Texte intégral
Merci d'être présents aussi nombreux.
Je voudrais adresser un merci particulier aux jeunes et vous demander des applaudissements particuliers pour une dame qui est présente parmi nous et qui a 87 ans.
Je voudrais vous dire combien je suis sensible à votre présence et remercier ceux qui se sont exprimés avant moi : le responsable de cette fédération, Yves Porteix, Jean-Marie Cavada, qui a ouvert la réunion, ainsi que Yvan Lachaud, député du Gard, député de Nîmes, selon ses propos.
C'est un moment très chaleureux, très émouvant que nous sommes en train de vivre. Je suis particulièrement heureux de le vivre à Perpignan, avec vous, car, entre les Béarnais et les Catalans, il existe une très vieille et très profonde histoire qui nous a permis d'être ce que nous sommes.
Vous ne savez pas peut-être, mais cela vous rappellera des choses, que nous sommes, nous, la Catalogne et le Béarn, des pays de très vieille démocratie. Naturellement, l'histoire officielle ne le dit pas, mais nous sommes des pays de très vieille démocratie, à telle enseigne que le Béarn a une constitution écrite, naturellement en béarnais, depuis le XIème siècle.
Cela signifie qu'il y a 1 000 ans qu'est apparue la première constitution écrite, qui n'était pas une constitution retardataire, mais une constitution extrêmement moderne et la première. C'est toujours dans les pays de montagne que les démocraties naissent. C'est une notion qui mérite méditation.
La première, sans doute, des démocraties écrites s'appelait les Fors de Béarn et commençait en racontant l'histoire suivante : "Ici, vous allez lire les Fors de Béarn", pays où, autrefois, il n'y avait pas de roi.
Il s'agit, vous le voyez, d'un peuple qui, dès son origine, explique que la légitimité ne vient pas d'en haut, mais d'en bas. Cela nous rappelle des idées contemporaines.
Puis, un jour, les Béarnais se sont aperçu que ce n'était pas facile de vivre sans autorité, que c'était un peu l'anarchie. Alors, ils ont donc décidé de se doter d'un souverain et ils ont commencé des démarches pour trouver un souverain.
Ne voyez aucune intention politique dans ce que je vais vous raconter, il s'agit uniquement de la démocratie, les Fors de Béarn, écrite il y a 1 000 ans.
Leur première démarche a été de se rendre en Auvergne pour demander à un prince auvergnat de devenir roi, en tout cas souverain de Béarn. Puis, le souverain est arrivé, il a été installé sur le trône et, au bout d'un certain temps, comme il n'a pas respecté les droits du peuple, ils lui ont coupé la tête.
Oublions ce désagrément !
Giscard d'Estaing détestait quand je racontais cette histoire devant lui ! Je ferme la parenthèse, c'était en des temps très anciens.
Après, ils sont allés en Bigorre, du côté de Lourdes pour chercher un souverain. Ils l'ont trouvé, l'ont installé sur le trône, mais, comme le souverain n'a pas respecté les droits du peuple, ils lui ont coupé la tête.
Ne voyez aucune allusion politique dans ce que je raconte !
Philippe Douste-Blazy détestait quand je racontais cette histoire.
Après, ils ont entendu dire que, là-bas, à l'autre bout de la chaîne des Pyrénées, en pays catalan, un roi avait eu deux jeunes princes jumeaux. Ils ont envoyé une délégation pour lui dire : "Puisque vous avez deux jeunes princes et qu'ils ne pourront pas régner tous les deux, vous pourriez peut-être nous donner l'un d'entre eux pour qu'il soit notre souverain".
Les députés de Béarn sont venus en pays catalan, le souverain les a reçus et leur a présenté...
Tout cela, c'est l'introduction des Fors de Béarn, la constitution écrite au XIème siècle que je cite à peu près mot à mot.
Alors, ce souverain leur a présenté ses deux jumeaux en disant : "J'accepte, choisissez celui que vous voulez et, disent les Fors du Béarn -et je vous demande de vous en souvenir-, deux jumeaux étaient devant eux, deux jeunes princes magnifiques, comme tous les Catalans le sont, endormis dans leur berceau. L'un avait les points fermés et, l'autre, les mains ouvertes. Ils ont choisi celui qui avait les mains ouvertes et il est devenu souverain du Béarn. Il a créé la dynastie du Béarn et, après, est venu Gaston Febus, puis Henri IV.
C'est le Béarn que vous avez devant vous et qui vous remercie de nous avoir offert un prince avec les mains ouvertes.
Ceci n'est, ni inventé, ni exagéré. Je n'ai pas ajouté une ligne, j'en ai plutôt retranché, à l'histoire qui a fondé, en tout cas c'est ce que l'on dit, le mythe du pays d'où je viens.
J'ai toujours pensé à cette histoire en pensant à vous, toujours pensé qu'il y avait, entre nous, au deux bout des Pyrénées, ce lien d'affection, de tendresse, de reconnaissance qui fait les grandes aventures humaines.
C'est une occasion de dire, car je n'aurais peut-être pas l'occasion d'y revenir après, à ceux qui, en France, sont des Jacobins, complètement stricts et décidés à tout centraliser qu'ils se trompent lorsqu'ils veulent ignorer les trésors que représentent les identités régionales de la France.
Ils se trompent lorsqu'ils croient que les langues régionales sont les ennemis de l'unité de la France. Je crois exactement le contraire. Je pense que les peuples vivent mieux ensemble lorsque chacun sait qui il est. Les femmes et les hommes vivent mieux ensemble lorsque chacun est fier de son identité.
Il est mieux pour un peuple d'assumer tous ses trésors et toutes ses richesses et il n'est pas vrai que l'on parle moins bien une langue lorsque l'on a, par ailleurs, la chance d'en parler une deuxième, car celle de ses racines ou sa langue maternelle.
J'espère que personne ne dira que nous parlons moins bien le français, car nous parlons béarnais, pour moi, et catalan, pour vous.
Qui peut prétendre que l'on sent moins bien les nuances d'une langue lorsque l'on peut la comparer avec une autre ?!...
Je suis de ceux qui pensent qu'il faut défendre ce trésor que représentent pour nous, pour nos cultures, les langues, les identités et les cultures régionales et je suis pour que la France ratifie, car elle l'a déjà signée, cette Charte européenne qui demande à tous les pays de protéger les langues et cultures régionales et minoritaires.
Il se trouve -et je le dis du même mouvement, dans la même phrase, presque dans le même souffle- que j'aime la langue française, car c'est notre maison. Je la pratique, je l'écris, j'aime sa poésie, j'aime sa chanson, car elle chante et qu'elle a sa propre musique, qui diffère de toutes les autres langues romanes.
Cette langue française chante pour nous, mais nous pouvons adorer la langue française et aimer les langues de nos racines. C'est pareil et, d'ailleurs, si vous y réfléchissez une seconde, le combat pour la diversité culturelle que nous, Français, conduisons -et nous avons raison de le faire- qui a bien raison de dire à l'anglais, ou plus exactement à l'anglo-américain ou à cette espèce d'epéranto moderne que l'anglo-américain représente, baragouiné un peu différemment dans tous les pays, sur tous les aéroports de la planète et dans toutes les salles de réunion de tous les milieux d'affaire de la planète -c'est devenu un passeport international- que nous voulons résister à ce rouleau compresseur. Ce n'est pas car nous sommes minoritaires, nous, la France et la francophonie au travers du monde, que nous devons disparaître et nous coucher.
C'est le contraire ! C'est car nous sommes minoritaires que nous devons nous battre, défendre l'identité et la force de notre langue.
Je voudrais que nous réfléchissions à cela : c'est vrai du français face à l'anglo-américain, tout comme cela l'est pour les langues de France face à la langue française. Il faut les défendre comme une richesse.
C'est la diversité culturelle vers le haut et c'est la diversité culturelle vers le terrain, vers la France profonde. Nous avons besoin, nous tous, ensemble, d'accepter nos différences, d'aimer nos identités, d'aimer nos différences et de considérer que c'est ensemble que nous allons conjuguer ces différences pour faire la France de toutes nos forces.
Je suis très sensible à votre présence et à votre grand nombre, sachant que nombre d'entre vous n'ont pu entrer. Si nous sommes, là, tous ensemble, c'est évidemment parce qu'il se passe quelque chose de très important dans notre pays.
Il y a des semaines et des mois que nous disions, que je disais, parfois dans le scepticisme général, que ceux qui croyaient que le scénario de cette élection était écrit à l'avance se "mettaient le doigt dans l'oeil jusqu'à l'omoplate" et qu'ils ne connaissaient pas le peuple français. Ils ne connaissaient pas bien la situation de la France.
Ils ne connaissaient pas le peuple français, car ce dernier est, en fait, le peuple le plus démocratique de la planète, l'un de ceux qui a la plus longue expérience de ce que République et démocratie veulent dire.
C'est un peuple qui pense profondément ce qui est écrit dans sa constitution, à savoir, je cite la phrase, que "la souveraineté appartient au peuple qui l'exerce directement ou au travers de ses représentants".
Ceci est le texte de la constitution.
C'est le peuple souverain qui commande dans la République française et, chaque fois que se développe une tentative ou une manoeuvre pour lui arracher sa souveraineté, pour lui expliquer que ce n'est pas la peine qu'il veuille se mêler d'une élection, que le résultat est joué à l'avance, le peuple français, tout d'abord, se tait, baisse les yeux et, après, se redresse, car il est décidé à montrer de quel "bois il se chauffe".
C'est exactement ce qui s'est passé pendant les mois que nous avons vécu dans lesquels, et vous vous en souvenez, il n'était question que du résultat fabriqué à l'avance de cette élection.
Il se trouve, de surcroît, que cette élection et son résultat fabriqué à l'avance étaient prévus pour un pays qui avait toutes les raisons de se sentir amère de la manière dont il était gouverné depuis vingt-cinq ans.
Nous sommes un pays qui a des raisons de demander des comptes à ses gouvernants. Nous sommes un pays qui a toutes les raisons du monde de dire : "Mais, enfin, nous étions, il y a vingt-cinq ans, le pays le moins endetté de tous les pays développés. Qu'avez-vous fait de notre liberté ?"...
Vous nous laissez, aujourd'hui, une dette qui est telle que tous ceux qui sont présents aujourd'hui, ces garçons et ces filles, vont avoir à travailler toute leur vie pour la rembourser et cela va peser lourd sur leurs épaules.
"Qu'avez-vous fait de notre liberté et de notre équilibre ?"... Ils ont raison de poser cette question. Nous étions le pays qui avait l'Éducation nationale la plus admirée et la plus enviée de tous les pays de la planète et, partout dans le monde, on demandait que s'ouvrent des lycées français, partout dans le monde, on venait chercher dans nos universités le prestige de la formation intellectuelle française.
Je ne jette la pierre à personne, car je connais les raisons si compliquées ayant fait que nous constatons aujourd'hui des taux d'échec ne correspondant pas à ce que devrait être l'image de la France.
Notre pays a, aujourd'hui, le taux de chômage le plus élevé des pays développés du même genre que le nôtre. Or, ce taux de chômage devrait, normalement, remettre en cause les politiques que nous suivons.
Savez-vous que, ces jours-ci, une polémique est en train de se développer, car, paraît-il, les services officiels ont reçu ordre de ne pas publier les vrais chiffres du chômage et de continuer à faire croire à notre pays que nous n'avons que 2 millions de chômeurs, alors que tout le monde sait que nous en avons entre 4 et 4,5 millions ?!...
Savez-vous, par exemple, que les deux tiers des RMIstes français ne sont pas décomptés dans les statistiques du chômage ?!...
Quel est ce pays qui refuse de voir que les RMIstes sont, d'abord et avant tout, des chômeurs, d'abord et avant tout des personnes qui retrouveraient leurs forces et leur dignité si nous les aidions ou si nous les poussions parfois à retrouver un travail, un emploi, pour qu'ils soient simplement autonomes, libres, indépendant comme toutes les femmes et tous les hommes, en tout cas comme toutes les familles devraient l'être ?!...
Nous avons toutes les raisons de poser ce genre de questions, car l'exclusion frappe des millions de personnes parmi nos compatriotes, de même que le sentiment d'échec, qui est celui de beaucoup d'entre nous.
Personnellement, je ne "jette pas la pierre" à ceux qui échouent. Je n'aime pas que, dans certains meetings, on siffle ceux qui, paraît-il, ne se lèvent pas le matin et qu'on leur oppose ceux qui, au contraire, font "l'effort" de travailler, de se lever le matin. Je sais que c'est un effort de travailler, mais, en même temps, c'est un accomplissement et je peux vous dire ceci, sans crainte d'être démenti : de nombreux RMIstes aimeraient se lever le matin pour avoir un bon travail et accomplir leur destin d'homme et de femme, de citoyens français.
Je ne crois pas que les chômeurs et les RMIstes soient les principaux responsables de leur situation. Je crois qu'il faut les regarder en pensant qu'ils aimeraient beaucoup s'en sortir, mais que l'on ne leur offre pas la deuxième ou la troisième chance qui, seule, leur permettrait de se rattraper aux branches lorsqu'ils ont connu un échec et cela arrive très vite, l'échec.
Pensez à ce qui se passe autour de vous : vous perdez votre emploi, votre couple se brise, car c'est très souvent comme cela aujourd'hui, et vous vous retrouvez tout seul, puis vous arrivez en fin de droits, puis vous avez le surendettement sur les épaules et vous n'osez plus sortir de chez vous, car vous n'osez plus affronter le regard de ceux qui ont des points d'interrogation dans les yeux et se demandent ce que vous faites dans la vie, ni même, parfois, celui de vos enfants.
J'estime que c'est une situation si lourde à porter que la société ne doit pas s'en désintéresser et, en tout cas, pas considérer celles et ceux qui en sont frappés comme des boucs émissaires.
Je veux une société où l'on s'adresse à eux, pas seulement en leur tendant la main pour leur faire le petit chèque du RMI à la fin du mois, mais en leur offrant la possibilité de trouver un travail ou une activité au service de la société qui leur permettra, pas seulement de s'en sortir, mais de se remettre debout et de retrouver confiance en eux.
C'est de la solidarité et cela permettra à la République de penser que, lorsqu'elle écrit "Liberté, égalité, fraternité", elle ne se trompe pas, elle exprime sa véritable nature.
Nous avons donc cette situation devant nous, ces échecs multipliés depuis vingt-cinq ans et nous savons très bien comment cela fonctionne, à chaque alternance. Notre pays détient le record du monde des alternances. Nous sommes le seul pays dans le monde où chaque élection, sans exception depuis vingt-cinq ans, a conduit à "virer" ceux qui étaient en place pour les remplacer par ceux qui étaient en place la fois d'avant.
C'est ce que nous appelons l'alternance en France : "Je prends les mêmes et je recommence". C'est un roulement, ce n'est pas vraiment une alternance. Cela arrive depuis vingt-cinq ans et les Français savent très bien comment le jeu fonctionne.
Selon qu'il y aura une alternance la prochaine fois, la règle du jeu est très simple : ceux qui sont dans l'opposition refusent tout sans exception de ce que proposent ceux qui sont au Gouvernement et, lorsque les élections arrivent, ceux qui viennent d'être élus détruisent ce qu'avaient fait ceux qui étaient au pouvoir avant eux.
Cela fonctionne ainsi depuis vingt-cinq ans et c'est l'une des raisons principales pour lesquelles notre pays se trouve dans une impasse dont il n'arrive pas à sortir, mais je crois qu'il va en sortir pour la première fois en 2007 !
Il est probablement que cette phrase prononcée à cette tribune, il y a dix-huit mois ou un an, a ressuscité, de la part des citoyens et des observateurs, beaucoup de scepticisme, parce qu'ils auraient dit : "Ce que l'on nous propose là est un peu utopiste ou un peu idéaliste", mais un événement s'est produit auquel je vous invite à réfléchir et qui est celui-ci : dans le plus grand pays d'Europe, notre voisin, de l'autre côté du Rhin, l'Allemagne, il y a dix-huit mois, les citoyens, exaspérés par les mêmes jeux éternels, ont forcé les deux principaux partis, au lieu de se faire la guerre, à travailler ensemble et, naturellement, ces deux principaux partis, la CDU de Angela Merkel et le SPD du chancelier sortant Gerhard Schroeder, avaient fait toute la campagne électorale, en expliquant que, jamais, ils n'accepteraient de se retrouver attelés ainsi à la même charge, parce que leurs visions étaient incompatibles, les unes avec les autres.
Vous pouvez reprendre, aujourd'hui, les déclarations du PS et de l'UMP, ce sont exactement les mêmes, si vous les traduisez en allemand, que celles de la CDU et du SPD et, si vous traduisez en français les déclarations de la CDU et du SPD, vous allez trouver exactement mimétiquement les mêmes mots au cours des mêmes affirmations. Simplement, une fois que le vote du peuple allemand est passé, ils ont bien été obligés d'en tenir compte. Ils sont entrés dans le même gouvernement et ont fait une négociation sérieuse. Ils gouvernent ensemble depuis dix-huit mois et que constate-t-on ? Que l'Allemagne est en train d'obtenir les performances et le redressement le plus spectaculaire de toute l'Europe et, désormais, tout le monde se tourne vers eux, en disant : "Mais comment ont-ils fait ?"
Ils ont décidé de travailler ensemble au lieu de se faire la guerre et ce n'est pas autre chose que je propose à la France. Je veux vous dire pourquoi ce ne sont pas des bons sentiments. Je ne dis pas que je n'ai pas de bons sentiments, mais je ne suis pas du tout, en train, dans une élection présidentielle, de chercher à ce que les bons sentiments l'emportent sur les mauvais. Tant mieux si c'est le cas, mais ce n'est pas la vérité ou le profond de ce que je propose à la France.
Le profond de ce que je propose à la France est inspiré par cette réflexion : nous sommes dans un moment de crise profonde de l'histoire de notre pays. Cette crise profonde va nous obliger à des politiques courageuses, politique courageuse en matière de dette, politique courageuse en matière d'emploi, politique courageuse en matière d'éducation, politique courageuse en matière de retraite, politique courageuse pour reconstruire ce qui, peu à peu, s'est effrité, politique courageuse pour faire de la France un modèle parmi les nations, ce qu'elle a été et qu'elle n'aurait jamais dû cesser d'être, parce que c'est cela le devoir ou la vocation de notre pays, mais ce sont des politiques courageuses.
Quand il y a des décisions courageuses à prendre, naturellement, il faut les annoncer à l'avance et c'est ce que je fais tout au long de cette campagne électorale, particulièrement en refusant les promesses mensongères. Je m'en honore.
Quand des décisions courageuses doivent se prendre pour un peuple ou avec un peuple, les citoyens ont besoin d'une garantie. C'est que ces décisions sont d'intérêt général et non pas à l'avantage d'un clan contre l'autre. Ils ont besoin d'avoir la certitude que tous ceux qui vont avoir à réfléchir à la manière dont on redresse la France, leur gouvernement, leur président, leur parlent d'une manière qui n'est pas partisane ; ce n'est pas parce qu'il y a tel clan idéologique qui les inspire dans un sens contre tel autre dans un autre sens.
Ils ont besoin d'avoir la certitude de l'objectivité de ceux qui les conduisent et vont les entraîner dans le sens du redressement du pays. Ils ont besoin de savoir que c'est l'intérêt général qui commande et pas les intérêts de clans et les intérêts partisans. Cela, c'est le premier point.
Deuxième élément, quand un certain nombre des réformes que nous avons à conduire concernent l'organisation de notre démocratie et la place des citoyens de tous les courants de pensée dans cette démocratie-là... Je m'arrête un instant sur ce sujet. Voyez-vous, je suis frappé depuis longtemps par le fait qu'un très grand nombre de millions de Français ne sont pas représentés au Parlement, dans les institutions, à l'endroit où se prennent les décisions pour la République.
Si l'on fait la somme des voix obtenues, en 2002, par le candidat de l'UMP qui était Jacques Chirac et le candidat du PS qui était Lionel Jospin à l'époque, on arrive au maximum à 35 % des voix. Or, ils ont, à eux deux , 95 % des sièges à l'Assemblée Nationale. Ce n'est pas normal. Ce qui serait normal, c'est que tous les autres Français, les 65 % qui ne sont pas dans les 35 %, aient aussi leur mot à dire, qu'on les reconnaisse, qu'on salue leur légitimité, qu'on les écoute quand on prend les décisions, bref, qu'ils aient, comme citoyens et comme français, la place légitime qui devrait être la leur dans les institutions de la République.
Je dis cela pour tout le monde, y compris pour ceux que je n'aime pas ou que je combats depuis longtemps. Je me suis, toute ma vie, confronté au Front national ou à l'extrême-gauche, car leurs visions sont, pour les uns, offensantes pour une certaine idée que l'on se fait de l'Homme et de la Citoyenneté et, pour les autres, radicalement fausses.
Je me suis confronté, toute ma vie, à leurs visions, mais je dis : "Je ne suis pas de votre avis. Je considère que vous vous trompez, mais je vous reconnais le droit de défendre votre point de vue au sein du Parlement de la République française qui représente les citoyens. Je préfère vous affronter face à face et les yeux ouverts, que tout le monde sache quelles sont nos confrontations, que tout le monde sache où sont, pas seulement nos désaccords, mais également les chocs que nous pouvons avoir entre nous et ceci sera, pour les Français, une garantie d'authenticité des débats qui, en leur nom, prétendent examiner l'avenir et les décisions à prendre pour notre pays."
Je le dis d'autant plus, que j'ai siégé au Parlement européen. J'avais Le Pen d'un côté et Krivine de l'autre, ainsi que Arlette Laguiller naturellement. En quoi cela n'était-il pas pour faire des lois ? En quoi est-ce que cela nous empêchait d'examiner des textes ? En réalité, cela ne nous empêchait en rien d'adopter des lois, mais cela obligeait les forces démocratiques à se mettre d'accord entre elles sur un certain nombre de textes, à regarder ce qu'il y avait de juste dans l'approche des uns et des autres pour éviter que les extrêmes ne prennent la démocratie en otage.
Certains disent que c'est un embarras, moi, je dis que c'est un bien. C'est drôlement bien quand on oblige les grands courants démocratiques du pays à discuter ensemble, voire à négocier ensemble, pour améliorer ensemble les textes qu'on leur propose et représenter, au fond, la majorité démocratique du pays.
C'est pourquoi je sais qu'il faut que l'on arrête avec cette manière confiscatoire que l'on a eue de considérer le gouvernement et nos institutions en France. Vous croyez qu'aucun d'entre nous peut être fier quand il assiste, comme depuis des mois et des mois et des années, chaque fois qu'il y a une nomination, à voir nommer un copain, chaque fois un ami, chaque fois un affidé, chaque fois quelqu'un du camp, chaque fois quelqu'un du parti, chaque fois quelqu'un qui dépend de vous ; et ce n'est pas la compétence qui conduit aux fonctions, c'est le fait que vous êtes soumis à celui qui a tout le pouvoir entre les mains.
Ceci, ce n'est pas la République, ce n'est pas la démocratie. C'est une perversion que nous ne devons pas accepter en France et qui ne ressemble pas à la République. C'est terriblement dangereux. Je vous dis cela en une phrase, parce que, au fond, ce qui s'installe dans l'esprit des jeunes, ceux qui entrent, par exemple, dans la Fonction publique, ceux qui ont l'ambition légitime de faire une carrière au service de la République et au service de l'Etat, c'est que ce n'est pas la compétence qui fait les carrières ni la justesse de pensée, mais d'aller s'embaucher le plus tôt, le plus vite possible dans le parti dont on croit qu'un jour il va vous nommer aux responsabilités.
Eh bien, ceci n'est pas sain. C'est une atteinte à l'esprit civique. C'est la culture du piston au sommet de l'Etat. Moi, je veux enlever la culture du piston du sommet de l'Etat et je la remplacerai par l'impartialité de l'Etat et l'impartialité de l'Etat est l'impartialité de la République.
C'est une vision de salubrité publique, notamment pour la magistrature, pour l'indépendance de la justice, si nécessaire et, aujourd'hui, tellement mise à mal, pour les grandes fonctions et pour les corps de contrôle. Vous trouvez normal que le Conseil constitutionnel ou le Conseil supérieur de l'audiovisuel soient entièrement entre les mains d'un seul parti qui, au lieu d'être arbitre, est, en fait, partie prenante dans la manière dont fonctionnent nos institutions ?
Ce n'est pas juste et ce n'est pas bien. Nous devons corriger tout cela, pour être un grand pays parce que, naturellement, quand on est dans cette situation, on ne prend pas les bonnes décisions. Par exemple, on doit rendre au Parlement, qui représente les Français, la place légitime qui doit être la sienne lorsque des décisions se prennent.
Vous croyez que l'on n'a pas honte ? Regardez les parlementaires ; Il n'y en a pas un, si vous lui posez la question, entre quatre yeux, qui vous dira qu'il a l'impression de servir à quelque chose quand il est au Parlement.
Songez que l'on a pris la décision de privatiser les autoroutes françaises, décision que j'ai combattue jusqu'au bout du bout, en Conseil d'Etat, alors que tout le monde savait qu'elle allait se transformer en "pompe à cash" comme disent les boursiers. On a pris cette décision sans même que le Parlement, qui représente les Français qui avaient construit les autoroutes grâce à leurs impôts et grâce à leurs péages, soit même consulté pour savoir s'il fallait ou pas prendre une décision de cet ordre.
On a refusé de le faire et les choses sont telles en France qu'ils ont prétendu, devant le Conseil d'Etat, que les autoroutes n'appartenaient pas à l'Etat, n'appartenaient pas aux Français. Vous parlez ! C'est l'Etat qui a pris la décision de les privatiser et c'est l'Etat qui a touché les sous.
Expliquez-moi en quoi on pouvait soutenir que ce n'était pas l'Etat qui était propriétaire. C'est comme cela. On n'a pas voulu faire de vagues. Eh bien, moi, je considère qu'il y a des moments où il faut faire des vagues pour défendre les Français.
Songez que la décision la plus lourde de conséquences que je connaisse pour l'avenir de l'Europe, c'est-à-dire l'ouverture des négociations d'adhésion de la Turquie à l'Union européenne qui valent engagement d'adhésion si les conditions sont remplies, a été prise sans même que le Parlement français ait le droit de s'exprimer par un débat sérieux ou par un vote sur une décision d'une telle importance. On a interdit au Parlement de s'exprimer, même par un voeu, même par un texte qui aurait dit : "Voilà ce que nous souhaitons".
Quand je suis monté à la tribune pour demander que l'on fasse ce qui se fait dans toutes les démocraties de la planète, le président de l'UMP de la Commission des lois, qui est actuellement Garde des Sceaux, qui s'appelle M. Clément, m'a répondu que celui qui demandait un débat sur un tel sujet voulait, en réalité, la mort de la Vème République.
Eh bien, si, la Vème République, c'est l'interdiction pour le Parlement qui représente les citoyens de s'exprimer sur le sujet le plus fondamental de notre avenir européen, alors, oui, je dis qu'il faut changer la Vème République, nos institutions et rendre au Parlement la parole, son importance et sa légitimité.
Étonnez-vous, après cela, de voir vides les bancs de l'Assemblée Nationale, ce qui est un scandale aux yeux de beaucoup de Français. Étonnez-vous de ce qui se passe. Savez-vous -j'ai presque honte de vous raconter cette histoire- que lorsque l'on a examiné à l'Assemblée Nationale le texte du futur traité constitutionnel qu'on allait soumettre au référendum des Français, présenté par Giscard d'Estaing qui en avait été le principal rédacteur -et naturellement il attendait que ce fut un événement- un mercredi après-midi à 16 heures -ce n'était pas une séance de nuit, le samedi soir... c'était le moment précis où, à cause des questions d'actualité et de la télévision qui permet à leurs électeurs de les pister vaguement pour savoir s'ils sont là où pas- où, en principe, il y a le plus grand nombre de parlementaires présents, mais, au bout des deux heures qu'a duré le débat, sur 577 députés, il en restait 17 présents en séance pour examiner le texte le plus important de la République ?!
On en est là, mais ne vous trompez pas, il faut toujours rechercher les causes pour comprendre les conséquences. C'est parce qu'on leur a donné le sentiment, on leur a introduit à l'esprit la certitude que le Parlement ne servait à rien, que la tribune ne servait à rien et que, pour rester député, il valait beaucoup mieux être dans sa circonscription à aller couper des rubans ou participer aux foires agricoles.
C'est comme cela que l'on a détruit, peu à peu, l'esprit de la République, en vidant le parlement de son sens. Moi, je suis pour lui rendre ses prérogatives. Je suis pour que, de nouveau, il puisse fixer son ordre du jour, que, de nouveau il ait le moyen de contrôler le gouvernement. Je suis pour qu'aucun député ne puisse être réputé votant, s'il n'est pas présent dans l'hémicycle, ce qui est, après tout, la règle au Parlement européen, sachant que vous pouvez vérifier, sur le site Internet, si vos députés sont présents, s'ils votent et ce qu'ils votent à chaque vote, sur chaque amendement.
De surcroît, bien que cela ne joue naturellement aucun rôle dans leur présence, s'ils ne votent pas, on ne les paie pas. Loin de moi l'idée que cette dernière raison soit un appui puissant à la présence générale pour les votes, mais je veux que le Parlement retrouve sa dignité.
Le président de la République est garant des institutions. Il doit donc assumer l'image des institutions auprès des citoyens, parce que c'est un motif de scandale perpétuel auprès de ceux-ci, la manière dont sont organisés les travaux du Parlement, la manière dont les bancs sont vides, la manière dont on a l'impression que ce ne sont pas les vrais débats qui sont en cause.
Je veux leur rendre leur dignité tout simplement. Je veux que l'on applique ce que l'on apprend, dans les cours d'éducation civique, à tous les gamins de l'école primaire et, ainsi, comme vous le sentez, c'est bien, en effet -je vais employer un grand mot- d'une révolution civique dont il s'agit, afin que les citoyens s'y retrouvent, que, de nouveau, ils comprennent et qu'ils soient fiers de la manière dont la démocratie et la République fonctionnent en France.
Donc, on va faire tous ces changements-là. On va changer les institutions, en rendant au Parlement français les pouvoirs qui sont ceux de tous les parlements de la planète, d'autant que, nous, nous avons un président de la République élu au suffrage universel. J'espère, au passage, qu'il aura de bonnes idées démocratiques et civiques, mais ce président de la République, élu au suffrage universel, investi de la confiance des Français, est là pour empêcher qu'il y ait des jeux parlementaires comme on en a connu autrefois et qui, en effet, ne permettent pas d'avancer à un pays comme le nôtre.
Je suis pour qu'il y ait un équilibre entre la fonction présidentielle qui assume la confiance des Français et les parlementaires qui sont là pour exprimer et représenter la volonté de leurs concitoyens sur tous les textes et toutes les lois et pour contrôler le gouvernement, lorsque celui-ci a besoin de l'être, pour que l'on sache, par exemple, que l'argent public est bien dépensé et bien utilisé dans notre pays, et, croyez-moi, il y a beaucoup à faire de ce point de vue-là.
Vous voyez pourquoi on a besoin que chaque citoyen, quand on va voter ces institutions, ait la garantie que ce n'est pas fait au bénéfice des uns contre les autres. Par exemple, je suis pour que l'on instaure la moitié de proportionnelle aux élections législatives. Cela veut dire qu'il va falloir regrouper des circonscriptions.
Je n'ai pas envie qu'on se livre à un "charcutage" et les Français n'en ont pas envie non plus, même s'ils ont de la sympathie pour leur nouveau président, s'il est élu. Même s'ils ont de la sympathie et de la confiance, ils n'ont pas envie que les "charcutages" de circonscriptions se fassent pour avantager tel ou tel autre parti.
Ils ont besoin d'avoir la loyauté et l'impartialité de l'Etat. Cela ne peut se faire que si, dans le gouvernement chargé de cette réforme et de cette reconstruction, sont représentées les grandes sensibilités démocratiques du pays par des gens compétents, dévoués et décidés à reconstruire et à travailler ensemble au lieu de se disputer perpétuellement et d'exercer de l'arbitraire, là où il faut de l'impartialité.
Ne croyez pas que ce soit par volonté de générosité et d'apaisement -ce serait déjà pas mal-, par volonté de faire la paix entre les Français -ce serait déjà pas mal- que je plaide pour ce rassemblement, c'est car, dans l'état où est notre pays, les réformes qui sont à conduire exigent que les citoyens aient la plus absolue confiance dans l'objectivité et dans l'impartialité de leurs gouvernants et cela ne peut se faire que par le pluralisme. C'est pourquoi je défends ce dernier devant vous. Il s'agit d'une nouvelle démarche politique, une démarche de rassemblement pour redresser notre pays et le reconstruire.
J'en viens à la conclusion de ce propos. C'est naturellement ce qui fera l'immense travail que nous avons à conduire. Je prends les chantiers un par un que nous avons devant nous. Je ne laisserai pas le pays s'abaisser à augmenter perpétuellement ses déficits et sa dette.
Il faut que nous retrouvions l'équilibre des finances publiques. Je m'honore d'avoir été celui qui a introduit ce sujet dans le débat présidentiel, contre tous les observateurs et même contre un grand nombre de mes amis qui disaient : "François, est-ce vraiment un sujet pour attirer les électeurs ?"...
Personnellement, je pense que oui, car, après vingt-cinq années de laxisme et de dissimulations, le peuple français a besoin qu'on lui dise maintenant la vérité. Il a besoin de savoir que l'on va lui dire les choses telles qu'elles sont et, si elles sont dures, on lui expliquera ce qu'elles sont et pas lui mettre un bandeau sur les yeux. On va le placer devant ses responsabilités pour que, tous ensemble, nous prenions les bonnes décisions, en particulier pour nos enfants, pour les jeunes qui sont là et qui votent, pour les jeunes qui ne votent pas encore, pour les enfants, pour les bébés, pour ceux qui ne sont pas encore nés, car les décisions que nous allons prendre maintenant concernent les générations à venir et je suis heureux et fier que nous ayons, en effet, décidé d'être la voix, pas seulement de ceux qui votent, mais de ceux qui ne votent pas encore.
Comme nous allons essayer d'alléger un peu la dette financière qui pèse sur leurs épaules, nous allons également nous occuper de traiter de cette question lancinante des retraites qui, depuis si longtemps, nous menace, de par ce mouvement bienfaisant, qu'il faut saluer, selon lequel la vie humaine augmente sans cesse depuis des années et des années au rythme de... écoutez bien... un trimestre d'espérance de vie supplémentaire tous les ans.
Tous les quatre ans, nous tous, Français que nous sommes, nous gagnons une année d'espérance de vie supplémentaire, ce qui signifie que, chère madame qui avez 87 ans, nous viendrons fêter votre cent septième anniversaire dans cette salle et que nous serons là pour vous entourer et pour vous aider à souffler les bougies.
Parmi tous ceux présents aujourd'hui, forts comme des Catalans !, la moitié de ceux qui ont moins de cinquante ans deviendront centenaires. C'est une grande chance, naturellement, mais, en même temps, une grande charge, car...
(Mouvements divers.)
Vous ne voulez tout de même pas réduire le nombre des centenaires ! Ôtez moi d'un doute !...
(Rires.)
Nous avons choisi un système de retraite que l'on appelle par répartition. C'est un mot compliqué pour expliquer une idée toute simple : les retraites sont payées, chaque mois, par ceux qui travaillent. De ce fait, plus il y a de retraités, plus la charge qui pèse sur les épaules de ceux qui travaillent est lourde. Nous avions, au début des années 1950, cinq personnes qui travaillaient pour un retraité. Nous approchons aujourd'hui d'une personne et demie, seulement, qui travaille pour un retraité. Nous n'aurons, d'ici très peu de temps, plus qu'une personne qui travaille pour un retraité et nous sommes menacés d'avoir, si nous ne faisons rien, d'ici vingt ans, beaucoup plus de retraités que de personnes qui travaillent.
Eh bien, ceci, Mesdames et Messieurs, a une signification claire que j'exprime devant vous : soit les retraites s'effondreront et le pouvoir d'achat des pensions sera divisé par deux -c'est un scénario crédible auquel il faut que les retraités songent-, soit les charges qui pèseront sur les épaules de ceux qui travaillent seront telles que les emplois s'en iront de France, de même que les salariés et les emplois.
Nous nous retrouverions alors dans un système, non pas dangereux, mais diabolique dans lequel plus les emplois partiront, plus la charge augmentera sur ceux qui restent. Or, plus cette charge sera lourde, plus les emplois partiront. C'est le cercle vicieux absolu !...
Je prétends qu'il est non pas seulement du devoir ou de la vocation du prochain Président de la République, mais d'une obligation absolue, s'il veut être à la hauteur de la fonction qu'on lui confie, de venir devant les Français et de dire : "Mesdames et Messieurs, cette situation mérite que l'on y pense et que l'on prenne les décisions qui conviennent".
Je dis que je conduirai, avec les Français -je dis bien avec les Français-, une réforme des retraites qui équilibrera, une fois pour toutes, ces régimes qui sont aujourd'hui si profondément déséquilibrés.
Comment ferons-nous ? Je pense qu'il faut, à partir de l'âge légal du départ à la retraite, que chacun connaisse exactement la pension à laquelle il aura droit. Cette réforme concerne tout le monde, y compris les régimes spéciaux. Il est nécessaire que tous les Français aient la certitude que, désormais, les principes d'équité, de loyauté et d'égalité s'appliquent dans la réforme des retraites.
Il faut prendre en compte la pénibilité des retraites, car il est quelque chose que nous ne disons pas et qui est un terrible scandale, si l'on y songe bien : en France, partent à la retraite le plus tôt ceux qui ont l'espérance de vie la plus longue et partent à la retraite le plus tard ceux qui ont l'espérance de vie la plus brève.
Je suis obligé de vous dire -et je le dis d'autant plus que je suis moi-même un fonctionnaire et que je sais très bien comment fonctionne les régimes de retraite- que ceci n'est pas la justice. La justice idéale serait que partent à la retraite le plus tôt ceux qui ont l'espérance de vie la plus brève et partent à la retraite le plus tard ceux qui ont l'espérance de vie la plus longue.
Ce serait la justice, mais je ne demande même pas la justice, je demande l'égalité et que tout le monde se retrouve, naturellement en prenant le temps... Là, un certain nombre de régimes spéciaux commencent à frémir dans la salle, je les repère ! À leurs réflexions et aux points d'interrogation qu'ils ont dans les yeux...
Si nous voulons être un grand peuple, il faut nous dire des idées simples comme celle-là et cette réforme devra donc concerner tout le monde...
DE LA SALLE. - Les députés également !...
François BAYROU. - C'est une très bonne idée !
J'ai été avisé d'une décision qui n'a été rendue publique en aucune manière, prise par l'UMP et le PS en même temps à l'Assemblée Nationale : l'indemnité qui serait versée aux députés à la fin de leur mandat, qui était fixé à six mois, pour qu'ils retrouvent un travail, sera désormais allongée à cinq ans.
Eh bien, je considère que ceci n'est pas la justice et j'ai donc l'intention, si je suis élu Président de la République, de faire qu'une telle décision soit rapportée. Je le demanderai à l'Assemblée Nationale, je considère qu'il y a des moments, dans la vie, où l'on ne peut pas accepter que les privilèges s'additionnent aux privilèges.
Il faut que la République s'applique à tout le monde et, la République, c'est, en particulier, l'égalité et la solidarité.
Rassurez-vous, les députés n'ont pas des indemnités de cet ordre et c'est tant mieux, car, après tout, il faut qu'ils aient simplement une situation honorable. On ne devient pas riche en faisant de la politique ou, plus exactement, si quelqu'un devient riche en faisant de la politique, regardez-le du coin de l'oeil !
Autrement, ce n'est pas envisageable. C'est normal et je trouve que c'est bien.
Oui, il y a de nombreux manquements à l'égalité, vous avez raison de le dire. J'en profite, saluant les parlementaires qui sont là, pour vous dire que je salue, au premier rang, Jean-Jacques Jégou, sénateur du Val-de-Marne, et Jean Lassalle, député des Pyrénées-Atlantiques, qui vient de nous rejoindre et qui fait le tour de France avec nous, soirs après soirs.
C'est mieux, car, il y a un an, il était en grève de la faim. Je préfère le voir là !
Nous avons besoin d'une réforme des retraites juste et, pour être sûr que tout le monde considérera que la réforme des retraites est juste, j'ai décidé que je la soumettrai au moins à un référendum du peuple français.
Ne croyez pas, là encore, que ce soit uniquement pour de bons sentiments. C'est car, chaque fois que l'on annonce une réforme des retraites et que les Français ont l'impression que cette réforme sera décidée sans eux et contre eux, ils se crispent et expriment une espèce de sentiment de blocage généralisé du pays.
Il est légitime et normal que chaque Français ait la certitude que, s'agissant d'une décision essentielle pour son avenir, cette décision lui sera soumise et qu'il pourra exprimer, en tant que citoyen, son avis : "Oui ou non", pour savoir si c'est une bonne réforme.
Nous avons besoin d'inverser, c'est l'une de mes grandes idées, le jeu habituel de la politique. Ce jeu est le suivant : je me fais élire en faisant les promesses les plus avantageuse possibles, une fois que je suis au pouvoir, je considère que les promesses n'engagent que ceux qui les reçoivent et je fais ce que je veux avec l'espoir que, dans cinq ans, lorsque je reviendrai, tout le monde aura oublié les promesses que j'avais formulées au moment de l'élection, il y a cinq ans. C'est ainsi que la politique fonctionne en France depuis très longtemps.
Je propose d'inverser ce processus, car, pour avoir vécu tout cela, les Français en ont conçu une très grande défiance à l'égard de leurs responsables politiques et ils ont besoin de retrouver la confiance.
Je propose donc de faire le contraire : au lieu de faire des promesses, nous refusons d'en faire, au lieu de prendre des décisions en catimini, subrepticement, nous préparons les décisions avec les citoyens au vu et au su de tout le monde, au lieu d'imposer "que les Français le veuillent ou pas, ce sera comme cela", on soumet, au peuple qui gouverne, un référendum, autrement dit, on crée un climat de confiance qui donne au mot démocratie tout son sens. Ceci est également une révolution.
Si nous avions procédé ainsi, la dette n'en serait pas où elle en est, le déficit n'en serait là pas où il en est, le problème des retraites ne serait pas lancinant, nous ne serions pas devant ces questions impossibles à remuer depuis si longtemps. Notre pays aurait, comme les autres, trouvé son équilibre. C'est normal que nous agissions ainsi en France, car, après tout, notre pays a inventé la République depuis maintenant bien plus de deux siècles.
Il est temps de lui donner une nouvelle jeunesse, son printemps, un printemps républicain pour la France.
La dette, le déficit, l'emploi, l'exclusion, l'éducation, et je m'arrête une seconde sur l'éducation. Je vous parle d'éducation, car c'est la seule clé dont nous disposons si nous voulons que notre avenir soit à la hauteur de nos espérances.
Dans un monde de la mondialisation où la compétition est forte, un pays comme le nôtre, qui a un haut niveau de vie, des exigences sociales importantes, ne peut s'en tirer que s'il a compris que, le seul moyen de son succès ou de son progrès, c'est d'avoir le peuple et les jeunes les mieux formés de la planète.
Ceci, c'est notre engagement et, pour cela, il faudra les moyens.
Je viens de parler de toutes les économies que nous devons faire, mais je dis également que je protégerai les moyens de l'Éducation nationale. En échange, je demanderai à l'Éducation nationale d'augmenter le niveau d'exigence et de réussite qui doit être celui de l'école dans notre nation.
En particulier, j'estime que nous devons prendre un engagement simple et compréhensible par tout le monde : il ne doit pas y avoir, en France, d'enfants qui entrent en sixième sans savoir lire et écrire. C'est le minimum que nous devons obtenir pour notre nation.
Ne vous trompez pas, c'est difficile. Ne croyez pas qu'il s'agisse seulement de problèmes de méthode, car, même si cela compte, ce n'est pas seulement cela. En effet, nous sommes devant au moins deux phénomènes, dont le premier est que, il y a des générations, l'écrit était roi et, lorsqu'un enfant voulait s'évader, découvrir un nouveau monde et de belles histoires, il prenait un livre et lorsque les adultes voulaient connaître le monde, ils prenaient un journal.
C'était par l'écrit que passaient toutes les découvertes, toutes les connaissances et tous les rêves des générations qui nous ont précédés. Aujourd'hui, c'est par l'image que cela passe. Tout le monde est devant l'écran de télévision, les écrans vidéo, les jeux et les consoles, notamment les enfants et en particulier ceux des milieux les plus fragiles de la société française.
Cela illustre donc la difficulté du projet que je forme d'arriver, en quelques années, à ne plus avoir d'illettrisme en France.
Le deuxième phénomène est le suivant -et, s'il y a des éducateurs et des enseignants dans la salle, ils le savent- : les enfants qui n'apprennent pas, ce n'est pas toujours pour des raisons pédagogiques, ils n'apprennent pas car ils sont intérieurement cassés, même si on ne le voit pas.
Je vous remercie d'applaudir cette réflexion !
Je pense qu'il faut, devant des enfants qui, ainsi, ont quelque chose qui ne va pas, qu'il y ait des psychologues dans les écoles et du suivi.
Si l'on dit que plus personne n'entrera en sixième sans savoir lire et écrire, cela entraîne tout l'amont : on remonte vers la source et, au CM2, on pense au CM1, au CM1, on pense au CE2, au CE2, on pense au CE1 et on s'adresse, le plus tôt possible, aux enfants en espérant que la bonne réponse les réparera, les reconstruira, les cicatrisera et que l'on pourra, ainsi, les conduire vers le niveau minimal qu'il faut pour pouvoir faire des études.
Nous avons besoin de cela -et je pourrais en dire autant de l'enseignement secondaire et de l'université-, de l'égalité des chances. En effet, nous avons un très lourd problème dans l'université française à qui il faut rendre les moyens qu'elle n'a pas.
Nous devons également réfléchir aux besoins de la formation professionnelle et de l'insertion, car il y a longtemps que les diplômes ne garantissent plus l'emploi. On a simplement oublié de le dire aux Français !
Tout ceci, c'est pour reconstruire notre pays à l'intérieur et, ensuite, il y a la voix de la France à l'extérieur.
Chers amis, je pense que celle-ci doit d'abord s'occuper de problèmes d'environnement.
Oui, nous avons également l'agriculture. Je vous promets... Je vais vous donner un truc ! Vous allez, demain, dans la librairie la plus proche. Un très bon livre est sorti hier matin, qui s'appelle Projet d'espoir.
Il la décrit, chapitre après chapitre, mais, ce soir, je ne peux pas traiter de tous les chapitres et, pourtant, Dieu sait que j'aime l'agriculture... D'ailleurs, lors de toutes les réunions publiques, on m'offre un petit tracteur et on n'y a pas manqué ce soir. J'y vois un signe très amical, car il s'agit d'un clin d'oeil à une partie de ma vie que je n'ai jamais reniée.
Après tout, au fond, je suis assez content d'avoir été, parmi les candidats à l'élection présidentielle, le seul, ou presque, à avoir travaillé de ses mains dans sa vie. C'est également une manière de montrer que l'on peut réconcilier la société française et qu'après tout -allez !... je me risque...-, il n'existe pas de différence fondamentale entre les personnes qui travaillent avec leurs mains et celles qui travaillent avec leur tête. En effet, on peut travailler avec ses mains en ayant de la culture et les deux doivent être respectés.
C'est tout cela que je vois dans le petit tracteur que l'on m'offre chaque fois. Merci, Madame, qui venez de m'offrir ce petit tracteur. Je vous promets qu'il sera sur mon bureau. Il y en a déjà beaucoup et cela s'accumule, mais cela me fait plaisir.
Je veux parler d'environnement, car il s'agit d'une responsabilité internationale de la France. Ce serait une erreur de ne traiter d'environnement que dans le cadre national, car nous savons bien à quoi est dû le réchauffement de la planète : 99,9 % des scientifiques sont d'accord sur ce point, le réchauffement de la planète est dû à l'effet de serre, c'est-à-dire aux rejets, dans l'atmosphère, des gaz de combustion des millions de millions de tonnes de pétrole, de gaz et de charbon que nous avons brûlées en un siècle et demi et qui étaient, au fond, les réserves que la terre avait accumulées depuis qu'elle existe.
Nous avons dilapidé, en quelques secondes, en quelques millièmes de secondes, ce que la terre avait accumulé à l'échelle d'une vie humaine.
Or, le rejet de tout ce carbone dans l'atmosphère a naturellement créé des turbulences ou des changements qui font que les rayons solaires, qui repartaient d'habitude après avoir frappé le sol, sont stoppés, comme par la vitre d'une serre. Cela réchauffe peu à peu l'atmosphère de la planète.
Il faut que vous sachiez que c'est l'espèce humaine qui est en jeu dans cette affaire. Il faut avoir le courage de regarder cela en face et il faut que nous demandions aux autres pays de la terre d'avoir aussi ce courage de le regarder en face.
C'est d'autant plus difficile à faire que, nous, les pays riches, avons été les pollueurs et qu'il faut que nous parlions aux pays pauvres qui, eux, n'avaient ni industries, ni transports et n'ont donc pas rejeté de gaz à effets de serre.
Il faut que nous trouvions avec eux un équilibre qui nous oblige à baisser nos émissions et qui les autorisent à monter les leurs pour que nous ayons à peu près un niveau de vie équivalent. Il s'agit de l'un des défis politiques les plus lourds que l'humanité n'a jamais eu à résoudre. C'est une guerre silencieuse à laquelle nous sommes confrontés et à laquelle il faut que nous apportions une réponse.
Ceci ne peut pas se faire si la voix de la France ne s'exprime pas et si la France ne donne pas l'exemple.
Ce ne sont naturellement pas les économies d'énergie que nous allons réaliser qui changeront la composition de l'atmosphère de la planète, car, même si la France, avec ces soixante-quatre millions d'habitants, réduisait de moitié, ou de trois-quarts, ou de quatre cinquièmes l'émission de ses gaz à effets de serre, cela ne changerait pas d'un millième de millième la composition de l'air que nous respirons. En effet, comme vous le savez, vous qui avez la tramontane, l'air se déplace et ne s'arrête pas aux frontières.
Il vient de loin, il va loin et il est en perpétuel brassage.
Il faut donc que ce soit une démarche internationale, mais nous devons tout de même donner l'exemple pour montrer que c'est possible, que l'on peut réaliser des économies d'énergie, que l'on peut isoler les maisons et que l'on peut transporter autrement que par poids lourds et sur la route les charges que l'on transporte. Il faut faire du ferroutage, du transport fluvial. Il faut chercher des énergies de substitution, par exemple des biocarburants dont je suis défenseur.
Il faut avoir le courage de dire -je le dis car c'est vrai- que personne ne réduira les émissions de gaz à effets de serre si nous n'avons pas, pendant longtemps, le réseau très important de fabrication d'électricité nucléaire que nous a laissé le Général de Gaulle et qui est le seul moyen de fabriquer de l'électricité sans émettre des gaz à effets de serre.
Je sais qu'il y aura des controverses. Je sais qu'il aurait été plus pratique, pour moi, comme pour d'autres candidats, pour se faire applaudir, de dire : "Nous allons réduire les gaz à effets de serre et nous allons, en même temps, sortir du nucléaire", mais ce sont des promesses fallacieuses.
Le seul moyen de réduire nos gaz à effets de serre, c'est que nous conservions, en même temps, un nucléaire en état de marche en sécurité. Voilà pourquoi j'imposerai la transparence dans toutes les Commissions chargées de la sûreté nucléaire en France.
C'est un message international que la France doit porter et, si nous voulons que ce message soit entendu -et c'est mon dernier point-, il faut que nous ayons une Europe digne de ce nom et en état de marche !
Un pays seul ne peut pas faire tout cela. Il peut y contribuer. Il peut avoir des responsables, des leaders et un président qui s'expriment avec la force nécessaire pour que son message soit entendu, mais il doit également savoir qu'il a besoin de solidarité et de relais.
Nous avons besoin d'une Europe qui se redresse, qui sorte de la crise dans laquelle elle est plongée, qui fasse en sorte que cette crise cesse. En effet, il s'agit d'une crise d'inspiration, car, ne vous trompez pas, si les Français ont voté non, c'est qu'ils avaient un doute profond sur l'Europe et, je le dis, moi qui ait voté oui.
J'ai voté oui en sachant, depuis le premier jour, que nous allions perdre ce référendum. C'était pour moi un crève-coeur et ceux qui m'entouraient ne comprenaient pas mon inquiétude et mon pessimisme.
Toutefois, lorsqu'un peuple ne se reconnaît plus dans une grande aventure politique, il existe de très grands risques qu'il la rejette.
Je fixe donc comme objectif à la période, si je suis élu, durant laquelle je serai Président de la République, d'obtenir la réconciliation de la France avec l'Europe et de l'Europe avec la France et de refondre, devant les Français, de réinventer ce qu'est la force et l'importance de l'idéal européen. Il ne faut pas chercher à éviter les Français, ni la confrontation. Je ne cherche pas à ruser comme un certain nombre de candidats qui se sont engagés dans ce chemin. Je ne cherche pas à éviter ces explications et cette réflexion nationale.
J'associerai le peuple français à toutes les décisions qui doivent être prises sur ce sujet et, en particulier, s'il s'agit de sortir de la crise qui a été matérialisée par le "non" français le 29 mai 2005.
Je veux un texte lisible, compréhensible par tous, court, dont tout le monde sache qu'il ne recèle aucun piège. Ce texte, je ne le ferai pas adopter par le Parlement, subrepticement, en catimini, mais par le peuple français, car il a bien le droit, lui qui a dit non, d'avoir à dire oui le jour où il le décidera.
Nous avons besoin d'un peuple qui croit à nouveau à la démocratie, à la République, au projet de société, de la France, au message que la France doit envoyer au monde, car j'ai la certitude que, si la France ne soutient pas ce projet de société qui est unique parmi les nations, personne ne le soutiendra plus. Si la France n'est pas là pour soutenir ce message qu'elle veut porter, personne ne le soutiendra plus.
J'ai eu de nombreuses confrontations avec Jacques Chirac dans ma vie. Dieu sait qu'en politique intérieure, nous n'avons pas souvent été d'accord. 19 % des Français avaient voté pour lui au premier tour.
Je le sais et je le lui ai dit le 22 avril au matin, lors d'une discussion vive entre nous deux.
Cependant, j'ai été fier -je dis cela puisque dimanche il y aura une déclaration- de la manière dont Jacques Chirac avait conduit, pendant cette période et pendant la crise en Irak, la politique étrangère de notre pays.
Je l'ai soutenu envers et contre tous ceux qui venaient me voir en disant : "Mais, enfin, puisque tu as des désaccords avec lui, voilà maintenant le moment où tu vas pouvoir exprimer tes désaccords et tu seras, dans cette attitude, soutenu, car des tas de personnes n'attendent que cela".
Je leur ai dit que je soutiendrai cette position, car elle est juste et qu'il est important, lorsqu'un pays exprime, dans une situation de crise internationale, une volonté aussi juste que celle-là, que tous les responsables publics se rassemblent pour que le monde entier voit que la France est unie, lorsqu'elle veut défendre une position et un message juste à adresser au monde.
Il y a des choses que seule la France peut dire, que seule la France peut faire.
J'ai cette foi dans notre pays et je suis sûr que vous l'avez aussi. C'est cette foi qui explique le grand mouvement qui a commencé et qui est en train d'apporter de si profonds changements, de si grands démentis à ce qui était prévu pour cette élection présidentielle.
Je suis fier de porter avec vous ce combat et je suis fier que vous soyez venus à Perpignan, ce soir, si nombreux pour me manifester votre amitié et votre soutien.
Nous irons ensemble, jusqu'au 22 avril et au 6 mai.
Merci à tous.Source http://www.bayrou.fr, le 20 mars 2007
Je voudrais adresser un merci particulier aux jeunes et vous demander des applaudissements particuliers pour une dame qui est présente parmi nous et qui a 87 ans.
Je voudrais vous dire combien je suis sensible à votre présence et remercier ceux qui se sont exprimés avant moi : le responsable de cette fédération, Yves Porteix, Jean-Marie Cavada, qui a ouvert la réunion, ainsi que Yvan Lachaud, député du Gard, député de Nîmes, selon ses propos.
C'est un moment très chaleureux, très émouvant que nous sommes en train de vivre. Je suis particulièrement heureux de le vivre à Perpignan, avec vous, car, entre les Béarnais et les Catalans, il existe une très vieille et très profonde histoire qui nous a permis d'être ce que nous sommes.
Vous ne savez pas peut-être, mais cela vous rappellera des choses, que nous sommes, nous, la Catalogne et le Béarn, des pays de très vieille démocratie. Naturellement, l'histoire officielle ne le dit pas, mais nous sommes des pays de très vieille démocratie, à telle enseigne que le Béarn a une constitution écrite, naturellement en béarnais, depuis le XIème siècle.
Cela signifie qu'il y a 1 000 ans qu'est apparue la première constitution écrite, qui n'était pas une constitution retardataire, mais une constitution extrêmement moderne et la première. C'est toujours dans les pays de montagne que les démocraties naissent. C'est une notion qui mérite méditation.
La première, sans doute, des démocraties écrites s'appelait les Fors de Béarn et commençait en racontant l'histoire suivante : "Ici, vous allez lire les Fors de Béarn", pays où, autrefois, il n'y avait pas de roi.
Il s'agit, vous le voyez, d'un peuple qui, dès son origine, explique que la légitimité ne vient pas d'en haut, mais d'en bas. Cela nous rappelle des idées contemporaines.
Puis, un jour, les Béarnais se sont aperçu que ce n'était pas facile de vivre sans autorité, que c'était un peu l'anarchie. Alors, ils ont donc décidé de se doter d'un souverain et ils ont commencé des démarches pour trouver un souverain.
Ne voyez aucune intention politique dans ce que je vais vous raconter, il s'agit uniquement de la démocratie, les Fors de Béarn, écrite il y a 1 000 ans.
Leur première démarche a été de se rendre en Auvergne pour demander à un prince auvergnat de devenir roi, en tout cas souverain de Béarn. Puis, le souverain est arrivé, il a été installé sur le trône et, au bout d'un certain temps, comme il n'a pas respecté les droits du peuple, ils lui ont coupé la tête.
Oublions ce désagrément !
Giscard d'Estaing détestait quand je racontais cette histoire devant lui ! Je ferme la parenthèse, c'était en des temps très anciens.
Après, ils sont allés en Bigorre, du côté de Lourdes pour chercher un souverain. Ils l'ont trouvé, l'ont installé sur le trône, mais, comme le souverain n'a pas respecté les droits du peuple, ils lui ont coupé la tête.
Ne voyez aucune allusion politique dans ce que je raconte !
Philippe Douste-Blazy détestait quand je racontais cette histoire.
Après, ils ont entendu dire que, là-bas, à l'autre bout de la chaîne des Pyrénées, en pays catalan, un roi avait eu deux jeunes princes jumeaux. Ils ont envoyé une délégation pour lui dire : "Puisque vous avez deux jeunes princes et qu'ils ne pourront pas régner tous les deux, vous pourriez peut-être nous donner l'un d'entre eux pour qu'il soit notre souverain".
Les députés de Béarn sont venus en pays catalan, le souverain les a reçus et leur a présenté...
Tout cela, c'est l'introduction des Fors de Béarn, la constitution écrite au XIème siècle que je cite à peu près mot à mot.
Alors, ce souverain leur a présenté ses deux jumeaux en disant : "J'accepte, choisissez celui que vous voulez et, disent les Fors du Béarn -et je vous demande de vous en souvenir-, deux jumeaux étaient devant eux, deux jeunes princes magnifiques, comme tous les Catalans le sont, endormis dans leur berceau. L'un avait les points fermés et, l'autre, les mains ouvertes. Ils ont choisi celui qui avait les mains ouvertes et il est devenu souverain du Béarn. Il a créé la dynastie du Béarn et, après, est venu Gaston Febus, puis Henri IV.
C'est le Béarn que vous avez devant vous et qui vous remercie de nous avoir offert un prince avec les mains ouvertes.
Ceci n'est, ni inventé, ni exagéré. Je n'ai pas ajouté une ligne, j'en ai plutôt retranché, à l'histoire qui a fondé, en tout cas c'est ce que l'on dit, le mythe du pays d'où je viens.
J'ai toujours pensé à cette histoire en pensant à vous, toujours pensé qu'il y avait, entre nous, au deux bout des Pyrénées, ce lien d'affection, de tendresse, de reconnaissance qui fait les grandes aventures humaines.
C'est une occasion de dire, car je n'aurais peut-être pas l'occasion d'y revenir après, à ceux qui, en France, sont des Jacobins, complètement stricts et décidés à tout centraliser qu'ils se trompent lorsqu'ils veulent ignorer les trésors que représentent les identités régionales de la France.
Ils se trompent lorsqu'ils croient que les langues régionales sont les ennemis de l'unité de la France. Je crois exactement le contraire. Je pense que les peuples vivent mieux ensemble lorsque chacun sait qui il est. Les femmes et les hommes vivent mieux ensemble lorsque chacun est fier de son identité.
Il est mieux pour un peuple d'assumer tous ses trésors et toutes ses richesses et il n'est pas vrai que l'on parle moins bien une langue lorsque l'on a, par ailleurs, la chance d'en parler une deuxième, car celle de ses racines ou sa langue maternelle.
J'espère que personne ne dira que nous parlons moins bien le français, car nous parlons béarnais, pour moi, et catalan, pour vous.
Qui peut prétendre que l'on sent moins bien les nuances d'une langue lorsque l'on peut la comparer avec une autre ?!...
Je suis de ceux qui pensent qu'il faut défendre ce trésor que représentent pour nous, pour nos cultures, les langues, les identités et les cultures régionales et je suis pour que la France ratifie, car elle l'a déjà signée, cette Charte européenne qui demande à tous les pays de protéger les langues et cultures régionales et minoritaires.
Il se trouve -et je le dis du même mouvement, dans la même phrase, presque dans le même souffle- que j'aime la langue française, car c'est notre maison. Je la pratique, je l'écris, j'aime sa poésie, j'aime sa chanson, car elle chante et qu'elle a sa propre musique, qui diffère de toutes les autres langues romanes.
Cette langue française chante pour nous, mais nous pouvons adorer la langue française et aimer les langues de nos racines. C'est pareil et, d'ailleurs, si vous y réfléchissez une seconde, le combat pour la diversité culturelle que nous, Français, conduisons -et nous avons raison de le faire- qui a bien raison de dire à l'anglais, ou plus exactement à l'anglo-américain ou à cette espèce d'epéranto moderne que l'anglo-américain représente, baragouiné un peu différemment dans tous les pays, sur tous les aéroports de la planète et dans toutes les salles de réunion de tous les milieux d'affaire de la planète -c'est devenu un passeport international- que nous voulons résister à ce rouleau compresseur. Ce n'est pas car nous sommes minoritaires, nous, la France et la francophonie au travers du monde, que nous devons disparaître et nous coucher.
C'est le contraire ! C'est car nous sommes minoritaires que nous devons nous battre, défendre l'identité et la force de notre langue.
Je voudrais que nous réfléchissions à cela : c'est vrai du français face à l'anglo-américain, tout comme cela l'est pour les langues de France face à la langue française. Il faut les défendre comme une richesse.
C'est la diversité culturelle vers le haut et c'est la diversité culturelle vers le terrain, vers la France profonde. Nous avons besoin, nous tous, ensemble, d'accepter nos différences, d'aimer nos identités, d'aimer nos différences et de considérer que c'est ensemble que nous allons conjuguer ces différences pour faire la France de toutes nos forces.
Je suis très sensible à votre présence et à votre grand nombre, sachant que nombre d'entre vous n'ont pu entrer. Si nous sommes, là, tous ensemble, c'est évidemment parce qu'il se passe quelque chose de très important dans notre pays.
Il y a des semaines et des mois que nous disions, que je disais, parfois dans le scepticisme général, que ceux qui croyaient que le scénario de cette élection était écrit à l'avance se "mettaient le doigt dans l'oeil jusqu'à l'omoplate" et qu'ils ne connaissaient pas le peuple français. Ils ne connaissaient pas bien la situation de la France.
Ils ne connaissaient pas le peuple français, car ce dernier est, en fait, le peuple le plus démocratique de la planète, l'un de ceux qui a la plus longue expérience de ce que République et démocratie veulent dire.
C'est un peuple qui pense profondément ce qui est écrit dans sa constitution, à savoir, je cite la phrase, que "la souveraineté appartient au peuple qui l'exerce directement ou au travers de ses représentants".
Ceci est le texte de la constitution.
C'est le peuple souverain qui commande dans la République française et, chaque fois que se développe une tentative ou une manoeuvre pour lui arracher sa souveraineté, pour lui expliquer que ce n'est pas la peine qu'il veuille se mêler d'une élection, que le résultat est joué à l'avance, le peuple français, tout d'abord, se tait, baisse les yeux et, après, se redresse, car il est décidé à montrer de quel "bois il se chauffe".
C'est exactement ce qui s'est passé pendant les mois que nous avons vécu dans lesquels, et vous vous en souvenez, il n'était question que du résultat fabriqué à l'avance de cette élection.
Il se trouve, de surcroît, que cette élection et son résultat fabriqué à l'avance étaient prévus pour un pays qui avait toutes les raisons de se sentir amère de la manière dont il était gouverné depuis vingt-cinq ans.
Nous sommes un pays qui a des raisons de demander des comptes à ses gouvernants. Nous sommes un pays qui a toutes les raisons du monde de dire : "Mais, enfin, nous étions, il y a vingt-cinq ans, le pays le moins endetté de tous les pays développés. Qu'avez-vous fait de notre liberté ?"...
Vous nous laissez, aujourd'hui, une dette qui est telle que tous ceux qui sont présents aujourd'hui, ces garçons et ces filles, vont avoir à travailler toute leur vie pour la rembourser et cela va peser lourd sur leurs épaules.
"Qu'avez-vous fait de notre liberté et de notre équilibre ?"... Ils ont raison de poser cette question. Nous étions le pays qui avait l'Éducation nationale la plus admirée et la plus enviée de tous les pays de la planète et, partout dans le monde, on demandait que s'ouvrent des lycées français, partout dans le monde, on venait chercher dans nos universités le prestige de la formation intellectuelle française.
Je ne jette la pierre à personne, car je connais les raisons si compliquées ayant fait que nous constatons aujourd'hui des taux d'échec ne correspondant pas à ce que devrait être l'image de la France.
Notre pays a, aujourd'hui, le taux de chômage le plus élevé des pays développés du même genre que le nôtre. Or, ce taux de chômage devrait, normalement, remettre en cause les politiques que nous suivons.
Savez-vous que, ces jours-ci, une polémique est en train de se développer, car, paraît-il, les services officiels ont reçu ordre de ne pas publier les vrais chiffres du chômage et de continuer à faire croire à notre pays que nous n'avons que 2 millions de chômeurs, alors que tout le monde sait que nous en avons entre 4 et 4,5 millions ?!...
Savez-vous, par exemple, que les deux tiers des RMIstes français ne sont pas décomptés dans les statistiques du chômage ?!...
Quel est ce pays qui refuse de voir que les RMIstes sont, d'abord et avant tout, des chômeurs, d'abord et avant tout des personnes qui retrouveraient leurs forces et leur dignité si nous les aidions ou si nous les poussions parfois à retrouver un travail, un emploi, pour qu'ils soient simplement autonomes, libres, indépendant comme toutes les femmes et tous les hommes, en tout cas comme toutes les familles devraient l'être ?!...
Nous avons toutes les raisons de poser ce genre de questions, car l'exclusion frappe des millions de personnes parmi nos compatriotes, de même que le sentiment d'échec, qui est celui de beaucoup d'entre nous.
Personnellement, je ne "jette pas la pierre" à ceux qui échouent. Je n'aime pas que, dans certains meetings, on siffle ceux qui, paraît-il, ne se lèvent pas le matin et qu'on leur oppose ceux qui, au contraire, font "l'effort" de travailler, de se lever le matin. Je sais que c'est un effort de travailler, mais, en même temps, c'est un accomplissement et je peux vous dire ceci, sans crainte d'être démenti : de nombreux RMIstes aimeraient se lever le matin pour avoir un bon travail et accomplir leur destin d'homme et de femme, de citoyens français.
Je ne crois pas que les chômeurs et les RMIstes soient les principaux responsables de leur situation. Je crois qu'il faut les regarder en pensant qu'ils aimeraient beaucoup s'en sortir, mais que l'on ne leur offre pas la deuxième ou la troisième chance qui, seule, leur permettrait de se rattraper aux branches lorsqu'ils ont connu un échec et cela arrive très vite, l'échec.
Pensez à ce qui se passe autour de vous : vous perdez votre emploi, votre couple se brise, car c'est très souvent comme cela aujourd'hui, et vous vous retrouvez tout seul, puis vous arrivez en fin de droits, puis vous avez le surendettement sur les épaules et vous n'osez plus sortir de chez vous, car vous n'osez plus affronter le regard de ceux qui ont des points d'interrogation dans les yeux et se demandent ce que vous faites dans la vie, ni même, parfois, celui de vos enfants.
J'estime que c'est une situation si lourde à porter que la société ne doit pas s'en désintéresser et, en tout cas, pas considérer celles et ceux qui en sont frappés comme des boucs émissaires.
Je veux une société où l'on s'adresse à eux, pas seulement en leur tendant la main pour leur faire le petit chèque du RMI à la fin du mois, mais en leur offrant la possibilité de trouver un travail ou une activité au service de la société qui leur permettra, pas seulement de s'en sortir, mais de se remettre debout et de retrouver confiance en eux.
C'est de la solidarité et cela permettra à la République de penser que, lorsqu'elle écrit "Liberté, égalité, fraternité", elle ne se trompe pas, elle exprime sa véritable nature.
Nous avons donc cette situation devant nous, ces échecs multipliés depuis vingt-cinq ans et nous savons très bien comment cela fonctionne, à chaque alternance. Notre pays détient le record du monde des alternances. Nous sommes le seul pays dans le monde où chaque élection, sans exception depuis vingt-cinq ans, a conduit à "virer" ceux qui étaient en place pour les remplacer par ceux qui étaient en place la fois d'avant.
C'est ce que nous appelons l'alternance en France : "Je prends les mêmes et je recommence". C'est un roulement, ce n'est pas vraiment une alternance. Cela arrive depuis vingt-cinq ans et les Français savent très bien comment le jeu fonctionne.
Selon qu'il y aura une alternance la prochaine fois, la règle du jeu est très simple : ceux qui sont dans l'opposition refusent tout sans exception de ce que proposent ceux qui sont au Gouvernement et, lorsque les élections arrivent, ceux qui viennent d'être élus détruisent ce qu'avaient fait ceux qui étaient au pouvoir avant eux.
Cela fonctionne ainsi depuis vingt-cinq ans et c'est l'une des raisons principales pour lesquelles notre pays se trouve dans une impasse dont il n'arrive pas à sortir, mais je crois qu'il va en sortir pour la première fois en 2007 !
Il est probablement que cette phrase prononcée à cette tribune, il y a dix-huit mois ou un an, a ressuscité, de la part des citoyens et des observateurs, beaucoup de scepticisme, parce qu'ils auraient dit : "Ce que l'on nous propose là est un peu utopiste ou un peu idéaliste", mais un événement s'est produit auquel je vous invite à réfléchir et qui est celui-ci : dans le plus grand pays d'Europe, notre voisin, de l'autre côté du Rhin, l'Allemagne, il y a dix-huit mois, les citoyens, exaspérés par les mêmes jeux éternels, ont forcé les deux principaux partis, au lieu de se faire la guerre, à travailler ensemble et, naturellement, ces deux principaux partis, la CDU de Angela Merkel et le SPD du chancelier sortant Gerhard Schroeder, avaient fait toute la campagne électorale, en expliquant que, jamais, ils n'accepteraient de se retrouver attelés ainsi à la même charge, parce que leurs visions étaient incompatibles, les unes avec les autres.
Vous pouvez reprendre, aujourd'hui, les déclarations du PS et de l'UMP, ce sont exactement les mêmes, si vous les traduisez en allemand, que celles de la CDU et du SPD et, si vous traduisez en français les déclarations de la CDU et du SPD, vous allez trouver exactement mimétiquement les mêmes mots au cours des mêmes affirmations. Simplement, une fois que le vote du peuple allemand est passé, ils ont bien été obligés d'en tenir compte. Ils sont entrés dans le même gouvernement et ont fait une négociation sérieuse. Ils gouvernent ensemble depuis dix-huit mois et que constate-t-on ? Que l'Allemagne est en train d'obtenir les performances et le redressement le plus spectaculaire de toute l'Europe et, désormais, tout le monde se tourne vers eux, en disant : "Mais comment ont-ils fait ?"
Ils ont décidé de travailler ensemble au lieu de se faire la guerre et ce n'est pas autre chose que je propose à la France. Je veux vous dire pourquoi ce ne sont pas des bons sentiments. Je ne dis pas que je n'ai pas de bons sentiments, mais je ne suis pas du tout, en train, dans une élection présidentielle, de chercher à ce que les bons sentiments l'emportent sur les mauvais. Tant mieux si c'est le cas, mais ce n'est pas la vérité ou le profond de ce que je propose à la France.
Le profond de ce que je propose à la France est inspiré par cette réflexion : nous sommes dans un moment de crise profonde de l'histoire de notre pays. Cette crise profonde va nous obliger à des politiques courageuses, politique courageuse en matière de dette, politique courageuse en matière d'emploi, politique courageuse en matière d'éducation, politique courageuse en matière de retraite, politique courageuse pour reconstruire ce qui, peu à peu, s'est effrité, politique courageuse pour faire de la France un modèle parmi les nations, ce qu'elle a été et qu'elle n'aurait jamais dû cesser d'être, parce que c'est cela le devoir ou la vocation de notre pays, mais ce sont des politiques courageuses.
Quand il y a des décisions courageuses à prendre, naturellement, il faut les annoncer à l'avance et c'est ce que je fais tout au long de cette campagne électorale, particulièrement en refusant les promesses mensongères. Je m'en honore.
Quand des décisions courageuses doivent se prendre pour un peuple ou avec un peuple, les citoyens ont besoin d'une garantie. C'est que ces décisions sont d'intérêt général et non pas à l'avantage d'un clan contre l'autre. Ils ont besoin d'avoir la certitude que tous ceux qui vont avoir à réfléchir à la manière dont on redresse la France, leur gouvernement, leur président, leur parlent d'une manière qui n'est pas partisane ; ce n'est pas parce qu'il y a tel clan idéologique qui les inspire dans un sens contre tel autre dans un autre sens.
Ils ont besoin d'avoir la certitude de l'objectivité de ceux qui les conduisent et vont les entraîner dans le sens du redressement du pays. Ils ont besoin de savoir que c'est l'intérêt général qui commande et pas les intérêts de clans et les intérêts partisans. Cela, c'est le premier point.
Deuxième élément, quand un certain nombre des réformes que nous avons à conduire concernent l'organisation de notre démocratie et la place des citoyens de tous les courants de pensée dans cette démocratie-là... Je m'arrête un instant sur ce sujet. Voyez-vous, je suis frappé depuis longtemps par le fait qu'un très grand nombre de millions de Français ne sont pas représentés au Parlement, dans les institutions, à l'endroit où se prennent les décisions pour la République.
Si l'on fait la somme des voix obtenues, en 2002, par le candidat de l'UMP qui était Jacques Chirac et le candidat du PS qui était Lionel Jospin à l'époque, on arrive au maximum à 35 % des voix. Or, ils ont, à eux deux , 95 % des sièges à l'Assemblée Nationale. Ce n'est pas normal. Ce qui serait normal, c'est que tous les autres Français, les 65 % qui ne sont pas dans les 35 %, aient aussi leur mot à dire, qu'on les reconnaisse, qu'on salue leur légitimité, qu'on les écoute quand on prend les décisions, bref, qu'ils aient, comme citoyens et comme français, la place légitime qui devrait être la leur dans les institutions de la République.
Je dis cela pour tout le monde, y compris pour ceux que je n'aime pas ou que je combats depuis longtemps. Je me suis, toute ma vie, confronté au Front national ou à l'extrême-gauche, car leurs visions sont, pour les uns, offensantes pour une certaine idée que l'on se fait de l'Homme et de la Citoyenneté et, pour les autres, radicalement fausses.
Je me suis confronté, toute ma vie, à leurs visions, mais je dis : "Je ne suis pas de votre avis. Je considère que vous vous trompez, mais je vous reconnais le droit de défendre votre point de vue au sein du Parlement de la République française qui représente les citoyens. Je préfère vous affronter face à face et les yeux ouverts, que tout le monde sache quelles sont nos confrontations, que tout le monde sache où sont, pas seulement nos désaccords, mais également les chocs que nous pouvons avoir entre nous et ceci sera, pour les Français, une garantie d'authenticité des débats qui, en leur nom, prétendent examiner l'avenir et les décisions à prendre pour notre pays."
Je le dis d'autant plus, que j'ai siégé au Parlement européen. J'avais Le Pen d'un côté et Krivine de l'autre, ainsi que Arlette Laguiller naturellement. En quoi cela n'était-il pas pour faire des lois ? En quoi est-ce que cela nous empêchait d'examiner des textes ? En réalité, cela ne nous empêchait en rien d'adopter des lois, mais cela obligeait les forces démocratiques à se mettre d'accord entre elles sur un certain nombre de textes, à regarder ce qu'il y avait de juste dans l'approche des uns et des autres pour éviter que les extrêmes ne prennent la démocratie en otage.
Certains disent que c'est un embarras, moi, je dis que c'est un bien. C'est drôlement bien quand on oblige les grands courants démocratiques du pays à discuter ensemble, voire à négocier ensemble, pour améliorer ensemble les textes qu'on leur propose et représenter, au fond, la majorité démocratique du pays.
C'est pourquoi je sais qu'il faut que l'on arrête avec cette manière confiscatoire que l'on a eue de considérer le gouvernement et nos institutions en France. Vous croyez qu'aucun d'entre nous peut être fier quand il assiste, comme depuis des mois et des mois et des années, chaque fois qu'il y a une nomination, à voir nommer un copain, chaque fois un ami, chaque fois un affidé, chaque fois quelqu'un du camp, chaque fois quelqu'un du parti, chaque fois quelqu'un qui dépend de vous ; et ce n'est pas la compétence qui conduit aux fonctions, c'est le fait que vous êtes soumis à celui qui a tout le pouvoir entre les mains.
Ceci, ce n'est pas la République, ce n'est pas la démocratie. C'est une perversion que nous ne devons pas accepter en France et qui ne ressemble pas à la République. C'est terriblement dangereux. Je vous dis cela en une phrase, parce que, au fond, ce qui s'installe dans l'esprit des jeunes, ceux qui entrent, par exemple, dans la Fonction publique, ceux qui ont l'ambition légitime de faire une carrière au service de la République et au service de l'Etat, c'est que ce n'est pas la compétence qui fait les carrières ni la justesse de pensée, mais d'aller s'embaucher le plus tôt, le plus vite possible dans le parti dont on croit qu'un jour il va vous nommer aux responsabilités.
Eh bien, ceci n'est pas sain. C'est une atteinte à l'esprit civique. C'est la culture du piston au sommet de l'Etat. Moi, je veux enlever la culture du piston du sommet de l'Etat et je la remplacerai par l'impartialité de l'Etat et l'impartialité de l'Etat est l'impartialité de la République.
C'est une vision de salubrité publique, notamment pour la magistrature, pour l'indépendance de la justice, si nécessaire et, aujourd'hui, tellement mise à mal, pour les grandes fonctions et pour les corps de contrôle. Vous trouvez normal que le Conseil constitutionnel ou le Conseil supérieur de l'audiovisuel soient entièrement entre les mains d'un seul parti qui, au lieu d'être arbitre, est, en fait, partie prenante dans la manière dont fonctionnent nos institutions ?
Ce n'est pas juste et ce n'est pas bien. Nous devons corriger tout cela, pour être un grand pays parce que, naturellement, quand on est dans cette situation, on ne prend pas les bonnes décisions. Par exemple, on doit rendre au Parlement, qui représente les Français, la place légitime qui doit être la sienne lorsque des décisions se prennent.
Vous croyez que l'on n'a pas honte ? Regardez les parlementaires ; Il n'y en a pas un, si vous lui posez la question, entre quatre yeux, qui vous dira qu'il a l'impression de servir à quelque chose quand il est au Parlement.
Songez que l'on a pris la décision de privatiser les autoroutes françaises, décision que j'ai combattue jusqu'au bout du bout, en Conseil d'Etat, alors que tout le monde savait qu'elle allait se transformer en "pompe à cash" comme disent les boursiers. On a pris cette décision sans même que le Parlement, qui représente les Français qui avaient construit les autoroutes grâce à leurs impôts et grâce à leurs péages, soit même consulté pour savoir s'il fallait ou pas prendre une décision de cet ordre.
On a refusé de le faire et les choses sont telles en France qu'ils ont prétendu, devant le Conseil d'Etat, que les autoroutes n'appartenaient pas à l'Etat, n'appartenaient pas aux Français. Vous parlez ! C'est l'Etat qui a pris la décision de les privatiser et c'est l'Etat qui a touché les sous.
Expliquez-moi en quoi on pouvait soutenir que ce n'était pas l'Etat qui était propriétaire. C'est comme cela. On n'a pas voulu faire de vagues. Eh bien, moi, je considère qu'il y a des moments où il faut faire des vagues pour défendre les Français.
Songez que la décision la plus lourde de conséquences que je connaisse pour l'avenir de l'Europe, c'est-à-dire l'ouverture des négociations d'adhésion de la Turquie à l'Union européenne qui valent engagement d'adhésion si les conditions sont remplies, a été prise sans même que le Parlement français ait le droit de s'exprimer par un débat sérieux ou par un vote sur une décision d'une telle importance. On a interdit au Parlement de s'exprimer, même par un voeu, même par un texte qui aurait dit : "Voilà ce que nous souhaitons".
Quand je suis monté à la tribune pour demander que l'on fasse ce qui se fait dans toutes les démocraties de la planète, le président de l'UMP de la Commission des lois, qui est actuellement Garde des Sceaux, qui s'appelle M. Clément, m'a répondu que celui qui demandait un débat sur un tel sujet voulait, en réalité, la mort de la Vème République.
Eh bien, si, la Vème République, c'est l'interdiction pour le Parlement qui représente les citoyens de s'exprimer sur le sujet le plus fondamental de notre avenir européen, alors, oui, je dis qu'il faut changer la Vème République, nos institutions et rendre au Parlement la parole, son importance et sa légitimité.
Étonnez-vous, après cela, de voir vides les bancs de l'Assemblée Nationale, ce qui est un scandale aux yeux de beaucoup de Français. Étonnez-vous de ce qui se passe. Savez-vous -j'ai presque honte de vous raconter cette histoire- que lorsque l'on a examiné à l'Assemblée Nationale le texte du futur traité constitutionnel qu'on allait soumettre au référendum des Français, présenté par Giscard d'Estaing qui en avait été le principal rédacteur -et naturellement il attendait que ce fut un événement- un mercredi après-midi à 16 heures -ce n'était pas une séance de nuit, le samedi soir... c'était le moment précis où, à cause des questions d'actualité et de la télévision qui permet à leurs électeurs de les pister vaguement pour savoir s'ils sont là où pas- où, en principe, il y a le plus grand nombre de parlementaires présents, mais, au bout des deux heures qu'a duré le débat, sur 577 députés, il en restait 17 présents en séance pour examiner le texte le plus important de la République ?!
On en est là, mais ne vous trompez pas, il faut toujours rechercher les causes pour comprendre les conséquences. C'est parce qu'on leur a donné le sentiment, on leur a introduit à l'esprit la certitude que le Parlement ne servait à rien, que la tribune ne servait à rien et que, pour rester député, il valait beaucoup mieux être dans sa circonscription à aller couper des rubans ou participer aux foires agricoles.
C'est comme cela que l'on a détruit, peu à peu, l'esprit de la République, en vidant le parlement de son sens. Moi, je suis pour lui rendre ses prérogatives. Je suis pour que, de nouveau, il puisse fixer son ordre du jour, que, de nouveau il ait le moyen de contrôler le gouvernement. Je suis pour qu'aucun député ne puisse être réputé votant, s'il n'est pas présent dans l'hémicycle, ce qui est, après tout, la règle au Parlement européen, sachant que vous pouvez vérifier, sur le site Internet, si vos députés sont présents, s'ils votent et ce qu'ils votent à chaque vote, sur chaque amendement.
De surcroît, bien que cela ne joue naturellement aucun rôle dans leur présence, s'ils ne votent pas, on ne les paie pas. Loin de moi l'idée que cette dernière raison soit un appui puissant à la présence générale pour les votes, mais je veux que le Parlement retrouve sa dignité.
Le président de la République est garant des institutions. Il doit donc assumer l'image des institutions auprès des citoyens, parce que c'est un motif de scandale perpétuel auprès de ceux-ci, la manière dont sont organisés les travaux du Parlement, la manière dont les bancs sont vides, la manière dont on a l'impression que ce ne sont pas les vrais débats qui sont en cause.
Je veux leur rendre leur dignité tout simplement. Je veux que l'on applique ce que l'on apprend, dans les cours d'éducation civique, à tous les gamins de l'école primaire et, ainsi, comme vous le sentez, c'est bien, en effet -je vais employer un grand mot- d'une révolution civique dont il s'agit, afin que les citoyens s'y retrouvent, que, de nouveau, ils comprennent et qu'ils soient fiers de la manière dont la démocratie et la République fonctionnent en France.
Donc, on va faire tous ces changements-là. On va changer les institutions, en rendant au Parlement français les pouvoirs qui sont ceux de tous les parlements de la planète, d'autant que, nous, nous avons un président de la République élu au suffrage universel. J'espère, au passage, qu'il aura de bonnes idées démocratiques et civiques, mais ce président de la République, élu au suffrage universel, investi de la confiance des Français, est là pour empêcher qu'il y ait des jeux parlementaires comme on en a connu autrefois et qui, en effet, ne permettent pas d'avancer à un pays comme le nôtre.
Je suis pour qu'il y ait un équilibre entre la fonction présidentielle qui assume la confiance des Français et les parlementaires qui sont là pour exprimer et représenter la volonté de leurs concitoyens sur tous les textes et toutes les lois et pour contrôler le gouvernement, lorsque celui-ci a besoin de l'être, pour que l'on sache, par exemple, que l'argent public est bien dépensé et bien utilisé dans notre pays, et, croyez-moi, il y a beaucoup à faire de ce point de vue-là.
Vous voyez pourquoi on a besoin que chaque citoyen, quand on va voter ces institutions, ait la garantie que ce n'est pas fait au bénéfice des uns contre les autres. Par exemple, je suis pour que l'on instaure la moitié de proportionnelle aux élections législatives. Cela veut dire qu'il va falloir regrouper des circonscriptions.
Je n'ai pas envie qu'on se livre à un "charcutage" et les Français n'en ont pas envie non plus, même s'ils ont de la sympathie pour leur nouveau président, s'il est élu. Même s'ils ont de la sympathie et de la confiance, ils n'ont pas envie que les "charcutages" de circonscriptions se fassent pour avantager tel ou tel autre parti.
Ils ont besoin d'avoir la loyauté et l'impartialité de l'Etat. Cela ne peut se faire que si, dans le gouvernement chargé de cette réforme et de cette reconstruction, sont représentées les grandes sensibilités démocratiques du pays par des gens compétents, dévoués et décidés à reconstruire et à travailler ensemble au lieu de se disputer perpétuellement et d'exercer de l'arbitraire, là où il faut de l'impartialité.
Ne croyez pas que ce soit par volonté de générosité et d'apaisement -ce serait déjà pas mal-, par volonté de faire la paix entre les Français -ce serait déjà pas mal- que je plaide pour ce rassemblement, c'est car, dans l'état où est notre pays, les réformes qui sont à conduire exigent que les citoyens aient la plus absolue confiance dans l'objectivité et dans l'impartialité de leurs gouvernants et cela ne peut se faire que par le pluralisme. C'est pourquoi je défends ce dernier devant vous. Il s'agit d'une nouvelle démarche politique, une démarche de rassemblement pour redresser notre pays et le reconstruire.
J'en viens à la conclusion de ce propos. C'est naturellement ce qui fera l'immense travail que nous avons à conduire. Je prends les chantiers un par un que nous avons devant nous. Je ne laisserai pas le pays s'abaisser à augmenter perpétuellement ses déficits et sa dette.
Il faut que nous retrouvions l'équilibre des finances publiques. Je m'honore d'avoir été celui qui a introduit ce sujet dans le débat présidentiel, contre tous les observateurs et même contre un grand nombre de mes amis qui disaient : "François, est-ce vraiment un sujet pour attirer les électeurs ?"...
Personnellement, je pense que oui, car, après vingt-cinq années de laxisme et de dissimulations, le peuple français a besoin qu'on lui dise maintenant la vérité. Il a besoin de savoir que l'on va lui dire les choses telles qu'elles sont et, si elles sont dures, on lui expliquera ce qu'elles sont et pas lui mettre un bandeau sur les yeux. On va le placer devant ses responsabilités pour que, tous ensemble, nous prenions les bonnes décisions, en particulier pour nos enfants, pour les jeunes qui sont là et qui votent, pour les jeunes qui ne votent pas encore, pour les enfants, pour les bébés, pour ceux qui ne sont pas encore nés, car les décisions que nous allons prendre maintenant concernent les générations à venir et je suis heureux et fier que nous ayons, en effet, décidé d'être la voix, pas seulement de ceux qui votent, mais de ceux qui ne votent pas encore.
Comme nous allons essayer d'alléger un peu la dette financière qui pèse sur leurs épaules, nous allons également nous occuper de traiter de cette question lancinante des retraites qui, depuis si longtemps, nous menace, de par ce mouvement bienfaisant, qu'il faut saluer, selon lequel la vie humaine augmente sans cesse depuis des années et des années au rythme de... écoutez bien... un trimestre d'espérance de vie supplémentaire tous les ans.
Tous les quatre ans, nous tous, Français que nous sommes, nous gagnons une année d'espérance de vie supplémentaire, ce qui signifie que, chère madame qui avez 87 ans, nous viendrons fêter votre cent septième anniversaire dans cette salle et que nous serons là pour vous entourer et pour vous aider à souffler les bougies.
Parmi tous ceux présents aujourd'hui, forts comme des Catalans !, la moitié de ceux qui ont moins de cinquante ans deviendront centenaires. C'est une grande chance, naturellement, mais, en même temps, une grande charge, car...
(Mouvements divers.)
Vous ne voulez tout de même pas réduire le nombre des centenaires ! Ôtez moi d'un doute !...
(Rires.)
Nous avons choisi un système de retraite que l'on appelle par répartition. C'est un mot compliqué pour expliquer une idée toute simple : les retraites sont payées, chaque mois, par ceux qui travaillent. De ce fait, plus il y a de retraités, plus la charge qui pèse sur les épaules de ceux qui travaillent est lourde. Nous avions, au début des années 1950, cinq personnes qui travaillaient pour un retraité. Nous approchons aujourd'hui d'une personne et demie, seulement, qui travaille pour un retraité. Nous n'aurons, d'ici très peu de temps, plus qu'une personne qui travaille pour un retraité et nous sommes menacés d'avoir, si nous ne faisons rien, d'ici vingt ans, beaucoup plus de retraités que de personnes qui travaillent.
Eh bien, ceci, Mesdames et Messieurs, a une signification claire que j'exprime devant vous : soit les retraites s'effondreront et le pouvoir d'achat des pensions sera divisé par deux -c'est un scénario crédible auquel il faut que les retraités songent-, soit les charges qui pèseront sur les épaules de ceux qui travaillent seront telles que les emplois s'en iront de France, de même que les salariés et les emplois.
Nous nous retrouverions alors dans un système, non pas dangereux, mais diabolique dans lequel plus les emplois partiront, plus la charge augmentera sur ceux qui restent. Or, plus cette charge sera lourde, plus les emplois partiront. C'est le cercle vicieux absolu !...
Je prétends qu'il est non pas seulement du devoir ou de la vocation du prochain Président de la République, mais d'une obligation absolue, s'il veut être à la hauteur de la fonction qu'on lui confie, de venir devant les Français et de dire : "Mesdames et Messieurs, cette situation mérite que l'on y pense et que l'on prenne les décisions qui conviennent".
Je dis que je conduirai, avec les Français -je dis bien avec les Français-, une réforme des retraites qui équilibrera, une fois pour toutes, ces régimes qui sont aujourd'hui si profondément déséquilibrés.
Comment ferons-nous ? Je pense qu'il faut, à partir de l'âge légal du départ à la retraite, que chacun connaisse exactement la pension à laquelle il aura droit. Cette réforme concerne tout le monde, y compris les régimes spéciaux. Il est nécessaire que tous les Français aient la certitude que, désormais, les principes d'équité, de loyauté et d'égalité s'appliquent dans la réforme des retraites.
Il faut prendre en compte la pénibilité des retraites, car il est quelque chose que nous ne disons pas et qui est un terrible scandale, si l'on y songe bien : en France, partent à la retraite le plus tôt ceux qui ont l'espérance de vie la plus longue et partent à la retraite le plus tard ceux qui ont l'espérance de vie la plus brève.
Je suis obligé de vous dire -et je le dis d'autant plus que je suis moi-même un fonctionnaire et que je sais très bien comment fonctionne les régimes de retraite- que ceci n'est pas la justice. La justice idéale serait que partent à la retraite le plus tôt ceux qui ont l'espérance de vie la plus brève et partent à la retraite le plus tard ceux qui ont l'espérance de vie la plus longue.
Ce serait la justice, mais je ne demande même pas la justice, je demande l'égalité et que tout le monde se retrouve, naturellement en prenant le temps... Là, un certain nombre de régimes spéciaux commencent à frémir dans la salle, je les repère ! À leurs réflexions et aux points d'interrogation qu'ils ont dans les yeux...
Si nous voulons être un grand peuple, il faut nous dire des idées simples comme celle-là et cette réforme devra donc concerner tout le monde...
DE LA SALLE. - Les députés également !...
François BAYROU. - C'est une très bonne idée !
J'ai été avisé d'une décision qui n'a été rendue publique en aucune manière, prise par l'UMP et le PS en même temps à l'Assemblée Nationale : l'indemnité qui serait versée aux députés à la fin de leur mandat, qui était fixé à six mois, pour qu'ils retrouvent un travail, sera désormais allongée à cinq ans.
Eh bien, je considère que ceci n'est pas la justice et j'ai donc l'intention, si je suis élu Président de la République, de faire qu'une telle décision soit rapportée. Je le demanderai à l'Assemblée Nationale, je considère qu'il y a des moments, dans la vie, où l'on ne peut pas accepter que les privilèges s'additionnent aux privilèges.
Il faut que la République s'applique à tout le monde et, la République, c'est, en particulier, l'égalité et la solidarité.
Rassurez-vous, les députés n'ont pas des indemnités de cet ordre et c'est tant mieux, car, après tout, il faut qu'ils aient simplement une situation honorable. On ne devient pas riche en faisant de la politique ou, plus exactement, si quelqu'un devient riche en faisant de la politique, regardez-le du coin de l'oeil !
Autrement, ce n'est pas envisageable. C'est normal et je trouve que c'est bien.
Oui, il y a de nombreux manquements à l'égalité, vous avez raison de le dire. J'en profite, saluant les parlementaires qui sont là, pour vous dire que je salue, au premier rang, Jean-Jacques Jégou, sénateur du Val-de-Marne, et Jean Lassalle, député des Pyrénées-Atlantiques, qui vient de nous rejoindre et qui fait le tour de France avec nous, soirs après soirs.
C'est mieux, car, il y a un an, il était en grève de la faim. Je préfère le voir là !
Nous avons besoin d'une réforme des retraites juste et, pour être sûr que tout le monde considérera que la réforme des retraites est juste, j'ai décidé que je la soumettrai au moins à un référendum du peuple français.
Ne croyez pas, là encore, que ce soit uniquement pour de bons sentiments. C'est car, chaque fois que l'on annonce une réforme des retraites et que les Français ont l'impression que cette réforme sera décidée sans eux et contre eux, ils se crispent et expriment une espèce de sentiment de blocage généralisé du pays.
Il est légitime et normal que chaque Français ait la certitude que, s'agissant d'une décision essentielle pour son avenir, cette décision lui sera soumise et qu'il pourra exprimer, en tant que citoyen, son avis : "Oui ou non", pour savoir si c'est une bonne réforme.
Nous avons besoin d'inverser, c'est l'une de mes grandes idées, le jeu habituel de la politique. Ce jeu est le suivant : je me fais élire en faisant les promesses les plus avantageuse possibles, une fois que je suis au pouvoir, je considère que les promesses n'engagent que ceux qui les reçoivent et je fais ce que je veux avec l'espoir que, dans cinq ans, lorsque je reviendrai, tout le monde aura oublié les promesses que j'avais formulées au moment de l'élection, il y a cinq ans. C'est ainsi que la politique fonctionne en France depuis très longtemps.
Je propose d'inverser ce processus, car, pour avoir vécu tout cela, les Français en ont conçu une très grande défiance à l'égard de leurs responsables politiques et ils ont besoin de retrouver la confiance.
Je propose donc de faire le contraire : au lieu de faire des promesses, nous refusons d'en faire, au lieu de prendre des décisions en catimini, subrepticement, nous préparons les décisions avec les citoyens au vu et au su de tout le monde, au lieu d'imposer "que les Français le veuillent ou pas, ce sera comme cela", on soumet, au peuple qui gouverne, un référendum, autrement dit, on crée un climat de confiance qui donne au mot démocratie tout son sens. Ceci est également une révolution.
Si nous avions procédé ainsi, la dette n'en serait pas où elle en est, le déficit n'en serait là pas où il en est, le problème des retraites ne serait pas lancinant, nous ne serions pas devant ces questions impossibles à remuer depuis si longtemps. Notre pays aurait, comme les autres, trouvé son équilibre. C'est normal que nous agissions ainsi en France, car, après tout, notre pays a inventé la République depuis maintenant bien plus de deux siècles.
Il est temps de lui donner une nouvelle jeunesse, son printemps, un printemps républicain pour la France.
La dette, le déficit, l'emploi, l'exclusion, l'éducation, et je m'arrête une seconde sur l'éducation. Je vous parle d'éducation, car c'est la seule clé dont nous disposons si nous voulons que notre avenir soit à la hauteur de nos espérances.
Dans un monde de la mondialisation où la compétition est forte, un pays comme le nôtre, qui a un haut niveau de vie, des exigences sociales importantes, ne peut s'en tirer que s'il a compris que, le seul moyen de son succès ou de son progrès, c'est d'avoir le peuple et les jeunes les mieux formés de la planète.
Ceci, c'est notre engagement et, pour cela, il faudra les moyens.
Je viens de parler de toutes les économies que nous devons faire, mais je dis également que je protégerai les moyens de l'Éducation nationale. En échange, je demanderai à l'Éducation nationale d'augmenter le niveau d'exigence et de réussite qui doit être celui de l'école dans notre nation.
En particulier, j'estime que nous devons prendre un engagement simple et compréhensible par tout le monde : il ne doit pas y avoir, en France, d'enfants qui entrent en sixième sans savoir lire et écrire. C'est le minimum que nous devons obtenir pour notre nation.
Ne vous trompez pas, c'est difficile. Ne croyez pas qu'il s'agisse seulement de problèmes de méthode, car, même si cela compte, ce n'est pas seulement cela. En effet, nous sommes devant au moins deux phénomènes, dont le premier est que, il y a des générations, l'écrit était roi et, lorsqu'un enfant voulait s'évader, découvrir un nouveau monde et de belles histoires, il prenait un livre et lorsque les adultes voulaient connaître le monde, ils prenaient un journal.
C'était par l'écrit que passaient toutes les découvertes, toutes les connaissances et tous les rêves des générations qui nous ont précédés. Aujourd'hui, c'est par l'image que cela passe. Tout le monde est devant l'écran de télévision, les écrans vidéo, les jeux et les consoles, notamment les enfants et en particulier ceux des milieux les plus fragiles de la société française.
Cela illustre donc la difficulté du projet que je forme d'arriver, en quelques années, à ne plus avoir d'illettrisme en France.
Le deuxième phénomène est le suivant -et, s'il y a des éducateurs et des enseignants dans la salle, ils le savent- : les enfants qui n'apprennent pas, ce n'est pas toujours pour des raisons pédagogiques, ils n'apprennent pas car ils sont intérieurement cassés, même si on ne le voit pas.
Je vous remercie d'applaudir cette réflexion !
Je pense qu'il faut, devant des enfants qui, ainsi, ont quelque chose qui ne va pas, qu'il y ait des psychologues dans les écoles et du suivi.
Si l'on dit que plus personne n'entrera en sixième sans savoir lire et écrire, cela entraîne tout l'amont : on remonte vers la source et, au CM2, on pense au CM1, au CM1, on pense au CE2, au CE2, on pense au CE1 et on s'adresse, le plus tôt possible, aux enfants en espérant que la bonne réponse les réparera, les reconstruira, les cicatrisera et que l'on pourra, ainsi, les conduire vers le niveau minimal qu'il faut pour pouvoir faire des études.
Nous avons besoin de cela -et je pourrais en dire autant de l'enseignement secondaire et de l'université-, de l'égalité des chances. En effet, nous avons un très lourd problème dans l'université française à qui il faut rendre les moyens qu'elle n'a pas.
Nous devons également réfléchir aux besoins de la formation professionnelle et de l'insertion, car il y a longtemps que les diplômes ne garantissent plus l'emploi. On a simplement oublié de le dire aux Français !
Tout ceci, c'est pour reconstruire notre pays à l'intérieur et, ensuite, il y a la voix de la France à l'extérieur.
Chers amis, je pense que celle-ci doit d'abord s'occuper de problèmes d'environnement.
Oui, nous avons également l'agriculture. Je vous promets... Je vais vous donner un truc ! Vous allez, demain, dans la librairie la plus proche. Un très bon livre est sorti hier matin, qui s'appelle Projet d'espoir.
Il la décrit, chapitre après chapitre, mais, ce soir, je ne peux pas traiter de tous les chapitres et, pourtant, Dieu sait que j'aime l'agriculture... D'ailleurs, lors de toutes les réunions publiques, on m'offre un petit tracteur et on n'y a pas manqué ce soir. J'y vois un signe très amical, car il s'agit d'un clin d'oeil à une partie de ma vie que je n'ai jamais reniée.
Après tout, au fond, je suis assez content d'avoir été, parmi les candidats à l'élection présidentielle, le seul, ou presque, à avoir travaillé de ses mains dans sa vie. C'est également une manière de montrer que l'on peut réconcilier la société française et qu'après tout -allez !... je me risque...-, il n'existe pas de différence fondamentale entre les personnes qui travaillent avec leurs mains et celles qui travaillent avec leur tête. En effet, on peut travailler avec ses mains en ayant de la culture et les deux doivent être respectés.
C'est tout cela que je vois dans le petit tracteur que l'on m'offre chaque fois. Merci, Madame, qui venez de m'offrir ce petit tracteur. Je vous promets qu'il sera sur mon bureau. Il y en a déjà beaucoup et cela s'accumule, mais cela me fait plaisir.
Je veux parler d'environnement, car il s'agit d'une responsabilité internationale de la France. Ce serait une erreur de ne traiter d'environnement que dans le cadre national, car nous savons bien à quoi est dû le réchauffement de la planète : 99,9 % des scientifiques sont d'accord sur ce point, le réchauffement de la planète est dû à l'effet de serre, c'est-à-dire aux rejets, dans l'atmosphère, des gaz de combustion des millions de millions de tonnes de pétrole, de gaz et de charbon que nous avons brûlées en un siècle et demi et qui étaient, au fond, les réserves que la terre avait accumulées depuis qu'elle existe.
Nous avons dilapidé, en quelques secondes, en quelques millièmes de secondes, ce que la terre avait accumulé à l'échelle d'une vie humaine.
Or, le rejet de tout ce carbone dans l'atmosphère a naturellement créé des turbulences ou des changements qui font que les rayons solaires, qui repartaient d'habitude après avoir frappé le sol, sont stoppés, comme par la vitre d'une serre. Cela réchauffe peu à peu l'atmosphère de la planète.
Il faut que vous sachiez que c'est l'espèce humaine qui est en jeu dans cette affaire. Il faut avoir le courage de regarder cela en face et il faut que nous demandions aux autres pays de la terre d'avoir aussi ce courage de le regarder en face.
C'est d'autant plus difficile à faire que, nous, les pays riches, avons été les pollueurs et qu'il faut que nous parlions aux pays pauvres qui, eux, n'avaient ni industries, ni transports et n'ont donc pas rejeté de gaz à effets de serre.
Il faut que nous trouvions avec eux un équilibre qui nous oblige à baisser nos émissions et qui les autorisent à monter les leurs pour que nous ayons à peu près un niveau de vie équivalent. Il s'agit de l'un des défis politiques les plus lourds que l'humanité n'a jamais eu à résoudre. C'est une guerre silencieuse à laquelle nous sommes confrontés et à laquelle il faut que nous apportions une réponse.
Ceci ne peut pas se faire si la voix de la France ne s'exprime pas et si la France ne donne pas l'exemple.
Ce ne sont naturellement pas les économies d'énergie que nous allons réaliser qui changeront la composition de l'atmosphère de la planète, car, même si la France, avec ces soixante-quatre millions d'habitants, réduisait de moitié, ou de trois-quarts, ou de quatre cinquièmes l'émission de ses gaz à effets de serre, cela ne changerait pas d'un millième de millième la composition de l'air que nous respirons. En effet, comme vous le savez, vous qui avez la tramontane, l'air se déplace et ne s'arrête pas aux frontières.
Il vient de loin, il va loin et il est en perpétuel brassage.
Il faut donc que ce soit une démarche internationale, mais nous devons tout de même donner l'exemple pour montrer que c'est possible, que l'on peut réaliser des économies d'énergie, que l'on peut isoler les maisons et que l'on peut transporter autrement que par poids lourds et sur la route les charges que l'on transporte. Il faut faire du ferroutage, du transport fluvial. Il faut chercher des énergies de substitution, par exemple des biocarburants dont je suis défenseur.
Il faut avoir le courage de dire -je le dis car c'est vrai- que personne ne réduira les émissions de gaz à effets de serre si nous n'avons pas, pendant longtemps, le réseau très important de fabrication d'électricité nucléaire que nous a laissé le Général de Gaulle et qui est le seul moyen de fabriquer de l'électricité sans émettre des gaz à effets de serre.
Je sais qu'il y aura des controverses. Je sais qu'il aurait été plus pratique, pour moi, comme pour d'autres candidats, pour se faire applaudir, de dire : "Nous allons réduire les gaz à effets de serre et nous allons, en même temps, sortir du nucléaire", mais ce sont des promesses fallacieuses.
Le seul moyen de réduire nos gaz à effets de serre, c'est que nous conservions, en même temps, un nucléaire en état de marche en sécurité. Voilà pourquoi j'imposerai la transparence dans toutes les Commissions chargées de la sûreté nucléaire en France.
C'est un message international que la France doit porter et, si nous voulons que ce message soit entendu -et c'est mon dernier point-, il faut que nous ayons une Europe digne de ce nom et en état de marche !
Un pays seul ne peut pas faire tout cela. Il peut y contribuer. Il peut avoir des responsables, des leaders et un président qui s'expriment avec la force nécessaire pour que son message soit entendu, mais il doit également savoir qu'il a besoin de solidarité et de relais.
Nous avons besoin d'une Europe qui se redresse, qui sorte de la crise dans laquelle elle est plongée, qui fasse en sorte que cette crise cesse. En effet, il s'agit d'une crise d'inspiration, car, ne vous trompez pas, si les Français ont voté non, c'est qu'ils avaient un doute profond sur l'Europe et, je le dis, moi qui ait voté oui.
J'ai voté oui en sachant, depuis le premier jour, que nous allions perdre ce référendum. C'était pour moi un crève-coeur et ceux qui m'entouraient ne comprenaient pas mon inquiétude et mon pessimisme.
Toutefois, lorsqu'un peuple ne se reconnaît plus dans une grande aventure politique, il existe de très grands risques qu'il la rejette.
Je fixe donc comme objectif à la période, si je suis élu, durant laquelle je serai Président de la République, d'obtenir la réconciliation de la France avec l'Europe et de l'Europe avec la France et de refondre, devant les Français, de réinventer ce qu'est la force et l'importance de l'idéal européen. Il ne faut pas chercher à éviter les Français, ni la confrontation. Je ne cherche pas à ruser comme un certain nombre de candidats qui se sont engagés dans ce chemin. Je ne cherche pas à éviter ces explications et cette réflexion nationale.
J'associerai le peuple français à toutes les décisions qui doivent être prises sur ce sujet et, en particulier, s'il s'agit de sortir de la crise qui a été matérialisée par le "non" français le 29 mai 2005.
Je veux un texte lisible, compréhensible par tous, court, dont tout le monde sache qu'il ne recèle aucun piège. Ce texte, je ne le ferai pas adopter par le Parlement, subrepticement, en catimini, mais par le peuple français, car il a bien le droit, lui qui a dit non, d'avoir à dire oui le jour où il le décidera.
Nous avons besoin d'un peuple qui croit à nouveau à la démocratie, à la République, au projet de société, de la France, au message que la France doit envoyer au monde, car j'ai la certitude que, si la France ne soutient pas ce projet de société qui est unique parmi les nations, personne ne le soutiendra plus. Si la France n'est pas là pour soutenir ce message qu'elle veut porter, personne ne le soutiendra plus.
J'ai eu de nombreuses confrontations avec Jacques Chirac dans ma vie. Dieu sait qu'en politique intérieure, nous n'avons pas souvent été d'accord. 19 % des Français avaient voté pour lui au premier tour.
Je le sais et je le lui ai dit le 22 avril au matin, lors d'une discussion vive entre nous deux.
Cependant, j'ai été fier -je dis cela puisque dimanche il y aura une déclaration- de la manière dont Jacques Chirac avait conduit, pendant cette période et pendant la crise en Irak, la politique étrangère de notre pays.
Je l'ai soutenu envers et contre tous ceux qui venaient me voir en disant : "Mais, enfin, puisque tu as des désaccords avec lui, voilà maintenant le moment où tu vas pouvoir exprimer tes désaccords et tu seras, dans cette attitude, soutenu, car des tas de personnes n'attendent que cela".
Je leur ai dit que je soutiendrai cette position, car elle est juste et qu'il est important, lorsqu'un pays exprime, dans une situation de crise internationale, une volonté aussi juste que celle-là, que tous les responsables publics se rassemblent pour que le monde entier voit que la France est unie, lorsqu'elle veut défendre une position et un message juste à adresser au monde.
Il y a des choses que seule la France peut dire, que seule la France peut faire.
J'ai cette foi dans notre pays et je suis sûr que vous l'avez aussi. C'est cette foi qui explique le grand mouvement qui a commencé et qui est en train d'apporter de si profonds changements, de si grands démentis à ce qui était prévu pour cette élection présidentielle.
Je suis fier de porter avec vous ce combat et je suis fier que vous soyez venus à Perpignan, ce soir, si nombreux pour me manifester votre amitié et votre soutien.
Nous irons ensemble, jusqu'au 22 avril et au 6 mai.
Merci à tous.Source http://www.bayrou.fr, le 20 mars 2007