver de nouvelles ressources pour les universités. J'ai un doute vraiment que ce soit par l'augmentation, mais comme je ne veux pas fermer les portes à la discussion, puisque j'ouvre la discussion autour de l'idée d'autonomie des universités, tout est ouvert, dans le cadre des principes que l'Etat, le parlement va arrêter une sorte de loi cadre, qui permettra aux universités d'assumer leur autonomie. Et en échange de cette autonomie, je vous demanderai de lutter contre l'échec, donc de trouver des solutions, de réfléchir à l'orientation des élèves, de vous rapprocher des entreprises, et beaucoup d'universités le font déjà, notamment dans le cadre des pôles de compétitivité, je souhaite que, comme dans les autres grands pays industrialisés, il y ait des alliances beaucoup plus étroites entre les laboratoires de recherche, l'université et les entreprises au sein des mêmes pôles de compétitivité, qu'il y ait des alliances entre régions, et qu'il y ait des alliances de région à région européenne, d'un pays européen à un autre, pour que, là aussi, il y ait des synergies, et non pas des doublons, et qu'en particulier, quand on recherche dans tous les pays la même chose, par exemple pour lutter contre tel ou tel cancer, je me dis que c'est quand même très dommage, et qu'on pourrait répartir autrement les fonds de la recherche et les fonds de l'université, en créant des synergies et des alliances dans les cohérences industrielles, je le répète, au niveau régional, mais au niveau inter-régional d'un pays européen vers un autre. Voilà la nouvelle université que j'appelle de mes voeux. Quant à la remise à niveau matérielle, parce qu'il y a eu des inspections dans les universités françaises, il y a même eu des élèves qui ont été rapatriés parce que tellement les chambres universitaires étaient lamentables, ce sont les régions qui auront la responsabilité de construire les logements étudiants qui seront d'ailleurs communs à des logements étudiants pour les étudiants et pour les jeunes travailleurs, et qui auront la responsabilité de remettre à niveau le matériel et les bâtiments des universités. Et pourquoi ça sera possible ? Parce que les régions arrivent à la fin de la rénovation des lycées. Elles ont mené ce travail à bien, eh bien maintenant, elles vont se tourner vers la rénovation des universités. Et nous aurons en France des universités dignes de ce nom, et qui, je l'espère même, attireront des étudiants des autres pays européens, et déboucheront sur des diplômes et des emplois.
Arlette Chabot
Il y avait le mot sélection je crois qui...
Louis Vogel
Il y avait le mot sélection oui justement, est-ce que vous nous permettrait d'ouvrir des filières sélectives ?
Ségolène Royal
Mais je pense qu'il faut faire faire attention aux choix des mots et je préfère parler d'orientation, vous aurez oui le pouvoir d'orienter... qu'est-ce qui est important pour un élève qui rentre à l'université, c'est de trouver, d'abord qu'il y ait une égalité sociale à l'entrée de l'université, qu'il n'y ait pas de sélection par l'argent et qu'il n'y ait pas de sélection par l'origine sociale. Ca je ne veux pas que l'université sous prétexte de sélectionner, sélectionne par l'argent ou sélectionne par l'origine sociale. Donc il va falloir faire des choix. Mais deuxièmement pour déboucher et que pour l'investissement public ait un sens, il faut qu'à la sortie de l'université les jeunes trouvent du travail. Et donc bien évidement il faut adapter la formation des jeunes au développement de l'économie, et donc vous aurez cette possibilité là bien évidement, mais attention, à ne pas, et ça la loi fixera les règles sans revenir sur cette idée d'autonomie qu'il n'y ait pas de compétition injuste d'une université à l'autre et que uniquement la sélection se fasse, la compétition se fasse uniquement par la sélection. Mais je suis convaincue que nous y arriverons et que nous trouverons un juste équilibre.
Arlette Chabot
Claire Delallau, Claire que j'ai perdu, je ne sais plus où elle est Claire. Voilà excusez-moi, voilà université toujours, court, question courte, réponse courte, pardonnez-moi Claire.
Claire Dellalau
Madame Royal, bonsoir, comment comptez-vous tout d'abord mettre en place un partenariat beaucoup plus étroit entre les entreprises et l'université, faire que les jeunes aient déjà un pied dans l'entreprise pour faire en sorte que leurs diplômes soient revalorisés et qu'ils veuillent vraiment dire quelque chose, que ce soit concret ? Concrètement quelles mesures souhaitez-vous prendre...
Arlette Chabot
Il faut expliquer que vous avez passé un Deug d'Anglais et que finalement vous avez repris vos études et que maintenant vous êtes ?
Claire Delallau
En brevet professionnel de fleuriste.
Arlette Chabot
De fleuriste parce que ça ne débouchait sur rien, voilà un beau gâchis, c'est-à-dire une belle formation, un deug d'Anglais...
Ségolène ROYAL
Non, si c'est dans une zone d'une formation.
Arlette Chabot
Non mais je veux dire c'est une formation...
Ségolène Royal
Vous allez vous servir de votre Anglais.
Arlette Chabot
Ce n'était pas ce que vous souhaitiez faire à l'origine, c'est ça.
Claire Delallau
Non surtout que je ne suis vraiment pas la seule dans ce cas là quand je me suis retrouvée en formation de CAP, donc une formation professionnelle pour adulte, je n'étais vraiment pas la seule dans mon cas et c'est quand même dommage de devoir repasser par des filières comme ça.
Ségolène Royal
Quel métier auriez-vous souhaité faire, quel est votre rêve ?
Claire Delallau
Professeur d'Anglais, c'était à la base ce métier là.
Ségolène Royal
Ou interprète...
Claire Delallau
Mais la réalité de l'université n'était pas du tout celle, l'idée que je m'en faisais, ni l'orientation qu'on m'avait donné à ce niveau là et c'était vraiment une autre planète, pas du tout concret.
Arlette Chabot
Alors réponse courte sur l'entreprise université, ça c'est un truc qui était tabou quand même, un peu...
Ségolène Royal
C'était tabou.
Arlette Chabot
C'est un truc qui ne marche pas très fort ça.
Ségolène Royal
Oui c'était tabou, mais heureusement les choses ont beaucoup changé.
Arlette Chabot
Ah bon il n'y a pas longtemps que ça a changé...
Ségolène Royal
...dans les faits, l'université se rapproche des universités.
Arlette Chabot
Non mais c'est vous qui dites ça parce que c'est effectivement tabou à gauche.
Ségolène Royal
C'était un peu tabou, c'est-à-dire on considérait mais ce n'était pas totalement malvenu, on considérait qu'il devait y avoir une formation générale qui n'était pas à être mise tout de suite au service à court terme de l'économie. Cette exigence là, elle doit être maintenue, c'est la raison pour laquelle d'ailleurs je ne suis pas favorable à l'apprentissage dès l'âge de 14 ans parce que je considère qu'un jeune peut être en formation jusqu'à 16 ans pour acquérir un bagage général pour l'armée dans la vie y compris pour avoir la possibilité de changer de métier.
Arlette Chabot
Mais université entreprise alors ?
Ségolène Royal
En revanche je suis favorable aux liens avec l'entreprise dès le collège, je ne peux pas vous dire mieux, dès le collège, là il y a un vague stage de 8 jours, ce n'est pas suffisant. Le collège, le lycée, l'enseignement supérieur, il faut des échanges beaucoup plus étroits entre les jeunes, et l'entreprise parce qu'ils seront ensuite mieux à même de choisir leur orientation.
Claire Delallau
Mais concrètement quels liens étroits, est-ce que c'est des stages, est-ce que c'est de l'apprentissage ?
Ségolène Royal
Des stages obligatoires qui sont encadrés par l'université, qui sont validés par l'université parce qu'il ne faut pas non plus que les entreprises trouvent une main d'oeuvre corvéable et gratuite parmi les stagiaires, donc il faut que les règles soient bien définies. Mais sous prétexte d'avoir peur des règles il n'y a plus de stage, donc il faut retrouver un juste équilibre. Et je pense qu'en effet tous les étudiants, tous les jeunes doivent pouvoir faire un passage dans plusieurs entreprises d'ailleurs, parce que cela est indispensable si on veut débloquer l'esprit, le goût du risque, l'esprit d'entreprendre, la connaissance du milieu professionnel, c'est absolument indispensable car on s'enrichit les uns, les autres, l'entreprise va s'enrichir de ces stagiaires parce que peut-être qu'elle va les garder aussi et inversement, l'université va s'enrichir de ces échanges. Donc je crois que c'est très important.
Arlette Chabot
Alors on fait court, professeur Patrice Valleur qui est chef du service de chirurgie viscérale à l'hôpital Lariboisière à Paris, on n'aura pas le temps de poser tous les problèmes de santé, mais question courte, réponse courte.
Patrice Valleur
Bonsoir mesdames, comme vous le savez l'application des 35 heures à hôpital public a aggravé considérablement la pénurie du personnel, qu'est-ce que vous comptez faire pour arrêter une hémorragie qui rend de plus en plus difficile l'exécution des missions qui nous sont confiées ?
Ségolène Royal
C'est vrai ce que vous dites, c'est un problème très lourd. C'est vrai que les 35 heures dans les métiers de l'Humain où il n'y a pas de gain de productivité possible, là où les 35 heures ont bien marché c'est quand il y a eu des gains de productivité, qui ont été possible par une meilleure organisation, une meilleure formation etc... dans les métiers de l'humain les 35 heures qui n'ont pas été accompagnées de créations d'emplois suffisantes, c'est vrai monsieur, ont dégradé le service dans les hôpitaux. Mais ce qui l'a encore davantage dégradé récemment, c'est la continuité sur la suppression des emplois, vous êtes d'accord avec moi, que ce n'était pas le moment de serrer la visse des hôpitaux et de continuer à supprimer des emplois. Donc il va y avoir une remise à niveau à faire et puis il va falloir aussi faire évoluer les structures médicales et de faire de la médecine préventive aussi. Donc je crois qu'on fera des économies dans le système de soins, si on investit dans la prévention. Je suis convaincue de cela. Ca coûte beaucoup moins cher d'investir dans la prévention et c'est pour cela que je propose dans le pacte présidentiel avec les Français la gratuité des soins pour les élèves, pour les enfants de moins de 16 ans parce que ça permet aussi de lutter contre l'échec scolaire...
Arlette Chabot
Vous maintenez même si on dit que ça coûte très très cher...
Ségolène Royal
Mais non ça ne coûte pas très cher, la plupart des enfants qui sont couverts déjà par des mutuelles, donc c'est tous ceux qui n'ont pas de mutuelle, ils seront couverts et c'est surtout une réflexion sur une médecine préventive à l'école parce que je crois que c'est cela qui aboutira ensuite, non seulement à lutter contre des formes d'échecs scolaires, les difficultés des jeunes, il y a des jeunes qui échouent parce qu'ils ne voient pas clair ou qui entendent mal et que ces problèmes ne sont pas détectés, les problèmes dentaires...
Arlette Chabot
Alors à hôpital vous remettez des infirmières, vous remettez, voilà on va former du personnel.
Ségolène Royal
hôpital, il va falloir une remise à niveau mais ça veut dire aussi parce qu'on va me le demander, on remet à niveau dans les universités, on remet à niveau dans hôpital, il va falloir payer tout cela dans un contexte de dettes que l'on connaît, donc il va falloir rationaliser la dépense publique et je crois que là aussi dans les hôpitaux, il y a souvent des propositions qui sont faites et qui pourraient permettre l'amélioration de l'organisation des services, donc je suis également favorable à ce que par exemple on puisse avoir accès à des technologies beaucoup plus pointues, et qui ne sont actuellement pas accessibles par les hôpitaux publics parce qu'ils ne sont pas encore sur la nomenclature, alors qu'ils peuvent conduire à faire des économies.
Arlette Chabot
Donc rationalisation...
Ségolène Royal
Donc il va falloir aussi je crois donner un peu plus d'autonomie aux établissements hospitaliers pour qu'ils nous disent comment mieux s'organiser pour mieux gérer la dépense publique. Et enfin je pense que les petits hôpitaux de proximité doivent être maintenus pour faire de la médecine de proximité, et notamment je suis favorable à la création de dispensaires de proximité pour que l'état sanitaire de la population...
Arlette Chabot
Qui permet le respect à la désertification médicale...
Ségolène Royal
Oui, et puis surtout là aussi de faire de la prévention, si les gens sont mieux soignés en amont, la médecine coûtera peut-être moins cher en aval.
Arlette Chabot
Voilà pardonnez-moi, alors monsieur Richard aurait plein de choses à nous dire, juste poser un problème du logement qu'on n'aura pas le temps de traiter totalement mais voilà pardonnez-nous, on fait court.
Richard
Oui bonsoir mesdames, bonsoir madame Royal, je vais faire très vite, j'ai été licencié en 2006, j'ai retrouvé un travail en 2007, j'ai déménagé et j'ai fait 700 km pour reprendre ce travail et parallèlement au travail repris, j'ai eu les plus grosses difficultés à trouver un logement puisque étant en CDI avec période d'essai aucune agence immobilière ne me louait un appartement même avec le système Loca-Pass parce que c'est un système pour que les assurances ne prennent pas au niveau des loyers et parallèlement à ça, on reprend une activité et j'ai perdu 30 % par rapport à mes annuités Assedic. Je voulais savoir ce que vous comptez faire après l'élection, si vous êtes élue par rapport à ces soucis là.
Arlette Chabot
Très court pour avoir le temps de terminer tranquillement l'émission, pardonnez-moi.
Ségolène Royal
C'est un problème extrêmement aigu, même dramatique parce que l'accès au logement, c'est ce qui conditionne tout le reste, c'est ce qui conditionne le droit d'avoir une vie de famille, une vie digne, et donc la situation s'est beaucoup dégradée en France, donc il faut reprendre et respecter le programme des 20 % de logements sociaux, je ne sais pas si vous relevez du logement social mais le problème c'est que ça crée une telle tension, comme il n'y a pas de logement social, il y a une tension supplémentaire sur le marché du locatif. Deuxièmement ce que je souhaite faire, c'est mettre en place un service public de la caution puisque vous avez déménagé et vous avez déboursé j'imagine trois mois de loyers en plus.
Richard
Qui ne fonctionnera pas dans l'état actuel puisque les assurances qui garantissent les loyers impayés ne fonctionnent pas avec la caution de l'Etat ou de Loca-Pass, il faut qu'une...
Ségolène Royal
Non c'est un dispositif nouveau que nous allons mettre en place avec...
Richard
Donc avec une caution physique...
Ségolène Royal
Avec une caution physique, il y aura un service public de la caution pour que les locataires n'aient plus à débourser trois mois de loyer avant d'entrer dans les lieux entre la caution, les frais d'agence, plus l'assurance sur les impayés de loyer en cas de difficultés d'emploi. Et enfin je ferais et j'en es la ferme volonté, je vais autoriser les communes à faire des réquisitions acquisitions des logements vacants, parce que s'il y a une pression sur le marché du locatif c'est parce qu'il y a dans certaines grandes villes 20 %, vous m'entendez, 20 % de logements spéculatifs vacants. Eh bien avec moi les communes pourront réquisitionner ces logements et pourront les remettre sur le marché du locatif et enfin les loyers seront réglementés. Nous allons suivre les choses par rapport à l'évolution du coût de la vie...
Arlette Chabot
On dit un bouclier logement c'est ça, un bouclier.
Ségolène Royal
C'est ça.
Arlette Chabot
C'est-à-dire ?
Ségolène Royal
C'est-à-dire que l'objectif c'est de faire en sorte que pas plus de 20 à 25 % du revenu soit consacré au loyer.
Richard
Excusez-moi juste très rapidement, j'entends bien que vous nous dites mais par rapport aux soucis qu'il y a entre les indemnités Assedic et la reprise de travail comme je vous l'ai dit, indemniser, si j'étais resté au chômage pendant 22 mois, j'aurais pu très bien le faire si je n'avais pas été citoyen, le fait de reprendre une activité salarié, les Assedic ne font pas de compensation entre mon nouveau salaire, donc je prends un salaire 30 % moins cher que les Assedic sans aucune aide de l'Assedic, rien, ni pour ça, ni pour un déménagement payé dans le cadre des Assedic.
Ségolène Royal
Cette question est énormément remontée dans les débats participatifs, et là aussi au niveau de la présidence de la République, le principe que je pose et que j'ai écrit, dans ce pacte que je veux nouer avec les Français, c'est que personne ne perde de l'argent lorsqu'il se remet à travailler, lorsqu'il passe d'un revenu de substitution de soutien au revenu du travail qu'il n'y ait pas de perte, de rémunération, autrement dit que l'on puisse glisser les choses, cumuler les choses dans un certain délai bien évidement pour qu'il y ait une incitation à reprendre le travail. Donc cette question là fera partie aussi de la conférence sur les revenus et la croissance et sera mise sur la table puisqu'il y a aussi le problème des érémistes, les gens qui sont au RMI, qui retrouvent un travail, qui perdent tous les avantages et donc qui sont découragés pour retravailler puisqu'ils gagnent moins en travaillant que quand ils sont au RMI, ça c'est l'assistanat et je n'en veux plus.
Arlette Chabot
C'est très fréquent, donc il y a une possibilité de cumuler au moins pendant une période, ou dans une certaine proportion.
Ségolène Royal
C'est ce qui sera fait pour que les gens aient intérêt à retrouver un travail parce que je ne veux pas d'une société d'assistanat. Je veux au contraire inciter chacun à maîtriser sa vie, à retrouver sa dignité, à revaloriser le travail et dans votre cas bien évidement il est absolument anormal qu'en retrouvant une activité professionnelle, on perde une partie de sa rémunération.
Arlette Chabot
En vous demandent une petite réponse de trente secondes, je ne résiste pas quand même à la tentation de vous demander, le travail c'est une valeur de droite ou de gauche, parce Nicolas SARKOZY met la valeur travail au centre de son projet, donc vous avez la même valeur, est-ce que c'est normal, une valeur de droite et de gauche ?
Ségolène Royal
Ca dépend comment on la conçoit vous savez...
Arlette Chabot
Mais c'est une valeur de droite et de gauche sans rentrer dans le détail, droite ou gauche ? J'aurais pas du la poser la question...
Ségolène Royal
C'est une valeur mais la différence entre ce que je dis et ce que fait Nicolas Sarkozy, c'est que je pense que la précarité a détruit la valeur travail. Je pense que ce sont les bas salaires qui détruisent la valeur travail.
Arlette Chabot
C'est une valeur de gauche le travail.
Ségolène Royal
Non, non parce que quand comme lui on défend la précarité et qu'on veut généraliser le contrat nouvelle embauche qui est finalement une autre forme du CPE, je pense que l'on détruit la valeur travail. Ce qui détruit la valeur travail, c'est le chômage et c'est pour cela que ce sera mon combat principal.
Arlette Chabot
Toutefois vous vous êtes fait piquer le truc quand même, la gauche s'est fait piquer la valeur travail ?
Ségolène Royal
La gauche doit défendre la valeur travail et c'est une de ses valeurs fondamentales, c'est une valeur de gauche fondamentale. Pourquoi c'est une valeur de gauche fondamentale ? pas au sens de la polémique politicienne, mais parce que...
Arlette Chabot
Non, non ... valeur, c'est pour ça que je posais la question.
Ségolène Royal
Mais parce que ce qui est au coeur du combat de la gauche, c'est la dignité de l'être humain, c'est que toute décision politique doit être vue au travers d'une seule question, est-ce que la décision que je prends améliore oui ou non le progrès social pour chacun et le respect pour tous ? Est-ce que oui ou non la décision politique que je prends en tant que chef de l'Etat fait avancer la France dans ce sens là et est-ce que oui ou non, je réconcilie la solidarité et l'efficacité économique ? Si c'est oui, alors je prends cette décision. Si c'est non, alors je ne prends pas cette décision.
Arlette Chabot
Dernière question web cam avant de se quitter, voilà.
Djamel, commerçant
Nicolas Sarkozy est favorable au financement de la construction des mosquées par l'Etat, si vous étiez élue demain présidente de la République y seriez-vous, vous aussi favorable ?
Ségolène Royal
Non, je pense qu'il ne faut pas modifier la loi de 1905. Je pense en revanche qu'il faut que chaque personne puisse pratiquer son culte dans des conditions dignes, et qu'aujourd'hui c'est vrai que l'exercice du culte musulman dans des caves n'est pas digne pour certaines personnes et je pense que ce problème là doit être réglé, mais il y a d'autres façons de le faire, qu'en modifiant la loi de 1905.
Arlette Chabot
Donc pas de financement public des mosquées comme...
Ségolène Royal
Je pense que ce n'est pas une bonne solution.
Arlette Chabot
Même parce qu'on dit financement étranger, ce n'est pas souhaitable.
Ségolène Royal
Mais il y a d'autres façons de le faire et d'ailleurs vous aurez observé que de nombreuses municipalités aident à la construction d'édifices en donnant des terrains, en subventionnant les associations culturelles qui accompagnent etc et je pense aussi qu'il faudra regarder la question des carrés musulmans dans les cimetières parce que cette question là aussi doit être réglée avec dignité.
Arlette Chabot
Je vous remercie, dernière étape, vous allez signer les engagements que vous prenez ce soir devant les Français, c'est-à-dire qu'on vous les reproduira trop souvent si vous êtes élue, et on vérifiera si vous les tenez. Si vous le voulez bien...
Ségolène Royal
D'ailleurs vous avez vu que dans la démocratie participative que je vais mettre en place dans le cadre de la réforme des institutions, je rendrais des comptes et donc les citoyens pourront vérifier que ma parole sera tenue.
Arlette Chabot
Alors il y aura une trace écrite ce soir, attention en allant rejoindre le pupitre, voilà on y va. Vous avez inscrit, je vous explique comment on signe, c'est un peu compliqué. Voilà on va lire ensemble les sept engagements que vous prenez ce soir devant les Français, donc il y a soutien scolaire individuel gratuit dès la rentrée de septembre, je crois qu'on l'a bien compris dans tous les collèges, les lycées. Le gagnant gagnant, pacte avec les entreprises contre le chômage...
Ségolène Royal
On l'a expliqué aussi tout à l'heure.
Arlette Chabot
On l'a expliqué. Un euro dépensé doit être un euro utile.
Ségolène Royal
Ca c'est la lutte contre les gaspillages.
Arlette Chabot
Gaspillage, c'est un mot qui est très important pour vous ça.
Ségolène Royal
Oui parce que je pense que les Français attendent cela, ils ont le sentiment que s'il y a de la dette c'est parce qu'il y a des gaspillages, il n'y a pas que cela, bien évidement donc je pense qu'il faut faire très attention à la dépense publique.
Arlette Chabot
Alors négociations, donc on a dit immédiate pour protéger l'Europe contre les délocalisations, ça, ça veut dire que vous allez faire pression sur vos partenaires européens.
Ségolène Royal
Bien sûr et je crois que grâce aussi à l'appui sur les organisations de salariés, qui ont pris conscience de ces préoccupations là, je pense que les gouvernements d'Europe commencent à bouger parce qu'ils n'acceptent plus le déménagement des territoires, uniquement parce que dans les règles du commerce mondial, il y a les règles sociales et les règles environnementales qui ne sont pas suffisamment fermes. Donc ça c'est une vraie bataille politique.
Arlette Chabot
Alors arrêt immédiat des OGM en plein champ, il faut peut-être continuer quand même l'expérimentation en labo parce que ça peut être utile.
Ségolène Royal
Bien sûr, mais ça c'est un signal c'est parce que derrière il y a l'ensemble des décisions environnementales, écologiques que j'ai évoqué tout à l'heure. Donc c'est un signe.
Arlette Chabot
Alors la VIème République, ça c'est pour faire plaisir à Arnaud Montebourg.
Ségolène Royal
Non, parce que...
Arlette Chabot
Non, c'est pour faire plaisir aux Français, c'est pour faire des citoyens... D'un mot, c'est vrai que vous organisez un référendum si vous êtes élue à l'automne sur ces problèmes de réformes institutionnelles.
Ségolène Royal
Mais c'est cela je crois que les Français attendent d'une réforme institutionnelle en profondeur. Vous savez la France a changé, le monde a changé, la politique doit changer. Elle doit se rapprocher des citoyens, partir du réel, remettre de l'ordre juste dans le fonctionnement des institutions, donc il y a le nom cumul des mandats, il y a le pouvoir renforcé de contrôle par la Parlement, il y a la démocratie participative, il y a la démocratie sociale que j'ai évoqué tout à l'heure, bref il y a les trois piliers, la démocratie parlementaire, la démocratie sociale, je l'ai évoquée avec le dialogue social qui est producteur d'efficacité économique et la démocratie participative avec l'intervention des citoyens dans les décisions qui les concernent. Il y a bien d'autres choses sur la réforme des institutions.
Arlette Chabot
Donc référendum à l'automne si vous êtes élue ?
Ségolène Royal
Oui et je l'ai dit aussi...
Arlette Chabot
Consultation. On revote à l'automne.
Ségolène Royal
Il y aura un référendum sur la réforme des institutions avec la part de régionalisation qu'on a évoqué tout à l'heure pour rendre la dépense publique plus efficace et l'Etat impartial, mais ça nous l'avons évoqué en début d'émission.
Arlette Chabot
En début d'émission. Revalorisation vous avez dit dès juillet des petites retraites. Voilà, alors il n'y a plus qu'à signer, surtout vous n'appuyez pas sur le petit bouton, contrairement à ce que l'on pourrait croire, pardonnez-moi de donner ce problème technique, mais il faut que ça marche, voilà vous signez ces engagements en mettant voilà Ségolène Royal, la date d'aujourd'hui nous sommes donc le 15 mars 2007. Voilà on vous remerciant madame Royal. Pour terminer, je voudrais vous demander, je crois que vous aviez confié à Bernard-Henry Levy quand vous avez dîner avec lui que vous aviez souvent dans la poche un livre, c'est ça ?
Ségolène Royal
Ah non.
Arlette Chabot
Contemplation, Victor Hugo, c'est vrai ou pas ?
Ségolène Royal
C'est possible, vous êtes au courant...
Arlette Chabot
Non, non mais attendez, c'est passé public, ce n'est pas une indiscrétion, ça a été publié dans un journal.
Ségolène Royal
Ce n'est pas le seul livre que je lis bien sûr.
Arlette Chabot
Vous avez des livres de chevet, des livres que vous retrouvez régulièrement ?
Ségolène Royal
D'une façon générale j'aime beaucoup lire la poésie, c'est vrai.
Arlette Chabot
C'est vrai ?
Ségolène Royal
C'est vrai.
Arlette Chabot
Et Victor Hugo ce n'est pas celui que vous détestez le plus. C'est ça.
Ségolène Royal
Voilà exactement pour pleins de raisons.
Arlette Chabot
Pourquoi ? pleins de raisons parce que vous l'avez découvert quand vous étiez très jeune au lycée ?
Ségolène Royal
Oui sur son oeuvre, sur sa vie, sur son engagement, sur sa vision de l'univers, de l'humanité et ça reste très actuel, très profond. Et je crois qu'en politique comme il faut prendre son temps, avoir des pauses, savoir méditer, savoir réfléchir, rien n'est mieux que la poésie, que la lecture de Victor Hugo, mais ça peut être d'autres auteurs.
Arlette Chabot
Merci en tout cas d'avoir accepté notre invitation. On se retrouvera tout au long de cette campagne.
Source http://www.desirsdavenirs.org, le 20 mars 2007