Déclaration de Mme Nelly Olin, ministre de l'écologie et du développement durable, sur la prévention des inondations à l'échelle des grands bassins hydrographiques et sur le renforcement des programmes d'actions de prévention des risques liés aux inondations (PAPI), Paris le 15 février 2007.

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Circonstance : Colloque "Programme d'actions de prévention des risques liés aux inondations : Quel bilan ? Quelles perspectives ?"

Texte intégral

Mesdames les Présidentes,
Messieurs les Présidents,
Messieurs les Préfets,
Mesdames et Messieurs,
Les risques d'inondation concernent en France 5 millions de personnes et près d'une commune sur quatre. Ils représentent la plus forte dépense d'indemnisation des risques naturels.
L'importance des dommages s'est considérablement accru depuis 50 ans en raison notamment du développement urbain en zones inondables. On évalue à plusieurs dizaines de milliards d'euros les dégâts que causeraient les grands fleuves si les crues majeures des 19ème et 20ème siècle se reproduisaient.
Les inondations que nous avons connues en 2005 et en 2006, le projet de directive européenne relative à la prévention des inondations qui a fait l'objet d'un accord politique au dernier Conseil environnement, ou encore la demande très forte des collectivités territoriales relayée par les préfets lors de la préparation des futurs contrats de projets Etat-Régions, confirment la nécessité du renforcement de la politique de prévention des inondations, que le Gouvernement a décidé à mon initiative.
J'ai retenu pour cela une généralisation des plans d'actions pour les grands fleuves et un renforcement des programmes de prévention des risques liés aux inondations pour les autres bassins versants.
Depuis son lancement en 1994 par Michel Barnier, le Plan Loire a fait brillamment la démonstration de l'intérêt et de l'efficacité d'une réflexion menée à cette échelle à la fois en termes de prévention des inondations et de restauration des milieux aquatiques.
Une évaluation de la mise en oeuvre du plan Loire a notamment été réalisée par la commission Loire du Comité de bassin Loire-Bretagne. Elle a apporté un diagnostic largement positif de la mise en oeuvre du plan.
Ces acquis et cette expérience ont largement guidé notre démarche pour l'élaboration des autres plans Grands fleuves.
J'insiste sur le caractère pragmatique et concret de notre démarche.
Nous avons fait le constat que les enjeux à l'échelle des bassins versants du Rhône, de la Seine, de la Garonne et de la Meuse sont colossaux : plusieurs millions de personnes résident en zone inondable et les dommages potentiels s'élèvent à plusieurs dizaines de milliards d'euros.
Les crues du Rhône de décembre 2003 sont venues cristalliser les réflexions sur la mise en place d'un plan Rhône.
Pour la Seine, fallait-il attendre la crue similaire à celle de 1910 pour lancer une démarche à l'échelle de ce bassin ?
Evidemment pas.
Dès mon arrivée au Ministère en juin 2005, j'ai ainsi soutenu la mise en place de plans Grands fleuves et le Comité Interministériel à l'Aménagement Du Territoire (CIADT), de juillet 2005, a retenu le principe d'un plan Rhône et a validé l'engagement de réflexions sur les plans Seine et Garonne.
En juillet 2006, lors de ma communication en Conseil des ministres sur la prévention des inondations, j'ai annoncé le lancement de programmes d'actions sur les fleuves Loire, Rhône, Seine, Garonne et Meuse.
Ces programmes d'actions de prévention des inondations, intégrés dans les contrats de projet Etat/Régions sont dotés de 272 millions d'euros sur la période 2007-2013. Cette dotation correspond à une moyenne annuelle de 39 Meuros par an.
Entre le lancement du plan Loire et 2005, 11 ans se sont écoulés sans que soient tirées les leçons de ce plan au bénéfice des autres fleuves.
Je souhaite que vous mesuriez ici l'ampleur du travail accompli en un an et demi pour faire naître ces plans grands fleuves.
Nous marquons ainsi aujourd'hui une nouvelle étape, que je qualifierai d'historique, pour l'intégration de la prévention des inondations à l'échelle des grands bassins hydrographiques.
Franchir cette nouvelle étape n'aurait pas été possible sans une mobilisation accrue du fonds de prévention des risques naturels majeurs mis en place en 1995 par Michel Barnier.
La loi sur l'eau et les milieux aquatiques, pour laquelle je me suis battue, a ouvert au financement par ce fonds le champ des travaux de prévention des inondations à hauteur de 55 millions d'euros par an.
Je voudrais souligner à ce propos que prévenir les risques d'inondations s'avère bien plus efficace que de remédier aux conséquences des inondations.
Il est essentiel que cet investissement dans la prévention soit poursuivi.
Mais l'action du ministère en matière de prévention des inondations ne se résume pas aux plans grands fleuves.
42 bassins versants, parmi les plus exposés, ont été retenus en 2003 pour la mise en place de programmes d'actions de prévention des risques liés aux inondations.
Ce sont les PAPI dont vous avez tous entendu parler.
Si le plan Loire constitue le prototype des plans Grands fleuves, la charte Oise-Aisne constitue le prototype des PAPI.
C'est pour cette raison que je suis très heureuse que M. SEIMBILLE ait accepté de nous présenter l'action de l'Entente Oise-Aisne.
Les PAPI visent à :
- inciter les opérateurs locaux à renforcer les approches à l'échelle du bassin ;
- à développer la culture du risque ;
- à améliorer les dispositifs de surveillance, de prévision et d'alerte ;
- à favoriser les actions de ralentissement dynamique ;
- ainsi qu'à réduire la vulnérabilité.
Ces deux dernières actions réduisent les risques d'inondation sans aggraver la situation à l'aval contrairement à des créations de digues, fort coûteuses par ailleurs.
Je vous épargnerai la litanie des quarante-deux PAPI.
La majorité de ceux-ci ont été intégrés dans les contrats de projets Etat/Région.
Ceux-ci, hors plan grands fleuves, prévoient près de 185 millions d'euros sur la période 2007-2013 pour des actions de prévention des inondations.
La mise en oeuvre des PAPI constitue bien évidemment la priorité.
Je voudrais revenir brièvement sur le bilan de ces 42 PAPI de la première génération.
Près de la moitié des crédits prévus ont été engagés fin 2006. Pour cette raison, j'ai proposé aux porteurs de projets des 42 PAPI de prolonger leur mise en oeuvre jusqu'à fin 2008.
Je suis disposée à examiner les demandes des porteurs de projets dont l'achèvement du programme interviendrait avant ce terme et qui souhaiteront prolonger leur action dans le cadre d'un deuxième PAPI.
Ma décision dépendra bien évidemment de l'état d'avancement effectif des travaux et du contenu proposé pour cette 2ème phase.
Néanmoins, je retiens du bilan de ces PAPI quelques éléments importants :
- le soutien apporté aux équipes projets dans le cadre des PAPI a favorisé l'émergence de programmes d'actions et permis leur mise en oeuvre effective ;
- la logique de projet qui a été insufflée dès la création des PAPI a permis de dépasser les clivages entre services, entre départements, entre régions parfois et de réunir autour d'une même table l'ensemble des acteurs et des financeurs de la prévention des inondations. C'est un succès considérable, qui s'est dans de nombreux cas traduit par la création d'une maîtrise d'ouvrage adaptée ;
- la mise en oeuvre des actions de ralentissement dynamique dont des exemples ont été présentés ce matin par M. SEIMBILLE et M. JEANTEUR soulignent la possibilité de mettre en place des actions innovantes en pensant la prévention des inondations à l'échelle des bassins versants ;
- la prise en compte du risque dans l'urbanisme est au coeur des PAPI. Elle constitue une des conditions du développement durable des vallées inondables ;
- Le développement de la culture du risque et la mise en oeuvre effective des actions d'information préventive est essentiel pour que tous, Etat, collectivités, entreprises et particuliers, puissent prendre les dispositions individuelles de nature à limiter les dommages. Le soutien fréquemment apporté par les porteurs de projet des PAPI est très apprécié.
Les résultats atteints ont donc d'ores et déjà démontré que ces PAPI sont un très bon outil pour élaborer une politique locale efficace de prévention des inondations.
Je souhaite à cette occasion rendre hommage aux hommes et aux femmes qui ont porté et continuent à porter ces PAPI et qui ont fait leur succès : les élus, les préfets ainsi que les personnels des services techniques et administratifs.
J'ai donc décidé de tirer les leçons de ce succès en amplifiant l'utilisation des PAPI.
C'est ainsi, grâce aux moyens nouveaux dégagés dans le cadre de la loi sur l'eau et les milieux aquatiques, que 15 PAPI supplémentaires ont pu être élaborés, ou sont sur le point de l'être, sur des bassins particulièrement sensibles.
Sur les 15 projets retenus, certains des bassins avaient été identifiés dès 2003 comme susceptibles de donner lieu à des programmes d'actions.
Dans d'autres, les inondations récentes ont mis en évidence la forte exposition aux risques d'inondations.
J'aurai le plaisir de vous présenter plus en détail ces projets et leurs promoteurs dans quelques instants.
Ces 15 PAPI vont donc rejoindre les 42 PAPI déjà existants.
Il n'est pas dans mes intentions de figer la liste des PAPI à ce niveau : tout nouveau projet qui émerge localement, s'il correspond à la logique des PAPI et présente des enjeux réels, à vocation à devenir un PAPI.
Vous le voyez, la prévention des inondations est une question centrale pour ce ministère et pour l'ensemble du Gouvernement.
Je rappelle que les crues ont été mortelles et que de nombreuses entreprises situées en zone inondables ont déménagé ou fermé après avoir subi des crues.
Je voudrais insister sur le fait que, à travers les PAPI et les plans grands fleuves, nous réparons actuellement les erreurs du passé, mais aussi, et c'est essentiel, nous prenons les mesures pour ne pas avoir à réparer les erreurs de l'avenir.
En effet, les conséquences du changement climatique sont préoccupantes avec des crues plus fréquentes qui augmenteront le coût humain et financier de ces erreurs.
A nous tous d'avoir le sens des responsabilités nécessaire pour ne plus créer de situation de risques qu'un jour nous ne pourrons plus assumer.
Mais je sais pouvoir compter sur votre lucidité et votre détermination.
Je vous remercie de votre attention.Source http://www.cepri.fr, le 22 mars 2007